Les carrières des Fonceaux à Marcoussis

Chronique du Vieux Marcoussy -------------------------------------- _----- ------------- --------- août 2011

Extrait du plan terrier de Marcoussis.

JP. Dagnot

 

 

 

Cette chronique est la quatrième d'une série consacrée aux carrières de Marcoussis et sort prématurément à la demande d'un lecteur ayant quelques problèmes de construction dans ce lotissement. Comme à l'habitude, situons ce lieu. Du carrefour du baillage prendre "l'escargot" conduisant aux laboratoires de l'ancienne CGE. Au sommet de la côte tourner deux fois à droite.

 

 

Préambule

L'exploitation des carrières au XVIIIe et début du XIXe siècle se faisant sans autorisation, la localisation des concessions n'a pu être réalisée pour un certain nombre d'entr'elles. Ainsi pour celles situées entre le Grand Parc de Marcoussis et le Houssay, dites des Fonceaux, du Rocher, des Sorts et de la Roche Garnier, nous ne rapporterons que les informations collectées au fil du temps. Précisons que la route en lacet dite de l'escargot n'existe pas et sera réalisée fin XIXe siècle . Ajoutons que au-dessus de ce banc de grès se trouve celui dit du Ménil Forget.

Faisons un point en regardant le plan terrier de Marcoussis. Le bois de Monsieur, appartient avant la Révolution à la comtesse d'Esclignac. Au début du XIXe siècle, Antoine Hyacinthe de Puységur (1), de retour d'exil, propriétaire à Paris, passe à Marcoussis et vend à Jean Dioudonnat, entrepreneur des routes nationales, treize hectares de bois, dits les bois de Monsieur, lui étant échus du partage de la succession de la comtesse d'Eclignac, moyennant 5.000 francs payés comptant.

Cet entrepreneur de travaux publics, est titulaire d'un bail d'entretien de la "route nationale de Paris à Chartres" et de ce fait utilise des pavés en grès. Pour se les procurer deux méthodes sont utilisées l'extraction autorisée dans son bail, du grès existant dans les bois proches la route nationale, la seconde plus originale, consiste à dépouiller les biens nationaux. En général ce sont des bâtiments mal entretenus durant la Révolution qui ont été bien souvent considérés comme des carrières où il n'est pas besoin de dégager le banc de grès. Le sieur Dioudonnat commence par la destruction de l'église et des communs du monastère des Célestins, continue probablement avec le château de Marcoussis, passe ensuite avec la démolition de la ferme du Ménil Forget pour terminer par celle du château de Crosnes.

 

 

Les premières carrières début XIXe siècle

L'exploitation à cette époque se fait par demande au près de l'administration et c'est ainsi que l'on apprend qu'en 1817, les citoyens Chimbeau père, carrier de Marcoussis et Potier de Linas, ont ouvert une carrière de grès dans le chemin vicinal de Nozay à Marcoussis, sans autorisation, et de plus, ont forcé les eaux pluviales à prendre une autre direction. Comme dit précédemment, ce seul chemin pour se rendre de Marcoussis à Nozay, part du Baillage et monte en ligne droite jusqu'au plateau via un sentier pentu le long du grand parc. Un orage testé célèbre cette année-là, occasionne de grands dommages en ensablant les terres de plusieurs particuliers situées sous cette carrière... Le conseil municipal envisage trois ans plus tard de faire rétablir le chemin qui est dégradé depuis 1815. Ils vont s'adresser au conseil de préfecture pour poursuivre les deux carriers devant les tribunaux. Nous verrons que les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets, l'eau qui passe dans les couches sableuses entraînent ces dernières ... C'est ce qui se passe actuellement au lotissement des Fonceaux! Décidemment la nature est obstinée !!

 

 

Auguste Macé de Bagneux

Nous arrivons en 1823, Jean Dioudonnat décède à Crosnes sans héritier direct, une succession complexe se déroule... Ne retenons que le bois de Monsieur, compris dans cette dernière, est adjugé deux ans après à Auguste Macé de Bagneux dans une vente sur licitation moyennant 12.750 frs de prix principal.

