Les paroisses du doyenné de Montlhéry |
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Chronique du Vieux Marcoussy -------------------------------------------------------- --------- Novembre 2010 C. Julien
Dans son ouvrage publié « avec approbation et privilège du Roi » intitulé " Mélanges tirés d'une grande bibliothèque de la lecture des livres françois ", vol. XLII, t. X (chez Moutard à Paris, 1784), pour lequel l'auteur avait été ouvert une souscription en juillet 1783, Marc-Antoine de Voyer Argenson nous donne un tableau géographique et historique de la France au XVIe siècle. L'élection de Paris était située au centre du gouvernement de l'Ile-de-France, et qui a pour chef-lieu la capitale du royaume. Le siège de l'élection est le Châtelet de Paris où tous les jugements en appel ont lieu après contestation d'une sentence rendue par le prévôt de la châtellenie royale de Montlhéry. Le diocèse ayant à peu près les mêmes limites que l'élection, nous parcourons les paroisses du doyenné de Montlhéry qui avec le doyenné de Châteaufort constituaient l'archidiaconé de Josas, c'est-à-dire toute la partie méridionale de cette élection si l'on compte le doyenné de Corbeil. Le doyenné rural de Montlhéry « decanatu de Monteletherico » , le second, avec celui de Châteaufort, de la partie méridionale du diocèse de Paris, s'étend depuis le grand chemin d'Orléans jusqu'à la Seine; et en commençant par la paroisse la plus voisine de Paris, c'est-à-dire Gentilly qui, au moyen âge était le fief de l'évêque. Nous remarquons que le doyenné qui nous concerne a été connu sous diverses appellations. Dans le pouillé de la province de Sens (A. Longnon, 1904) donné en 1215, il prend le nom de doyenné de Linas « decanatu de Linais », sans doute par l'importance de la collégiale Saint-Merry et son chapitre au début du XIIIe siècle. Dans certains actes, il est aussi donné comme doyenné d'Essonne. Vers 1260, on parle du doyenné de Longjumeau « decanatu Montis Gemelli » dans lequel sont situés les prieuré de Longpont et de Saint-Pierre de Montlhéry.
Partie septentrionale du doyenné Le village de Gentilly existoit dès le septième siècle. On ne doute pas qu'il ne prenne son nom d'un Gaulois Romain, nommé Gentilis comme le village de Chevilly qui en est voisin, prend le sien d'un seigneur ou possesseur nommé Civilis. On y compte plus de cinq cents habitants, en y comprenant le Petit-Gentilly, dont les dernières maisons sont de la paroisse Saint Hippolyte, au fauxbourg Saint-Marceau. On est assuré que le Roi Pépin avoit un palais ou maison royale à Gentilly, qu'il y tint cour plénière aux fêtes de Noël, l'an 761, et y célébra, en 766, un fameux concile national, au sujet du culte des images. La paroisse de Gentilly étoit si considérable, qu'elle renfermoit celle d'Arcueil, qui n'en a été démembrée qu'après le règne de Saint Louis. Cependant on voit que, depuis la fin du neuvième siècle , les évêques de Paris ont été seigneurs de Gentilly, et que les seigneurs particuliers de ce canton leur ont constamment rendu hommage. Aux quatorzième et quinzième siècles , il paroît que les évêques y avoient une maison de campagne, dans laquelle ils se retiroient souvent : un d'eux, nommé Simon de Bussy , y mourut en 1304. D'ailleurs, il y avoit de grands seigneurs qui y avoient des maisons, tels que les comtes de Valois, de la maison royale, les comtes de Savoie, etc. Ce n'est qu'au dix-septième siècle que l'on établit à Gentilly une communauté de religieuses hospitalières, qui doivent reconnoître pour leur fondateur un fameux libraire, nommé Claude Sonnius. Au milieu de ce même siècle , une partie d'entre elles passa dans le faux-bourg Saint-Marceau, rue Mouffetard; elles y existent encore sous le nom de Saint Julien et de Sainte Basilisse. Au commencement du siècle courant, les Religieuses qui restoient à Gentilly, passèrent à Saint-Mandé, près Vincennes, où elles sont encore. Il n'y a plus de maisons religieuses à Gentilly, mais beaucoup de maisons de campagne. Le cardinal de Gondi, premier archevêque de Paris, vendit la maison épiscopale à un M. Chevalier, premier Président de la Cour des Aides, et lui inféoda la seigneurie. M. Chevalier vendit cette terre à un M. de Beauvais, fils d'une fameuse première femme de chambre de la reine Anne d'Autriche ; sa postérité en a joui jusqu'à nos jours. Le château de Bicêtre , si connu dans Paris, est sur la paroisse de Gentilly. Le nom qu'il porte, lui vient, non pas d'un comte, mais d'un évêque de Wincester, qui possédoit un manoir ou un hôtel dans cet endroit, dès le temps de Philippe le Bel, à la fin du treizième siècle . Quelque temps après, il appartenoit à Amédée comte de Savoie, qui le vendit au duc de Berry, fils du roi Jean et frère de Charles V. Ce Prince y fit bâtir un magnifique château. L'évêque de Paris s'opposa à ce qu'il y eût des fossés et un pont-levis, prétendant qu'on ne pouvoit se fortifier ainsi sur son territoire sans son agrément. Le Prince déféra à ces représentations, et s'en trouva très-mal; car, lors des troubles excités dans Paris par les Cabochiens, ce château fut entièrement brûlé ; l'on assure que ce fut grand dommage, parce qu'il contenoit des richesses infinies. Six ans après, le duc de Berry, en mourant, laissa ce château au chapitre de Notre-Dame, à condition que les chanoines conserveroient précieusement le chef de l'apôtre Saint Philippe, qu'il leur avoit donné, et qu'ils le porteroient tous les ans en procession. L'exécution de cet article du testament du duc de Berry, souffrit de grandes difficultés. On prétendit que tout ce qui avoit appartenu à un prince apanagé, rentroit de droit au Domaine du Roi. En 1519, le Roi reprit en effet