Le prieuré Notre-Dame de Longpont
XXV. Les chartes relatives à Viry (1)
Cette chronique est le vingt-cinquième volet de la série des textes qui présentent les chartes du prieuré Notre-Dame de Longpont « ecclesia sancte Marie de Longo Ponte » dont certaines sont inédites (1). Il s'agit d'actes relatifs à Viry (ch.-l. cant., Essonne), paroisse dans laquelle les religieux de Longpont partageaient des droits dîmiers avec les chanoines du Chapitre Notre-Dame de Paris . Avant de présenter les chartes propres au prieuré de Longpont, nous évoquons le prélèvement des dîmes prélevées sur le territoire de Viry par l'église cathédrale de Paris (2).
C.Julien Janvier 2013
L'église prieurale de Longpont (gravure, 1817).
À l'époque gallo-romaine, sur l'emplacement de Viry existait une villa « Veriacum » (3). Pour Hippolyte Cocheris, le toponyme de Viry est formé du nom d'un homme Verus , l'un de ceux qui l'habitèrent. Ce nom était commun chez les Romains. Au travers des siècles, Veriacum , Viriacum où le suffixe « iacum » désigne un lieu ou un domaine, est devenu Viry (4). Enfin, notons que Jules Marion, auteur du Cartulaire de Longpont, marque Ouriacum comme étant une mauvaise leçon de Viriacum . Bien avant le Xe siècle, le village faisait partie du temporel du Chapitre de l'église Notre-Dame de Paris. Les chanoines possédaient un domaine agricole où plusieurs hostises étaient placées sous la direction d'un prévôt. Ce n'est qu'au XIIe siècle que Viry entre dans l'histoire et c'est encore une fois les cartulaires des maisons religieuses, dont le prieuré de Longpont, qui nous donnent l'antiquité des lieux. Nous trouvons les célèbres familles qui en possédèrent successivement la seigneurie et les fiefs qui en relevaient.
Selon le pouillé du XVIe siècle publié par Benjamin Guérard « poulier des bénéfices du diocèse de Paris », dans la cure de Viry « cura Viriacum » dans l'archidiaconé de Josas, doyenné de Montlhéry « in archidiaconatu de Josayo, decanatus Montis Lehici », est à la collation du seigneur évêque. Le pouillé du XVIIIe siècle donne les mêmes indications, Viry, paroisse fut érigée en l'honneur de saint Denis au XIIe siècle et la cure est à la présentation de l'archevêque.
Les grandes maisons monastiques possédaient toutes sortes de biens temporels, allant à de grands domaines, seigneuries, fiefs, censives, églises avec tous ses droits, rentes, terres, bois, prés, etc. Ainsi nous trouvons l'église cathédrale et le Chapitre Notre-Dame de Paris en divers villages du Hurepoix (Châtenay, Wissous, Viry-Châtillon, La Norville, ), l'abbaye Saint-Magloire (Ris-Orangis, Morsang, Sainte-Geneviève-des-Bois, Briis-sous-Forges, Vaugrigneuse), le prieuré de Longpont qui formait un groupement régional clunisien, l'abbaye Saint-Victor (Athis, Ablon, …), l'abbaye des Vaux-de-Cernay (Athis, Montlhéry,…), Saint-Florent-les-Saumur (Gometz-la-Ville, l'abbaye de Marmoutiers, l'Hôtel-Dieu de Paris (Montlhéry, Champlan,…) et bien évidemment les deux grandes abbayes parisiennes de Saint-Denis et Saint-Germain-des-Près.
Selon l'instituteur Mr. Léon Deprun « L'Orge finissait autrefois, paraît-il à Châtillon, mais au XVIe siècle des seigneurs d'Athis et les moines de Juvisy en détournèrent le cours et le prolongèrent vers Mons. Il n'existe aujourd'hui qu'un bras de la rivière d'Orge qui reçoit au moyen d'un déversoir l'excédent d'eau de celle-ci. Aussi ce bras est-il presque toujours à sec. Autrefois l'eau qui coulait dans ce bras devait être plus importante car un moulin était établi au pont d'Antin en aval du pont Godot, mais il ne devait, d'après les titres, que profiter du surplus des eux provenant de l'Orge ».
Viry-Châtillon est traversé par deux routes dont la construction remonte à la plus haute antiquité. La commune se trouve à la jonction de la route nationale n°7, voie de Lutèce à Antipolis (Antibes) et la route de Lutèce à Melun « Melodunum ». De Juvisy, la voie ancienne côtoyait la Seine, elle passait à proximité de Châtillon où l'on trouve les lieux-dits le « Grand Chastillon » et le « Petit Chastillon », à Viry où un fief portait autrefois le nom de la Marche ou les Marches, « marca », limite ou passage.
