Le prieuré de Notre-Dame de Longpont XV. Chartes tirées du cartulaire de Saint-Martin-des-Champs |
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Chronique du Vieux Marcoussy ----------------------------------- _------------------- --------- Décembre 2010
C. Julien
Cette chronique est le quinzième volet de la série de textes qui exposent les chartes relatives au prieuré Notre-Dame de Longpont. Cette fois nous présentons des chartes du cartulaire de Saint-Martin-des-Champs où le nom de Longpont apparaît à divers titres et notamment quand le prieur conventuel était simultanément le chef de ces deux prieurés clunisiens. Rappelons que Saint-Martin-des-Champs était, avec la Charité-sur-Loire, l'un des plus importants prieurés de l'Ordre de Cluny. Tout en étant un monastère de moindre importance, Longpont était le chef d'un réseau régional possédant une dizaine d'églises du Hurepoix.
L'enquête de l'abbé de Cluny La première charte de Saint-Martin-des-Champs, dont nous voulons parler, est connue sous le numéro MXXXIII (1). C'est une enquête, en date du 13 février 1244, faite à la requête de l'abbé de Cluny sur le revenu de toutes les cures du diocèse de Paris, dont le patronage appartient à son ordre. Les dépositions des titulaires sont reçues sous la foi du serment par le délégué des commissaires apostoliques. « O. p. l. i. Officialis curie Parisiensis salutem in Domino. Notum facimus quod, cum frater Petrus, subcamerarius Sancti Martini de Campis Parisiensis, peteret, procuratorio nomine pro abbate et conventu Cluniacensi , coram nobis subdelegato a venerabilibus viris Luca decano et Odone archidiacono Parisiens , executoribus a Domino Papa deputatis, ab universis rectoribus parochialium ecclesiarum in dyocesi Parisiensi existentium, subjectarum, jure patronatus, in temporalibus ecclesie Cluniacensi et monasteriis subjectis eidem, decimas triennii omnium proventuum et reddituum parrochiarum suarum, quas dicitur concessisse dominus Papa dictis abbati et conventui — plures de rectoribus ecclesiarum ad dictum monasterium pertinentium coram nobis constituti, de predicti decimis voluntati Prioris Sancti Martini de Campis se com miserunt, promittentes se stare — arbitrio dicti Prioris — tandem — eas estimaverunt in hunc modum. Juravit enim Guibertus, presbiter de Nooreio, ecclesiam suam valere XII lib. paris..... Nicholaus, presbiter de Pecqueusa, juravit suam valere centum sol..... Radulphus, presbiter de Bondoufle, juravit decem lib. Bernardus, presbiter de Longuoponte, juravit quindecim lib. Petrus, presbiter Sancti Petri de Monteletherici, juravit duodecim lib..... Johannes, presbiter de Orceio, juravit undecim lib ..... Bochardus, presbiter de Campiplantu, juravit quindecim lib..... Xristoforus, presbiter Beate Marie de Monteletheri, j uravit decem et octo lib.. ... De quarum ecclesiarum proventibus et redditibus dictus Petrus, nomine procuratorio pro dicto Priore, finavit cum dictis rectoribus in hunc modum quod dicti rectores promiserunt se reddituros, pro posse suo, infra tres septimanas proximo post Pascha computandas, decimas de duobus annis, decima de tercio anno eisdem rectoribus dimissa a dicto subcamerario. Cui finationi et solutioni rectores predicti consenserunt. Datum anno Domini millesimo ducentesimo quadragesimo tercio, dominica ante Cineres ». Voici la traduction sommaire de cette charte « À tous ceux que ces lettres verront, moi, official de la cour épiscopale de Paris, au nom du seigneur, salut. Nous faisons savoir que frère Pierre sous-chambrier du prieuré parisien de Saint-Martin-des-Champs sollicité et ayant reçu procuration par l'abbé et le couvent de Cluny (2), choisi en la présence de vénérable