Le prieuré de Notre-Dame de Longpont IX. Concordats avec les Vaux de Cernay |
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Chronique du Vieux Marcoussy ------------------------------------- _---------------------- --------- Juin 2010
C. Julien
Cette chronique est le neuvième volet de la série de textes qui présentent les chartes inédites dans le cartulaire du prieuré clunisien Notre-Dame de Longpont. Cette fois nous exposons trois chartes dénommées « chirographum » qui sont, en fait, des engagements écrits ou reconnaissances faites envers l'abbaye cistercienne des Vaux-de-Cernay sur des biens situés hors la seigneurie ecclésiastique de Longpont. Nous nous référons au Cartulaire de Notre-Dame des Vaux de Cernay de l'ordre de Citeaux publié en 1858 par Lucien Merlet et Auguste Moutié (1). Cette fois nous assistons à des concordats entre les deux maisons religieuses, qui, au XIIIe siècle se trouvaient être rivales pour recevoir des libéralités pieuses. Créé un demi-siècle après Longpont, les Vaux-de-Cernay bénéficièrent de la réputation de saint Bernard qui prêchait la stricte observance de la règle de saint Benoît. Les chicanes arrivèrent rapidement car l'abbaye entrait dans les terres du prieuré de Longpont comme à Montlhéry, à Orsay et même à Athis-Mons. Plusieurs contentieux furent réglés en faisant appel à l'arbitrage de la curie parisienne.
Chirographum de la vigne nommée Peletart C'est la charte XLV rédigée entre 1176 et 1191 du cartulaire dont les auteurs ont donné le titre " Cirographum de Longo-Ponte, de vinea que dicitur Peletart ". Il s'agit d'un manuscrit, original en parchemin — (Inv., p. 5, l . 1 re , n o 3.) — portant sur un concordat signé entre l'abbaye des Vaux-de-Cernay, d'une part, et le couvent de Longpont et les moines du prieuré de Montlhéry, d'autre part, à propos des droits seigneuriaux prélevés sur une vigne nommée Peletart. Voici le texte latin transcrit par les auteurs du cartulaire de l'abbaye N.-D. des Vaux-de-Cernay : « Cum misera sit hominis conditio, ut que viderit ignoret, que audierit non intelligat, que didicerit non retineat, vel si aliquandiu retinuerit, tandem tamen oblivioni tradat, ideo conventionem factam inter monachos de Sarneio et monachos de Longo Ponte et monachos de Monte Letherico, ab eisdem requisiti, scripto volumus commendare. Sciant igitur presentes et futuri, quod monachi de Sarneio, monachis de Longo Ponte et monachis de Monte Letherico II solidos censuales et etiam justiciam in quadam vinea, que dicitur Peletart , concedunt et assignant, pro XII denariis censualibus, quos in quadam sua vinea monachis de Monte Letherico debebant, et pro decima ejusdem vinee sue, quam monachis de Longo Ponte debebant. Hoc tam hi quam illi, sapienti freti consilio, concedunt. Et, ut ratum permaneat, decernunt, cyrographo mediante, scribendum ».