La révolte des serfs de Viry
Dans le cartulaire de l'église cathédrale de Notre-Dame de Paris, une charte de 1067 relate la révolte des serfs de Viry contre les chanoines du Chapitre « De servis Viriaci insurgentibus contra canonicos Parisienses ». Cette charte est l'un des rares textes qui relate la triste condition des serfs au XIe siècle. Voici le texte latin : « Venerabilis priorum patrum non minimum laudanda est vita, eorumque non minus glorifianda est intentio, quorum fide ac illustri devotione, ebus omnibus, juxta reverentiam , quibuscumque ad Dei honorem potuere, sacratissime sunt constitute ecclesie, primum in honore Salvatoris nostri, cujus justitia eorum fides benigna crevit intentione ; postremo, in honore sanctissime genitricis ejus virginis Marie, apostolorum scilicet et martyrum, confessorum et virginum, ut rebus ipsis prius secularibus, modo ecclesiasticis, fraterna ordinum congregatio construeretur, que religiose constructa et ecclesiastice sedi devota, canonica et sollerti ageretur cura. Quibus viventibus, quanta potuere cura exaltata est ecclesia ; defuntis, rebus ipsis est expoliata, quoniam insurrexere filii, non tante intentionis quante patres erga eam, et, pejoribus adhuc supervenientibus, minorata est paternis rebus ecclesia. Quapropter, hec prenotavimus, quoniam qancta Dei genirix virgo Maria, in cujus honore hec Parisiace sedis ecclesia est constructa, non patiens fideles suos tantis amplius effligere tribulationibus, hec pro sancta ecclesia sua operata est miracila, que inferius manifestantur. Anno incarnationis Domini millesimo sexagesimo septimo, regnante Philippo, Francorum rege , vivente Goisfredo, Parisiorum episcopo, viventibus Odone dacano et Radulfo preposito, vivente etiam Herberto, Vermandensium comite, et Vuacelino, Viriaci Advocato, servi Viriaci , insurgentes erga prepositum et cananicos Sante Maris, denegaverunt non debere quod antecessoribus suis manifestum est persolvere, scilicet custodiam nocturnalem, preterea quod, sine licentia prepositi et canonicorum, quas vellent ducerent uxores. Quorum contradicto nos ad placitum quoddam excitavit, per quod dissererent se licential non debere expectare a preposito et canonicis. Hanc eis rem secundum rationem adnichilare putantibus, meritis sacratissime Dei genitricis Maris ita eorum lingua confusa est, quod ea, que putavere proferre ad adjutorium utilitatis eorum, conversa sunt ad ipsorum supplicium et ad nostre utilitatis gaudium. Quibus ita confusis, juricantibus cabinis per legem, porrigentibus decano Odoni sinistram cirothegam, reddiderunt custodiam ; per dextram vero alias reliquere feminas, ita ut sine licentia prepositi et canonicorum non amplius ducerent » (5).
Le scribe passe la moitié de la charte à louer l'Eglise qui est préoccupée par le bonheur de ceux qui vivent dans le Seigneur « quibus viventibus, quanta potuere cura exaltata est ecclesia » et prie pour le repos des défunts dans l'Insurrection du fils de Dieu « defunctis, rebus ipsis est expoliata ». L'an de l'Incarnation du Seigneur 1067, sous le règne de Philippe roi des Francs, du vivant de Godefroid, évêque de Paris, du vivant d'Eudes, doyen, et de Raoul, prévôt, du vivant également de Herbert, comte de Vermandois, de Wacellin avoué de Viry « Vuacelino, Viriaci advocato », les serfs de Viry se révoltant contre le prévôt et les chanoines de Sainte-Marie « servi Viriaci insurgentes erga prepositum et canonicos Sancte Marie », affirmèrent ne pas devoir ce dont leurs ancêtres se sont manifestement acquittés, à savoir la garde de nuit « custodiam nocturnalem », et pouvoir en outre, sans l'autorisation du prévôt et les chanoines, épouser les femmes qu'ils voulaient « quas vellent ducerent uxores ». Leur opposition nous conduisit à participer à un plaid, où ils démontreraient qu'ils n'avaient pas à attendre l'autorisation des prévôts et des chanoines. Mais comme ils pensaient, par leurs raisonnements, réduire cette coutume à néant, par les mérites de Marie la très sainte Mère de Dieu, leur langue s'embrouilla si bien que ce qu'ils avançaient pensant faire progresser leurs affaires, se retourna pour les accabler et donner pleine satisfaction aux nôtres. Ainsi confondus, sur un jugement des échevins rendu conformément à la loi, ils nous restituèrent le droit de garde en remettant au doyen Eudes le gant gauche. Par le droit, ils abandonnèrent la revendication sur les femmes étrangères : désormais ils ne les épouseraient pas sans autorisation du prévôt et des chanoines.
