Emmeline de Montlhéry et ses descendants (2)

Chronique du Vieux Marcoussy --Marcoussis--------------- _----------------------------___---_--juin 2012

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Généalogie simplifiée de la maison de Broyes (XIe-XIIe s.).

C. Julien

 

 

Cette chronique est le second volet de l'histoire d'Emmeline de Montlhéry, fille de Milon le Grand, seigneur de Montlhéry et de Bray-sur-Seine et de Lithuise vicomtesse de Troyes, qui fut alliée au seigneur de Broye et fut l'ancêtre d'une lignée de chevaliers célèbres, vassaux du comte de Champagne aux XIIe-XIIIe siècles. Précédemment nous avons pris rencontré les membres de la maison de Broyes, puis Emmeline et son mari Hugues. Les libéralités pieuses faites aux églises et couvents de la Champagne méridionale ont été tirées de différents cartulaires. Nous continuons cette histoire par la biographie de Simon 1er de Broyes, leur fils, et celle des descendants d'Emmeline de Montlhéry (*).

 

 

Simon I de Broyes

Voici les termes avec lesquels Duchesne décrit la biographie de Simon de Broyes, seigneur de Beaufort, de Baye, Trie-le-Bardoul, Charmentré, etc. justifiée par les chartes de diverses églises (1) : «  Ce Simon de Broyes fut fils aisné de Hugues Bardoul II du nom seigneur de Broyes, et d'Emmeline de Montlhéry sa femme. Car il se void nommé le premier entre leurs enfans dans la charte de la fondation du prieuré de Pejaz expédiée l'an 1104. Le continuateur d'Aimoinus fait aussi mention de luy comme du fils et héritier principal de l'une des filles de Miles 1er seigneur de Montlhéry et de Bray, qui estoit Emmeline... .

«  Le mesme Simon de Broyes espousa Félicitas de Brienne , ou Brenne, fille d'Erart comte de Brenne en Champagne, et seur de Gautier pareillement comte de ce lieu, qui print alliance avec Hubeline de Brai ne fille d'André de Baudement, seigneur de Braine-sur-Veste, séneschal de Champagne, seur de Heluide de Brai ne mariée à Guy seigneur de Dampierre, et tante d'Agnes dame de Braine femme de Monsieur Robert de France comte de Dreux. Leur mariage fut célébré l'an 1110, ainsi que remarque Alberic en sa chronique. Et ensuite Simon estant parvenu aux seigneuries de Broyes et de Beaufort par le trespas de son père, les religieux de Pejaz firent un accord en sa présence avec les chanoines de Broyes, lequel Philippe évesque de Troyes confirma l'an 1112 à la prière de Guy abbé de Molesme et de luy. Il fonda aussi quelques années après un monastère à Andecies prés de Baye , où il mist des religieuses tirées de l'abbaye de Juilly : avec le consentement de Félicitas son espouse, et de ses enfans. Ce que Thibaut le Grand comte de Champagne et de Blois approuva par lettres datées de l'an 1131 .

«  Puis luy mesme confirma derechef lesbiens qu'il avoit dé partis à cette abbaye en l'année 1136, qui estoit la cinquiesme du siège de Geofroy évesque de Chaalons. De quoy furent tesmoins Clerembaut de Broyes et Pierre son frère, Guy seigneur de Dampierre , Philippe de Pleurre, et autres. Finalement il donna encore à Hugues Reclus et aux frères qui demeuroient avec luy au lieu appelle de son nom le Reclus , et anciennement la Fontaine de Balime , tout droit d'usage et d'aisance en son bois de Talus. À quoy consentit Félicitas de Brenne son espouse, qui le survescut. Car l'ayant laissée veuve, elle se remaria à Geofroy dit Le Gros seigneur de Joinville , séneschal de Champagne , fils de Roger seigneur de Joinville. Duquel mariage elle eut Geofroy surnommé Vaslet seigneur de Joinville, et Gertrude de Joinville comtesse de Vaudemont, qui par ainsi furent frère et seur uterins des enfans de nostre Simon de Broyes et d'elle. Je n'ay pas trouvé précisément l'année , en laquelle ce Simon décéda. Mais Alberic tesmoigne qu'il fut inhumé en l'abbaye d'Andecies prés de Baye  ».