La traduction succincte donne : « Parce que la création humaine est digne de pitié, que l'on considère l'ignorance, que les paroles ne soient pas comprises, que l'on apprendrait aucune retenue, même si l'on retenait longtemps, en fin de compte qu'on oublierait, pour cette raison un concordat est fait entre les moines de Cernay, les moines de Longpont et les moines de Montlhéry, à leur demande, la rédaction de cet acte a été recommandée. Nous faisons savoir aux présents et aux futurs que les moines des Vaux de Cernay, les moines de Longpont et ceux de Montlhéry concèdent et assignent un cens de deux sols et la justice sur la vigne nommée Peletart , contre plusieurs cens pour un montant de 12 deniers que les moines de Montlhéry recevaient quand ils possédaient cette vigne et la dîme qui était perçue sur cette vigne par les moines de Longpont. De ceci comme de cela, il a été cédé avec jugement, sagesse et confiance. Et, nous croyons que ce que nous avons écrit dans cet acte de médiation demeurera une décision permanente. »
Nous nous apercevons que le scribe de cette charte n'a pas précisé la situation de la vigne Peletart . Par conjecture, Peletart a été identifié par un chantier ou lieu-dit à Ablon. Une première charte (XLIV) donnée en 1175 par Maurice, évêque de Paris nous informe que ce fut Simon de Poissy « Simon de Pensiaco » qui légua cette vigne « vinea apud Ablonem » à l'abbaye des Vaux de Cernay avec l'accord de sa femme Mathilde, son fils et son frère Simon, lequel a retenu six arpents de vigne à Ablon. La seconde charte traite encore le sujet de cette même vigne, alors nommée Peilecoc, lors d'un concordat signé en 1191 entre les moines des Vaux de Cernay « monachos Vallium Sarnaii » et les chanoines de Saint-Victor représentés par le prieur Jean à propos des dîmes prélevées sur les vignes et terres situées à Athiis « apud Athias » (charte XCII). Sous la dictée de l'abbé Guy, l'important vignoble existant à Athis est décrit et il est décidé d'éteindre la chicane en faisant un partage. La dîme de la vigne Peilecoc donnée par Simon de Poissy revient sous forme d'aumône de la part du couvent des Vaux aux chanoines de Saint-Victor « dederunt nobis jamdicti canonici in elemosinam partem suam decime quam habebant in vinea que dicitur Peilecoc ». L'acte est co-signé par les religieux dont le diacre Guarin et les sous-diacres Hubert et Eudes. Nous trouvons vers 1110 Bernard d'Athis probablement seigneur du lieu mentionné au cartulaire de Longpont. En 1140, Rodolphe le Beau, seigneur d'Athis et son fils Mathieu consentent à la donation faite par Albert de Ver , chevalier, et Auxais , sa femme, à l'abbaye de Saint-Victor des dîmes qu'ils possédaient à Athis et du patronage de l'église. Le prieuré Saint-Denis d'Athis fut donné à l'abbaye de Saint-Victor par Etienne, évêque de Paris auparavant chevalier de Louis le Gros. Cette donation fut approuvée par une bulle du pape Innocent II adressée à Gilduin , premier abbé de Saint-Victor, ainsi que par Louis VII et Maurice, évêque de Paris en 1182. D'autres diplômes se rapportent à des biens détenus par les moines clunisiens à Athis. En 1205, une des prébendes des chanoines de l'église de Saint-Pierre de Montlhéry, appartenant à l'abbaye de Saint-Victor, fut donnée au Prieuré de Longpont, et « en échange lesdits religieux ont donné les terres et vignes qu'ils possédaient près le village d'Athis ». Il s'agirait encore une fois des héritages du terroir d'Ablon. Enfin, signalons que les moines des Vaux-de-Cernay possédaient depuis le début du XIIe siècle un vignoble de quatre arpents dans leur clos d'Ablon « vinearum in clauso Ablonis ». En 1162, le roi Louis VII confirma la charte de donation faite par Philippe, nommé par une erreur du scribe « avunculum nostrum » notre oncle maternel, en réalité Philippe, comte de Mantes et de Mehun-sur-Yèvre, fils de Philippe 1er et de Bertrade de Montfort lequel Philippe avait épousé Elisabeth de Montlhéry, fille du seigneur Guy Troussel. Quatre ans plus tard, les lettres de Maurice évêque de Paris confirmaient qu'Albert de Soisy, sa femme et leurs sept enfants approuvaient le legs de Philippe de Montibus. Cette charte démontre encore une fois le crédit apporté à la production du vin par les maisons religieuses. La dimension était triple : en premier, le monastère a besoin du vin pour la liturgie et le sacrement de l'eucharistie ; en second, le vin est généralement admis comme une des bases de la nourriture quotidienne au Moyen Âge. Le vin est également utilisé pour le soin aux malades et des vieillards. Finalement, le vin a un intérêt économique non négligeable, il est vendu et participe à la trésorerie du monastère. Le véritable essor de la production et de la qualité du vin en région parisienne est lié à l'activité des moines bénédictins et cisterciens. Tous les grands monastères avaient un ou plusieurs vignobles dans Hurepoix. L'abbaye de Saint-Germain-des-Prés possédait des vignes à Epinay-sur-Orge dont le vin était renommé pour être l'un des meilleurs de l'Île-de-France. Les clunisiens de Longpont avaient un important vignoble à Chailly-en-Bière, et percevaient la dîme de vin dans toutes les paroisses aux environs de Longpont. Les moines blancs des Vaux-de-Cernay avaient un cellier considérable à Bruyères-le-Châtel. La plus grande contribution des moines au monde du vin est la mise en valeur avec le souci permanent d'atteindre la perfection. En créant les clos « clausum », les moines ont donné aux vins leur identité. Les abbayes ont joué un rôle décisif dans l'épanouissement du vignoble, en y construisant des celliers. Par leur action, le vin devient également synonyme d'hospitalité (2).