Les seigneurs de Viry
Au XIIe siècle vivait Vulgrain de Viry qui occupa le premier la seigneurie de Viry. La charte CLXXX du cartulaire de Longpont le nomme au nombre des clients des seigneurs de Châtillon (*). Un castel, élevé au commencement de la féodalité, dominait en cet endroit la rive gauche de la Seine et faisait partie de tout un système de fortifications destiné dans la pensée des seigneurs de Corbeil à rendre plus difficile l'attaque de cette ville. Ainsi la seigneurie de Viry était dans la mouvance du comte de Corbeil.
Joscelin de Chastillon, l'un des seigneurs de ce hameau, fut témoin vers l'an 1100 avec Guillaume le Normand, Robert de Draveil et Sultan, fils de Girard de Gastinel, d'une donation faite aux moines de Longpont par Galéran, fils de Vivien et de sa ratification par Gaufrède d'Yères et Ada son épouse. Frédéric de Chastillon, probablement le frère de Joscelin, entreprenait, quelques années plus tard, un pèlerinage en Terre Sainte, sans attendre la seconde croisade qui ne devait avoir lieu que trente ans plus tard. Mais, il n'était pas encore arrivé au terme de son voyage qu'il demanda à Comtesse sa femme, de céder au monastère de Longpont pour le repos de son âme, une partie de ses domaines. Pour condescendre à son désir, celle-ci se démit en faveur des moines de Longpont d'une rente que lui devaient des hôtes établis à Bondoufle et tout le bois mort dont pouvait avoir besoin la communauté monastique qui y habitait. Eustachie de Corbeil sa fille, veuve de Baudouin de Beauvais consentit volontiers à cette donation. C'est Eustachie de Corbeil, fille de Frédéric de Chastillon qui fonda la célèbre abbaye d'Yerres au diocèse de Paris et la gratifia d'importantes donations. Eustachie devait sa puissante fortune à ses alliances avec les maisons d'Étampes et de Corbeil. En effet, l' abbaye Notre-Dame d'Yerres fut fondée grâce au don de quatre arpents de terre d'Eustachie de Corbeil, fille de Ferry de Châtillon, épouse de Baudouin de Corbeil, puis de Jean d'Étampes, bâtie entre 1124 et 1132, sous l'épiscopat d'Etienne de Senlis, le couvent avait pour vocation d'accueillir les religieuses en transit de maison en maison, "errantes loin de leurs maisons".
Dans le cartulaire de Longpont nous relevons, outre Vulgrain de Viry, les noms de plusieurs familles de Viry, les Gastinel, les Cocherel, aux XIIe et XIIIe siècles, Girold et Aveline sa femme, Eudes et Hugues et une fille nommée Emeline leurs enfants. Eudes de Viry hérita des biens que ses parents possédaient à Viry et à Morçang-sur-Orge. Et il fit présent de cet alleu au monastère de Longpont. Landry de Viry qui avait épousé Eremburge, fille d'Eudes, après avoir contesté la donation d'Eudes et finit par l'approuver. Soltène de Viry et Aston de Viry se trouvent dans deux chartes du XIIIe siècle, l'un comme signataire d'une convention intervenue entre les moines de Sainte-Marie et Foulques de Liers, le second comme hôte de Guillaume de Massy.
Gautier Tyrel, le beau-frère d'Isambard d'Etampes, petit-fils d'Eustachie de Corbeil détint un moment une partie des dîmes de Viry, mais ajoute l'abbé Lebeuf, il se fit scrupule de les garder, lors de son départ pour Jérusalem, aussi avant de prendre la mer, il abandonna ce qu'il en avait engagé à Thierry de Paris, abandon que confirmèrent, vers 1140, Thomas, abbé de Morigny et Jean, prieur de Longpont.
Bouchard de Cocherel, et Holdearde son épouse, Thibaud leur fils vendit à Maurice de Sully, évêque de Paris, moyennant la somme de 27 livres tout ce qu'il possédait à Viry et qui était enclavé dans le fief que les évêques de Paris possédaient déjà dans cette paroisse. Simon de Genillac et Robert de Genillac vendirent au monastère de Longchamp récemment fondé pour la somme de 355 livres parisis, la moitié de la seigneurie de Viry ainsi que le domaine qu'ils y possédaient.