possession des ruines du château de Bicêtre. Elles subsistoient encore à la fin du seizième siècle ; ce ne fut qu'en 1632 qu'elles furent rasées, sous le règne de Louis XIII. On voulut alors établir dans cet endroit un hôpital pour les soldats invalides. Cet établissement fut même assez avancé ; et les plus anciens bâtiments que l'on voie actuellement à Bicêtre, sont de ce temps-là, ils n'ont pas par conséquent cent cinquante ans d'ancienneté. Mais, en 1671, Louis XIV ayant fait élever l'Hôtel Royal des Invalides avec bien plus de magnificence, la retraite des vieux militaires a été fixée dans ce séjour, et Bicêtre dépend depuis ce temps de l'immense établissement de l'hôpital général de Paris. On trouve à Arcueil des vertiges si évidents d'un aqueduc du temps des Romains, qu'on ne peut douter qu'il n'y en ait eu un dans cet endroit, et que le lieu n'ait pris son nom des arcades qui y subsistent encore. Au reste, la première fois que l'on entend parler d'Arcueil, c'est au douzième siècle ; il n'a été érigé en paroisse qu'à la fin du treizième : une partie du bâtiment de l'église paroissiale est de ce temps-là. Il y avoit autrefois beaucoup de vignes aux environs d'Arcueil, et le vin passoit pour excellent. Si les Romains ont fait construire un aqueduc à Arcueil, les François se sont occupés du soin de le réparer. Ce n'est cependant qu'au seizième siècle que Louis XIII posa la première pierre de l'aqueduc, qui conduit les eaux de Rungis à Paris, en passant par Arcueil ; et cette grande entreprise n'a été achevée que plus de cent ans après. Il y a toujours eu de belles mai sons de campagne à Arcueil : on sait que Jodelle, fameux poète du seizième siècle , y en avoit une, et qu'il y donnoit des fêtes à ses amis, entre lesquels étoit le poète Ronsard ; et, c'est là que furent jouées les premières tragédies qui aient été composées en françois. Cachant , qui est de la paroisse d'Arcueil, dépendoit autrefois, aussi bien qu'Arcueil même, de celle de Gentilly. C'étoit un pays de chasse, et on croit que c'est de là que vient son nom, qui doit s'écrire en latin Catticampus. Dès le temps de Louis le Débonnaire et de Charles le Chauve, ce lieu appartenoit à l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Cependant nous voyons que, tout au commencement du treizième siècle , Philippe le Bel avoir une maison à Cachant, et que plusieurs ordonnances importantes de son règne en sont datées. Il y en a aussi du temps de Philippe le Long, de Charles le Bel et enfin du roi Jean. Ce monarque le céda au duc de Berry, son second fils ; ce prince au connétable du Guesclin, et celui-ci au duc d'Anjou. Apparemment que, dans le temps des troubles du règne de Charles VI, la maison royale de Cachant fut ruinée ; car on ne voit plus depuis ce temps-là ce qu'elle est devenue. L'abbé de Saint-Germain est toujours seigneur de Cachant, et ceux qui ont des fiefs et des maisons dans ce village, en relèvent. La situation de Villejuif est connue dès le temps de Jules César, qui fait mention d'une hauteur auprès de la ville de Lutèce, sur laquelle il s'arrêta, et remonta de là vers Essonne et Melun . Cette hauteur étoit sûrement celle de Villejuif : mais d'où vient le nom que porte actuellement cette paroisse? Son étymologie pourroit faire la matière de grandes dissertations ; ce qu'il y a de sûr, est qu'elle ne vient point des Juifs, car il n'y en a jamais eu dans ce lieu, mais plutôt de Villa Jugi , ville sur la hauteur. L'église paroissiale, dont la construction paroît être de la fin du quinzième siècle , ou des premières années du seizième, renferme des reliques qui y attiroient autrefois un grand concours de peuple catholique qui venoit les révérer. On les porte encore en procession à certains jours de l'année. Elles consistent dans un os de la jambe de saint Cyr, la mâchoire de sainte Julitte, et une vertèbre du cou de saint Roch. On fait que saint Cyr souffrit le martyre étant encore enfant, et que sainte Julitte étoit sa mère ; quant à saint Roch, il est assez connu. Le chapitre de Notre-Dame et les principales églises de Paris ont eu autrefois des biens et des rentes à Villejuif, mais le Roi en étoit seigneur haut-justicier, et il faisoit partie du comté de Montlhéry. Depuis, nos Rois ont cédé ou engagé cette justice à différents particuliers. Les principales familles de l'ancienne magistrature de Paris l'ont possédée. Le couvent de filles de la Saussaye est sur le territoire de la paroisse de Chevilly, qui d'ailleurs n'a rien de remarquable. Cette maison étoit autrefois une maladrerie ou léproserie pour les femmes, fondée du temps de Louis le jeune. Au quatorzième siècle , la supérieure prit le nom de Prieure, et les Hospitalières devinrent de vraies religieuses de l'ordre de Saint Augustin. On prétend qu'au seizième siècle elles sont devenues Bénédictines. La Prieure est de nomination royale, et se disoit tout-à-fait exempte de la juridiction de l'archevêque : mais je crois que cette maison est à présent absolument détruite. Les bâtiments en subsistent cependant encore à environ une demi-lieue de Villejuif, sur le chemin de Paris à Fontainebleau. La paroisse de Rungis est partagée entre l'abbaye de. Sainte-Geneviève et le chapitre de Notre-Dame de Paris, qui nomme à la cure. C'est là que sont la source et le réservoir des eaux que l'on nomme communément à Paris eau d'Arcueil, parce que l'aqueduc qui les y conduit passe par ce dernier village. Sans m'arrêter aux paroisses de Vissoux et de Parai , je me contenterai de dire que celle de Morangis ne porte ce nom que depuis 1693 ; au seizième siècle , elle s'appeloit Louant. C'est en faveur de MM. Barillon qu'on lui a fait prendre le nom qu'elle porte à présent.