homme Lucas doyen, et Eudes archidiacre de Paris, commissaires épiscopaux afin d'évaluer l'ensemble des droits qui se rapportent aux églises paroissiales du diocèse de Paris, dont les patronages sont placés dans le temporel de l'église de Cluny et les monastères en dépendants, toutes les décimes triennales produites et reçues de ces paroisses, que le Saint-Père a accordé aux dits abbé et couvent. Plusieurs recteurs des églises qui appartiennent à ces couvents s'opposent aux décimes susdites, ce dont le prieur de Saint-Martin-des-Champs veut déplorer, promettant fermement - avec l'arbitrage dudit prieur – finalement – là, en fixant des limites convenables. Évidemment ce sont : Guibert, curé de Nozay dont l'église vaut 12 livres parisis, Nicolas, curé de Pecqueuse qui estime sa valeur à 100 sols, Raoul, curé de Bondoufle à 10 livres , Bernard, curé de Longpont à 15 livres , Pierre curé de Saint-Pierre de Montlhéry à 20 livres , Jean, curé d'Orsay à 11 livres , Bouchard, curé de Champlan à 15 livres , Christophe, curé de Notre-Dame de Montlhéry à 18 livres …. Le quart des églises ont payé au dit Pierre, nommé procureur dudit prieur, le restant desdits recteurs ont promis de payer les décimes de deux années dans les trois semaines suivant Pâques et les décimes de la troisième année seront envoyés au susdit sous-chambrier. Desquels paiements les commissaires susdits donnent leur accord. Fait l'an 1243 de l'incarnation de notre Seigneur, le dimanche précédant les Cendres ». Ainsi, nous trouvons dans cette charte l'énoncé de la plupart des églises du diocèse de Paris placées dans la dépendance de Longpont avec le nom des curés qui officiaient en l'an 1243 En effet, le prieuré Notre-Dame avait reçu au fil des décennies des XIe et XIIe siècles, de nombreuses églises du Hurepoix et même au-delà. La plupart du temps, l'église comprend le chœur dont le prieur de Longpont est le patron, l'atrium et le cimetière. Les dîmes de la paroisse sont le plus souvent associées par suite du patronage. Le commissaire clunisien, nommé « définiteur » par le Chapitre général de Cluny , cite huit églises dont trois prieurés en comptant le chef de réseau. Toutes sont sous le patronage de N.-D. de Longpont qui en est le gros décimateur. Toutefois, le prieuré parisien de Saint-Julien-le-Pauvre est manquant à l'appel. Les décimes étant évalués au nombre de paroissiens, nous observons que la population des deux paroisses de Montlhéry : Saint-Pierre du Château et Notre-Dame correspond bien à celui d'une ville de plusieurs centaines d'habitants. Par contre, avec 100 sols, soit 5 livres , Pecqueuse est la plus petite paroisse du réseau régional clunisien de Longpont.
Chartes nouvelles sur Longpont La charte CVII du cartulaire de Saint-Martin-des-Champs n'est pas datée, l'auteur envisage les limites extrêmes entre 1079 et le 12 octobre 1105. Cet acte nous livre que Ours (Ourson), prieur de Saint-Martin-des-Champs, assiste le prieur Henri, de Notre-Dame de Longpont, lorsque Gautier de la Bretonnière lègue une terre à Brétigny . Voici le texte latin : « Gauterius de Britonaria dedit Deo et Sancte Marie de Longo Ponte et monachis ibidem manentibus, pro anima sua parentumque suorum, medietatem terre patrimonii sui, que est apud Britiniacum, ad locum qui dicitur Ad-Vicinum , que de patre suo et matre sua remansit ; cujus terre donum posuit super altare Sancte Marie, videntibus istis : Rodulfo de Brueriis ; Aymone filio Frogerii ; Frogerio clerico, ex parte sua ; ex parte Sancte Marie : Henricus prior, Ursus prior Sancti Martini de Campis ; Rainerius de Savigniaco ; Herbertus clericus ; Hugo forestarius ; Theudo famulus, Ermenerius, Robertus, Fulco ».