Marguerite de Viry avait des biens à Saint-Cloud. Au 30 mars 1276, messire Pierre de Villeneuve, chevalier, rendit hommage entre les mains d'Estienne, évêque de Paris des biens qu'il possédait à Saint-Cloud et aux environs et qui venaient de Marguerite son épouse, fille de Mathieu de Viry. Renaud de Viry est mentionné comme un des conseillers de l'abbé Pierre de Chevry, abbé de Saint-Maur dans une sentence criminelle dont le cartulaire de Saint-Maur nous a laissé le mémoire.
Les personnages de Viry au XIIIe siècle
Au mois d'octobre 1235, une sentence est rendue par trois juges, Jean dit Teuton abbé de Saint-Victor, Hugues Clemens chanoine de Notre-Dame de Paris et Michel doyen de Saint-Marcel à propos du différend entre Philippe le Marguillier chanoine de Paris et le Mathieu curé de Viry « litigium esset inter Philippum Matricularium, canonicum Parisiensem, ex una parte, et Matheum, presbyterum de Viriaco, ex alia » pour la possession d'une masure à Ivry « super mestiva masure dicti Philippi, site apud Ivriacum ». (Charte LI du Liber secundus , Viriacum propre Gevesiacum, Fraxine, Leudevilla, Lanorvilla, Villa Cereris, etc.).
Au mois de mars 1245, l'official de la Curie parisienne donne des lettres de confirmation de la donation par le chevalier Gazon de Viry et Eremburge sa femme « Gazo de Viriaco, miles, et Eremburgis, ejus uxor » de la place empierrée à l'extérieur de la grange de Viry qui était la propriété de l'Église de Paris. La place sera tenue à perpétuité en ce lieu et pour que nul ne puisse contester cet acte, quatre livres parisis sont reçues en monnaie. Le chevalier Aubert de Nageville « Aubertus vero de Nagevilla, miles » de qui cette terre est dans la mouvance et son frère Robert de Nageville, chevalier également, acceptent et approuvent cette donation en garantissant toute contestation dans l'avenir. (Charte LXX du Liber secundus ). Gazon de Viry était conseiller de l'Église de Paris « Parisiensis ecclesiæ succentori ». Le 30 novembre 1279, le jour de la fête de saint Nicolas d'hiver « festum beati Nycholai hyemalis », Guillaume, doyen d'Orly et Marie sa femme et Jean, leur fils, vendent au seigneur Gazon, conseiller, huit arpents et un demi quartier de terre arable situés à Orly moyennant la somme de 32 livres et 10 sols parisis.
En décembre 1275, le doyen du Chapitre parisien donne des lettres rapportant qu'un arrangement est fait avec Gazon de Viry, conseiller de l'église de Paris et Dom Étienne de Blesis, chanoine de Paris qui se plaignent du loyer excessif payé annuellement pour leur logement dans la maison claustrale, à savoir 9 livres parisis pour Gazon et 7 livres pour Étienne. (Charte CXXIII, liber vigesimus).
Les dîmes novales
Au début du XIIIe siècle, nous assistons à la création de dîmes novales à Viry . Selon le droit coutumier, les dîmes novales étaient prélevées sur les nouveaux fruits. Il y a dîme novale pour les terres récemment défrichées depuis moins de 40 ans et portant récolte, ou quand sur une même terre on passe de fruits non décimables à des fruits décimables. Lorsque les cultures cessent, la dîme cesse.
En mars 1209, Pierre II de Nemours donne des lettres de confirmation pour le règlement d'un conflit entre le chevalier Bouchard Cocherel, sa femme Elisabeth et les chanoines de Paris. Il s'agit de la dîme novale dans la grange de Viry . Voici brièvement la traduction de cette charte en langue latine. « À tous ceux, que ces présentes lettres, verront, moi, Pierre, évêque de Paris par la grâce de Dieu, salut au nom du Seigneur. Nous faisons savoir qu'entre nos doyen Hugues et le Chapitre de Notre-Dame de Paris, d'une part, et Bouchard Cocherel, chevalier et Elizabeth sa femme, d'autre part un contentieux s'était élevé à propos de la dîme novale sur le bois que ledit Bouchard et Elisabeth sa femme ont arraché dans le canton dîmier de l'église Notre-Dame de Paris. En notre présence il a été convenu avec regret que toute la dîme novale de la terre défrichée sera intégrée à la dîme de l'église Notre-Dame. Et pour témoigner de la fermeté des présentes lettres et conforter cet acte, nous apposons notre scel. Donné à Paris, l'an de grâce MCC°VIII, au mois de mars ». (Charte LXV, Grand Pastoral).