Chirographum de la terre de Montfaucon et Boissière La charte CLX du cartulaire de l'abbaye des Vaux-de-Cernay, datée de 1208, porte le titre " Cirographum de Montefalcone et de terra Buxerie ". C'est un acte d'échange entre ce monastère et le prieuré de Longpont. L'original est un parchemin scellé ( Inv. , p. 28, l . V . ). Le diplôme de 1208 est passé lors de l'abbatiat de Gui, le plus célèbre des abbés des Vaux-de-Cernay par la part qu'il prit aux affaires générales de la France. En 1202, il partit pour Jérusalem avec une grande troupe de croisés « Anno 1202, Guido, abbas de Sernaio, perrexit Jerusalem cum magna manu comitum ». Il prit part à la croisade contre les Albigeois, fut nommé en 1211 évêque de Carcassonne, et mourut en 1223. À cette époque le prieuré de Longpont était commandé depuis 1198 par Guillaume de Milly. Ce prélat reçut ensuite le bénéfice de deux établissements clunisiens d'Île-de-France : le prieuré de Longpont et le prieuré Saint-Martin-des-Champs à Paris avant de devenir abbé de Cluny (cf. chronique spécifique). Voici la version latine, transcrite par Merlet : « Noverint universi qui presens scriptum viderint, quod ego Willelmus, prior Longi Pontis, et ejusdem loci conventus, terram de Buxeria,quam domus de Orceaco habebat apud grangiam monachorum Sarnaii, que Mons Falconis dicitur, commutavimus cum eisdem monachis Sarnaii, pro duobus frustis terre illius, quam domina Rancia de Palaisol ipsis in elemosinam contulit apud Vivers, pro eadem quantitate terre videlicet utriusque commutationis ; ita tamen quod Sarnaienses nobis dimidium arpennum superaddunt pro decima quam monachi de Orceaco in terra utriusque commutationis habebant. Debet autem pars utraque terram quam commutat invicem sibi guarantire. Quod si forte nos Sarnaiensibus terram de Buxeria non potuerimus guarantire, ipsi terram suam in pace recipient. Si vero Sarnaienses terram sue commutationis nobis guarantire non potuerint, de reliqua terra Rancie equipollenter commutabunt. Quod, ut robur obtineat perpetuum, convenit inter utramque partem ut, interposito cyrographo, litteras sigillatas super hac pactione mutuo daremus et acciperemus. Actum anno gracie M o CC o VIII o . Ex parte Sarnaiensium horum subscripta sunt nomina : Bertranni tunc prioris ; Petri supprioris ; Symonis cellerarii ; Amarrici Moreher ; Roberti de Doldinco ; Bartholomei de Caprosia : ex parte Longipontensium : Ancherii supprioris ; Ascelini ; Mathei, prioris Orceaci ; Odonis Poot ; Guidonis de Maciaco ; Symonis Paste. "
Extrait du cadastre napoléonien de Saint-Jean-de-Beauregard (30 novembre 1808).
