Breuillet sous la Révolution (2) (1792-1793)
Cette chronique est le deuxième volet de l'histoire du village de Breuillet pendant la Révolution. Nous reproduisons, dans l'esprit et la lettre, les procès-verbaux des réunions du conseil général, alias conseil municipal.
C.Julien septembre 2013.
Les femmes de Breuillet
Les femmes de Breuillet, on peut en juger par ce qui précède, et nous aurons encore l'occasion de le constater, n'étaient pas d'un commerce facile. Elles n'avaient aucun respect pour l'autorité. C'était tout au moins le cas de la cabaretière Duperray chez qui vint verbaliser le procureur Charles Le Roy, le 6 janvier 1792 « jour de fête de l'Epiphanie. Ledit procureur trouve chez la délinquante plusieurs personnes de la paroisse à boire, qui est contre l'ordre de la bonne police, lesquels buveurs ont ofert audy Le Roy un verre de vin ». Le procureur, on le pense bien, ne se laissa point corrompre et se retira pour aller à l'office non sans avoir entendu la femme Duperray lui dire « mille invectives avec menaces qu'une autre fois il ne sortiroit pas de chez elle comme il y étoit rentré vu qu'il n'était pas décoré de son écharpe et qu'il méritoit une bonne volée, et que s'il retournoit chez elle pendant le service divin ou à autre heure indue pour y faire la police que ce qu'elle lui promettoit lui arriveroit ».
Marie Lesage, femme de Jean-Baptiste Paillard, et la femme Cousin étaient plus irascibles encore. Le 2 mars 1792, à six heures du matin, Marie Catherine Auré, femme de Noël Declaye, sabotier, se rendit chez la dame Cousin sa voisine pour y chercher les bas de ses enfants. Elle était à peine entrée qu'elle fut reçue manu militari par Marie Lesage. Elle cria à son secours. Declaye accourut, les mégères fermèrent la porte derrière laquelle elles échangèrent des propos qui donnèrent la chair de poule au pauvre sabotier : « la serpe, la serpe, il faut l'ébrancher… » Declaye battit prudemment en retraite. Il le fit en bon ordre ; il aurait gagné à y mettre plus de précipitation. Le procès-verbal dit qu'à ce moment précis, il reçut « un coup de pelle à feu sur l'œil gauche ». La cause de la scène ? Declaye était soupçonné d'avoir déclaré que la femme Cousin et Paillard avaient fait « ripaille pendant la nuit dernière en mangeant le salé à Paillard avec Étienne Broust qui fournissait le vin, et que cela causait un gros scandale dans tout le pays vu que ledit Paillard frappait sa femme sachant que toutes ses choses se faisaient en son absence… ». Hélàs ! la calomnie, la médisance peut-être régnaient à Breuillet.
Administration du maire Paul Léonard
Le 18 décembre 1792, les citoyens actifs de la commune nommèrent comme maire, aux lieux et place de Pierre Brouet, Paul Léonard, maçon, élu par 27 voix sur 33 votants seulement.
La nouvelle administration fut la continuation de la précédente : mêmes persécutions contre les personnes enfreignant l'arrêté sur le repos dominical.
On a lu dans le chapitre précédent, le procès verbal dressé par le nouveau procureur Charles Le Roy à la cabaretière Duperray. Il convient de signaler l'attitude du menuisier Pierre Bertrand Simon vis-à-vis le nouveau procureur et la municipalité. Le lundi 27 février 1792, Charles Le Roy enregistra une plainte contre Bertrand Simon qui dans une séance tenue la veille, s'était présenté à la municipalité pour contester la nécessité de la présence du procureur aux réunions. Simon avait accompagné ces paroles d'injures, « traitant ledit sieur procureur d'un gredin, en le prenant au collet d'une main et de l'autre levée pour le frapper, ce que plusieurs personnes ont empêché ». Simon avait ajouté « que les officiers municipaux étaient des chiens », immédiatement ces messieurs quittent la salle.
Il est certain que le véritable maire était « messire Vincent Fontaine, curé de la paroisse », que nous verrons plus loin qualifié « d'aristocrate renforcé ». Ce prêtre, trépassé le 23 janvier précédent, à l'âge de 52 ans, fut remplacé par Jean-Baptiste François Baron, prêtre franchement constitutionnel, nommé à la cure de Breuillet par l'Assemblée électorale du district d'Étampes à la date du 11 mars 1792. L'administration communale devint alors plus libérale.