 

 

Simon II de Beaufort

Simon de Broyes, fils puîné de Simon 1 er et de Félicité de Brenne fut seigneur de Beaufort en la comté de Ronay, de Trie-le-Bardoul, et de Charmentré près de Meaux. Selon André Duchesne, ses principaux actes furent les suivants.

«  L'an 1152 il ratifia tout ce que ses prédécesseurs avoient donné à l'église et abbaye de la Chapelle aux Planches de l'Ordre de Prémonstré, en la présence de Hugues III, seigneur de Broyes, son frère, de Guillaume seigneur de Dampierre, et de Miles de Plancy. De là, il transigea sur un diffèrend qu'il avoit avec Pierre abbé de Monstier la Celle, à cause de quelques héritages situez à Fontenay. Ce qu'il fist à la prière de sa mère, et de Geofroy le Gros seigneur de Joinville, séneschal de Henry comte de Champagne, comme portent les lettres qui en furent passées l'an 1154, est dit fils de Simon de Broyes. Il octroya aussi l'année d'après à l'église de Molesme quarante sols de rente sur le péage de Rameru. Confirma à l'abbaye de Boullencourt les donations que Hugues II Bardoul, son ayeul, et Simon, son père, y avoient faites depuis quarante ans. Donna l'an 1172 tout ce qui luy appartenoit és confins de Prebeliart à la mesme a bbaye, avec le consentement d'Agnès sa femme, dame en partie de Rameru, et de Hugues de Broyes, son frère. Auquel don, il adjousta dix ans après (1182) quelques terres assises près le lieu dit Perte-Haymon, estant assisté de Pierre, abbé de Clair vaux, de Jean abbé de Beaulieu, d'Aubert abbé de la Chapelle, d'Erart comte de Brenne, de Renaut de Pougy, et de Martin de Beaufort, chevaliers. Il renouvella, l'an 1184, la confirmation des biens, dont ses prédécesseurs avoient doté l'abbaye de la Chapelle. Bref il octroya encore à l'abbaye de Boullencourt vingt sols de rente en ses censives de Beaufort, et huit livres monnoye de Troyes sur son péage de Rameru, par lettres des années 1185 et 1187  ».

 

 

Félicitas de Broyes dite de Beaufort

Le mesme Simon seigneur de Beaufort eut pour fille unique Félicitas de Broyes dite de Beaufort, qui luy succéda aux seigneuries de Beaufort, de Trie-le-Bardoul, et de Charmentré. Elle fut aussi du costé d' Agnès sa mère dams en partie de Rameru, et espousa Hugues comte de Retel, fils de Manasses, comte de Retel, et de Mahaut, sa femme, fille du comte Sauvage en Alemagne et d'une fille de la maison de Bar. Du consentement duquel Hugues, elle eschangea ce qui luy appartenoit en la seigneurie de Rameru avec les terres de Pertes et de Taujoux. Ils confirmèrent aussi ensemblement l'an 1210 vingt sols de rente que Simon de Broyes, père de Félicitas avoit donnez à l'abbaye de Boullencourt, à prendre sur ses censives d'Otignes. Et sept ans après ils permirent aux religieux du mesme lieu de clorre de murs ou de fossez le bois des Naudes assis entre leur église et Hampigny. Mais environ l'an 1228 le comte Hugues mourut, laissant veuve cette Félicitas dame de Beaufort sa femme. Laquelle depuis fist encore plusieurs biens à Boullecourt és années 1229, 1230,1240, et 1142. Elle fut mère de quatre fils successivement comtes de Retel, et de trois filles ; à sçavoir de Hugues, Jean , Gaucher, Manasses, Helissende, Mahaut, et Béatrix de Retel. Hugues aisné des fils porta premièrement le tiltre de seigneur de Sainct-Hillier, surnommé le Manastier en la prévosté d'Espernay, sous lequel il print alliance avec Mabile, chastelaine d'Ypre et de Bailleul, veuve d'Adam, seigneur de Uvalaincourt, et seur de Marguerite d'Ypre, femme de Baudouin d'Aire. Depuis il succéda en la comté de Retel à Hugues son père, et procréa un seul fils nommé Jean de Retel conjoint avec Marie d'Audenarde, fille d'Arnoul, seigneur d'Audenarde en Flandres. Mais, ce Jean décéda sans lignée devant Marie, son espouse, qui se remaria avec Godefroy de Louvain.