Pour de nombreux archéologues la frontière entre les doyennés de Châteaufort et de Montlhéry suivrait le tracé de l'ancienne voie romaine de Paris à Orléans. Cette hypothèse a été récemment vérifiée par les fouilles réalisées au nord de Longjumeau.Chilly qui est à quatre lieues de Paris et à deux de Montlhéry, à l'extrémité de la plaine que l'on nomme Longboyau, et qui, de l'autre extrémité, se termine à Villejuif, s'appeloit anciennement Chailly. Il n'étoit pas encore bien remarquable au seizième siècle ; cependant, dès le douzième, il avoit eu pour seigneur Robert, comte de Dreux , fils de Louis le Gros, qui y bâtit un château et une chapelle. Pierre de Dreux, comte de Bretagne, en hérita, son gendre, Hugues de Luzignan, comte de la Marche, le vendit au roi Philippe le Bel. Ensuite nos rois cédèrent et engagèrent cette seigneurie à différentes personnes, jusqu'à ce qu'enfin elle entra dans la maison d'Anjou au quatorzième siècle ; à la fin du quinzième, elle revint au roi Louis XI, François 1er la donna à sa sœur naturelle, Souveraine ( nom de baptême) d'Angoulême, qui avoit épousé Michel Gaillard, panetier du roi. La postérité de Michel Gaillard, en jouit jusqu'à ce qu'en 1616, Martin Rusé, secrétaire d'Etat, l'acheta ; Antoine Coeffier d'Effiat, neveu de Martin Rusé, en hérita. Celui-ci devint bien grand seigneur sous le règne de Louis XIII, car il fut surintendant des Finances, et mourut maréchal de France. Il fit bâtir le château de Chilly avec une magnificence vraiment royale. Celui qu'occupoit son oncle le secrétaire d'État, n'étoit ni si beau ni si grand ; nos cosmographes nous en ont laissé la description et la représentation. Quant à celui du maréchal d'Effiat, on le voit encore, et il a été de nouveau embelli par ses héritiers et successeurs qui ont été les ducs de la Meilleraye-Mazarin, une fille, du Maréchal d'Effiat ayant épousé le maréchal de la Meilleraye. On voit dans l'église, donc le bâtiment est du quatorzième siècle, des tombeaux très modestes de quelques anciens seigneurs, et de plus magnifiques élevés à MM. d'Effiat et de la Meilleraye. Il y a dans la paroisse de Chilly un petit prieuré de chanoines réguliers, fondé au treizième siècle par les anciens seigneurs de la Maison de Dreux. Il est sous l'invocation de saint Éloi, dont on prétend y conserver quelques reliques; l'église est bâtie dans le goût gothique, et à peu près du temps de la fondation. Longjumeau est un gros bourg de plus de douze cents habitants, très-anciennement dépendant du Domaine, si bien qu'on prétend que nos Rois de la première Race y avoient un palais et y ont tenu des Cours plénières et des Parlements. Les plus anciens seigneurs particuliers que l'on connoisse, sont les Comtes de Dreux, qui possédèrent Longjumeau avec Chilly, et ces deux terres réunies ont été aux mêmes maîtres jusqu'au moment présent. Au reste, il y a dans Longjumeau et dans l'étendue de la paroisse, différents fiefs appartenants à des seigneurs particuliers. Balainvilliers est une assez belle terre, érigée en paroisse au treizième siècle, et en baronnie au dix-septième. Espinay-sur-Orge appartient en plus grande partie à l'abbaye de Sainte Geneviève. Près de là est un prieuré assez considérable de l'Ordre de Cluni nommé Longpont , que l'on a quelquefois assez mal à propos confondu avec l'abbaye de Longpont, dans le Soissonnois. Enfin on trouve sur le grand chemin de Paris à Orléans, entre Longjumeau et Châtres, le bourg et le château de Montlhéry . Le bourg a environ douze cents habitants ; le château est ruiné et conserve cependant une tour fort élevée, que l'on voit de fort loin, même de Paris. Beaucoup de fiefs et de seigneuries en relèvent; mais elle relève elle-même de la tour du Louvre. On a fait bien des contes sur l'origine et l'étymologie de ce château. Il y a des vieux auteurs qui la font remonter jusqu'au temps des druides ; d'autres prétendent qu'elle a été bâtie par !e traître Ganelon ; mais il est plus raisonnable de ne faire remonter cette histoire que jusqu'au règne de Pépin. Ce premier Roi de la seconde race donna cette terre à l'abbaye de Saint-Denis ; quelque temps après, elle passa par échange à l'évêque de Pans; ce Prélat inféoda la montagne à quelques chevaliers qui la fortifièrent, pour se défendre contre les courses des Normands. Telle est l'origine du château ; le bourg s'est formé de maisons de paysans qui se réfugièrent au pied et sous la protection de cette forteresse. Sous le règne de Robert, Thibaut, que l'on croit avoir été de la maison de Montmorency, et qui fut surnommé File Etoupe parce qu'il avoit les cheveux blancs, étoit possesseur du château de Montlhéry. Guy, son fils, fut fondateur de la collégiale du château, d'une autre église dans le bourg, et avec sa femme Hodierne, du prieuré de Longpont. Leur fils aîné s'appela Milon , et fut surnommé le Grand ; effectivement il fut assez grand seigneur pour donner beaucoup d'inquiétude au Roi Philippe I. Cependant Elisabeth, fille unique de Guy le Rousseau, fils de Milon, épousa Philippe de Mantes, fils naturel du Roi et de Bertrade de Montfort. Cependant les affaires se brouillèrent encore ; il en résulta une véritable guerre entre Louis le Gros, les Montmorency seigneurs de Montlhéry, et autres. Le roi prit enfin le château, en rasa les fortifications, et ne laissa que la tour. Guy le Rousseau, sa fille et son frère cadet étant morts, nos Rois devinrent absolument les maîtres de Montlhéry, Philippe Auguste et ses successeurs y établirent des chevaliers pour châtelains ; mais eux-mêmes y alloient souvent, et y recevoient les hommages d'un assez grand nombre de chevaliers qui possédoient des fiefs aux environs. D'ailleurs la tour de Montlhéry servoit quelquefois à renfermer des prisonniers d'état de grande conséquence. Au quinzième siècle, ce château parut une place importante, dont les différents partis jugèrent à propos de s'assurer. Enfin, en 1465, la Ligue, que l'on appela du bien public, s'étant formée, et les seigneurs qui la composoient faisant la guerre au Roi Louis XI, Charles de Bourgogne, dit le Téméraire, qui n'étoit encore que comte de Charolois, s'avança jusqu'aux portes de Paris, mais ne put le prendre. L'armée du Roi l'ayant suivi jusqu'à Linas, l'affaire s'engagea entre les Bourguignons et les François. Louis XI ne s'y montra pas fort brave, et le comte de Charolois au contraire prouva qu'il méritoit le surnom qu'il a toujours porté jusqu'à sa mort. La perte fut grande de part et d'autre; ce pendant les Bourguignons restèrent maîtres du champ de bataille. Ils passèrent t rois jours dans le bourg de Montlhéry, mais fans le piller, et ne sommèrent pas même le château de se rendre. On montre encore près de Montlhéry le champ de cette bataille, et entre autre une pièce de terre considérable, que l'on nomme le Cimetière des Bourguignons. Au seizième siècle, le domaine de Montlhéry a été engagé successivement à différents seigneurs. Au dix-septième, il fut joint à l'apanage de Monsieur Gaston, frère de Louis XIII, et depuis la réunion de cet apanage, il a encore été engagé à MM. de Lamoignon et Phelippeaux. La collégiale de Saint- Pierre de Montlhéry est réduite à un prieuré, dont l'église antique est au milieu des ruines du château. Le prieur est curé primitif de la paroisse du bourg, où il se tient deux fois la semaine des marchés dans lesquels il se fait un grand débit de blés. Linas , ou, pour mieux dire, Linois , est fort près de Montlhéry, si bien qu'on l'en a quelquefois regardé comme un faubourg ; il fut donné dès le dixième siècle à l'église de Saint-Merry de Paris; Se lorsqu'on plaça les reliques du patron dans cette église, on en détacha une partie pour celle de Linas, où on la révère encore. De même il y a un petit chapitre dans l'église de Saint-Merry de Linas, qui est comme un détachement de celui de la collégiale de Paris.