Voici la traduction sommaire : " Que tous ceux présents et futurs qui verront ce diplôme, sachent que moi Guillaume, prieur de Longpont et les [moines] du couvent de ce lieu, proclame que nous avons échangé avec les moines des Vaux-de-Cernay la terre de Bussières que possédait le seigneur d'Orsay dans la grange des moines des Vaux de Cernay que l'on nomme Montfaucon contre deux droitures de cette terre arable à Viviers qui avait été données en aumône par la dame Rancie de Palaiseau. De même, les moines des Vaux-de-Cerny font l'échange d'un demi arpent contre la dîme que les moines d'Orsay prélevaient sur la terre susdite. Tandis que la dette de celle des deux parts de terre a été garantie dans cet échange . Que si d'aventure, les moines des Vaux-de-Cenay ne sont pas satisfait de la terre de Bussière, cette terre sera rendue en toute quiétude. Si vraiment les moines des Vaux-de-Cenay ne sont pas satisfaits par cet échange, le reste de la terre de Rancie reviendra équitablement. Et pour fortifier et tenir solidement à perpétuité, cet accord fait entre les deux parties, nous plaçons sur ce diplôme, la marque de nos sceaux sur le pacte susdit que nous donnons et recevons mutuellement. Fait en l'an de grâce 1208. Ceux qui ont signé de la part des moines des Vaux de Cernay : Bertrand prieur en exercice, Pierre sous-prieur, Simon cellarier, Amaury Moreher, Robert de Dourdan, Barthélemy de Chevreuse ; de la part des moines de Longpont : Ancher sous-prieur, Ascelin, Mathieu prieur d'Orsay, Eudes Poot, Guy de Massy et Symon Paste." Au XIe siècle, les terres de Montfaucon et de la Boissière étaient dans les mains des seigneurs d'Orsay. Vers 1080, Geoffroy de Bologne, évêque de Paris donna aux moines de Longpont « l'autel et ce qui dépend de l'autel du village nommée Orceacus , autel consacré en l'honneur de saint Martin ». Le seigneur d'Orsay, Simon, contesta d'abord cette donation, puis abandonna ses prétentions et rendit en outre aux moines de Longpont l'atrium (3). Vers 1100, Sevin Chastel « Sevinus, filius Milonis Castelli » donne toute la dîme qu'il possédait à La Boissière et deux arpents de terre qu'il avait à Grand Viviers « omnem decimam quam habebat apud Bosseriam et duos arpentos terre quos habebat apud Viverios ». Parmi les témoins les oncles et les cousins du donateur sont présents Pierre Chastel et Gui, son fils, Payen Chastel et Hilduin son fils (charte CCLXV). Ce Sevin était l'un des fils de Milon d'Orsay qui avait pris le froc de moine à Longpont. Ainsi, les libéralités faites aux moines du prieuré Saint-Martin d'Orsay, dépendance de Sainte-Marie de Longpont, étaient entrées ans le temporel du réseau régional clunisien. Désormais, le prieur de Longpont est le suzerain de tous les biens des dépendances du couvent. Nous rencontrerons Nantier, le frère de Sevin délaissant sa part de la terre de La Bussière « Buxeria » à un autre monastère du sud parisien, l'abbaye des Vaux de Cernay. La donation faite par Nantier d'Orsay et sa fille a été confirmée en 1162 par le roi Louis le Jeune (charte XXI). « Quod Nanterius de Orceis, assentiente filia sua, totam terram suam de Buxeria abbatiae de Sarnaio donavit in elemosinam ». En contre-partie, les moines devaient fournir deux muids de céréales au donateur : un muid de blé d'hiver et un autre d'avoine « duos modios annonae, unum de ivernagio et alterum de avena » (charte XXI). Pour revenir au chirographum de Montfaucon , le parchemin a été scellé, sur lacs de soie rouge et verte, d'un sceau en cire brune, de forme ogivale, représentant la Vierge nimbée, assise et tenant l'enfant Jésus. La légende porte : † Sigill. [B eate M arie ] Longipontis. Le contre-sceau, aussi de forme ogivale, représente une branche de lis naturel entre deux épines, avec ces mots : † S icvt liliv [ m ] int . spinas . ( Gravés. ) Le concordat de 1208 est signé par Ancher, sous-prieur à Longpont, et Mathieu, prieur d'Orsay. Le prieur Guillaume semble être occupé ailleurs. Cet acte d'échange est monnaie courante à la fin du XIIe siècle car les maisons religieuses ayant reçu de nombreux biens épars voulaient regrouper leurs héritages pour créer un patrimoine homogène. Ainsi, l'entré de la terre de Bussières dans le temporel des moines des Vaux de Cernay fortifiant le domaine agricole désigné sous le nom de « la Grange aux Moines » ou « Montfaucon » (cf. chronique spécifique). Deux des témoins qui assistent le sous-prieur de Longpont méritent d'être cités, étant connus par ailleurs. D'une part, Guy de Massy est le fils du sire Jean de Massy et de dame Marguerite. Nous trouvons cette famille quelques années plus tard, en avril 1225, quand Guy, ayant pris le froc à Longpont, fut mis en possession par ses parents de biens consacrés à des œuvres pies, suivant la teneur de lettres de feu Guillemin [ Guillaume II ] , évêque de Paris. D'autre part, Symon Paste est présent lors de la cérémonie d'échange. Ce chevalier pourrait être le seigneur du Plessis, paroisse de Saint-Pierre de Brétigny et père de Ferry Pasté. Nous trouvons ce dernier chevalier « Ferricus Paste », en avril 1241, en tant qu'arbitre dans un contentieux angageant le prieuré de Longpont dans sa dépendance de Pecqueuse. Il fut maréchal de France sous Saint-Louis et associa son patronyme à sa terre qui devint « Le Plessis-Pâté ».