Signature de Vincent Fontaine, curé de Breuillet sur l'acte de mariage de Pierre Elliot et de Marie Madeleine Rosalie Léonard (29 mai 1786).
Signature de Jean-Baptiste Baron, curé puis officier d'état-civil de Breuillet.
Premier brumaire an III, désormais, l'état-civil est tenu par le maire de la commune.
D'ailleurs le Révolution française poursuivait son œuvre, ses idées pénétraient les masses ; le patriotisme naissait. Pour répondre aux menaces de l'étranger, on procédait partout aux enrôlements volontaires. « Vive la Nation !» remplaçait « Vive le Roy ! ». Les engagements furent reçus à la municipalité de Breuillet le 6 septembre 1792. La réunion fut troublée « par les nommés Guyot, Rozière et Roché qui se moquèrent de ceux qui avaient eu la générosité de se faire enregistrer ; ce qui est contraire à la liberté ». On fut obligé de mettre ces singuliers Français à la porte et de verbaliser contre eux. Les enrôlements volontaires paraissent avoir eu à Breuillet un bon nombre de détracteurs Louis Broust officier municipal défendit à ses deux fils de contracter un engagement. Il refusa même de voter tout subside en faveur des recrues. En revanche le terrible Bertrand Simon devenu lieutenant de la garde nationale, se montra plein d'enthousiasme ; il donna un habit pour les volontaires. Les agissements des amis des émigrés et ceux des prêtres réfractaires par toute la France eurent pour conséquences les visites domiciliaires. Le 7 septembre 1792, l'an quatrième de la Liberté et le premier de l'Égalité (*), les officiers municipaux et plusieurs citoyens se transportèrent chez les particuliers considérés comme suspects et notamment chez Madame de Saint-Paul à La Briche et chez le concierge de Madame Blot (ancienne maîtresse du régent) au château de Segray. Ils trouvèrent chez ledit sieur de Saint-Paul six fusils dont trois à deux coups et deux pistolets de selle simple…, et chez le concierge de Madame Blot, deux fusils simples dont un avec une baïonnette. Ces armes furent déposées au greffe de la Municipalité et distribuées en partie aux volontaires.
Breuillet pendant la Première République
La Première République fut proclamée par la Convention nationale le 22 septembre 1792. Le maire de Breuillet, Paul Léonard, mourut le 22 octobre suivant. Provisoirement ses fonctions furent confiées à Michel Marly, premier officier public. Le 12 novembre 1792, Michel Marly agissant à la requête de Charles Le Roy, procureur de la commune se rendit avec le greffier à la maison presbytérale et requit Jean-Baptiste François Baron, curé, de lui remettre conformément à la loi du 20 septembre 1792, tous les registres de baptêmes, mariages et enterrements se trouvant entre ses mains. Ces registres furent déposés à la maison commune.
Le 6 décembre suivant, le fameux Bertrand Simon, notable, devint receveur de la fabrique et de la Charité (bureau de bienfaisance) et le même jour le curé Baron fut élu officier public, c'est-à-dire chargé de la rédaction des actes de l'état civil. Le 21 décembre Jean-François Baron rédige, au nom de la République, son premier acte pour le décès d'Augustine Saintin, nourrisson de Paris décédé dans la maison de Charles Le Roy. Vers cette époque, Michel Marly remit l'administration communale entre les mains de Louis Augustin Hubert nouvellement maire. Le procureur fut Rozière.
Clôture du registre d'état-civil de Breuillet par Michel Marly et Brière (12 novembre 1792).
Administration de Louis Augustin Hubert
On était alors en plein procès Louis XVI. Depuis la déchéance du roi, les idées républicaines faisaient leur chemin. Les Révolutionnaires et principalement les Montagnards se déchaînèrent contre l'Église. Le 10 janvier 1793, le procureur Rozière demanda :
• Que les parts de pain bénit ne soient plus données à personne dans l'église quoi qu'il ait été décidé par les anciennes municipalités d'en donner aux chantres ; cela afin de se conformer à l'égalité .
• Que les titres et pièces de la fabrique soient inventoriez et mis sous clefs et que lesdites clefs soient mises ès mains à qu'il appartiendra.
• Que l'argenterie de l'église soit pesée et envoyée au district.