 

Les écus de Félicité de Broyes et d'Hugues de Retel.

 

Le second fils du comte Hugues de Retel et de Félicitas de Broyes fut Jean de Retel, seigneur de Chastellar, puis de Saint-Hillier, et enfin comte de Retel par la mort de Jean, son neveu. Il succéda aussi à Félicitas, sa mère, en la seigneurie de Beaufort, et espousa Marie de Torote, fille de Jean de Torote et de Noyon, seigneur d'Aillebaudières, bouteiller et gouverneur de Champagne. De laquelle il eut un fils appelle Hugues de Retel, seigneur de Beaufort, allié avec Marie d'Enghien, fille de Gautier, seigneur d'Enghien. Mais il mourut sans postérité devant le comte Jean son père, et après son décès Marie sa veuve reprint pour deuxiesme mary le comte de Brienne. Gaucher de Retel, troisiesme fils de Hugues et de Félicitas fut au commencement seigneur de Raucourt, puis comte de Retel par le trespas de Jean son frère, et décéda encore sans enfans. Par quoy la comté de Retel escheut au quatriesme nommé Manasses de Retel alors seigneur de Maisières. Celuy-cy procréa d'Ysabeau, sa femme, un fils appelé Hugues, mentionné cy-après, et une fille dite Marie de Retel, qui fut conjointe avec Gautier seigneur d'Enghien. Hugues de Retel, fils de Manasses, jouyt premièrement de la seigneurie de Beaufort, laquelle il vendit à Blanche d'Arthois, comtesse de Ronay, veuve de Henry, roy de Navarre, comte de Champagne et de Brie. De là, il print le tiltre de sire de Borc en Champagne. Et en fin ayant hérité de la comté de Retel, il laissa d'Ysabeau son espouse une fille unique nommée Jeanne, qui porta en mariage cette comté à Louys de Flandres comte de Nevers. Quant aux filles de Hugues comte de Retel et de nostre Félicitas de Broyes, dame de Beaufort, la première Helissende de Retel, dame de Pertes et de Taujoux, fut mariée deux fois. Car en premières nopces elle espousa Thomas, comte du Perche, qui mourut sans lignée en Angleterre. Puis, elle reprint alliance avec Garnier de Trainel, seigneur de Marigny, en Champagne (ce Garnier est l'un de ses cousins éloignés puisqu'il était issu de Mélisende de Montlhéry, tante de son ancêtre Milon le Grand).

La seconde, Mahaut de Retel eut pour partage les terres de Trie-le-Bardoul et de Charmentré, qu'elle porta en mariage à Thomas de Coucy I. du nom seigneur de Veruin. Duquel et d'elle sortirent Thomas de Coucy II du nom seigneur de Veruin, Yoland de Coucy femme d'Arnoul seigneur de Mortagne, Chastellain de Tournay, Félicitas de Coucy conjointe avec Baudouin d'Avennes sire de Beaumont en Hainaut, dont entr'autres enfans Béatrix d'Avennes alliée avec Henry II du nom comte de Luxembourg, et Agnès de Coucy espouse de Gobert seigneur d'Aspremont. Finalement, la troisiesme fille de Hugues, comte de Retel et de Félicitas, fut Béatrix de Retel, dame d'Amoingnes, premièrement mariée à un seigneur de la maison de Dampierre, puis religieuse en l'abbaye de la Piété de Rameru.