Nous en donnons une traduction sommaire : « Gautier de la Bretonière donna à Dieu et Sainte-Marie de Longpont et aux moines de ce lieu , pour le salut de l'âme de sa sœur, la moitié d'une terre située à Brétigny, au lieu-dit Le Voisin venant du patrimoine de ses père et mère lui ont laissé. L'acte de donation fut posé sur l'autel de Saint-Marie, devant ceux qui ont vu cela de la part de Gautier : Rodolphe de Bruyères, Aymon fils de Froger et le clerc Froger. De la part de Sainte-Marie : le prieur Henri, Ours prieur de Saint-Martin des Champs, Rainier de Savigny, le clerc Herbert, le forestier Hugues, le serviteur Theudon, Ermener, Robert et Foulques ». L'original de cette charte a été perdu à une époque inconnue. Une copie fut rédigée en 1153 qui se trouve dans le fonds des manuscrits latins (Ms. lat. 9968) transcrite au n° 167 dans le cartulaire A de Longpont. Elle est mentionnée dans le Gallia christiana nova, VII, 555. D'après la chronologie des prieurs de Longpont dressée par l'éditeur du Cartulaire, Henri, cinquième prieur, succéda à Eudes 1er de Péronne, vivant en 1076 : il est cité de 1086 à 1125. Rien dans les détails de la notice ne permet de lui assigner de plus étroites limites que les dates extrêmes du priorat d'Ourson. Le prieur de Saint-Martin des Champs, chef de la plus importante maison de la province clunisienne de France, était à Longpont en tant qu'ami du prieur Henri qui jouissait d'une grande renommée à la cour de Philippe 1er. Selon la coutume, nous distinguons des témoins tant du côté du donateur que du côté du donataire. L'énumération est immuable, les religieux, les nobles laïcs et les gens du peuple. Il fallait que toutes les couches de la société aient vue et entendu qu'un bien avait été donné à l'église de Longpont. La chose devait être publiquement proclamée après avoir assister à la cérémonie solennelle avec dépôt de l'acte de donation sur le maître-autel. Du côté du prieuré Sainte-Marie, après les deux prieurs, un aristocrate nommé Rainier de Savigny et le clerc Herbert, nous apprenons que cinq personnages au service des moines témoignent de la libéralité pieuse de Gautier ; ce sont le forestier et cinq familiers du prieuré dont les noms reviennent quelquefois lors d'autres donations.
La libéralité de Lucienne de Montlhéry-Rochefort En l'an 1137, Eudes, sous-prieur de Saint-Martin, assiste avec l'évêque de Paris Étienne et le comte Raoul de Vermandois, à la confirmation donnée par le roi Louis à une libéralité de Lucienne de Montlhéry-Rochefort au prieuré de Longpont (charte CCXVI) . Lucienne donne la totalité de sa part de terre à Égly et Boissy-sous-Saint-Yon avec l'approbation du roi, seigneur dominant. L'original ayant été perdu, c'est un vidimus de 1153 qui apparaît dans le cartulaire. Cette charte porte le numéro CCXCII dans le cartulaire de Longpont édité par Jules Marion (Ms. lat. 9968). Voici le texte latin : « Luciana, soror Hugonis de Creciaco , dedit Deo et Sancte Marie de Longoponte et monachis ejusdem loci, totam partem terre sue quam habebat apud Agglias et Buxiacum , cum redditibus suis. Quod donum Ludovicus, rex Francorum, quia ex ejus feodo erat, laudavit, et concessit eisdem monachis et perpetuo confirmavit possidendum, videntibus et audientibus istis : Stephano, Parisiensi episcopo , Odone suppriore Sancti Martini de Campis , Hugone de Creciaco, Arnulfo monacho, Radulfo comite, Manasse de Turnomio, qui hoc idem ibidem concessit. Item, idem Manasses et Beatrix, uxor ejus, apud Creciacum prefatum donum laudaverunt et sepedictis monachis concesserunt atque in manu Johannis prioris per quandam portiunculam ligni miserunt, ut ex parte eorum super altare Sancte Marie poneret ». La version de Longpont contient, en plus, la liste des témoins qui étaient à Crécy : « Quod viderunt et audierunt hii testes : Georgius, monachus, Gislebertus de Turnomio, Galterius Saracenus, Radulfus, filius ejus, Galterius de Curtevrolt, Paganus, frater ejus, Gibuinus, armiger, Bernardus, famulus, Ricard, famulus ». Nous en donnons une traduction succincte : « Lucienne, sœur d'Hugues de Crécy, donna à Dieu et à Sainte-Marie de Longpont et aux moines de ce lieu, toute la part de la terre qu'elle possédait à Égly et à Boissy avec les revenus associés. Louis, roi des Francs approuve ce don parce que le bien était dans sa mouvance et