L'année suivante en avril 1210, les lettres de Pierre de Nemours, évêque de Paris confirment le concordat avec Hugues de Lais et Robert de Maincourt à propos des novales de Viry. La charte LXVI porte le titre « De contentione super quibusdam novalibus que Hugo de Lais et Robertus de Media Curia, presbiteri , se habere dicebant ». Voici le texte de cet acte en latin : « Petrus, Dei gracia Parisiensis episcopus, omnibus presentes litteras inspecturis, salutem in Domino. Universitati vestre notum facimus quod, cum inter dilectos nostros decanum et capitulum Parisiense et presbiterum de Viriaco, ex una parte, et inter Hugonem, presbiterum de Lais, et Robertum, capellanum de Media Curia, ex alia, coram nobis contentio verteretur, super quibusdam novalibus, que dicti Hugo et Robertus de dono nobilis viri quondam domini Caprasii se habere dicebant; nos, bonorum virorum communicato consilio, cum ipsorum novalium donacio sine dispositione diocesani episcopi facta fuisset, in cujus ordinacione novalia esse noscuntur, pronunciavimus dictos Hugonem, presbilerum de Lais, et Robertum, capellanum de Media Curia, in ipsis novalibis nichil juris habere; eadem ecclesie Parisiensi et presbitero de Viriaco , presenlibus dictis presbiteris et non contradicentibus, adjudicantes. Gilibertus vero, presbiter de Longo Ponte, novalia quatuor arpennorum terre que tenebat, dicte Parisiensi ecclesie et presbitero de Viriaco, coram nobis, resignavit in perpetuum et quitavit. In cujus rei memoriam, has litteras fieri fecimus et sigilli nostri testimonio communiri. Actum anno Domini MCC° decimo, mense aprili » .
Voici une traduction sommaire : « Pierre, par la grâce de Dieu, évêque de Paris à tous ceux présents et futurs, salut en notre Seigneur. Que chacun sache qu'entre nos révérends doyen, les chanoines de Paris et le curé de Viry, d'une part, et Hugues curé de Laye et Robert chapelain de Maincourt, d'autre part, un accord est intervenu avec lesdits Hugues et Robert pour les novales qui nous avait été par le seigneur de Chevreuse. Le concordat fut établi entre personnes de bonne volonté pour les novales soient mises à la disposition de la Curie diocésaine ajoutant que lesdits Hugues curé de Laye, Robert chapelain de Maincourt ne peuvent pas les posséder. Aussi, Gilbert curé de Longpont qui détenait quatre arpents de novales, les quitte et les abandonne au profit de l'Eglise de Paris et du curé de Viry. Pour affirmer ces lettres, nous apposons notre scel épiscopal. Fait en l'an de Grâce 1210 ».
L'obituaire de l'Église de Paris
L'obituaire de Notre-Dame de Paris « obituarium ecclesiæ Parisiensis » renferme les noms de plusieurs défunts qui fondèrent des prières dont l'assiette est constituée par des fiefs ou des droits seigneuriaux à Viry. Pour la plupart, les obits sont constitués par des parts de dîmes possédés par des prélats de l'Église de Paris.
XVIII kalendes de février « Ipso die, de domo Sancte Marie, obiit Guillelmus de Annuello, diaconus qui dedit nobis quadraginta libras Parisienses, ad emendos redditus, implicatas in emptione decime de Viriaco ». Le diacre Guillaume d'Aunoy donne 40 livres parisis à prendre sur la dîme de Viry.
VIII des calendes d'avril « De domo Sancte Marie, obiit Herveus, decanus et sacerdos qui dedit nobis prata apud Viri, que acquisivit, ad stationem quatuor ferculorum, in qua participes sunt canonici sancti Dyonisii de Passu nobiscum ». Le 25 mars 1192, Hervé doyen et curé donna un pré situé à Viry pour la fondation d'un obit pour célébrer son anniversaire par les chanoines de Saint-Denis de Passy. V des Ides d'avril « Ipso die, obierunt Petrus de Challi et Eremburgis, uxor ejus. De quibus triginta libris, vinginti libre posite fuerunt in emptione decime de Viri, et decem in pignoratione decime de Fontaneto ». Pierre de Chailly et sa femme Eremburge donnent «30 livres parisis à prendre sur la dîme de Fontenay-le-Vicomte « Fontanetum, in decanatu de Linais » pour fonder un obit.