Le premier maire de la Ville-du-Bois, révolutionnaire peu glorieux, décède en 1812. Ses quatre enfants se partagent ses biens, et par le renoncement de ses trois soeurs, Auguste Joseph Macé de Baigneux devient le propriétaire de la Grand Maison. Cet homme est un fin stratège financier, et Dioudonnat lui sert d'exemple. Il va donc acquérir des parcelles de friches ou bois où les roches ne sont pas très profondes. Ainsi en 1826, a lieu une vente faite par un entrepreneur des ponts et chaussées de Montrouge, Pierre Boursier, audit Macé de Bagneux , chantier du Rocher ou de la Roche Garnier, deux pièces représentant 4.038 m2. Dans les tenants et aboutissant on apprend ainsi qu'il est mitoyen avec les friches et roches du bois de Monsieur.

Le même jour, il procède de même avec le notaire Boudier pour 3.418 m2 au chantier du Rocher au dessus des Ouardes. Ces friches sont également mitoyennes du bois de Monsieur. Apparemment son but est d'acquérir un banc de roches le plus étendu possible. Comme nous le verrons par la suite, plusieurs exploitants de carrières vont exercer sur ce banc.

 

 

Charles Tourillon

Le premier ne nous est pas inconnu, nous l'avons déjà rencontré à Orsay exploitant une carrière dans les bois de l'exilé Grimod, dernier seigneur d'Orsay. Comme pour les carriers de Marcoussis cette information provient de documents de justice où le tribunal de la Seine le condamne ainsi que Lemoine et Baron en 1807, 1820 ...

L'activité de cet entrepreneur se fait en notant les concessions ou les acquisitions qu'il a conclu au fil du temps:
) en 1825, il reprend des carrières à Pierre Denis Bourcier, entrepreneur de routes à Montrouge, pour 2.400 m2,
2°) en 1827,
- concession par Macé de Bagneux au bois de Monsieur pour un temps illimité d'une parcelle d'un hectare (acte non retrouvé),
- achat d'un passage à Victor Dioudonnat d'une largeur d'un mètre dans une pièce, chantier de la Grosse Treille pour élargir le sentier du Rocher, tenant aussi au chemin des berges & à l'ancien chemin de Marcoussis à Mo ntlhéry,
- achat au même d
u reste soit 354 m2 au de chantier de la Grosse Treille,
- François Petit lui vend également 427 m2 au même lieu.
3°) En 1828,
- acquisition de Louis Petit et Denis Buisson le jeune, 34 centiares au sieur Petit, situés au champ Félix, aboutissant sur le chemin de Marcoussis à Montlhéry, tenant à un clos appartenant à Mr Tourillon, 17 centiares au sieur Buisson, au même lieu ... L'acquéreur ayant l'intention de faire ouvrir une porte charretière à son clos sur les portions acquises;
- achat à Jacques Nicolas Retourné à Tourillon au chantier de la Grande Roche, du terrain nécessaire pour donner au chemin du Rocher une largeur de trois mètres. L'entrepreneur achète le passage pour sortir les roches ,
- achat à Jean François Moithey de 648 m2 au chantier le Rocher tenant à Macé de Bagneux,
- achat à Marie Madeleine Petit de 2426 m2 de friches au chantier de la Grande Roche. Tous ces terrains sont proches, ce dernier est également mitoyen du bois de Monsieur.
- Jean Claude Duval, meunier de Guillerville lui vend 700 m2 de friches et roches chantier du Rocher tenant au nord au bois de Monsieur .
4°) en 1829,
- François Petit dit Michoton, vente de 960 m2 de terre friches chantier des hauts Fonceaux tenant au nord au bois de Monsieur,
- vente d'un lopin par Petit Cornu devant Fontaine à Limours,
- notons la concession faite par le comte de Montesquiou au trio Lemoine, Baron et Tourillon, du banc des carrières Orsay. Ces trois gros entrepreneurs se sont groupés.
5°) En 1837,
- Macé de Bagneux lui refait une concession pour un temps illimité de 13.915 m2
- la municipalité de Marcoussis met en adjudication une série de terres friches et roches sur toute l'étendue de la commune, correspondant à onze lots; notre entrepreneur en acquerra deux.
6°) En 1840, Charles Tourillon propriétaire, comme ancien entrepreneur des ponts et chaussées demeurant à Paris rue Saint Sabin, arrête ses activités. Il procède en deux étapes, avec Adolphe Lemoine et Joseph Baron. La vente des droits restant sur diverses concessions restant à courir du droit d'extraire le grès à :
a) Marcoussis, la concession faite par Mr Macé de Baigneux pour un temps illimité de 13.915 m2 en deux parties, l'une de 5347 m2 à prendre dans les bois de Monsieur,
b) Saulx les Chartreux ... au grand banc du Plessis saint Père (2),
c) Orsay ... (2)
d) Belloy, 41 ares par Mr de Bethisy...
e) Massy, Chanvry ...
f) Forêt de Fontainebleau, du droit que Tourillon tient de la liste civile du roi lieudit la croix d'Augas, chargé d'un droit de sortage...
Le présent transport fait moyennant la somme de 64.820 frs qui correspond au fond de commerce dudit Tourillon. Après ce transport de droit ledit Tourillon, ancien entrepreneur, vend aux mêmes les carrières lui appartenant:
a) à Marcoussis, sont ainsi citées onze pièces de terres friches que nous ne citerons pas et correspondant à une partie des acquisitions déjà citées. Tous ces biens acquis à plusieurs propriétaires: Jean-Jacques Cornu, Jean-Jacques Dioudonnat, Henriette Gasser femme Maneglier, Louis Michel Arranger, Pierre Denis Legendre époux Louise Arranger, Pierre Joseph Noel, François Etienne Petit, François Petit le jeune dit Micholon époux Geneviève Groulon et Simon Groulon, Jean Claude Duval époux Elizabeth Groulon, la commune de Marcoussis, Marie Madeleine Petit, Jacques François Piffret époux Catherine Petit, Antoine Martin, Jean-Etienne Petit, François Moithey, Louis Jacques Petit,et Nicolas Denis Buisson.
b) Saulx. Ces acquisitions seront reprises lors de la chronique sur les carrières de Saulx.
La vente faite moyennant 25.180 frs dont 12.372 frs pour les carrières de Saulx.