donne son consentement pur que les moines le possèdent à perpétuité. Ceux qui ont vu et entendu ceci sont : É tienne, évêque de Paris, Eudes sous-prieur de Saint-Martin-des-Champs, Hugues de Crécy, le moine Arnoult, le comte Raoul, Manassé de Tournan qui ont également approuvé. De même, étant à Crécy, Manassé et Béatrice sa femme ont approuvé le legs et les moines acceptent à ce que le bâton de commandement soit mis dans les mains du prieur Jean qui le pose de leur part sur l'autel de la Vierge ». « Les témoins qui ont vu et entendu cela [à Crécy-en-Brie] : le moine Georges, Gislebert de Tournan, Gautier Saracenus, Radulf, son fils, Gautier de Curtevrolt, Payen, son frère, l'écuyer Gibuin, les serviteurs Bernard et Ricard » (3). Cette charte est la conséquence du drame familial des Montlhéry-Rochefort, c'est-à-dire le meurtre de Milon II de Bray, héritier de la seigneurie de Montlhéry par son cousin germain Hugues de Crécy, fils et héritier de Gui le Rouge, seigneur de Rochefort. Selon Luchaire, médiéviste qui édita la vie de Louis VI par Suger, Hugues de Crécy s'était fait moine à Saint-Denis après le meurtre de son parent en 1118. Mais il semble qu'il rejoignit rapidement l'Ordre clunisien en entrant au prieuré de Saint-Martin-des-Champs à Paris. Il devint un religieux très apprécié à qui l'abbé Pierre le Vénérable confia des missions diplomatiques. Lucienne ou Luciane de Rochefort était la fille de Guy le Rouge et d'Élisabeth de Crécy-en-Brie. En 1104, elle fut promise en mariage au roi Louis VI, mais suite aux intrigues de Bertrade de Montfort et des frères Garlande, l'alliance fut cassée, sur proposition de l'évêque Yves de Chartres, spécialiste de droit canon, par le pape Pascal II lors du concile de Troyes en 1107 sous prétexte de liens de consanguinité. Ce divorce marque la disgrâce définitive des Montlhéry-Rochefort. Plus tard, Lucienne épouse en secondes noces le seigneur Guichard III de Beaujeu. De ce mariage, elle donnera naissance à six enfants dont Humbert III de Beaujeu. Auparavant, cette famille avait fait plusieurs legs à Saint-Martin-des-Champs (charte CLXXX). Vers 1120, le prieur Mathieu établit, sur les revenu du prieuré de Sevran, une pitance de 60 sols pour solenniser l'anniversaire de Milon de Montlhéry, fondé par Amaury de Montfort et par Béatrice, sœur de Hugues de Crécy, mariée à Manassé de Tournan. Jules Marion a proposé de fixer la donation de Lucienne à l'année 1140. Elle est antérieure à cette date. Il y est en effet question de Manassé de Tournan, premier mari de Béatrice de Rochefort, sœur de Lucienne. Or Béatrice, devenue veuve, était en 1143 remariée à Dreux, sire de Pierrefonds, dont elle avait déjà trois enfants. D'autre part, Lucienne agit ici comme "dame de soi" sans l'autorisation d'un époux ; la charte se place donc après la mort de Guichard III de Beaujeu (1137) qui avait accepté pour femme la fiancée rebutée de Louis VI, et qui, sur la fin de sa vie, se fit moine à Cluny. Nous proposons de fixer à cette même année 1137 la date de cet acte ; le roi dont le concours fut demandé serait Louis le Gros lui-même. Hugues de Crécy mourut un 31 juillet (Nécrologes de Saint-Denis et de Saint-Martin-des-Champs, dans Molinier, Obituaire de la province de Sens. Tome I, 320, 452). Ce fut en 1147, d'après les diptyques funèbres de Saint-Martin (son obit précède celui de l'abbé Serlon de Beauvais, 25 septembre 1147). Afin de compléter l'analyse de cette charte, nous rapportons le texte de Joseph Depoin : « 1085 est la date probable de l'abandon par Gui de Montlhéry de ses droits sur Clamart à Saint-Martin-des-Champs. Gui fit cette libéralité avec le concours de sa femme Élisabeth de Crécy . Une étude récemment comprise dans les publications de la Société historique du Gâtinais, et due à M. Estournet, semble bien établir qu'Élisabeth, veuve de Bouchard II, comte de Corbeil (1070-1077), fut la seconde femme de Gui de Montlhéry qui, dès 1065, prenait le surnom "de Rochefort", qu'il avait acquis du chef d' Aélis, sa première femme . Il est probable que la libéralité de Gui suivit de près son second mariage, si même elle n'eut lieu à l'occasion de ses noces. Il n'y est pas question d'enfants ; or Hugues de Crécy, fils de Gui et d'Élisabeth, était en 1107 un jeune seigneur d'au moins vingt ans. Sa naissance est donc voisine de 1085 ».