Partie méridionale du doyenné La paroisse de Leuville en est très-proche, et a été détachée de celle de Linas. En 1466, Jacques Olivier, procureur au Parlement, reçut en don ou en paiement la Terre de Linas : le fils de ce procureur entra dans la magistrature, et parvint, par son mérite, à être premier président du Parlement de Paris ; il mourut en 1519, et fut père de François Olivier, chancelier de France en 1545, et qui ne mourut qu'en 1560 . La postérité de ce chancelier jouit de la terre de Leuville, qui fut érigée en marquisat en 1700. Elle s'est éteinte, il y a environ quarante ans, dans les personnes de MM. les Marquis de Leuville et de Givri, morts en Bohême et en Italie pendant la guerre de 1740. Feu M. le Marquis de Poyanne avoit hérité de la terre de Leuville par sa mère. Châtres étoit connu dès le temps de nos Rois de la première Race, qui y avoient une rnaison de campagne : son nom ne vient point du mot latin Castrum, mais du mot celtique Watrum , qui veut dire marécageux ou aquatique. Il ne paroît pas que ce lieu soit devenu bourg avant le douzième siècle ; mais il étoit déjà entouré de murailles sous le règne de Louis le Gros; l'abbé Suger en parle sur ce pied-là. Il y a deux églises, l'une dédiée à Saint Germain, l'autre à Saint Clément : on conserve dans la dernière une partie du corps de Saint Yon, martyr du pays, qu'on prétend avoir été disciple de Saint Denis, premier évêque de Paris ; sa tête est dans un reliquaire séparé. L'église de Saint Clément a été un prieuré dépendant de l'abbaye de Saint Maur, ensuite une petite collégiale, qui avoit une justice particulière dans le bourg, qui paroît avoir été confondue avec celle de la seigneurie. Les premiers seigneurs de Châtres que l'on connoisse, sont des règnes de Philippe 1er et de Louis le Gros ; ils s'appeloient MiIon père et fils ; ils eurent des successeurs de différentes familles, jusqu'à ce qu'au quinzième siècle les seigneurs de Montaigu et ensuite l'amiral de Graville ayant possédé une partie de cette seigneurie, le Roi Louis XI vendit l'autre à l'amiral. Les Balzac d'Entragues héritèrent des Mallet de Graville, et conservèrent cette terre jusqu'au dix-septième siècle. Après avoir passé par plusieurs mains, elle appartint enfin, en 1720, à M, d'Arpajon qui la fit ériger en marquisat, et obtint que le bourg de Châtres se nommeroit dorénavant Arpajon. Les habitants du canton et les voyageurs s'accoutument enfin à lui donner ce nom. Auprès d'Arpajon est la seigneurie de Chantelou , avec un château dans lequel on prétend que le Roi Philippe le Bel et ses enfants faisoient de fréquents séjours. Le château de Bretonniere en est aussi si voisin, qu'il en semble le château : on croit qu'il a été bâti par ordre de la Reine Blanche et du roi Saint Louis son fils ; et on y montre encore des débris de tours et des voûtes, comme des restes de ce premier château. Le village que l'on appelle aujourd'hui Saint-Yon , s'appeloît jadis Haute-feuille. Il est situé sur une hauteur où les gens du pays prétendent qu'il y avoit autrefois une ville ; c'étoit tout au plus un château, et l'on croit que c'est là que fut martyrisé Saint Yon. On y a bâti une chapelle qui est devenue église, et c'est aujour d'hui la paroisse qui a pris son nom. On y voit des tombes d'anciens seigneurs de Saint-Yon, des douzième et treizième siècles, et on y conserve une châsse dans laquelle on prétend qu'il y avoit autrefois beaucoup de reliques de ce saint; mais actuellement il y en a peu. Au commencement du quinzième siècle, il paroît que les seigneurs de Saint-Yon vinrent à Paris. Ils se mirent à la tête des bouchers, qui firent alors tant de désordres. Quelques-uns de ce nom, qui acquirent une partie des boucheries de Paris, sont restés dans la bourgeoisie de cette ville, et y ont exercé des charges municipales; cette branche ne s'est éteinte qu'au dix-septième siècle. Cependant la seigneurie de Saint-Yon a passé en différentes mains. L'amiral de Graville en étoit seigneur au commencement du seizième siècle, et ce village appartient actuellement à MM. de Lamoignon. Boissy-Saint-Yon et Egly sont deux lieux très-près l'un de l'autre. Le second étoit autrefois le principal ; à présent ce n'est plus qu'une annexe de Boissy, qui n'est devenue paroisse qu'au quinzième siècle. On y a ajouté le nom de Saint-Yon, pour le distinguer de tant d'autres terres de Boissy qu'il y a en France. Les Mallet de Graville ont été autrefois seigneurs de ce lieu, comme de plusieurs autres dont je viens de parler : les Balzac d'Entragues leur ont succédé : Boissy- Saint-Yon appartient aujourd'hui à MM. de Lamoignon, aussi bien que la paroisse de Saint-Sulpice de Favieres , qui tire ce dernier nom, des fèves qui croissent en abondance dans fon voisinage. On prétend que l'église paroissiale est la plus belle des villages de tout le royaume. Sa construction est pourtant du treizième siècle. On y conserve quelques reliques de son patron Saint Sulpice. La cure n'est pas moins bonne que l'église est belle; du moins étoit-elle regardée ainsi aux quinzième et seizième siècles. Segrée est un écart de cette paroisse ; la situation en est agréable, quoique dans un fond; il y a de belles eaux, mais qui en rendent le séjour humide et marécageux. Le château de Basville , illustre depuis le dix-septième siècle, parce que depuis cette époque il a été possédé par les grands magistrats de la famille de Lamoignon, près des paroisses dont je viens de parler, et qui appartiennent aux mêmes seigneurs ; il n'est ni du diocèse ni de la Généralité de Paris, mais de l'évêché de Chartres, et de l'élection de Dourdan, dans la Généralité d'Orléans. La paroisse et le château de Chamarante sont à dix lieues de Paris et à trois d'Etampes, dans une vallée proche le grand chemin d'Orléans. Le village s'appeloit autrefois Bonnes situé au pied d'une côte que les anciens titres appellent Cocatrix. L'église est dédiée à Saint Quentin, et étoit autrefois un prieuré dépendant de l'abbaye de Morigny, près d'Etampes. On connoît le lieu de Bonnes dès le temps de Louis le Gros et de Philippe Auguste ; mais le plus ancien seigneur de ce lieu dont on entend parler, est Jean Cocatrix , qui, en 1358 , étoit échevin de Paris, et a donné fon nom à une rue de cette ville. Au quinzième siècle, la terre de Bonnes appartenoit à Jean de Montaigu, seigneur de Marcoussy; au seizième, à la famille de Huraut; enfin, au dix-septième, à MM. d'Ornaison de Chamarante, de qui elle a passé à MM. de Tallaru de Chalmazel. La