 

 

Adolphe Lemoine et Joseph Baron

Voyons maintenant les acheteurs de l'activité de Charles Tourillon. Ces entrepreneurs commencent leur exploitation des grès sur Orsay. En 1835, nous voyons apparaître un dénommé Joseph Baron qui crée avec Adolphe Lemoine la société Entreprise générale du pavé de Paris, sous signatures privées .

Quatre mois après, les choses se précisent, un bail à ferme important est conclu entre Auguste Joseph Macé de Bagneux, propriétaire, maire de la Ville-du-Bois, François Lemoine, entrepreneur de ponts et chaussées, et Joseph Baron également entrepreneur. Il s'agit principalement du droit d'exploiter toutes les roches de grès qui se trouvent au domaine du Ménil Forget, dans les terrains cy après désignés se consistant en :
1) maison bourgeoise, écuries, chambres de garde...
2) 419.110 m2 de terres dont une partie en bois sur Marcoussis,
3) 289.333 m2 sur Nozay, partie terre et partie bois,
4) cinq petites pièces de bois et friches...
Dans les annexes du bail on app
rend que le propriétaire a fait construire la maison bourgeoise. La raison principale du bail est l'extraction du grès. Ce bail est une vente déguisée par le paiement de 7.000 frs pendant vingt années représentant 140.000 frs.

 

 

Plan du domaine baillé par Macé de Bagneux.