 

 

Les libéralités pieuses des seigneurs de Broyes

Les abbayes du diocèse de Troyes et de Langres furent richement dotées au XIIe siècle par la puissante famille de Broyes. Par exemple, on compte pas moins de 17 chartes données par les seigneurs de Broyes et de Châteauvillain à l'abbaye de Molesme (Côte-d'Or, arrondissement de Châtillon-sur-Seine, canton de Laignes). Les plus anciennes mentions du sceau seigneurial figurent dans une charte d'Hugues Bardoul II, sire de Broyes, en 1104. Cette année fut remarquable par une grande assemblée féodale tenue à Molesme à Pâques sous les auspices du premier abbé et par la fondation du prieuré de Péas «  Peiacum  » , en Champagne, doté par le sire de Broyes

L'abbaye Notre-Dame d'Andecy fut richement dotée par les seigneurs de Broyes. En 1131, Simon de Broyes, seigneur de Baye, amena des bénédictins dans sa baronnie, et leur donna la terre d'Andecy, comprise entre Baye et Congy. Le pays était habité alors par de riches familles, et tous les seigneurs des environs se hâtèrent de répondre à l'appel fait à leur générosité par Simon de Broyes. La même charte mentionne les donations de Hugues de Montmort qui abandonne le labour de deux charrues en toute saison, d'Anseau de Trainel, cousin de Simon par les Montlhéry, de Marie de Broyes, de Dreux de Gachy, et d'autres aristocrates. Simon de Broyes ne voulut pas demeurer en arrière et augmenta ses libéralités, il ajouta de son chef deux moulins, les droit d'usage et de défrichement dans les bois, les revenus des portes de Broyes, dite Berenger et de la Gate, la première pour l'entretien de la lampe du dortoir, la seconde pour la pitance pendant le carême. Thibaud, comte de Champagne homologua immédiatement cette fondation, en y ajoutant lui-même des biens, et ordonnant à ses officiers de protéger cette maison et ses dépendances (2).

En 1131, Thibaud, comte de Blois, notifie la fondation d'Andecies, relevant de Jully, par Simon, seigneur de Broyes, et ses enfants Hugues, Simon et Émeline, avec rémunération des biens concédés aux religieuses sorties de Jully. Il énumère aussi les donations de Hugues, seigneur de Montmort; de Letice, sa femme, et de ses filles Elvis et Isabelle; de Manassès, seigneur de Pleurre de sa femme Helvis ou Heleridis et de Jean, son fils d'Hélie, seigneur de Montmirail; de Marie de Broyes, etc.

 

 

En 1135, Simon de Broyes, Félicité sa femme et leurs enfants donnent le fief de Nuisement à l'abbaye d'Andecy ptès Baye ; acte pour lequel un Clérembaut de Broyes est le premier témoin. Ce personnage n'appartenait pas à la puissante lignée, mais était un simple gentilhomme habitant la localité de Broyes qui vivait dans l'orbite du seigneur. En 1136, Geoffroi, évêque de Chalons, confirme la donation faite aux religieuses de Jully, lors de la fondation d'Andecies par Simon de Broyes, sa femme Félicité, ses enfants Hugues, Simon et Émeline. Témoins : Clerembaud de Broyes Pierre, son frère Gui, seigneur de Dampierre Philippe de Pleurre. Le même Clérembaut et Pierre, son frère, figurent encore en 1144 parmi les témoins d'un acte de Hugues III, sire de Broyes, en faveur de l'abbaye de Molesme (3).