Le corps municipal délibéra le 17 janvier sur le premier article du réquisitoire de Rozière ; il fut arrêté à la majorité des voix qu'il serait accordé une part de pain bénit les fêtes et dimanche en reconnaissance de l'assiduité qu'ils ont à venir au service, tant le matin que le soir. Sur les autres points il donna satisfaction au procureur.
Par suite de la suppression de la dîme, la situation de la cure devait être peu brillante, car nous voyons le maire exposer au conseil général, le 3 mars 1793 « qu'il étoit nécessaire de faire l'acquisition de surplis et quatre petites aubes pour le service du culte. L'assemblée autorisa le maire à en faire l'achapt avec tout le ménagement possible ».
Le conseil général comme le prouve cette délibération, était ennemi des grosses dépenses et exerçait un contrôle sévère sur la gestion financière du premier magistrat de la commune. Les temps, du reste, étaient durs, l'argent rare, pas de confiance. C'est après de vaines recherches chez tous les marchands des environs que le maire, chargé de procéder à l'habillement des soldats fournis par Breuillet, finit par trouver un marchand à Arpajon, qui voulut bien se charger de la fourniture, mais contre argent comptant. Or, l'argent ne gênait pas la municipalité qui en fut réduite à solliciter du district une avance de 1.000 livres pour payer lesdits habillements ainsi que les souliers que les cordonniers ne veulent pas donner non plus sans argent.
Les suspects
Le 2 avril 1793, le conseil général étant assemblé, il fut fait lecture d'un arrêté fait par le département de Seine-et-Oise, et pour s'y conformer et notamment à la loi du 24 août 1792, 25 février, 21 et 23 mars 1793, il a été à l'instant ouvert un registre pour recevoir les déclarations et dénonciations des différents particuliers, et à l'instant s'est présenté Pierre Bertrand Simon, menuisier, notable, Rozière procureur de la commune, François Hallier, Louis Yvon, Poulet, Charles Broust, Nicolas Broust, lesquels ont déclaré qu'ils regardaient comme suspects le nommé Boucher régisseur demeurant au petit Basville, le nommé Lejeune, ci-devant garde demeurant à La Thuillerie ; et Paillau, Rozière, Bertrand Simon, Durand, Lecomte, Desclaix, lesquels ont déclaré qu'ils regardaient comme suspect le nommé lainé meunier à La Boissière. D'autres dénoncèrent Cordier meunier à Guisseray.
Le conseil général décida sur-le-champ que Simon Léonard, capitaine de la garde nationale, ou, en cas d'absence, le citoyen Pierre Bertrand Simon, lieutenant de ladite garde se rendrait avec quelques hommes au domicile des suspects « pour y faire toutes perquisitions nécessaires, à enlever les armes offensives et deffensives de quelque genre qu'ils soient ». La garde nationale commença immédiatement ses opérations. On trouva chez Lejeune « un pistolet sans vis » ; chez Boucher « trois fusils dont un à deux coups, une canne à sabre, trois fleurets dont un sans poignée, un pistolet Englais et un petit baril de poudre dans lequel s'est trouvé environ une demi livre de poudre à tirer et une livre de plomb » ; chez Laisné « deux fusils dont il y en a un chez l'armurier, et s'est obligé de les remettre à la municipalité demain matin , et deux pistolets dont un sans batterie » ; chez Cordier la garde nationale ne trouva que la femme « laquelle a déclaré n'avoir point la clef où était le fusil. À l'instant ladite femme Cordier a envoyé chercher ladite clef et a ouvert la porte de la chambre et a donné le fusil. Mais au même moment Cordier survint, leur ôta ledit fusil des mains et leur dit qu'il le remettrait le lendemain lui-même ». Cordier se présenta en effet en la maison commune le 3 avril 1793 et déclara qu'il était très étonné de ce qu'on le regardait comme un homme suspect, n'ayant jamais donné aucune marque d'incivisme. Les citoyens qui l'ont déclaré suspect lui ont représenté que c'était parce qu'il ne s'était point fait inscrire sur le registre de la garde nationale. Ledit Cordier a représenté qu'il était venu pour se faire inscrire… avec Sorieul l'aîné, mais s'étant amusé dans le pays, qu'ils avaient oublié d'aller au greffe et que cela s'était passé de mémoire, en outre qu'il donnait des preuves de son civisme ayant payé son don patriotique.