 

A partir de cette époque, ces deux entrepreneurs parisiens vont systématiquement acquérir des parcelles afin d'exploiter le banc au dessus de l'église de Marcoussis contigu au domaine du Ménil Forget. Citons:
a
) en 1835:
- 478 m2 au champtier de la Butte des Moulins ou du Galheur à Marie-Anne Maubert,
- 1068 m2 champtier des Hautes Galheurs ou de la Butte des Moulins en deux pièces à François Moithey,
- 308 m2 champtier de la Roche Garnier où Galheur à Arnoud Arranger.
b) en 1836
- 407 m2 au chantier de Galheur, à Jean-Jacques Victor Dioudonnat, propriétaire,
- 214 m2 au chantier de Galheur, à François Marie Legendre, marchand de vin et charcutier d'Ivry,
- 214 m2 pour une pièce de bois au chantier Galheur ou de la roche Garnier à Germain Lumière, carrier,
- 214 m2 pour une pièce de bois aux Sorts, à Jacques Nion,
- 518 m2 d'une pièce de 854 m2, sur le rocher chantier du Berger, à François Petit dit Blaise,
- 427 m2 à la Roche Garnier, à Louis Pierre Lucas cultivateur,
- 316 m2 au chantier des Sorts, à Laurent Pierr
e journalier, et Marie Geneviève Cornu veuve François Groulon,
- 213 m2 de bois au même chantier, à Jean Victor Benoist, cultivateur,
- 1313 m2, à la Roche Garnier, à Jean Jacques Joly, ancien cultivateur, Maximilien Alexandre Leroy, charron, et Pierre Marie Retourné, cultivateur,
- 427 m2 au chantier des Sorts, à Jean Denis Dubocq, cultivateur,
- 308 m2 au chantier de la Roche Garnier, à Marie-Anne Petit, veuve Michel Heudeline, cultivateur,
- 214 m2 et 320 m2 au chantier de la Roche Garnier, à Charles Etienne Louis Petit, cultivateur, pour deux pièces
- 308 m2 à la Roche Garnier, à Jean-Baptiste Heudeline, cultivateur,
c) en 1837,
-
la municip
alité de Marcoussis met en adjudication une série de lopins de terres friches et roches sur toute l'étendue de la commune, correspondant à onze lots. Pour leur part nos exploitants se verront adjugés 4495 m2 en trois pièces, chantier du Rocher et des Audouardes.
- 147 m2 à la Roche Garnier, à Pierre Michel Legendre père, cultiv
ateur et ses enfants,
- 171 m2 de vignes, chantier de la Butte des Moulins, à Denis Marie Noel, cultivateur,
- 274 m2 au chantier du fond Bordier, à Louis Etienne Petit, cultivateur et Louis Michel Huré aussi cultivateur,
d) En 1838
- Pierre Adrien Arranger, cultivateur, 470 m2 d'une pièce plus grande à la Roche Garnier,
- Jean-Baptiste Heudeline, fromager, 513 m2 champtier de la Butte des Moulins,
- Louis Michel Arranger père, propriétaire et Pierre Denis Legendre, maçon époux Thérèse Arranger, 118 m2 à la Roche Garnier,
- Marie Anne Madeleine Mouton, 285 m2 de vignes chantier du Fond Bordier,
e) en 1839
- 124 m2 à la Roche Garnier, à Jean-Baptiste Retourné cultivateur,
- 285 m2 chantier du fond Bordier par Marie-Anne Mouton,
- Notons cette année 1839, la création d'une nouvelle société poursuivant celle de 1835 avec entrée de Adolphe Pierre Dabrin. L'acte est encore un seing privé, avec apport par les fondateurs du matériel et de la carrière du Ménil.
f)
en 1840 Nous avons vu précédemment que Tourillon avait en 1840 transporté ses droits et vendus ses carrières à Messieurs Lemoine & Baron. De ce fait, le trio Lemoine, Baron, Dabrin, est à la tête de la plus importante carrière de la région.

Que se passe-t-il? début 1842, la nouvelle société est liquidée. Deux ans après, Baron cède à Lemoine ses parts du Ménil Forget. De ce fait Lemoine reste seul propriétaire du domaine du Ménil Forget.

Reprenons ce que dit Malte-Brun au sujet de la carrière du grand banc: Cette carrière aurait vu son activité cesser vers 1853. De juin 1854 à août 1855 des essais furent réalisés par la ville de Paris dans cette carrière. La ville fut ensuite quelques mois locataire de cette exploitation.

