Le domaine de Beaulieu à la Ville-du-Bois (2)
Cette chronique poursuit l'histoire du domaine de Beaulieu à La Ville-du-Bois (Essonne, cant. Montlhéry). Précédemment, nous avons vu que l'existence de Beaulieu est connue depuis le XVIIe siècle quand Claude Erard, avocat au Parlement en fut le premier propriétaire ; terre qui fut inféodée par Léon de Balsac d'Entragues, seigneur de Marcoussis. Jusqu'en 1766, le fief de Beaulieu appartient à Pierre Langlois de la Fortelle, prieur commendataire de Saint-Eloy-lès-Longjumeau, lequel laisse la gestion des terres de La Ville-du-Bois et Nozay à son oncle Jean-Baptiste Joseph Langlois .
J.P Dagnot, C.Julien. Janvier 2014
Domaine de Beaulieu sur le plan cadastral napoléonien (1808).
Bonnefoy propriétaire de Beaulieu
Le 17 mai 1766, devant un notaire parisien, le couple Bonnefoy acquiert la nue-propriété de Beaulieu à Pierre Langlois de la Fortelle. « Messire Pierre Langlois de la Fortelle, prêtre docteur de la maison et société de Sorbonne, prieur commendataire de Saint-Eloy, demeurant à Paris rue des Francbourgeois, paroisse Saint-Gervais, lequel vend à savoir: premièrement, l'usufruit à Etienne Saulnier, écuyer, fourrier des logis du corps de la reine et Marie Potage, son épouse, pendant leur vie, deuxièmement, la nue-propriété à Antoine-François Bonnefoy, huissier du chambellan du roy et aide au serz d'eau de la reyne et Marie-Louise Michaut, son épouse. L'usufruit cessant et revenant à la propriété après le décès des Saulnier ». Les acheteurs demeurant à Versailles achètent:
- le fief de Beaulieu consistant en maison seigneuriale, bâtiments, cour, jardin, clos et autres appartenances,
- item, deux portions de rente l'une de 55 livres l'autre de 80 livres , passées par le sieur Érard en juin 1723,
- item, 62 livres de rente du curé de Nozay en 1729, comme dépendance du fief,
- item les rentes cy après sur 16 articles faisant un total de 376 livres ,
- item droit de chapelle dans l'église dudit lieu de La Ville-du-Bois.
La vente faite moyennant 16 000 livres.
D'autres constitutions de rente sont faites ultérieurement. Le 2 novembre 1768, une rente de 14 frs par Louis Etienne Robin et autres devant Lhéritier. Le 11 février 1775, ce sont 30 frs de rente par Henri Pierre Robin et Marie Claude Thoraille devant Barat à Versailles. Une déclaration est faite le 7 septembre 1782 par Pierre Charles Bonnefoy Duplan, écuyer, valet de chambre du roy et de la reine; concierge de leur majesté à Trianon.
La déclaration au terrier de Nozay- La Ville-du-Bois est passée le 25 juillet 1784 par Etienne Saulnier, écuyer, fourrier du logis de la reine, demeurant à La Ville-du-Bois , propriétaire et Antoine François Bonnefoy, huissier du chambellan du roy, demeurant à Versailles, usufruitier pour « une pièce de terre contenant 55 perches près l'hôtel de Beaulieu, au bout de la rue dudit lieu, d'un bout au nord ouest au parc de Beaulieu un chemin entre d'eux … ». Notons que cette déclaration ne contient pas le fief donc la demeure de Beaulieu; seules apparaissent les rotures.
En 1789, au chapitre des exempts de taille, nous trouvons le sieur Saulnier, fourrier de la reine qui déclare une petite maison basse et un clos de 6 arpents. Il s'agit de Beaulieu. Dans la liquidation de la succession Cossonnet du 24 décembre 1790, il y a un jardin commun avec Beaulieu de 15 perches, jardin et viviers.
Le 27 janvier 1794, notons le mariage Marie-Thérèse de Montessuy, divorcée d'avec Louis Quentin Maupetit, fille de Denis, banquier, demeurant rue du faubourg Poissonnière avec Jean Gabriel Gillebert demeurant à Rouen, majeur; mariage commun en biens... Le 27 ventôse et 24 prairial an VII (12 juin 1799), l'inscription des rentes est faite au bureau des hypothèques de Versailles.