Le faux diplôme Malgré le caractère criant de fausseté que présente la charte CCXXV du cartulaire de Saint-Martin-des-Champs, nous l'évoquons, ainsi que l'a fait M. Bruel, en raison de son importance, notamment quant à l'état d'esprit qui régnait au temps de Philippe le Bel. On y sent la mainmise de l'État substituant son patronage et sa tutelle sur les établissements monastiques à la protection qu'aux siècles précédents les congrégations cherchaient auprès des papes. Ce faux de la fin du XIIIe siècle (prétendu vidimus du 1er décembre 1294) supposé être un diplôme donné à Orléans le 1er janvier ou 30 mars 1119 par le roi Louis VI qui place sous la sauvegarde et la tutelle des rois de France l'abbaye de Cluny et quarante-quatre de ses filiales, en premier lieu le prieuré de Saint-Martin-des-Champs. Pour établir la fausseté du parchemin, les médiévistes ont remarqué le caractère insolite de cette rédaction, il suffit de la comparer à la formule stéréotypée des précédents diplômes de Louis VI qui ne comporte aucune répétition superflue. Voici le début de ce diplôme : « In nomine sancte et individue Trinitatis. Amen. Ego Ludovicus, Dei gratia Francorum rex. Notum fieri volumus cunctis fidelibus t. p. q. f., quod nos, pro salute nostra et stabilitate regni nostri, ad preces archiepiscoporum, episcoporum et principum regni nostri, monasterium Cluniacense, nobilius membrum nostri regni, cum omnibus prioratibus, possessionibus et pertinentiis in regno nostro constitutis, in nostra et successorum nostrorum regum Francie defensione, garda et tutela recipimus… ». Voici la traduction sommaire : « Au nom de la sainte et indivisible Trinité, amen. Moi, Louis, roi des Français par la grâce de Dieu. Nous faisons savoir à tous tant présents que futurs pour notre salut et la paix de notre royaume, m'adressant aux archevêques, évêques, et prélats de notre royaume, que nous donnons la garde et la tutelle aux moines de Cluny avec tous les prieurés et les héritages dépendants». Puis le texte énumère les prieurés placés dans l'obédience de Cluny à perpétuité « obedientia abbatis et monasterii Cluniacensis regendam perpetuo, ad requisitionem abbatis et conventus Cluniacensis, et ad precespriorum et monachorum prioratuum Cluniacensium, nomina prioratuum in quibus abbas Cluniacensis habet et exercet supradicta ad suam voluntatem, presentibus litteris inseri fecimus ». Ce sont les prieurés énoncés par les présentes lettres sur lesquels l'abbé de Cluny exerce son autorité. « Sunt autem hec nomina, videlicet : prioratus Beate Marie de Karitate supra Legerim,… prioratus Sancti Martini de Campis Parisiensis ; et alii prioratus qui sequuntur, videlicet … de Longo ponte, prioratus …. ». Sont nommés : le prieuré de Sainte-Marie de la Charité-sur-Loire, le prieuré de Saint-Martin-des-Champs à Paris et les autres prieurés qui suivent, à savoir… le prieuré de Longpont… Le texte, donné par le chancelier Étienne « Data per manum Stephani cancellarii », se termine par la pose du scel royal et les signatures des officiers de la cour « Guillelmo dapifero, Gisleberto buticulario, Hugone constabulario, Guidone camerario », le sénéchal Guillaume, le bouteiller Gilbert, le connétable Hugues, le chambrier Gui.