 

 

La ville de Paris

Fin 1855, Adolphe Lemoine, ancien entrepreneur de travaux publics demeurant à Villebouzin, et sa femme Mélanie Sadourny en vertu d'un décret impérial vendent leur carrière à la ville de Paris.

Il faut régulariser tous les actes sous seing privé et ventes déguisées. Début 1856, une quittance est faite par Auguste Joseph Macé de Baigneux, propriétaire, demeurant à la Ville-du-Bois, à la société du Comptoir d'Escompte de 140.000 frs. Auguste Thion de la Chaume, liquidateur de la société commerciale sous la raison Estienne de la Chaume & compagnie, dénommée Comptoir d'Escompte, et ledit Macé de Bagneux :
1°) vente par Mr de Bagneux à Mrs Lemoine & Baron du domaine du Ménil Forget, rappel du contrat de 1837, sous conditions "temporaires ou viagères".
L'aliénation du domaine par Mr de Bagneux en faveur de Lemoine et Baron avait été déguisée sous la forme d'un bail pour vingt années. Seulement avait été stipulé qu'après l'expiration du bail Lemoine & Baron auraient la jouissance dudit domaine.
...
3°) historique des diverses sociétés conduisant Lemoine à rester seul propriétaire du Ménil Forget.
4°) liquidation Comptoir d'Escompte,
... 7°) ....reconnaissance par Macé de Bagneux des paiements et décharges diverses, main levée, quittance finale. Paiement à cette époque à l'enregistrement de 5308 frs correspondant aux droits de donation, enterinant la vente déguisée.

La situation éclaircie, la vente de la carrière de Marcoussis est officialisée. Le mandataire de François Lemoine, ancien entrepreneur de travaux publics et de Mélanie Sadourny son épouse demeurant à Villebouzin, lesquels vendent à la ville de Paris, ce qui est accepté par Georges Eugène Haussmann, préfet de la Seine:
1°) une carrière à grès dite le Rocher de Marcoussis, et les terrains nécessaires à l'exploitation, contenant 155.363 m2
2°) une parcelle de 795 m2 au Houssay C1475 & 1507
3°) une autre parcelle de 782 m2 aussi au Houssay C943 & 944 ,
ces deux derniers postes qui aujourd'hui forment un chemin qui va de la route départementale n°3 au chemin du Houssay. Compris également un petit bâtiment autrefois à usage de forge aujourd'hui un bureau pour le régisseur de la carrière avec son mobilier.
L'origine de propriété reprend l'historique de l'acte précédemment rédigé avec Macé de Bagneux, avec paiement des 140.000 frs de l'acquisition déguisée. La vente faite moyennant 74.809 frs. Notons dans cet acte que l'étendue de la carrière est de 575 mètres.

Les services techniques de la ville de Paris prennent en main l'exploitation. Monsieur Chiquet, régisseur des carrières demande l'autorisation de faire passer les voitures chargées de pavés venant de la carrière de Marcoussis par le chemin des Petits Champs débouchant sur la route impériale N°20, à la maison Champeaux. Rappelons que Malte-Brun est arrivé à Marcoussis depuis peu, il a donc tout observé : Le Grand banc est attaqué à ciel ouvert par plus de 150 ouvriers terrassiers et carriers partagés en escouade et batterie. Une machine fort ingénieuse, mise en mouvement par la vapeur, de l'invention de Mr Laudet, ingénieur civil, vient en aide aux ouvriers en leur évitant la partie la plus dangereuse pour leur existence, de leur pénible et dur travail; elle fend les gros blocs de grès, transporte les pavés façonnés du fond des formes au niveau du sol, et les déblais provenant de la masse, sur les cavaliers .

 

Machine de Laudet utilisée pour l'extraction des roches.

 

Pour actionner la machine ci-dessus, l'utilisation de la vapeur est nécessaire. Un ingénieur du service municipal de Paris fait une demande au service des machines à vapeur de Seine-et-Oise pour utiliser :
- une chaudière à vapeur de forme cylindrique de capacité de 823 m3,
- une machine à vapeur de puissance de 6 chevaux et fonctionnant jusqu'à 6 atmosphères,
- un marteau à vap
eur destiné à fendre le grès.