paroisse de Lardy et celle de Torfou sont dans le voisinage de Chamarante. Torfou n'est fameux que par fa montagne, autrefois couverte de bois et remplie de voleurs qui dévalisoient les voyageurs qui, en allant de Paris à Orléans, étoient obligés de passer au pied de cette montagne. On a eu bien de la peine à les détruire, et on n'a pu en venir à bout qu'en élargissant le chemin et même en le détournant et le faisant passer plus loin. M. de Lamoignon est seigneur de Torfou. Avrinville appartient depuis le onzième siècle à l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Cheptainville , c'est à-dire, la ville du Capitaine, a eu ses seigneurs particuliers dès ce temps-là, et les a encore. La paroisse de Saint Vérain s'appeloit autrefois Ecorchy, mais depuis longtemps on s'est accoutumé à lui donner le nom d'un saint dont le vrai nom est Saint Veran, et en l'honneur de qui on avoit élevé une église, et fondé un monastère qui est réduit à présent à un simple prieuré. Le nom des anciens seigneurs de cette paroisse étoit Carnazet ils l'ont possédée pendant près de trois cents ans. Au commencement du dix-septième siècle, elle fut érigée pour eux en baronnie ; à la fin de ce même siècle, elle a été vendue, et a passé en d'autres mains. La paroisse de Ver le Grand ou Vulgrant a appartenu à ces mêmes seigneurs; mais le fameux chancelier de l'Hôpital l'acheta en 1568. Tout auprès est la paroisse de Ver le Petit, d'où dépend la seigneurie du Bouchet, avec un château assez beau, sur lequel il y a une anecdote singulière; quoiqu'elle soit du dix-septième siècle, je ne peux m'empêcher de la rapporter. Abraham Duquesne étoit un des plus grands officiers de Marine qui aient brillé dans le siècle de Louis XIV; il avoit fait des exploits éclatants dans ce genre, des expéditions des plus heureuses, et même de brillantes conquêtes. Mais il étoit protestant et très attaché à la religion Calviniste. Louis XIV sentit pourtant qu'il devoit être récompensé, et lui accorda une gratification de deux cent mille livres. Duquesne les employa à acheter le château du Bouchée et les terres de Ver le Petit et de Valgrant : le Roi consentit à les ériger en sa faveur en marquisat, sous le nom de Duquesne , en 1681. Cependant Louis XIV étant résolu à révoquer l'édit de Nantes, fit défendre au brave Duquesne de laisser pratiquer dans sa terre la religion prétendue réformée. Il paroît qu'il n'y établie effectivement point de prêche ; mais pour lui il ne voulut jamais y renoncer, ni faire aucun exercice de la religion catholique. Il mourut tranquille dans son château, sans avoir l'honneur d'être inhumé avec pompe dans son église; son corps fut enterré sans cérémonie dans une fosse au bout de son jardin, où probablement il est encore, et l'on n'y voit ni monument ni épitaphe. Je passe sous silence quelques paroisses de ces cantons qui n'offrent rien de remarquable, et je me rapproche de la terre et du château de Villeroy qui n'ont commencé à être bien connus qu'au seizième siècle. Cette terre a suivi et partagé l'illustration de ses possesseurs, et surtout de Nicolas de Neuville, seigneur de Villeroy, secrétaire d'Etat sous quatre rois, Charles IX, Henri III, Henri IV et Louis XIII. La paroisse de Villeroy s'appelle ou s'appeloit Menessï, et tiroit son nom d'un seigneur nommé Manasses, qui vivoit, à ce que l'on croit, an douzième ou treizième siècle, et que l'on dit avoir été de la famille des Garlandes autrefois si puissants. L'église paroissiale paroît avoir été construite aussi vers le treizième siècle, ou si elle est plus moderne, on y a suivi le goût de ce temps-là; mais elle a été fort embellie depuis par MM. de Villeroy. Il se tient tous les ans, le jour de Saint-Denis, une foire dans une prairie fort agréable, entre Menessi et le château de Villeroy ; c'est une des premières faveurs que Messieurs de Villeroy aient procurées à ce canton. Ils obtinrent cette grâce d'Henri II en 1550. Comme la saison est ordinairement belle alors, cette foire est une fête pour tout le pays; elle est belle et brillante, d'ailleurs il s'y vend beaucoup de bestiaux. Villeroy n'étoit au quatorzième siècle , qu'un hameau, avec un petit château qui s'augmenta cependant au quinzième siècle , au point qu'on y établit une cure dont l'abbesse d'Hieres eut la nomination, parce qu'une partie s'étendoit fur un terrain dépendant d'elle. Tout à la fin du quinzième siècle , Pierre Legendre, trésorier de France, et qui fut prévôt des marchands, posséda Villeroy, apparemment par acquisition ; il fut le grand-oncle maternel de Nicolas de Neuville , auquel il la laissa en 1515. Celui-ci fut père du fameux secrétaire d'Etat, qui ne mourut qu'en 1617. Ce ministre étendit ses possessions, non seulement sur Menessi, qui se trouva, pour ainsi dire, confondu avec Villeroy, mais sur un grand nombre de fiefs et de villages voisins, et fit commencer le superbe château que l'on y voit encore. En 1615, Villeroy fut érigé en marquisat en faveur de Charles de Villeroy, fils du secrétaire d'Etat, à qui son père l'a voit cédé. Le fils de Charles, nommé Nicolas, fut maréchal de France et gouverneur de la personne de Louis XIV pendant sa jeunesse. Ce fut en sa faveur que Villeroy fut érigé en Duché en 1651. On a joint pour se former douze paroisses des environs, dont six du diocèse et de l'élection de Paris, et les six autres de ceux de Sens. Il y a quarante-trois terres nobles qui en relèvent. Essone étoit autrefois un lieu très-considérable. Sous la première race de nos rois on y battoit monnoie; on en trouve encore qui porte le nom d'Exona. L'abbé Suger en parle sous ce nom latin, qui est aussi celui de la rivière qui y passe, et se jette dans la Seine à Corbeil. L'ancien Corbeil ayant été autrefois tout entier de la partie droite de la Seine, ce qui étoit de la partie gauche dépendoit de la paroisse d'Essone ; mais Corbeil ayant, pour ainsi dire passé de ce côté-là, il ne reste plus à Essone que ce qui est sur la hauteur par laquelle passe le grand chemin de Paris à Fontainebleau. Cependant ce qui est resté à Essone est assez considérable, pour que cette paroisse ait encore environ six cents habitants. La paroisse, ou plutôt les paroisses de Brétigny sont entre le chemin d'Orléans et celui de Fontainebleau, à la hauteur d'Essone et de Montlhéry. L'étymologie de ce nom vient de Brito, Breton , parce qu'on croit que les premiers habitants de ce lieu étoient venus de Bretagne. Ce lieu est connu dès le onzième siècle, et les deux paroisses existent