Beaulieu au lendemain de la Révolution
Pendant la Révolution, Beaulieu n'a pas changé de propriétaire lequel est Antoine François Bonnefoy, ci-devant huissier du chambellan du roi et Marie-Louise Michaut, son épouse. Le 23 messidor an VII (11 juillet 1799), un jugement ordonne la vente des biens du couple Bonnefoy, avec visite préalable par experts. Le 29 nivôse an VIII ( 19 janvier 1800), Alexandre Guillaume Leroy, curateur de la succession vacante d'Antoine François Bonnefoy dépose une enchère comme propriétaire énoncé au jugement. D'après la transcription et charges de l'adjudication, la mise à prix est 6.000 frs. La propriété est attribuée à André Pierre Coursin, demeurant à Paris rue Saint-Benoît, division de l'Unité.
Le 29 pluviôse an VIII (18 février 1800), l'adjudication de Beaulieu est prononcée au profit de Coursin par le jugement rendu en l'audience des criées du tribunal civil de la Seine sur l'enchère déposée par le sieur Leroy, curateur à la succession vacante d'Antoine François Bonnefoy, qui était propriétaire desdits biens, moyennant 28.800 frs.
La transcription du jugement au bureau des hypothèques de Versailles comporte neuf inscriptions. L'acte du 15 ventôse an VIII (6 mars 1800) mentionne « le juge tenant l'audience des criées du tribunal civil du département de la Seine à Paris, a rendu le jugement suivant sur l'enchère déposée par Alexandre Guillaume Leroy, curateur à la succession vacante d'Antoine François Bonnefoy poursuivant la vente et adjudication par licitation des biens dépendants de la dite succession, en vertu d'un jugement du 23 messidor an VII, entre ledit curateur et Marie-Louis Michaud, veuve de François Bonnefoy ». La désignation précise des biens est donnée par les articles suivants :
- une maison et dépendances à La Ville-du-Bois , celle a son entrée face à la rue Gaillard, sur une petite place qui fait partie de la propriété, entourée de barreaux et planté de tilleuls,
- une porte cochère et cavalière dans un mur de clôture auquel est adossé à l'intérieur un appentis, formant une niche à chien et un cabinet d'aisance,
- une cour non pavée plantée de tilleuls séparée du jardin, par un mur avec grille et porte en bois,
- à droite de la cour un appentis à usage de remise,
- à la droite un bâtiment voisin formant enclave avec la cour sur ladite cour,
- un autre bâtiment dépendant de ladite maison élevé d'un rez-de-chaussée formant écurie et grange et logement de jardinier, au dessus grenier, une chambre à grains, et un fruitier, ce bâtiment à égout par une maison voisine appartenant à Cossonnet,
- au devant un toit à porcs et un poulailler,
- en face et à gauche de la cour, le corps de logis principal , en pavillon à un seul épi, élevé d'un rez-de-chaussée, premier étage carré et étage lambrissé en mansardes, et l'une des faces de ce pavillon est adossé à un petit bâtiment à usage de serre et grenier au dessus,
- dans le jardin en face de ce pavillon, un petit salon en treillage couvert en tuiles, le rez-de-chaussée de ce pavillon forme un vestibule dans lequel est l'escalier, une cuisine, une salle à manger lambrissée en son pourtour et hauteur et une petite pièce à cheminée aussy lambrissée, lesdites pièces planchéyées et plafonnées, le tout éclairé par des croisées ouvrant en quatre parties avec contrevent et persiennes; le premier étage est composé de trois chambres dont deux à cheminées, carrelées en petits carreaux à solives apparentes dans une des pièces vers le jardin, une alcôve; au second étage trois pièces dont deux à cheminées carrelées plafonnées et lambrissées,
- un grand jardin s'étendant au levant et au couchant par un plan formant potager et verger avec partie en terre labourable, à la suite logement du jardinier,
- ensuite une serre et un berceau de cave voûtée s'étendant sur partie du jardin pour former la terrasse.
- dans l'intérieur du jardin, sont les restes d'une pièce d'eau avec bonde pour l'écoulement, ladite pièce a une autre entrée par une rigole venant de l'extérieur.