Admonition des dîmes de Montfaucon La charte CCCXXXIV du cartulaire des Vaux-de-Cernay porte le titre « De admodiatione decimarum de Monte-Falconis, ex concessione conventus Longi-Pontis ». Ce concordat rédigé en 1232, entre les deux églises, concerne les dîmes possédées par le prieuré d'Orsay, dépendance clunisienne du monastère de Longpont. Selon l'Encyclopédie, l'amodiation est un terme juridique utilisé en droit coutumier pour signifier un bail, dont le prix se paye en fruits par le fermier, lequel en retient moitié, ou plus ou moins, pour son exploitation. Amodiation est aussi synonyme en quelques endroits à bail à ferme , et se dit du bail même, dont le prix se paye en argent. L'original est un parchemin portant le sceau du prieuré de Longpont — ( Inv., p. 28, l . V.) dont voici la transcription par Merlet : « Universis presentes litteras inspecturis, frater D......., humilis prior ecclesie Longi-Pontis, totusque ejusdem loci conventus, salutem in Domino : Noverit universitas vestra quod nos, de communi assensu nostro, admodiavimus, in perpetuum religiosis viris, monachis Vallium Sarnaii decimas omnium terrarum quas ipsi possidebant apud granchiam suam de Monte-Falconis , in decimatione prioratus nostri de Orceio, pro septem sextariis bladi, dimidio videlicet modio hybernagii et uno sextario avene, de quibus assignaverunt nobis apud Vivers duo sextaria hybernagii et unum sextarium avene, singulis annis, percipienda ab heredibus defuncti Raginaldi de Vicinis, in terra que fuit Symonis de Chateron, et quatuor sextaria hybernagii percipienda, annis singulis, in modiatione que dictis monachis debetur de terris quas habent apud Gomet-Villam , ad mensuram et ad terminum quo eis debetur et de eodem blado ; et dicti monachi significare tenebuntur priori de Orceio diem quo recipient modiationem predictam, et prior de Orceio tenebitur mittere pro dictis quatuor sextariis recipiendis, et si dictus prior quatuor predicta sextaria requisierit et habere non poterit, dicti monachi tenebuntur eidem priori reddere dicta quatuor sextaria de prefata modiatione, infra festum dominice Nativitatis. Si vero sepedicti monachi de cetero terras aliquas adquisierint in decimatione nostra de Orceio, reddent inde plenam decimam nisi nobiscum aliter composuerint. Quod ut ratum sit et stabile, presentem paginam sigillis nostris fecimus roborari. Actum anno Domini millesimo CC o tricesimo secundo ». Nous en donnons la traduction sommaire : « À tous ceux que ces présentes lettres verront, frère D…, humble prieur de l'église de Longpont, et tous les moines de ce lieu, au nom du seigneur, salut. La totalité, tant vous que nous, la communauté nous a approuvé l'amodiation à perpétuité aux religieux et moines des Vaux-de-Cernay, de toutes les dîmes sur les terres qu'ils possèdent dans la grange de Montfaucon, dans le canton dîmier du prieur d'Orsay contre sept setiers de grains, moitié d'un muid de blé d'hiver et un setier d'avoine, lesquels seront à prendre annuellement deux setiers de blé d'hiver et un setier d'avoine sur le terroir de Viviers, prélevés sur l'héritage de feu Régis de Voisin, dans la terre qui fut à Simon de Chateron, et quatre setiers de blé d'hiver prélevés chaque année, un muid dont les moines étaient redevables sur la terre qu'ils possédaient à Gometz-la-Ville, qui sont les mesures redevables des quantités de ces mêmes blés. Et lesdits moines annonceraient au prieur d'Orsay retarder le jour où ils ramèneraient les susdits muids de blé, et que le prieur d'Orsay accepterait le délai pour recevoir lesdits quatre setiers, et si ledit prieur suspend la livraison des susdits quatre setiers, lesdits moines garderont lesdits quatre setiers parties du