L'échange avec le chapitre cathédral Deux textes donnés par le Gallia christiana ont été incorporés au cartulaire du prieuré de Saint-Martin-des-Champs (charte DLXIV). Guillaume, prieur de Saint-Martin et de Longpont, fait avec le doyen Hugues Clément et le Chapitre de Notre-Dame de Paris un échange qu'approuve ensuite Hugues V, abbé de Cluny (cf. la chronique " Guillaume de Milly, prieur de Longpont ") Le Gallia christiana nova, VII, 526 concerne les prieurs de Saint-Martin-des-Champs. La date du 1er janvier ou 6 avril 1203 est donnée. « Priores Sancti Martini de Campis. - Guillelmus II. - Num idem Guillelmus qui jam anno 1198 prior Longipontis, cognominatus de Milliaco , anno 1203 tacito cognomine sed prior dictus Sancti Martini et Longipontis , assentiente hujus loci conventu, permutationem fecit cum Hugone decano et capitulo ecclesie Parisiensi, quam Hugo, Cluniacensis abbas, hoc ipso anno approbavit, ex codice ms. Oratorii, quem præ manibus habemus ”. Nous retrouvons le prieur Guillaume de Milly qui, possédant en même temps les bénéfices de Longpont et de Saint-Martin-des-Champs, avait reçu l'approbation du couvent pour faire un échange avec le doyen Hugues et le chapitre de l'église cathédrale de Paris Le Gallia christiana nova, VII, 199 concerne la seconde charte aurait été donnée le 1er janvier ou 25 avril 1204. « Decani Parisienses. - Hugo I Clementis - Commutationem fecit [anno 1203] cum Guillelmo priore Sancti Martini de Campis, pro quibusdam decimis ». L'auteur du cartulaire mentionne dans une note « N'ayant pas retrouvé cet acte, nous n'avons pu vérifier la conjecture du rédacteur de la Gallia christiana. On a de fréquents exemples, au XIIIe siècle, d'un prieur de Saint-Martin dirigeant en même temps un autre monastère ; s'en rencontre-t-il pour un sous-prieur ? Le Guillaume de 1203 peut différer du Guillaume de Milly, de 1198 ». Mais la comparaison des obituaires de Longpont et de Saint-Martin donne l'impression que le premier a emprunté au second de nombreuses mentions, ce qu'expliquerait une administration commune vers le milieu du règne de Philippe-Auguste.
La dot de Gui de Massy Dans la charte LCCCXXXVIII donnée à Longpont en avril 1225, Baudouin, prieur de Saint-Martin-des-Champs et de Longpont, et les moines de Longpont, notifient que leur frère Gui, fils de sire Jean de Massy, chevalier, et de dame Marguerite, a été mis en possession par ses parents de biens consacrés à des œuvres pies, suivant la teneur de lettres de feu Guillaume, évêque de Paris. Le texte identique se retrouve dans la copie du XIIIe siècle du Cartulaire B de Longpont ( Nouv. acq. lat. 932, fol. 35) qui porte le numéro LXXXVI. Le catalogue du XVIIIe siècle (terrier de 1713) porte la mention « Ratification par le prieur de Saint-Martin-des-Champs de la donation faite par Jean de Maciaco et Marguerite, sa femme, de terres, prés, vignes et autres héritages, au couvent de Longpont, à cause de Guy, leur fils, qui y avait pris l'habit de religieux ». Il s'agit bien d'un concordat sur la possession des biens constituant la dot de Gui de Massy. Voici le texte latin : « Ego frater Balduinus, humilis prior Sancti Martini de Campis et Longipontis , totusque ejus Longipontis conventus, omnibus presentem paginam inspecturis, notum facimus quod domnus Johannes de Maciaco, miles, et domna Margareta, uxor ejus, karissimum fratrem nostrum Guidonem, filium suum, de omnibus terris, pratis, vineis et aliis possessionibuis suis elemosinis deputatis, et in litteris bone memorie Guilimini, Parisiensis quondam episcopi , expressius notatis saisiri fecerunt, tali videlicet conditione, quod predictus Guido, quandiu vixerit, possessiones teneat memoratas, et quod ei a predictis J. et M. jussum fuerit, de illis faciat ; et post mortem ipsius Guidonis, et