L'emplacement de la maison cour jardin contenant 22.208 centiares, estimé 3.250 frs. Suivent les terres pour 13.780 centiares et bois pour 31.495 centiares.
Une quittance du 19 fructidor an VIII (6 septembre 1800) est émise par Morue et la veuve Bonnefoy qui payent les créanciers Bonnefoy. L'acte est le suivant « Par devant maître Delanoue, notaire ont comparu Paul Etienne Morru, rentier, demeurant à Paris, rue des Deux Portes, division des Droits de l'Homme, et Joséphine Françoise Quatremerre, veuve de Charles Antoine Bonnefoy, demeurant à Paris rue de Grammont division Lepelletier », « lesquels reconnaissent que le citoyen André Pierre Coursin, rentier demeurant rue Saint-Benoist, division de l'Unité, leur a payé en espèces sonnantes ayant cours 6.378 frs pour le montant du mandement à lui délivré le 2 fructidor par Boizard premier créancier hypothécaire d'Antoine François Bonnefoy et sa femme dans l'ordre d'une maison sise à La Ville-du-Bois, fait par Marmottant juge de la quatrième section du tribunal civil de première instance du département de la Seine par jugement du tribunal du 2 fructidor, et à la citoyenne Quatremerre la somme de 5.996 frs à valoir sur le mandement à elle délivrée comme seconde créancière; pour payer 12.374 frs ledit Coursin quitte de l'adjudication et des créanciers ». L'inscription hypothécaire de l'an VII est faite aux noms des époux Bonnefoy, ainsi que des titres se trouvant chez Loyal.
Dès sa prise de possession, le sieur Coursin passe, le 24 ventôse an IX, un bail à rente de 75 ares par devant Loyal moyennant 25 frs de rente annuelle. Un autre bail pour d'autres pièces de terre est également fait pour neuf ans à Dauphin « André Pierre Coursin, propriétaire, demeurant à Paris rue Saint-Benoist division de l'Unité, de présent en sa maison de campagne à Linois, lequel baille à titre de rente foncière, à la veuve de Jean Dauphin, et deux autres Dauphin, tous cultivateurs à La Ville-du-Bois , 7 pièces de terre d'une contenance totale de 87 ares, faisant partie de la succession vacante d'Antoine François Bonnefoy, qui lui ont été adjugés, sur la poursuite d'Alexandre Guillaume Leroy, curateur créé par la succession vacante, contre Marie Louise Michaut veuve dudit Bonnefoy . Ce bail à rente fait moyennant 25 frs argent de rente héréditaire ».
Le même jour, Coursin baille à ferme pour neuf ans aux mêmes cultivateurs, 93 ares en 4 pièces qui tiennent au ruisseau, le bail fait moyennant le fermage de 111 frs en argent et quatre poulets bons à mettre en broche. Une clause spéciale stipule qu'en cas de vente de la maison de La Ville-du-Bois , le bail deviendra nul.
Madame Ysabeau propriétaire de Beaulieu
Le 15 floréal an IX (5 mai 1801), nous assistons à la vente de la maison de Beaulieu « André Pierre Coursin et Marie-Anne Françoise Miroir , sa femme, demeurant à Paris rue Saint-Benoist, division de l'Unité, vendent à Marie Françoise Ysabeau , femme divorcée depuis le 18 brumaire an III de François Marie Guillaume Faucon Delavergne, demeurante ladite rue de Lille maison Praslin, division de la Fontaine de Grenelle, d'une maison, cour, bâtiments, jardin clos, terres, prés, bois situés à La Ville-du-Bois ». La vente faite moyennant 20.000 frs payés en espèces or et argent. La désignation est identique à celle du procès-verbal d'adjudication, à la réserve de 75 ares aliénés par Coursin moyennant une redevance de 25 frs. La transcription aux hypothèques de Versailles porte la date du 17 floréal.
Quelle est la cause d'une transaction aussi rapide ? Nous ne pouvons que faire des suppositions. La vente pourrait être l'occasion d'un blanchiment d'argent bien que la différence entre prix d'achat et montant de la vente soit considérable, plus de 8.000 frs. Y aurait-il eu une manipulation de la part de Macé de Baigneux que l'on voit apparaître comme " le nouveau mentor communal de La Ville-du-Bois " ?