X des calendes de mai. « Eodem die, obiit Guillelmus, nepos domini Mauricii, Parisiensis episcopi, concanonicus noster, qui dedit qudraginta libras Parisienis monet ecclesia nostre, ad emendos redditus… De predictis autem quadraginta lmibris, posite sunt in emptione decime de Viri viginti libre, et sexdecim libre in pignoratione decime de Villa Nova… ». Vers 1225, le chanoine Guillaume, neveu de Maurice, évêque de Paris, donna à l'église Notre-Dame, une somme de 40 livres parisis en argent qui sont 20 livres de la dîme de Viry, 16 livres de la dîme de Villeneuve et 4 livres de cens à prendre à Andrésy.
VII des calendes de mai (25 avril). « De domo Sancte Marie, obiit Petrus Heremita, diaconus, pro cujus anima concessimus, ad stacionem quatuor ferculorum, terciam partem avene quam habemus de novalibus apud Viriacum, pro labore et expensis quas fecit in acquisitione istorum reddituum ». Pierre Heremite légua la tierce partie d'avoine à prendre sur la novale de Viry pour fondation d'un obit à célébrer à Saint-Denis de Passy. V des nones de mai « De domo Sancte Marie, obiit Matheus de Belvaco, concanonicus noster … pretera dedit quadraginta libras Parisiensium, positas in emptione decime de Viri ». Vers 1200, le chanoine Mathieu de Beauvais fonda un obit à l'église Notre-Dame en donnant 40 livres parisis à prendre sur la dîme de Viry
X des calendes de septembre « Obiit Richardus et Ligardis, uxor ejus, pro quorum animabus et sua, Ebrardus, presbiter de Liricanto, filius eorum, dedit nobis octoginta libras : primo sexaginta libras positas in emptione decime de Viriaco… ». (23 août) Richard et Ligarde, sa femme, fondent un obit pour le salut de leur âme et celui de leur fils Ebrard, curé de Larchant (arr. de Fontainebleau) en donnant 80 livres dont 60 à prendre sur la dîme de Viry
Le 1er septembre. « Obierunt pater et mater Petri de Boissiaco, ecclesie Baiocensis archidiaconi et concanonici nostri…qua concessione facta, idem Petrus, pro remedio anime sue et predictorum parentum, amicorum et benefactorum suorum, dedit nobis centum libras Parisiensium, quas popsuimus in emptione quam fecimus apud Viriacum, in terris, patris et aliis bonis temporalibus, que defunctus Herbertus de Restel, quondam concanonicus noster, emerat et possederat in vita sua, in dicta villa de Viriaco… ». Pierre de Boissy-Saint-Léger, archidiacre et chanoine, fonde un obit pour l'anniversaire de ses parentsen donnant 100 livres parisis à prendre à Viry, tant en terre, prés et autres biens temporels que le défunt chanoine Herbert de Restel possédait de son vivant dans le village de Viry. Le même jour que l'anniversaire du pape Clément VI, le XIV des calendes d'octobre (18 septembre) « … obitus Hudrici et Osanne, pro quorum animabus, magister Haymo, filius eorum, ad eorumdem anniversarium faciendum, dedit nobis sexaginta libras Parisiensium, positas in emptoione decime de Viriaco… ». Hudrici et Osanne donnent 60 livres parisis à prendre sur la dîme de Viry pour l'anniversaire de leur fils maître Haymon.
V des calendes d'octobre (27 septembre). « De domo Sancte Marie, obiit Hugo de Viriaco, capellanus et concanonicus noster. Qui instituit in ecclesia Parisiensi quandam capellaniam, valore duodecim librarum Parisiensium, percipendarum annis singulis a magistro et fratribus domus Dei Parisiensis… ». Hugues de Viry, chapelain et chanoine de Notre-Dame de Paris fonde un obit de 12 livres parisis à percevoir chaque année des maître et frères de l'Hôtel-Dieu de Paris. XII des calendes d'octobre (20 septembre). « De domo Sancte Marie, obiit magister Odo de Chantelupo, qui dedit nobis quadraginta libras Parisiensium, positas in emptione decime de Viriaco ». Eudes de Chanteloup fonde un obit en donnant 40 livres parisis à prendre sur la dîme de Viry.