etiam ipso vivente, si, quacumque ex causa, videbitur non possidere omnes predictas possessiones, ad dictos J. et M., vel ad alterum eorum si superstes fuerit, vel ad illos quibus presentes litteras tradiderit, si predicti J. et M. de medio cesserunt, integre et quiete et libere revertentur, pro animabus dicti J. et M. in elemosinis erogande, sine contradictione aliqua ecclesie Longipontis et etiam ecclesie Cluniacensis . In cujus rei confirmationem et testimonium, presentem paginam sigillorum nostrorum auctoritate fecimus roborari. Actum anno gratie M°CC°XX°V°, mense aprili ». Nous en donnons une traduction succincte : « Moi, frère Baudouin, humble prieur de Saint-Martin-des-Champs et de Longpont , et tout le couvent de Longpont, nous faisons savoir à tous ceux que ces lettres verront que notre cher moine, frère Gui, fils du seigneur Jean de Massy, chevalier et de dame Marguerite, sa femme, avait été mis en possession par ses parents de tous les biens consacrés à des œuvres pies, savoir les terres, prés, vignes et autres héritages suivant la teneur de lettres de feu Guillemin , évêque de Paris (4). À la condition que le susdit Gui rappelle qu'il tient, de son vivant ces biens et que les susdits Jean et Marguerite ont le droit féodal de ces choses, et au décès dudit Gui, comme de son vivant, pour une raison quelconque on s'aperçoit qu'il ne possède plus tous les biens susdits, et par une générosité venant de Jean et Marguerite ou de l'un des deux ou de ceux qui transmettront ces présentes lettres ou si les susdits Jean et Marguerite font défaut, ces biens retourneront librement, intégralement et en toute quiétude pour être distribués en aumône pour le salut de l'âme des susdits Jean et Marguerite, sans contestation, par quelque moyen qu'il soit, à l'église de Longpont autant qu'à l'église de Cluny. Pour le témoignage et la confirmation de cette chose, nous mettons notre scel sur le présent acte. Donné l'an de grâce 1225, au mois d'avril ».
La terre de Jean de Boutervilliers En avril 1241, le prieur Evrard, l'archidiacre Etienne, et Ferri-Pasté, chevalier, maréchal de France, décident, comme arbitres, que Jean de Boutervilliers, chevalier, devra mettre en vilenage une terre qu'il a acquise à Pecqueuse, dans la censive du prieur de Longpont, ainsi qu'il en a pris l'engagement envers le prédécesseur de celui-ci (charte MXI). Ce texte latin se retrouve en tant que charte XXVIII du second cartulaire (B) de Longpont. C'est une copie du XIIIe siècle (Nouv. acq. lat., 932, fol. 16). Voici le texte latin : « O. p. l. i. E[vrardus], prior Sancti Martini de Campis Parisiensis , Stephanus, archidiaconus, et Ferricus Pasté, miles, Francie marescallus , salutem in Domino. Noverint universi quod, cum Prior de Longoponte peteret a Johanne de Botervillari milite, quod ipse quandam terram quam emerat apud Piscosiam in censiva ecclesie Longipontis , poneret in manu rusticali, quam dicta ecclesia sufficienter posset justiciare ; et diceret idem Prior quod hoc promiserat idem miles predecessori ipsius Prioris, et ipsi Priori promiserat hoc infra festum Omnium Sanctorum postremum preteritam se facturum ; dictus vero Johannes recognosceret quod hoc re vera promiserat, sed per sufferenciam Prioris, hoc dilatum fuisse asserebat. Tandem in nos compromiserunt dicti Prior et Johannes, promittentes quod, quicquid supra dicta contemtione ( sic ) ordinaremus, observarent. Nos autem, cum per consensum dictarum partium non possemus amicabiliter componere inter ipsos, dicimus dicto militi, per dictum nostrum, quod ipse dictam [terram] poneret extra manum suam, sicut ipse promiserat et dictus Prior pecierat ; hoc eodem et dicimus ei, quod hoc faceret infra festum Penthecostes proximo venturam. Datum anno M°CC° quadragesimo primo, mense aprili » .