susdit muid qu'ils devront payer au même prieur, après la fête de la Nativité de notre Seigneur. Quant au reste des terres qui sont situées dans notre canton dîmier d'Orsay, si vraiment les moines s'acquittent pleinement des dîmes de ce lieu, dans ce cas la chicane sera terminée entre nous. Pour fortifier nous apposons notre sceau sur le présent acte que nous croyons solidement établi. Fait l'an 1232 de l'Incarnation du seigneur ». Depuis sa fondation, l'abbaye des Vaux-de-Cernay avait été dotée d'héritages à Montfaucon. Dans un diplôme de 1142, le roi Louis VII avait confirmé les libéralités reçues par les premiers moines de ce couvent « monachis de Savigneio terram de Valle Sarnaii ». Parmi les nombreux donateurs, nous trouvons Hugo Bibens qui donna une partie d'un bois qu'il possédait à Montfaucon « partem nemoris sui quod habebat in Monte Faucone » avec une terre de culture à côté de la route de Gomez avec l'approbation de sa femme Marie et son fils Hugues. Ce dernier confirma cette libéralité par la charte de 1168 (charte III). L'acte de 1232, qui semble éteindre un différend entre les deux monastères a été rédigé, par le prieur de Longpont dont l'auteur n'indique que l'initiale en parlant de « frater D..., humilis prior ecclesie Longi-Pontis ». Selon l'auteur du Cartulaire qui a établi le catalogue des prieurs conventuels de Longpont, le seul prélat avec cette initiale « D » se nomme Drogon dont Marion fait commencer le priorat en 1235. D'où un décalage entre 1232, année de la rédaction de la charte que nous analysons et l'entrée en fonction du prieur Drogon. Il n'est pas étonnant d'observer un tel désaccord, sachant que Jules Marion, n'ayant pas eu accès à tous les documents, a commis quelques erreurs dans la liste des prieurs de Longpont. Rappelons que Guillaume de Milly (1198-1208) et Beaudoin (1208-1232) cumulèrent à la fois les chapeaux de prieur de N.-D. de Longpont et de Saint-Martin-des-Champs. Plusieurs chartes mentionnent « humilis prior Sancti Martini de Campis et Longipontis » ; Beaudouin fut lui-même présent à Longpont quand Gui de Massy prit les habits de moines. Eudes de Condom succéda à Beaudouin, en 1232 selon Marion, puis vient Drogon, en 1235 selon Marion. Il convient donc de reconsidérer ces dates. Le prieur de l'église Saint-Martin d'Orsay percevait des grosses dîmes à Viviers, Gometz-la-Ville et à Montfaucon qui se montaient annuellement à sept setiers de grains : six setiers de blé d'hiver (moitié d'un muid) et un setier d'avoine. La collecte annuelle de six setiers de blé fournissait du pain pour nourrir deux moines. Bien évidemment, l'avoine était la nourriture d'un cheval, seul moyen de locomotion à cette époque. Le texte de cette charte est très précis en ce qui concerne la qualité du froment « bladi, dimidio videlicet modio hybernagii ». Les moines doivent fournir un demi muid de blé d'hiver « hybernagii ou ivernagio ». Cette notation indique bien l'existence de l'assolement triennal sur les terres de Montfaucon. À suivre…
Notes (1) L.Merlet et A. Moutié, Cartulaire de Notre-Dame des Vaux de Cernay de l'ordre de Citeaux au diocèse de Paris , tome I (chez Henri Plon, Paris, 1858). (2) Pendant le Moyen Âge, le vignoble de Paris et d'Île-de-France est le plus important de France en superficie et en production. Les vins blancs, de conservation facile, étaient les plus appréciés alors que les vins rouges ne furent produits qu'à partir du XVe siècle. (3) Dans la basilique chrétienne « l'atrium » était l'enceinte extérieure, le parvis. La possession de l'atrium signifie la propriété du porche de l'église et les redevances perçues sur le cimetière attenant.
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