dès le treizième. Ce n'est point dans ce Brétigny-là que s'est conclu le traité sous le Roi Jean ; mais c'est fur les coteaux voisins que croît le fameux vin de Brétigny, qui fait danser les chèvres. Tout le monde sait à présent l'origine de cette expression proverbiale et qu'il y avoit auprès de Brétigny une famille de vignerons, dont le nom étoit Chèvre. Quand ces bonnes gens avoient vendu avantageusement leur vin, tout médiocre qu'il étoit, ils étoient contents, dansoient et sautoient. Le Plessis-Paté est une paroisse démembrée de celle de Brétigny. Elle tire fort son surnom d'un chevalier qui en étoit seigneur sous le règne de Philippe Auguste, et qui s'appeloit Guillaume Pâté. La famille des Pâtés a duré jusqu'en 1405, a possédé le Plessis jusqu'aux premières années du quinzième siècle, qu'une dame, dite communément Marie la Pâtée, le vendit; il passa aux seigneurs de Blosset, dont l'un fut chevalier du Saint-Esprit lors de l'institution de cet ordre par Henri III. Vers 1610, un M. de Laigue, conseiller d'Etat, étoit seigneur de cette terre; il la fit ériger en baronnie, y fit bâtir un beau château avec des jardins fort ornés, et construire une église qu'il fit ériger en paroisse. Les héritiers de ce M. de Laigue vendirent cette terre à Mr d'Argouges, premier président du Parlement de Bretagne, qui lui fit prendre le nom du Plessis-d'Argouges : cependant les héritiers de M. d'Argouges l'ont ensuite vendue. La paroisse de Fleuri , qui est dans ces cantons, est surnommée Méraugis , du nom d'un de ses anciens seigneurs, qui vivoit au treizième siècle ; elle a depuis cette époque appartenu à un grand nombre de seigneurs différents. En 1601, elle fut acquise par François Joly, avocat, originaire de Bourgogne, chef du Conseil du cardinal de Richelieu, qui mourut en 1635, étant aussi seigneur de la terre de la Mousse, au Maine. Jean Joly, son fils aîné, fut conseiller au Grand Conseil, et grand-père, par sa fille, du fameux abbé Boutillier de Rancé, réformateur de la Trappe, et par son fils, de Mr Joly de Fleury, procureur-général, père de celui d'aujourd'hui. Ris est un village très-agréable et bien peuplé de maisons de campagne, qui est connu depuis huit cents ans. L'église paroissiale, érigée environ au douzième siècle, est encore de ce temps-là même. Depuis la fin du seizième siècle jusqu'à nos jours, cette terre a été possédée par MM. Faucon de Ris, qui ont rempli des places considérables dans la magistrature, ayant fourni plusieurs premiers présidents aux parlements de Rouen et de Bretagne.
Les paroisses du val d'Orge Sainte-Geneviève-des-Bois étoit connue dès le temps de Hugues Capet et du roi Robert, et peut-être plus anciennement. Elle s'appeloit Seguiny ou Sequiny, du nom d'un comte Seguin , qui vivoit , à ce que l'on croit, dès le temps de Charlemagne : mais, lors des irruptions des Normands, les reliques de sainte Geneviève ayant été réfugiées jusque dans le château d'un seigneur qui possédoit en même temps Draveil, Morsan et Sequiny, ce dernier lieu fut sans doute celui où elles s'arrêtèrent le plus longtemps , car il prit le nom de Sainte Geneviève des Bois ou du Bois. On voit encore les ruines d'une tour de l'ancien château; elle est entourée d'un fossé plein d'eau, et elle contient une chapelle dédiée à Sainte Geneviève. C'est-là l'ancien château ; le nouveau est plus loin ; il contient des beautés, entre autres quelques statues de la façon de Jean Goujon, célèbre sculpteur et architecte, auteur des bas-reliefs de la fontaine des Innocents à Paris. Ce château a été fort embelli par MM. Boyer, conseillers au Parlement, dont l'héritière épousa, en 1660 , le premier maréchal de Noailles. On montre encore dans le château de Sainte-Geneviève-des-Bois une chambre que l'on nomme la Chambre du Roi , parce que les rois Louis XIII et Louis XIV y ont souvent couché en allant à Fontainebleau. On célèbre tous les ans dans la paroisse de Sainte-Geneviève une Grand' Messe des Morts, pour le repos de l'âme de Hugues Capet, et c'est probablement le seul service que l'on fasse pour ce monarque dans tout le royaume. Mais il faut remarquer qu'il n'est pas d'une ancienne fondation, et que c'est une charge imposée nouvellement, par une espèce de plaisanterie, à un seigneur de Sainte-Geneviève-des-Bois. Morcent-sur-Orge est une dépendance de Sainte-Geneviève-des-Bois; l'étymologie de son nom vient du latin muro cinctus , qui signifie entouré de murailles, effectivement c'étoit autrefois une forteresse ; mais à présent ce n'est qu'un village tout ouvert. Savigny-sur-Orge porte ce surnom, pour le distinguer d'une infinité d'autres lieux de France qui s'appellent Savigny; d'ailleurs il est situé sur la petite rivière d'Orge. L'église étoit déjà paroissiale au douzième siècle. Dès ce temps-là, Savigny avoit des seigneurs qui étoient qualifiés de chevaliers. On ne sait pas précisément quelle est l'époque de la construction du château, qui est beau, et dans le goût des maisons royales du quinzième siècle. On prétend que le roi Charles VII y a tenu renfermée la belle Agnès Sorel, qu'elle y vivoit dans une grande solitude, et n'y recevoit d'autres visites que celles du roi, qui entroit dans la tour par une fenêtre, à l'aide d'une échelle. Je ne conçois pas trop dans quel temps de leur vie Charles VII et Agnès Sorel ont été obligés de mettre tant de précaution et de mystère dans leurs rendez-vous : on fait que depuis ils ne se cachoient pas tant de leurs sentiments mutuels. Quoi qu'il en soit, Savigny étant revenu à Louis XI , il le donna au cardinal Balue, évêque d'Evreux ; le monarque y venoit faire quelquefois des voyages, et en a daté plusieurs lettres. Ce château étoit encore regardé comme très-fort à la fin du seizième siècle ; car en 1581 il fut surpris par les troupes d'Henri IV sur les Ligueurs. Indépendamment de cet ancien château, il y en a un plus moderne qui, dans les dix-septième et dix-huitième siècles, à été possédé par des gens de qualité, tels que MM. de la Baume-Montrevel, de Créquy, de Vins et de Vintimille du Luc. Viri est encore un assez gros lieu qui n'est pas éloigné de Juvisi . Les environs sont remplis de vignes et de pâturages ; on y fait des fromages blancs de lait de vaches, qui depuis longtemps sont connus et estimés à Paris. Sur le bord de la Seine est un petit hameau dépendant de Viri, que l'on appelle Châtillon, nom si connu et si commun en France, qu'il n'y a aucune province où il n'y ait des villes, bourgs, villages, hameaux et châteaux qui ne