Donc Cordier avait été considéré comme suspect parce qu'il n'était pas garde national. Le régisseur Boucher qui n'était pas dans ce cas, demanda aussi des explications et réclama ses armes. « Après avoir ouï le maire, les officiers municipaux et le procureur de la commune, et dénonciateurs reconnaissant ledit citoyen Boucher non suspect, au contraire, ayant toujours présenté dans cette commune le patriotisme le plus pur », le conseil général reconnut Boucher non suspect et lui fit rendre ses armes « pour s'en servir comme bon citoyen ».
Laisné se présenta à son tour le 21 avril portant deux fusils, et protesta lui aussi contre la suspicion dont il était l'objet. Malheureusement pour lui, il n'était pas garde national, et il s'était vanté d'avoir traité les gardes nationaux « de meure de faim et de brigands » devant les administrateurs du district d'Étampes. Sur réquisition du procureur et malgré l'appui de Pierre Bertrand Simon, Laisné fut prévenu, le 23 avril d'avoir à comparaître devant le tribunal de police pour y être jugé en raison de ses outrages. Effrayé, le meunier courut à la municipalité le soir même, fit amende honorable et reconnut que les gardes nationaux étaient de « braves et honnêtes citoyens ». Ce qui n'empêcha pas, du reste, d'être condamné à dix livres d'amende au profit de la commune. Laisné acquiesça à cette sentence et heureux d'en être quitte à si bon compte, déclara qu'il était prêt à s'enrôler dans la milice. Pour cette bonne résolution, on lui rendit ses armes et il fut déclaré non suspect.
Conformément aux articles 16, 17, 18 de la loi ou plutôt du décret de la Convention nationale « du 4 may relatif aux subsistances et à la taxe des bleds, pains et farines, les meuniers de Breuillet : Laisné à La Boissière, Nicolas Paillard à Brétigny, Grangé frères à La Folleville et Cordier à Guisseray, vinrent déclarer au greffe qu'ils étaient dans l'intention de faire le commerce des grains et farines ».
C'est vers le même temps qu'un membre de la municipalité représenta « que l'on ôtait lesdits décrets affichés à la porte de l'église, ce qui empêchait les citoyens d'en prendre connaissance ». L'assemblée justement émue, prit le parti de faire placarder un avis prévenant la population que « tout citoyen surpris à toucher, déchirer ou enlever les affiches seroit puni d'une amende de 5 livres ». Le « on » qui montrait si peu de respect pour les actes de la République, ne tarda pas à être connu. « À la date du 19 may le citoyen Charles Le Roy vint dénoncer le nommé Nicolas Rozière comme auteur des méfaits ». Détail piquant : ce Nicolas Rozière était justement le fils du procureur de la commune !
Les meuniers
Si les meuniers de Breuillet avaient ponctuellement fait la déclaration que leur imposait le décret du 4 mai 1793, ils considéraient en revanche les articles concernant la taxe comme nuls et non avenus. Leurs prix n'avaient pour base que leur bon plaisir. Aucune pitié pour les malheureux. Or il arriva que le 20 mai, le citoyen Étienne Petit, vigneron, vint se plaindre au greffe de la municipalité des prétentions du meunier. Laisné exigeant 50 sols du boisseau de farine, sous prétexte « qu'il ne s'embarrassait pas de la taxe qui avait été faite ». Le procureur mis au courant de l'affaire s'en fut au greffe déclarant « qu'il n'a jamais été plus surpris des agissements de Laisné » qu'il cita pour le 22 du même mois. L'accusé fit défaut. Il fut condamné « en 300 livres d'amende et aux dépens liquidés à 22 sols 10 deniers ».
Les moulins de Breuillet (cadastre napoléonien).
Puis, vint le tour de Nicolas Paillard et de Louis Cordier qui, pour le même motif, s'entendirent condamner le 24 mai à 350 livres d'amende et aux dépens. Les meuniers furent dès lors soumis à une surveillance étroite. Ils ne pouvaient vendre leurs farines soit-disant à Paris « qu'après production d'un certificat délivré par la municipalité, celle-ci décida qu'elle n'accorderoit ce certificat qu'à la condition que les intéressés rapporteroient les certificats de destination et qu'ils produiroient les certificats d'achapt du bled ». On alla jusqu'aux visites domiciliaires. Le corps municipal comme on le voit ne manquait pas d'énergie. Les meuniers cependant réussissaient encore à le tromper. Témoins les frères Grangé de La Folleville produisant un faux certificat daté de Dourdan et déclarant se f… de la municipalité, extravagance qui valut à l'un deux, le 6 juin 1793, une amende de 15 livres .