XV des calendes de novembre (18 octobre). « Obierunt pater et mater domini Richardi de Viri, canonici Sancti Dyonisii de Passu, pro quorum animabus et sua et domini Guillelmi, fratris sui, et bebefactorum suorum, idem Richardus dedit nobis quadraginta libras Parisiensium, positas in emptione decime de Longemello ». Pour la célébration de l'anniversaire des père et mère de Richard de Viry, chanoine de Saint-Denis de Passy et pour le salut de son âme et de celui du seigneur Guillaume, son frère, Richard fonda un obit en donnant 40 livres parisis à prendre sur la dîme de Longjumeau.
VI des calendes de novembre (27 octobre). « De domo Sancte Marie, obiit Odo de Viriaco, sacerdos, pro cujus anima, Theobaldus, nepos ipsius, dedit nobis quadraginta libras Parisiensium, positas in pignoratione decime de Fonteneto ». Un obit fondé par le prêtre Eudes de Viry pour le repos de son âme et celle de Thibaud son neveu moyennant 40 livres à prendre sur la dîme de Fontenay. Il s'agirait de la dîme de Fontenay-le-Vicomte « Fontanetum, in decanatu de Linais ».
La famille Cocherel
Dans le Livre Second du Cartulaire de l'église Notre-Dame de Paris ( Liber secundus ), nous trouvons plusieurs personnages, dont la famille seigneurs de Viry qui vivaient au XIIIe siècle.
En l'an 1206, Eudes, évêque de Paris apposant son sceau sur les lettres de confirmation, annonce que le chapitre possédait les hôtes vendus par Bouchard de Viry , à savoir Renaud fils de feu Ferry, Robert son frère, Aubert Russel et Étienne Chabridaux. Renaud détient quatre arpents et un quartier de terre, sa masure et un alleu à Letro, et deux arpents et un quartier de terre au lieu-dit la Couture. Aubert Russel détient un arpent avec sa masure. Étienne Chabridaux détient trois arpents et demi de terre avec sa masure et un arpent de vigne. Robert, frère de Renaud détient quatre arpents au lieu-dit Foveau, deux arpents et demi qui sont au dessus du village, contigus à l'arpent de Gaudric, et de la vigne de Palnel, et un arpent avec sa masure, plus un arpent de terre sous Broce. Ces hostises ont été cédées par ledit Bouchard à l'église de Paris moyennant le pris de cent sols parisis. Les redevances sont les suivantes. Renaud paye annuellement 4 deniers de cens pour sa masure voisine de la grange aux dîmes de Viry et 8 deniers de cens pour les terres. Robert doit 5 sols de cens à raison de 6 deniers par arpent tant de terre que de vigne. Aubert Roussel doit 5 sols de cens à raison de 12 deniers par arpent de terre et 4 sols pour sa masure. Étienne Chabridaux doit 4 sols de cens. Les dites redevances sont payables à la grange de Sainte-Marie de Viry le jour de la Saint-Denis d'octobre. Le vendeur et sa femme Elizabeth quittent et garantissent lesdits héritages dont le chevalier Ferry de Cramuel est le premier seigneur. Aussi, Thibaud Cocherel, père dudit Bouchard et Baudouin, Milon et Geofrroy ses frères qui possédaient une portion de ces hostises les abandonnent en présence de l'évêque (Charte LXIX du Liber secundus ).
La charte LXV ( Liber secundus ) datée de mars 1209 se rapporte au concordat relatif à la dîme novale du bois de Bouchard Cocherel « Bochardi Cocherelli ». « Petrus, Dei gracia Parisiensis episcopus, omnibus presentes litteras inspecturis, salutem in Domino. Notum facimus quod, cum inter dilectos nostros Hugonem decanum et capitulum Beate Marie Parisiensis, ex una parte, et Bochardum Cocherelli militem et Elizabetli, uxorem ejus, ex alia, contencio verteretur super decima novalium nemoris ipsius Bochardi et E. uxoris ejus , quod ipsi in decimacione Beate Marie Parisiensis de Viriaco fecerant extirpari, et erat processu temporis extirpandum; tandem prefati Bochardus et uxor ejus, in nostra presencia constituti , decimam omnium novalium , que tune fuerant extirpata, et erant eciam in posterum extirpanda, ecclesie Beate Marie Parisiensis integre quitaverunt; et fidem in manu nostra corporaliter prestiterunt quod, si aliquis de cetero ecclesiam Beate Marie super hiis molestaret, auxilium suum et consilium inpertiri memorate ecclesie tenerentur, et ipsam decimam defendere bona fide. In cujus rei memoriam et testimonium, has litteras, ad peticionem parcium, conscribi fecimus et sigilli nostri munimine roborari. Actum Parisius, anno Gracie MCC° octavo, mense marcio ».