Nous en donnons une traduction sommaire : « À tous ceux que ces lettres verront, Evrard, prieur de Saint-Martin des Champs à Paris, Etienne archidiacre et Ferry Pâté chevalier et maréchal de France, au nom du Seigneur, salut. Nous faisons savoir que, récemment, le prieur de Longpont eut un différend avec le chevalier Jean de Boutervilliers, à propos de sa terre de Pecqueuse qu'il a acquise, celle-ci étant détenue comme une roture située dans la censive de l'église de Longpont, dont elle demande l'arbitrage judiciaire. Le prieur déclare que la terre avait été promise par ledit chevalier et le chevalier déclare que ledit prieur avait promis de l'indemniser avant la fête de la Toussaint. En vérité, ledit Jean reconnaît que cette chose avait été engagée et mise en vilenage, mais le prieur maintient pour sa défense de différer le paiement. Tandis que les susdits prieur et Jean s'en remettent à notre jugement, ils promettent d'observer la sentence donnée sur le contentieux susdit. Finalement, puisqu'un accord ne peut être obtenu par devant nous entre les parties pour une possession amicale, nous décidons que le susdit chevalier ne retiendra pas ladite terre dans ses mains, de plus il est promis et ledit prieur est satisfait. Cela sera fait avant la fête de la Pentecôte prochaine. Fait au mois d'avril 1241 »(5). Le prieuré de Longpont avait reçu l'église et le fief de Pecqueuse lors de la donation de Simon Château, seigneur d'Orsay, avec l'approbation de ses frères Pierre et Galeran, au début du XIIe siècle, en présence de Gui Troussel, leur suzerain. La censive comportait quatre arpents pour l'atrium, une charruée de terre arable et un bois pour alimenter le four du village neuf. Au même moment, Pierre Château donna six arpents plus une terre argileuse d'une charruée puis légua, pour le repos de l'âme de sa femme Tebeline et celle de tous ses ancêtres, une parcelle de terre, depuis le mur des moines jusqu'à la voie publique ; un arpent de pré situé à Pecqueuse, trois arpents de terre à côté de l'atrium de l'église. Pierre lui-même était présent quand l'arpentage fut effectué et toucha de ses mains, les bornes qui furent plantées. Le tout étant dans la mouvance de Milon II de Montlhéry. À suivre…
Notes (1) J. Depoin, Recueil de Chartes et documents de Saint-Martin-des-Champs, monastère parisien (Jouve et Cie, éds, Paris, 1912). (2) La lettre "P" ne doit pas être prise pour l'initiale du nom de l'abbé de Cluny. C'était alors Hugues VI, qui siégeait encore en 1245 et fut remplacé, cette année-là, par Guillaume III de Pontoise ( Gallia, IV, 1147). (3) Égly (com. de l'Essonne, cant. Arpajon, arr. Palaiseau). Boissy-sous-Saint-Yon, (com. de l'Essonne, cant. Saint-Chéron, arr. Étampes). D'après la chronologie de Jules Marion, le prieur Jean 1er de Longpont s'intercale entre Landri (1136) et Macaire (1141). Pierre 1er était indubitablement prieur de Longpont en 1142. (4) Ce diminutif familier désigne Guillaume II de Seignelay, mort à Saint-Cloud, en novembre 1223. (5) Boutervilliers (cant. Etampes). Pecqueuse (cant. Limours, arr. Palaiseau). Le prieur Macaire était le neveu du cardinal-évêque Albéric d'Ostie (ancien moine de Cluny nommé par Eugène III) selon le chanoine Arthaud, mérita par sa piété d'être fait abbé de Morienval, au diocèse de Soissons et ensuite abbé de Saint-Benoît-sur-Loire au diocèse d'Orléans.
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