La misère des habitants amena la municipalité à établir le 19 juin, une nouvelle taxe puis à appliquer à la « loy du maximum du 1er juillet » (**). Par suite de ces décisions, la farine première tomba de 64 livres le sac à 51 livres 6 sols.
Le procès-verbal suivant témoignera de la sévérité des administrateurs de Breuillet et de la pauvreté des habitants : « Aujourd'huy, cinq juillet mil sept cent quatre-vingt-treize, l'an deux de la République françoise, est comparu au greffe de la municipalité de Breuillet le citoyen procureur de la commune disant que le trois juillet présent mois qu'il a été délivré dix-sept sacs de farine que la municipalité avoit confisqué et laissé chez les citoyens Grangé et Cordier maîtres fariniers demeurant en cette commune et que par le consentement du citoyen Bussy et ses collègues administrateurs du département de Seine-et-Oise et qu'il en a été donné le pouvoir et que cette dite quantité n'a été distribué qu'aux plus nécessiteux de la commune en ayant délivré que quatre boisseaux à chaqu'un, et qu'il y en a encore le quart de cette commune quil reste dans l'indulgence nayant ny bled ny farine. Et pour éviter la cruelle famine qui est dans cette commune, il requert le conseil général de cette dite commune, de bien vouloir s'assembler pour délibérer sur son réquisitoire ».
« Ventre affamé n'a pas d'oreille », dit-on. La disette faillit pousser la population aux pires extrémités. Le 12 juillet 1793, le procureur se rendit à la municipalité pour consigner au registre « que la majeur partie des citoyens se trouve aujourd'huy sans pain et sans farine, n'en ayant point dans aucun moulin, ce qui occasionne la disette… qui paraît susceptible d'une Révolution ». Pour conjurer le péril, la municipalité décida de vendre au prix du maximum les farines confisquées dans les précédentes perquisitions chez plusieurs citoyens et laissés en dépôt à la maison commune.
Destruction des signes aristocratiques
« Le deuxième jour de la troisième décade du premier mois de la deuxième année de la République française, une et indivisible, le conseil général assemblé … il a été représente par un membre que des fleurs de lys et autres signes aristocratiques blessoient continuellement les yeux des patriotes ». Ce membre conclut en demandant leur destruction. « Les citoyens Hubert, maire, et Rozière, procureur, furent designer pour faire enlever sous huit jours lesdits signes aristocratiques de dessus les édifices publiques avec autorisation de se transporter chez des particuliers pour les obliger à faire disparaître tous lesdits signes ».
Famine, rareté du numéraire
Quand les farines confisquées eurent été consommées, la famine régna en maîtresse à Breuillet. La municipalité en fut bientôt réduite à adresser au district une pétition demandant 2.277 quintaux de seigle, bled méteil et orge indispensables pour assurer l'existence des habitants jusqu'à la moisson nouvelle. L'argent étant rare au point de transformer les prix du maximum en chiffres homicides.
Or pas d'argent, pas de vivres. Chaque citoyen avait donc un intérêt primordial à augmenter ses ressources. C'est probablement cette considération d'économie domestique qui suggéra au bedeau Simon Hubert de solliciter de la municipalité une augmentation de traitement menaçant d'ailleurs de rendre son tablier s'il n'obtenait satisfaction. Ses prétentions furent telles qu'on n'en tint aucun compte. Il fut tout heureux et tout aise d'obtenir en récompense pour ses longs et loyaux services « une ancienne robe de bedeau qui netoit plus en usage ». Nonobstant il donna sa démission.
À suivre…
Notes
(*) On évoque l'an I de la Liberté, l'année 1789 alors que l'an I de la République (ou an I de l'Égalité) commence le 22 septembre 1792.
(**) La loi du maximum votée le 4 mai 1793 instituait le maximum décroissant du prix des grains réglé par chaque administration de département pour son ressort en fonction du prix moyen pendant les premiers mois de l'année. Le 26 juillet, la Convention vota, sur le rapport de Collot d'Herbois, un décret contre les « accapareurs » des denrées et marchandises de première nécessité, menaçant ceux-ci de la peine de mort et de la confiscation des biens. En septembre 17932, le prix du grain taxé fut unifié dans toute la France à 14 livres le quintal.