Malte-Brun continue: Il a été fabriqué par la ville de Paris sur la carrière du grand banc de Marcoussis depuis le 1er mars 1856 jusqu'au 20 octobre 1866, 5.967.107 pavés. Mais le grand banc s'épuise la longueur dur du banc passe de 800 m en 1856 à 400m en 1866. La roche qui autrefois affleurait le sol, et qui à l'origine de l'exploitation, on rencontrait à une petite profondeur, il faut maintenant l'aller chercher à 7 ou 10 mètres de la surface.

Bien que l'on n'ait pas retrouvé de document, un registre de délibérations de Montlhéry nous apprend que le grand banc de Marcoussis et le banc du Grand Parc fournissent annuellement 500.000 pavés. À Saulx c'est 800.000 pavés.

La ville de Paris fabriquant et utilisant les pavés, les actes concernant son exploitation sont inexistants. Nous arrivons en 1876, l'exploitation est terminée, il faut déblayer le terrain. Deux étapes sont prévues:
1
°) la vente du matériel dépendant de l'exploitation de pavés des carrières de Marcoussis:
- 65 tonnes de fer et rail T, rails, écrous, boulons, cuivre, plomb, zinc; tôle, fonte ...
- 2 tonnes de chaînes de fer,
- 6 tonnes composées de 4 culbuteurs en fer, 2 wagons, outils de carriers,

L'affiche insérée dans un journal ajoute: On se rend à Marcoussis par le chemin de fer d'Orléans, station de saint Michel où se
trouvent des voitures de correspondance.

On peut penser qu'à l'époque le remblaiement a été fait très succinctement laissant certaines parties sans roches dans leur état initial, donc stable.

 

Plan des lots de l'adjudication.

2°) l'adjudication de la carrière . Pour être aisément vendu l'ensemble est découpé en 33 lots comprenant maison d'habitation, bâtiments divers, terrains boisés, terres labourables, roches & carrières, sur Marcoussis et Nozay le tout pour 15 hectares . Notons le lot 1qui est une partie non exploitée composé d'emplacement de bâtiment, réserve d'eau, lavoir, contenant 3 hectares.

L'adjudication s'est faite en deux temps, en effet à la première, ne se sont présentés que trois acquéreurs:
- François
Seguin pour les lots 17 et 18 pour1690 frs,
- Louis Noel pour le lot 19 adjugé 730 frs,
- Auguste Pelletier pour le lot 20 adjugé 540 frs.
Les premiers acquéreurs ont choisi les bois. La seconde adjudication, six mois plus tard a vu la vente du reste :
- lot 1 à Jules Vasseur pour 8.130 frs,
- lot 2 et 3 à Denis Legendre pour 570 frs,
- lots 4, 26, 18, à Auguste Cordeau pour 940 frs,
- lot 5 à Louis Mouton, pour 345 frs,
- lot 6 à Casimir Chimbaud pour 230 frs,
- lot 7 et 15 à Auguste Regnier pour 410 frs,
- lot 8 et 9 à Louis Noel pour 495 frs,
- lots 10 et 23 à Jean Pierre Songeux pour 435 frs,
- lot 11 à Victor Buisson pour 130 frs,
- lots 12, 13 et 14 à François Retourné pour 355 frs,
- lots 16, 21, 22 et 24 à François Seguin de Paris pour 2.570 frs,
- lot 25 à Louis Godet pour 880 frs,
- lot 27 à Laurent Hervet pour 280 frs,
- lot 29 et
30 à Paul Bouvelle pour 320 frs.

Suite à ces adjudications, un échange entre la ville de Paris et la commune a lieu. Le conseil municipal réclame le rétablissement de l'ancien chemin de la ruelle des bois ou une indemnité représentée par le chemin de sable de l'ancienne carrière des lots 31,32 et 33 (chemin aboutissant au feu tricolore de l'Etang Neuf.