s'appellent ainsi. Juvisi étoit encore, au seizième siècle un gros village, mais depuis environ cinquante ans il est fort diminué ; les travaux que l'on a faits sur le grand chemin de Paris à Fontainebleau ayant obligé de détruite quelques maisons , et le reste du village n'étant plus si passant. On n'entend parler de Juvisi qu'au douzième siècle ; l'on sait qu'alors les moines de Marmoutier y avoient des possessions habitées par des paysans qui étoient à peu près, serfs, mais que, par ménagement, les moines appeloient leurs hôtes : ces religieux avoient droit de présenter à la cure. Il y avoit aussi une léproserie considérable, et à laquelle on avoit attaché de gros revenus. Il en subsiste un petit reste dans une commanderie de l'Ordre de Saint-Lazare, qui a souffert tous les accidents ordinaires à ces établissements. Depuis qu'il n'y a plus de lépreux, la plupart des biens en ont été usurpés par les voisins, et pillés même par les commandeurs, qui se les sont souvent appropriés. La liste des seigneurs de Juvisi est peu suivie, et n'offre rien de curieux. Atis ou Athies vient d'un mot latin barbare, Attegia qui veut dire cabane, et n'est bien connu que depuis que la châsse de Sainte Geneviève, tirée de Paris par la crainte des Normands , s'arrêta pendant quelques jours dans ces cabanes ( in Attegiis ) : actuellement ce lieu est assez considérable ; on compte deux cent cinquante habitants dans Atis même, sans parler de ses dépendances. La situation en est très-agréable sur un coteau, d'où on a une vue charmante le long des rives de la Seine, qui coule au bas à quelque distance; mais la petite rivière d'Orge est encore plus voisine d'Atis même; elle longe le coteau, d'où on la voit se jeter dans la Seine. L'église paroissiale est d'une construction très ancienne ; on la juge du treizième siècle , Se la tour qui lui sert de clocher et qui est en pyramide très-élevée, du douzième. Il paroît qu'elle a dépendu de toute ancienneté de l'abbaye de Saint-Victor; on croit même qu'il y a voit auprès un petit monastère de chanoines réguliers ; mais aujourd'hui ce n'est plus qu'un prieuré. Les plus anciens seigneurs d'Atis que l'on connoisse, vivoient sous, le règne de Philippe Auguste. Sous celui de Saint Louis, Hugues d'Atis fut un seigneur très illustre ; il exerça l'office, de Grand Panetier de France. Au quinzième siècle , sous le règne de Charles VII, cette seigneurie appartint à une famille de magistrats nommée Viole. Sous François 1er, Pierre Viole , prévôt des marchands, étoit seigneur d'Atis ; et sous celui d'Henri IV, un autre Viole étoit président au Parlement ; on l'appelloit communément le président d'Atis. Ce président gagna un procès contre les religieux de l'abbaye Saint-Victor, et fut reconnu seigneur haut-justicier de cette paroisse, relevant cependant de la tour de Montlhéri. Un fils de ce président eut la fureur d'etre ermite, et vécut longtemps, dans la terre même de son père, sous le nom de Frère de la Mort, portant une robe noire et une tête de mort pendue à son cou. Il faisoit d'ailleurs beaucoup de bonnes œuvres. La famille des Viole étant éteinte, la seigneurie d'Atis a passé en différentes mains. On est assuré que plusieurs de nos rois y ont demeuré, puisqu'il y a des ordonnances de Saint-Louis et de Philippe le Bel qui en sont datées, Mais on ne sait pas où ils habitoient ; s'étoit probablement au prieuré. La plus belle maison d'Atis qui subsiste actuellement, est celle qui, au siècle dernier, appartenoit au duc de Roquelaure ; elle a passé depuis à Madame la Maréchale de Villars : les jardins et les terrasses sont admirables. Je me souviens d'avoir encore vu dans un des bosquets un monument élevé à une petite chienne, au dessus ; auquel étoient écrits ces, quatre vers : Ci gît la célèbre Badine, Qui n'eut ni beauté, ni bonté, Mais dont l'esprit a démonté, Le système de la machine. Ces vers font, m'a-t-on dit, de Mademoiselle de Scudery, qui avoit une maison de campagne à Atis, que l'on m'a fait remarquer.
Les paroisses du val de Seine Le hameau de Mons est une dépendance d'Atis ; il a eu des seigneurs particuliers, entre lesquels on compte la femme d'Enguerrand de Marigny, qui en étoit héritière. La situation en est presque aussi belle que celle du village principal ; il y a un pont sur la petite rivière d'Orge. Ablon est tout au bord de la Seine, au dessus d'Atis. Dès le treizième siècle il y avoir une chapelle qui dépend d'Atis ; on appelle improprement le chapelain, Prieur d'Ablon . Le nom latin de ce lieu est Ablavium ; il n'est effectivement composé que de sables ou terres rapportées par la rivière de Seine, qui, en différents temps, a changé son lit. Vers 1560, Ablon avoir pour seigneur Pierre Grassin, conseiller au Parlement ; il donna trente mille francs pour fonder à Paris un collège qui s'appelle encore aujourd'hui le Collège des Grassins. Henri IV, par l'édit de Nantes, ayant fixé les lieux où les Huguenots pourroient avoir des prêches, permit l'établissement de deux auprès de Paris ; le premier à Charenton, le second à Ablon ; ils ont tous deux été détruits sous le règne de Louis XIV (1) . Villeneuve-le-Roi , à la rive gauche de la Seine, à trois lieues de Paris, est connu comme paroisse dès le douzième siècle , sous le règne de Louis le Jeune , à qui l'on rapporte également la fondation du bourg de Villeneuve-le-Roi, dans le diocèse de Sens. C'est un pays de vignoble, dont le vin n'est pas mauvais ; il faisoit partie du Domaine du temps de Philippe Auguste. Au quatorzième siècle , les Chartreux possédèrent la plus grande partie de cette terre, tant par acquisition que parce qu'elle leur avoit été donnée : le vin de leur clos passait pour si bon, que le Roi Charles VIII, qui en avoit goûté chez eux, ordonna à ses pourvoyeurs d'y faire dorénavant sa provision. Sur la fin du seizième siècle , les Chartreux s'étant déclarés pour la Ligue, et ayant fait des dettes à cette occasion, on les obligea à vendre le bien qu'ils avoient à Villeneuve-le-Roi ; un contrôleur général des Finances, nommé Marcel , l'acheta ; après lui il passa à M. du Vair , qui fut Garde des Sceaux sous Louis XIII, et mourut évêque de Lizieux en 1621. Environ soixante ans après, M. Pelletier, contrôleur général après Monsieur Colbert, en fit l'acquisition ; et ayant quitté les pénibles fonctions de l'administration des finances, il s'y retira. Il avoir absolument changé les dispositions du château bâti par M. du Vair, et l'avoir arrangé avec beaucoup d'élégance et de