Le 17 décembre 1802, Joseph Macé de Baigneux, propriétaire à La Ville-du-Bois, procureur de Marie-Françoise Isabeau, demeurant à Paris, rue Mazarin, fait échange de terres avec François Denis Rousseau, cultivateur. Le 20 nivôse an XI ( 10 janvier 1803), un échange de terre est fait entre Pierre Bucher et Madame Isabeau qui récupère une terre de 503 centiares clos de murs, plantés en fruitiers, dite le jardin de Viviers tenant à la sente de Beaulieu. L'origine de la propriété est mentionnée être du 24 décembre 1790.
Le 18 novembre 1810, Marie-Françoise Isabeau, propriétaire d'une maison bourgeoise et enclos en dépendant, située à La Ville-du-Bois, fait bail à ferme à moitié pour six ou neuf années, à Claude Levon, cultivateur demeurant à La Ville-du-Bois « 10.250 centiares ou 3 arpents de terre et vigne à prendre dans l'enclos de la maison; à l'exception des allées, plates-bandes et espaliers au pourtour de la largeur de trois mètres, le présent bail sans prix d'argent... ». La vente d' une parcelle de terre à un nommé Rochon est faite le 6 mars 1813 par Marie-Françoise Isabeau devant maître Devaux. Il est évident que la dame a besoin de liquidités. « Marie-Françoise Isabeau, vend à Louis Rochon, charpentier demeurant à La Ville-du-Bois , une portion de terrain à droite de la porte cochère de la venderesse, du comble de la porte cochère à la place du village, moyennant 20 frs de rente foncière au denier 20 soit 400frs ». Le 25 juin suivant, Marie-Françoise Isabeau épouse divorcée, vend à Claude Cossonnet, le droit d'ouvrir un soupirail dans le mur mitoyen entre les parties « ledit soupirail qui partira de la cave de l'acquéreur ».
Un jugement du tribunal civil de première instance de la Seine du 16 novembre 1813, ordonne la vente de Beaulieu, appartenant à Marie-Françoise Isabeau, à la demande de la veuve Louvet.
La transcription au greffe du tribunal en date du 1er juin 1814 est la suivante « le juge tenant l'audience des criées du tribunal de première instance du département de la Seine, séant au palais de justice à Paris a rendu le jugement sur le cahier des charges du 31 décembre 1813 par Maillier qui concerne une maison à La Ville-du-Bois, jardin et dépendances, formant le premier lot de l'enchère et une pièce de luzerne de trente perches formant le second lot. Jean Jacques Foignet avoué et demoiselle Françoise Marie Isabeau, épouse divorcée, propriétaire demeurant rue du colombier à Paris, poursuivant la vente volontaire, en présence de la veuve Louvet, en vertu du jugement du 16 nombre dernier, préférant la vente sur licitation à celle sur saisie, convertissant en rente volontaire la vente, ordonne la vente de Beaulieu ».
L'achat de la propriété est fait au terme d'un jugement rendu en l'audience des criées du tribunal civil de la Seine sur la conversion en vente sur publications judiciaires de la saisie desdits biens pratiqués à la requête d'une dame veuve Louvet sur Madeleine Françoise Marie Isabeau, épouse de François Marie Guillaume Faucon-Delavergne, propriétaire demeurant à Paris rue du Colombier, moyennant 28.100 frs, par le représentant du baron François Valentin maréchal de camp, commandant de la Légion d'honneur, chevalier de l'ordre royal de la Couronne de fer, demeurant à Paris, rue Napoléon. Cette maison est composée comme suit :
- entrée face à la rue Gaillard par une porte cochère et porte cavalière à côté,
- cour non pavée avec chaussée conduisant au pavillon; près de la rue un appentis à usage de remise,
- ensuite un bâtiment élevé d'un rez-de-chaussée formant écurie et grange et logement de jardinier, au dessus grenier avec une chambre à grain, fruitier et pigeonnier; le bâtiment à égouts par une maison voisine appartenant à Claude Cossonnet,
- devant toit à porc et poulailler,
- en face et à gauche de la cour le corps de logis principal en pavillon élevé d'un rez-de-chaussée, premier et deuxième étage lambrissé en mansardes; à l'une des faces est adossé un petit bâtiment à usage de bûcher. Le rez-de-chaussée forme vestibule avec escalier, cuisine, salle à manger et petite pièce à cheminée; au premier trois chambres dont deux à cheminées ; au deuxième trois pièces carrelées dont deux à cheminée,
- grand jardin formant potager et verger avec terres labourables avec arbres vignes chasselas, le tout bien entretenu,
- dans le jardin un petit salon en face du pavillon en treillage couvert de thuilles,
- serre et berceau de cave voûtée sous une partie de jardin pour former terrasse;
- à l'intérieur du jardin une pièce d'eau avec bonde, avec entrée par une rigole venant de l'extérieur; de plusieurs une grande pièce d'eau formant lavoir, recevant l'eau d'une petite rivière prenant naissance d'une fontaine formée par une source.