Un bon siècle s'écoule... Des arbres enracinés stabilisent les lieux. Nous sommes dans les années 74. Un ingénieur cherche à construire sur cet endroit (3) et fait une demande pour une vingtaine de pavillons sur l'ensemble des Fonceaux, donc une faible densité de construction. Sa demande est rejetée la D.D.E. déclarant cette zone inconstructible. Quelques années passent, la municipalité change de couleur. Un promoteur propose de faire un lotissement en accordant à la mairie une zone pour faire du logement social... Curieusement un permis est accordé.

Le promoteur fait alors venir un scrapper énorme pour niveler le terrain et arracher les arbres qui maintiennent le terrain. Un lotissement est construit et les eaux usées et pluviales passent dans une canalisation de plusieurs m2 de section, entourée de sablon! Un violent orage arrive. Sachant que les carrières de grès de Marcoussis servent ensuite de carrières de sable... Les bouleversements de terrain et leur aplanissement aboutit à un phénomène classique: dans un terrain en pente l'eau s'infiltre et entraîne le sable d'où des affaissements de terrain et des maisons lézardées. À la suite de cet incident, la municipalité change le trajet des eaux usées, ces dernières changent d'itinéraire et rejoignent la canalisation sur le chemin du Moulin. Les eaux pluviales doivent s'écouler dans des puisards ... Donc à l'évidence elles s'enfoncent toujours en terre, et dès qu'elles trouvent un écoulement propice, elles entraînent le sable... C'est pourquoi on peut observer une rotation de propriétaires qui, avant d'acheter, voient une maison dont les fissures ont été bouchées, et qui, quelques années après, constatent que ces dernières réapparaissent (4).

 

 

Carrière du Ménil Forget

Revenons en 1851 une demande venant de l'administration, nous apprend que Joseph Nourrie, entrepreneur de routes nationales et départementales demeurant à Montrouge, demande l'autorisation d'exploiter, à ciel ouvert, une carrière de grès qui lui appartient au Ménil Forget à Marcoussis. L'ingénieur des mines dans son rapport note que le banc de grès exploité a une puissance de 3,5 m recouvert par 5,5 m environ.

Au moment de l'adjudication de 1876, une dernière concession d'extraction de grès est accordée par les héritiers de la famille de Bagneux. Le mandataire d'Emmanuel Lalain Chomel, avocat demeurant à Paris, rue de l'Université, loue pour six années à Joseph Seguin, maître carrier demeurant au Petit Ballainvilliers le droit d'extraire le grès servant à la fabrication de pavés, dans une parcelle de bois à Marcoussis, lieudit le Ménil Forget, tenant au nord par le chemin de Montlhéry aux roches qui la sépare du surplus de bois de Mr Lalain Chomel , à l'est par le chemin du Houssay, à l'ouest par les bois de la ville de Paris, et dans une autre parcelle de l'autre côté du chemin du Houssay, le tout pour environ un hectare.
Le preneur ouvrira ses carrières dans lesdites parcelles et suivra les veines de grès à l'intérieur des parcelles. Le grès sera extrait uniquement, les autres pierres ou matériaux qui se trouveront dans les carrières seront réservés au bailleur. Le droit d'extraction cessera dès que le preneur jugera insuffisant la quantité de grès extraite. La concession est faite moyennant 3% du prix de revient des pavés, payable chaque trimestre.

 

 

Notes

(1) Ce personnage, possède un château à Beugney et y réside. A son retour d'exil, il réalise tous les biens de Marcoussis qui lui reviennent par la succession de la comtesse d'Esclignac, et à cette époque il fait détruire le château de Marcoussis pour tirer profit de cette "carrière idéale".

(2) Chronique à venir.

(3) informations verbales recueillies récemment.

(4) Les architectes n'ont-ils jamais appris que construire sur des terrains non stabilisés, sur d'anciennes carrières, sur des terres inondables et, même, sur des terrains situées au-dessous du niveau de la mer était extrêmement dangereux ? Des exemples récents ont coûté la vie à plusieurs personnes !!!

 

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