goût, mais avec une simplicité respectable. La retraite de ce ministre à Villeneuve-le-Roi, et la façon dont il y vécut, lui firent infiniment d'honneur. Il se livra tout-à-fait à l'étude et aux lettres , et publia, entre autres, de belles éditions des ouvrages de Messieurs Pithou, ses grand-père et oncle maternels, et publia lui-même à leur imitation, dans le plus beau latin, deux ouvrages sous les titres de Comes Senectutis & Comes Rusticus : on trouve dans ce dernier une belle description de sa maison, adressée à M. Rollin. Il mourut en 1711 âgé de quatre-vingt-un ans : son cœur est dans la paroisse de Villeneuve-le-Roi ; son fils et son petit-fils, successivement premiers présidents du Parlement, ont possédé cette terre, qui est enfin sortie de leur famille. Le village d' Orly se nomme en latin Aureliacum et vient apparemment d' Aurelius , nom commun parmi les Gaulois romanisés. L'église de Paris y avoit des biens dès le neuvième siècle, et elle y en possède encore à présent. Le terrain des environs est fertile en grains et en vins, et l'église est située dans un fond, ayant un coteau assez élevé à l'occident. Elle est dédiée à Saint-Germain, évêque de Paris, et à la nomination du chapitre de Notre-Dame. On compte qu'elle a aujourd'hui plus de quatre cents habitants. S'il y a eu des seigneurs d'Orly autres que ce Chapitre, on ne les connoît pas. Thiais est plus haut qu'Orly, entre le chemin de Fontainebleau et Choisy, qui étoit autrefois une dépendance de cette paroisse, Thiais existoit dès le temps de Charlemagne, et a été très anciennement donné à l'abbaye de Sainte-Geneviève, qui le possède encore, à quelques fiefs près : l'église est vaste et ancienne ; elle est dédiée à saint Loup ou Leu et saint Gilles, et on y conserve des reliques de ces saints. Il y a un écart de Thiais que l'on appelle Grignon. Choisy , que l'on appelle actuellement Choisy-le-Roi , qu'on appeloit, il y a un siècle, Choisy-Mademoiselle et plus anciennement encore, Choisy-sur-Seine , étoit au treizième siècle, un écart de Thiais. Il y avoit alors une chapelle qui a été depuis convertie en pareille. L'église qui au seizième siècle, étoit encore la même qu'au temps de la fondation; mais Mademoiselle d'Orléans en fit construire une autre au dix-septième, et de nos jours le Roi y en a fait faire une encore plus belle. On ne voit de seigneurs de Choisy, relevants de l'abbaye Saint-Germain, que sous le règne de Louis XI. C'étoient des gens fort ordinaires, jusqu'à ce que Mademoiselle , fille de Monsieur Gaston , et cousine germaine de Louis- XIV, l'acheta, et y fit bâtir un beau château qui fait la base de celui d'aujourd'hui, La terrasse en étoit le plus beau morceau. Les jardins furent ornés de statues parfaitement bien copiées d'après les plus belles antiques de Rome. Elles avoient été faites pour M. Fouquet, et destinées à orner son château deVaux. Mademoiselle laissa Choisy à M. le Dauphin, qui le céda à Madame de Louvois, veuve du Ministre, en échange de Meudon. À la mort de Madame de Louvois, il passa à Madame la Princesse de Conti, première douairière, fille légitimée de Louis XIV ; après elle à Louis XV ; et l'on sait combien ce monarque a embelli et illustré ce lieu. Vitry est environ à une demi lieue en deçà de Choisy, sur le chemin de Paris. Personne n'ignore combien ce nom est commun en France ; pour distinguer celui-ci de tous les autres, on l'appelle Vitry-sur-Seine, quoiqu'il ne soit pas précisément sur les bords de cette rivière. Le lieu est considérable, et a deux paroisses ; ce qui fait qu'on l'a quelquefois appelé bourg ; cependant il n'est point fermé. Il y a une grande différence entre ces deux paroisses ; car l'une a, dit-on, mille communiants, et l'autre n'en a pas cent. La première est dédiée à saint Germain, et est d'un gros revenu; la seconde à saint Gervais, d'un beaucoup moindre. Les deux églises actuellement subsistantes sont à peu près delà même antiquité, c'est-à-dire du treizième siècle. Mais l'on fait que les évêques et le Chapitre de Paris ont eu de toute ancienneté des biens dans la grande, et en ont eu la nomination. La seconde dépend depuis longtemps du Chapitre de Saint-Marcel. D'ailleurs plusieurs autres seigneurs, tant ecclésiastiques que séculiers, ont eu des possessions et même des fiefs dans l'étendue de la paroisse de Vitry. Ainsi l'abbaye de S. Laumer de Blois, le prieuré de Saint Eloy uni à l'évêché de Paris, les Chanoines réguliers de Saint -Victor et ceux de Sainte-Croix de la Bretonnerie de Paris, étoient co-seigneurs de Vitry en 1580. Quant aux seigneurs laïcs, les principaux fiefs séculiers qui leur appartiennent, sont, celui de Bremi et celui de Bonvarlet. On a bâti sur ces fiefs un grand nombre de belles maisons ; il seroit trop long de raconter quels en ont été les possesseurs, et hors de mon sujet de dire quels ils sont à présent. Il y a des gens qui prétendent que ce fut à ce Vitry même que mourut, en 1060, le roi Henri 1er, petit-fils de Hugues Capet. Pendant les guerres civiles des XIVe, XVe et XVIe siècles, il y a eu plusieurs affaires et combats à Vitry et aux environs. En se rapprochant de Paris et de la rivière de Seine, on trouve Ivry , qui étoit connu dès le dixième siècle, sous le règne de Louis d'Outremer, et est paroisse depuis le treizième, et à la collation du chapitre de Saint-Marcel. Cependant il a eu ses seigneurs particuliers, mais sur lesquels on n'a pas d'anecdotes fort anciennes. Au commencement de ce siècle, M. Bosc, conseiller d'Etat et ancien prévôt des marchands, étoit seigneur d'Ivry, et y avoit fait bâtir une belle maison. Ses héritiers la vendirent à M. le maréchal d'Uxelles, qui l'a laissée à M. le marquis de Beringhen, premier écuyer du Roi, qu'il a fait son légataire universel. Sa veuve en jouit encore. Le Port-à-Langlois est un écart de la paroisse d'Ivry ; il prend son nom de Thomas Langlois, qui, l'an 1300, possédoit dans ce lieu une cabane, et y avoit établi un bateau, au moyen duquel il traversoit la rivière, à peu près vis-à-vis du lieu où est à présent le château de Bercy.
Note (1) Le collège des Grassins ou d'Ablon , fondé exactement le 16 octobre 1569, accueillait des étudiants en théologie de l'université de Paris. Situé, à Paris, dans l'actuelle rue Laplace, naguère rue des Amandiers-Sainte-Geneviève, il se composait, à l'origine, d'un principal et de six grands boursiers, moniteurs de six petits boursiers d'humanité et de philosophie (artiens).
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