Le tout clos de beaux murs contenant 7 arpents et demy.
Le baron Valentin propriétaire de Beaulieu
Le paiement comptant par le baron Valentin à la venderesse et aux créanciers est effectué devant un notaire parisien le 3 septembre 1814. La quittance mentionne « le baron François Valentin, maréchal de camp, chevalier de la Couronne de fer, demeurant à Paris, rue de la Paix n°21, et Françoise-Marie Isabeau, divorcée de François Marie Guillaume Faucon-Delavergne, propriétaire à Paris, lesquels pour préparer les paiements; suite au jugement du premier juin et à l'adjudication sur vente volontaire de la maison à La Ville-du-Bois, ayant son entrée face à la rue Gaillard, ... ». L'acte fut transmis au bureau des hypothèques de Versailles, chargé de 14 inscriptions dont la première « pour la venderesse pour sûreté du prix de vente, contre le baron Valentin ».
Arrêtons nous un instant pour connaître le baron Valentin (1). C'est la publication de mariage faite le 31 janvier 1808 au consulat général de France à Naples qui nous donne quelques informations « entre François Valentin, général de brigade à l'armée de Naples , un des commandants de la Légion d'honneur, commandant la subdivision de Gaële, âgé de 44 ans et Anne Adélaïde Aménaïde Paroisse, âgée de 18 ans, native de Paris, fille de chirurgien du roi de Naples également membre de la Légion d'honneur ». Le contrat de mariage est établi le 2 juillet suivant. Louis Secret, agissant au nom de Jean-Baptiste Paroisse, premier chirurgien de sa majesté le roi de Naples (2), Vincent Thiéry, pensionnaire de l'État, représentant la mère d'Anne Paroisse et également pour la future nouvellement arrivée à Naples d'une part, et François Valentin, ..., avec l'agrément de sa majesté Joseph Napoléon, assistant au contrat de mariage et communauté. Les biens du futur époux s'élèvent à 60.000 frs comptants ; les parents de la future épouse fondent une rente de 2.840 ducats de Naples sur le grand livre de la dette, donné par le roy de Naples, et une pension annuelle de 4.000 frs de France jusqu'au partage relatif aux décès des constituants ; un trousseau de 18.000 frs dont 10.000 en bijoux. L'acte civil de mariage, devant le consul à Naples, faisant fonction d'officier public, est daté du 5 juillet 1808 « sont comparus François Valentin, général de brigade à l'armée de Naples, un des commandants de la Légion d'honneur, commandant la subdivision de Gaëte, âgé de 45 ans, et Anne Adélaïde Aménaïde Paroisse, âgée de 17 ans, fille de Jean premier chirurgien de sa majesté le roi de Naples, chirurgien en chef du quartier général de l'armée de Naples et de Louise Thiéry demeurant rue d'Anjou n°20, les parents absents » (3).
Quelques semaines après son achat, le baron Valentin rachète plusieurs terres qui avaient été cédèés aux cultivateurs de La Ville-du-Bois par Madame Ysabeau. Le 7 décembre 1814, Rochon revend au baron Valentin le droit de déposer des bois à gauche de la porte d'entrée du général Valentin. Le 11 mai 1816, François Froissant cultivateur vend à François Valentin, maréchal de camp, baron demeurant à La Ville-du-Bois , 512 m2 d'un jardin de 2562 m2 , clos de murs le long de la sente Beaulieu, appelé le jardin du Vivier, champtier de la Grenouillère, dont le surplus appartient au baron acheteur d'Isabeau des héritiers Froissant.