Voici une traduction sommaire « Pierre, par la grâce de Dieu, évêque de Paris, à tous ceux que ces lettres verront, salut au nom du Seigneur. Nous faisons savoir qu'entre notre affectionné doyen Hugues et le chapitre de Notre-Dame de Paris, d'une part, le chevalier Bouchard Cocherel et sa femme Elisabeth, d'autre part, un concordat est établi à propos de la dîme novale sur le bois de Bouchard et d'Elisabeth sa femme, que l'Église de Paris a fait défriché et continuera de défricher. A la fin, en notre présence lesdits Bouchard et sa femme accepte toute la dîme novale tant celle qui existe que celle qui viendra à l'avenir, qui sera intégralement payée à l'Église de Paris. Pour que cette chose soit retenue comme en témoigne ces lettres et préserver cette sentence nous apposons notre scel. Donné à Paris, l'an de grâce 1208, au mois de mars ».
En juin 1220, Étienne archidiacre de l'église de Paris donne des lettres où il fait savoir que, devant lui, s'est présenté Renaud, fils de Bouchard, chevalier de Viry accepte, consent et quitte de ses mains les quatre hostises et leurs dépendances situées à Viry « quator hostisias cum appendiciis » qui avaient été vendu à l'Église de Paris, par son père pour la somme de 100 sols parisis en monnaie payée par le Chapitre. Ces hostises sont tenues par Renaud fils de Ferry, Robert son frère, Albert Rufus et Étienne Cabridel. Le seigneur suzerain Adam de Cramoel de qui les biens étaient dans la mouvance, accepte le transport des hostises et de leurs dépendances et en garantit la possession par le Chapitre. Les plèges de ce délaissement sont Simon de Bosco, chevalier, Baudoin Cocherel « Baldoinus Chocherel » et Milon son père (charte LXVIII du Liber secundus ) (6).
En octobre 1214, un concordat est passé entre Philippe Marguillier et le curé de Viry. Jean 1er dit Teutonicus, abbé de saint Victor et Hugues Clemens doyen de l'église de Paris et Michael doyen de Saint-Marcel sont les arbitres pour le litige qui existe entre Philippe Marguillier, chanoine de Notre-Dame, d'une part, et Mathieu, curé de Viry, à propos d'une hostise que ledit Philippe possède à Ivry « Yvriacum ». La sentence est donnée par laquelle la masure restera dans les main de Philippe sa vie durant (charte LI du Libus Secundus).
En juin 1209, Pierre, évêque de Paris, annonce qu'une nouvelle chicane naît à propos des dîmes novales sur la terre de Viry entre le chapitre de l'église cathédrale et dame Emeline de Genouilly « dominam Emelinam de Genolliaco ». Sur l'insistance de l'évêque la dame abandonne spontanément ses prétentions au profit des chanoines de Notre-Dame de Paris (Charte LXVII du Liber secundus). Après quelques discussion, la dame accepte de donner la dîme pour obtenir les prières des chanoines de Paris. En notre présence elle se défait spontanément des dîmes ovales constituées sur sa terre de Viry « in presencia nostra, quitavit, et se in manu nostra de ipsis decimis spontanea devestivit » , nous dit l'évêque, qui, afin d'affermir et d'authentifier l'accord appose son sceau au bas des lettres.
À suivre…
Notes
(*) Une chronique spécifique sera consacrée à Châtillon.
(1) J. Marion, Le Cartulaire du Prieuré de Notre Dame de Longpont de l'ordre de Cluny au diocèse de Paris (Impr. Perrin et Marinet, Lyon, 1879).
(2) Rappelons que c'est au VIe siècle que le caractère obligatoire de la dîme est mentionné pour la première fois. Le deuxième concile de Mâcon, tenu en l'an 585, menace d'excommunication les fidèles qui refusent de verser les dîmes. La législation capitulaire des Carolingiens transforme cette obligation religieuse en obligation civile ; l'État intervient, au besoin par la contrainte, pour imposer le versement des dîmes dues à l'Église. (c.f. M.-C. Perrin).
(3) Il ne faut pas confondre Viry-Châtillon avec Viry-en-Vermandois « Viriacum in Viromandia », diocèse de Laon où l'évêque et le chapitre de Paris possédaient un domaine.
(4) H. Cocheris, Dictionnaire des anciens noms des communes de Seine-et-Oise (Versailles 1874).
(5) B. Guérard, Cartulaire de Notre-Dame de Paris , t. 3 (Impr. De Crapelet, Paris, 1850) pp.354-355.
(6) Voir la chronique suivante consacrée à la famille Cocherel.