La maison bourgeoise de Beaulieu construite par le baron Valentin.
Un testament est dicté le 12 novembre 1822 par le baron Valentin étant en la maison de son beau-père, le médecin Paroisse. « maréchal de camp et commandant de l'ordre royal de la Légion d'honneur, demeurant ordinairement à La Ville-du-Bois , fait à Soissons, malade de corps, ne pouvant signer et ne voyant plus, constitue sa femme légataire universelle ». Le baron Valentin décède le lendemain à Soissons sans laisser d'héritier. Alphonse Paillet, avocat, beau-frère de Valentin à cause d'Eliza Paroisse son épouse, est présent « Ledit Valentin décédé chez son beau-père Paroisse, docteur en médecine, revenu d'Italie. Ledit Valentin et son épouse demeurant à La Ville-du-Bois ».
Les époux Gillebert propriétaires de Beaulieu
La veuve Valentin épousa Achille Gabriel Gillebert, rentier, en secondes noces. Le 11 décembre 1828, Cossonnet vend les futurs communs de Beaulieu à Gillebert moyennant 5.000 frs. L'acte passé devant Devaux mentionne « Charles Cossonnet, cultivateur, et Geneviève Herson, son épouse en troisième noces, demeurant à Sainte-Geneviève, lesquels ont vendu à Achille Gabriel Gillebert, rentier et Aménaïde Paroisse son épouse, dont il est le second mari, ladite dame avant veuve en premières noces de le baron François Valentin, maréchal de camp, commandant de la légion d'honneur, demeurant ensemble à La Ville-du-Bois, acquéreurs d'une maison dite la maison du bas, grande rue faisant partie autrefois d'une plus grande ayant son entrée par un passage commun se consistant en un principal corps de bâtiment sur le devant ». La dite maison comprend au rez-de-chaussée, chambre à feu avec four, batterie avec porte sur le passage, trois chambres avec escalier dans la batterie; en retour bâtiment en appentis de deux petites écuries grenier au dessus, petite cour jusqu'au passage ; tenant au sud aux Gillebert, d'autre au passage commun.
En date du 6 mars 1833 apparaît un acte relatif à la succession Gillebert dans laquelle les propriétaires de Beau lieu sont concernés « Gabriel Achille Gillebert, propriétaire et Anne Adelayde Paroisse son épouse, Charlotte Amené Gillebert, épouse Jean-Claude Gasg, docteur médecin, et Jean-Charles Gillebert propriétaire; lesdits frères et soeur germain seuls héritiers pour un tiers de feu Marie-Thérèse de Montessuy, leur mère, épouse de Jean-Gabriel Gillebert. Ladite dame Gillebert était légataire universelle de feu Achille Edmé Maillet, lui légataire de sa tante Marie-Françoise Maillet, sous le nom de Henriette Larcher, veuve Jean-François Chagot » (4).
Les héritiers reconnaissent le paiement par Mme Chagot du prix des terrains. Marie-Françoise Maillet a fait venir son neveu dont la fortune avait été anéantie par de fausses spéculations ce dernier vivant à ses côtés jusqu'au décès. Désirant le récompenser sans que les créanciers ne puissent intervenir, son testament de 1815 institue Madame Chagot légataire universelle et lègue au neveu une rente qu'elle veut insaisissable et nomme Monsieur Chagot, son exécuteur qui décède, puis Andrieux de Cheptainville par un codicille de 1824. Une écriture sous seing privé par laquelle Madame Chagot déclare ne prétendre en rien dans le legs universel (5). L'actif de la succession consistait en la terre du Plessis-Saint-Père et dans un terrain faubourg Saint-Honoré. La succession était grevée d'une dette considérable par les héritiers de son mari. La vente du mobilier étant insuffisante pour acquitter le passif, on décide la vente de la terre du Plessis-Saint-Père devant le tribunal de Versailles, adjugée à la demoiselle Bonnart moyennant 300.500 frs. Des héritiers collatéraux se présentèrent et moyennant 30.000 frs abandonnèrent laissant la dame Chagot financer le neveu Maillet et vendre le terrain à la Madeleine. Le neveu Maillet décède le 2 octobre 1830. Par un testament il lègue notamment le reste à Madame Gillebert. Ses biens propres s'élèvent à 772 frs dont 500 pour les frais funéraires. Alors que les biens sont toujours entre les mains de la dame Chagot, intervient le décès de la dame Gillebert dont les biens reviennent à ses enfants. Les problèmes successoraux continuent et il faudra un paiement fictif pour que les Gillebert puissent recevoir le terrain.
En 1835, l'achat de la future charreterie et d'une maison par Gillebert à Marie Geneviève Rochon est réalisé moyennant 1.500 frs devant Boucher à Orsay « Pierre-François Vallée, tisserand à La Ville-du-Bois, vend à Gabriel Achille Gillebert, propriétaire et Anne Adélaïde Aménaïde Paroisse, son épouse, demeurant à La Ville-du-Bois, une maison Grande Rue composée de deux pièces par le bas avec grenier, cour couverte en partie, formant un rectangle de 7 m sur la rue profond jusqu'à la clôture de l'acquéreur ». Les bâtiments avaient été édifiés du temps des Rochon sur un terrain vendu par Marie-Françoise Isabeau en 1813. La maison se trouve à droite de la porte cochère de la propriété de l'acquéreur vendue pour 1.500 frs.
Le 8 mai 1856, Gillebert acquiert la cave avec appentis et fraction des communs de Herson devant Foulon moyennant 3.000 frs « Jean-Jacques Herson, propriétaire demeurant à Courbevoie, vend à Achille Gabriel Gillebert, une maison, grande rue, faisant partie originairement d'une plus grande dans une cour commune consistant en un corps de bâtiment au rez-de-chaussée, pièce à feu, cellier avec cave, petite grange derrière, au premier chambre froide, grenier sous comble; tenant à l'est à Cossonnet ».
Un acte de notoriété est passé chez un notaire de Palaiseau le 16 octobre 1863. L'année suivante, Achille Gillebert dépose son testament olographe chez le même notaire, instituant Charlotte Aména Gillebert, veuve Gasg, sa sœur, propriétaire demeurant à La Ville-du-Bois et depuis à Saint-Valérie-en-Caux, comme légataire universelle. L'acte est rédigé comme suit « Je lègue à titre particulier : à ma soeur Madame Gasg 5.000 livres de rente italienne, les portraits de mes parents, de mon grand oncle et ma grande tante Montessuy, à Madame Paillet, ma belle soeur par alliance, 4.000 livres de rente sur mes biens, à Aglaé Goubart 2.000 livres de rentes italiennes, à Gabrielle Poyet, épouse Auguste Poyet, avocat, ma nièce par alliance, mon habitation de La Ville-du-Bois et le petit jardin appelé l'Appointon, le mobilier le garnissant à la charge de servir 1.000 frs de rente à mon cocher Bernard Robin et 500 frs également à Mélanie Vanpoul et Etienne mon jardinier ». Le reste des biens est consacré au paiement du passif.
La succession Gillebert
Gabriel Achille Gillebert décède à La Ville-du-Bois le 27 novembre 1869 (acte de décès No.49) à l'âge de 71 ans. Les deux qui signèrent sur le registre d'état civil sont : son neveu Charles Alfred Gasg, 31 ans, négociant demeurant à Paris, et Louis Albert Alexandre Le Baillif, 33 ans, aussi négociant à Paris (6). Dans une ordonnance du 18 mars 1870, le tribunal de Versailles institue Charlotte Gillebert légataire de son frère ; elle accepte sous bénéfice d'inventaire. Une seconde ordonnance du 2 juin suivant autorise la dame Paillet à se mettre en possession de la maison léguée. « Le tribunal civil du troisième arrondissement communal et de chef-lieu, séant à Versailles au palais de justice ... entre Gabrielle Alexandrine Amélie Paillet, épouse Jean-Auguste Poyet, chevalier de la Légion d'honneur, avocat à la cour impériale, demeurant à Paris (7) , demandeurs et dame Eliza Paroisse, veuve Paillet, ancien bâtonnier, demandeur, dame Charlotte Aména Gillebert, propriétaire, veuve Gasg, demeurant à La Ville-du-Bois , défenderesse, et demanderesse ». Les termes du testament de Gillebert sont rappelés. Le tribunal dit que « la maison de campagne léguée à Mme Poyet doit être libre et affranchie de toutes dettes ».
Mme Poyet est convoquée le 20 juin 1870 par maître Neveu pour la délivrance du legs sous réserve de concourir au passif de la succession Gillebert. La légataire ne s'est pas présentée. Un état dressé le 16 février 1872 par le notaire rapporte le passif de la succession, la dame Poyet doit contribuer pour 4.751frs au passif ; elle accepte via son mari avec tous les autres légataires particuliers.
La vente par Jean-Antoine Auguste Poyet à Lalain Chomel d'une propriété à La Ville-du-Bois est réalisée le 24 avril 1882, la désignation comprenant trois caves dont deux font corps avec les bâtiments et une chez le voisin Rousseau, le tout tenant à l'est à la Grande Rue au fond à un sentier au sud aux héritiers Cossonnet. Ces biens viennent de la dame Paillet comme légataire particulière. La vente faite moyennant 30.000 frs.
Une quittance est délivrée le 25 novembre 1882, par Payet à Lalain-Chomel. Jean-Antoine Auguste Poyet, conseiller honoraire à la cour d'appel de Paris, chevalier de la Légion d'honneur, et Amélie Paillet, son épouse, d'une part et Jacques Marie Emmanuel de Lalain-Chomel, propriétaire demeurant à Paris, rue Richer n°15, d'autre part, au terme d'un contrat du 24 avril, Mr Lalain Chomel a acquis une propriété comprenant une grande maison d'habitation bourgeoise, granges remises, écuries, jardin d'agrément et potager entièrement clos de murs contenant 24.642 centiares, cadastré parcelles C650-661. Un reçu de 30.000 frs en billets de la banque de France plus 812 frs d'intérêts est émis.
En 1896, le nouveau propriétaire fit démolir la maison bourgeoise édifiée par le baron Valentin. La propriété fut transformée en exploitation maraîchère. À la mort de Lalain-Chomel, son héritière vendit la propriété sur licitation en 1923. Beaulieu fut acheté par la commune de La Ville-du-Bois qui aménagea la place que l'on peut admirer de nos jours.
Notes
(1) Né en 1763, le baron François Valentin avait fait les campagnes impériales d'Autriche et d'Italie. Outre les états de service décrits dans les actes, nous connaissons le général baron François Valentin comme directeur du haras national de Langonnet.
(2) Un décret du 6 décembre 1807 nomme Jean-Baptiste Paroisse, ancien chirurgien en chef d'armée, chevalier de la Légion d'honneur.
(3) Notons que la célèbre Désirée Clary demeurait au 28 de la rue d'Anjou.
(4) Marie-Françoise Maillet, âgée de 90 ans, née à Montreau en Seine-et-Marne, décède le 11 février 1826 en son château du Plessis-Saint-Père, commune de La Ville-du-Bois, témoin Gabriel Achille Gillebert, âgé de 29 ans, rentier, neveu de ladite et Auguste-Joseph Macé de Bagneux, lieutenant colonel, maire propriétaire, ami de la défunte. Les deux témoins demeurant à La Ville-du-Bois. Le testament rédigé le 30 juin 1815 par Marie-Françoise Maillet est déposé le 21 février 1826 chez maître Chodron.
(5) Jean-François Chagot est un personnage qui a fait sa fortune pendant la Révolution alors qu'il était maître de forges au Creusot. Il devient propriétaire du château de Villebouzin en nivôse an V quand le domaine fut vendu comme de Bien National de seconde origine à la suite de l'émigration de Charles Bernard de Ballainvilliers. Chagot mourut en 1818 et Villebouzin passa à sa fille et à son gendre Andrieux de Cheptainville.
(6) Adélaïde Aménaïde Paroisse, épouse Gillebert était décédée le 11 mars 1863.
(7) Jean-Auguste Poyet avait été reçu chevalier de la Légion d'honneur par le décret du 29 août 1848 en qualité de capitaine de la quatrième compagnie du neuvième bataillon de la troisième légion de la Garde nationale de la Seine.