Dans une charte donnée en 1150, Hugues, seigneur de Broyes, avec l'approbation de son frère Simon et sur les prières de sa mère Félicité, donne à l'église de Mesnil, pour l'usage des hommes de Broyes, un chariot de bois à brûler. «  Hugo, dominus Brecensis, quoniam que facta fiunt cum tempore transeunt et ea que pro helemosina Deo servientibus confereuntur, et ea propter, Ego Hugo, laudante Symone fratre meo, prece et monitu matris mee F., ecclesie de Mesnilo liberaliter concessi ad usum Brecensium hominum cursum unius quadrige ad usum ardendi tantum. Et ut firmius memorie eommandaretur, sigillo meo et sigillo fratris mei sicut inferius patet signatum est. Hujus rei testes sunt Fromundus de Plaiostro, Leonus, Hugo nepos Fromondi, abbas. Petrus Regnes, Hoto, Paganus de Baia, Bonardus, filins Belardi, Petrus capellanus, Garinus capellanus, Hudricus de Peiaco, Robertus, Hugo. Factum est hoc anno ab incarnatione Domini M°C°L° ». (Orig. Fonds Molême, 281.). La même année, le comte Thibaud de Troyes notifie une donation de Gui de Maseio à l'abbaye d'Andecies pour trois de ses filles, nonains de cette abbaye. À la prière de Symon de Broyes, fondateur de cette maison, le comte appose son sceau.

L'abbaye de Reclus doit son existence grâce aux libéralités des seigneurs de Broye. En 1144, Simon de Broyes donne à Hugues Reclusus «  omnes aisancias nemoris mei de Talus præter exsartiare  ». En 1168, Hugues de Broyes, pour se rendre aux conseils de Henri, évêque de Troyes, et constatant la pauvreté persistante de l'abbaye, lui fit d'assez larges aumônes, en revendiquant soigneusement dans l'acte confirmatif, souscrit immédiatement par le prélat, le double titre de « institutor et edificator abbatiæ  ». Les aumônes comprenaient l'aunaie ( alnetum ) de Morin, et les deux rives du ruisseau, la carrière voisine avec un champ de terre à poterie et le chemin pour y aller ; la partie de ses bois sis entre la terre de Roncheria, le gué du ruisseau de Bagneux et le Morin, sous la réserve de ne pouvoir défricher ; enfin, «  ut præfatæ ecclesiæ edificatur  » il accordait aux religieux le libre parcours sur ses domaines et le pâturage dans ses prés donnait à prendre sur les moulins de Baye de quoi entretenir toute la nuit une lampe allumée sur le tombeau de Hugues Reclusus; plus encore vingt arpents de terrain sur le côté méridional de Avoldo pour planter en vignes (4).

Le cartulaire de l'abbaye Saint-Pierre d'Oyes (canton de Sézanne) «  sancti Petri de Oya  », mentionne plusieurs libéralités pieuses des anciens seigneurs de Broyes (5) . Dans une charte sans date, Hugues Alesnellus et Angebert, fils d'Ilder de Monte-Félici remirent à l'abbaye, en présence du comte de Troyes, deux parts de leurs dîmes dudit lieu de Villeseneux « decima villa Seneoris  » avec l'approbation du seigneur de Broyes «  de cujus cassamento erant  » dont les biens étaient dans la mouvance (charte VI). Peu de temps après, en octobre 1148, le seigneur Hugues de Broyes dit «  reclusus  » confirma tous les acquêts faits par l'abbaye en sa suzeraineté «  confirmatio de feodis Hugonis, domini Brecarum  », à la charge de célébrer annuellement son obit après lui (charte VII). Il fut assisté par Herbert, prêtre de Corfélix, Pagan chevalier de Baye, Garnier chevalier de Aspero-Monte et Pierre de Monte-Miralli.

En 1151, Hugues, seigneur de Broyes, donne a l'église de Saint-Pierre et Saint-Gond de Oyes, l'usage en ladite forêt pour le chauffage et la construction, «  de usagio nemoris Raimboldi  » (bois de Raimbaut, commune de Broyes) et confirme ce qu'elle a ou pourra avoir en sa suzeraineté ; il ajoute l'usage de ses prés. Témoins : Thomas, chanoine de Broyes, Gilbert de Belon, Garnier de Vicher (charte VIII)

Le même, à la prière de Hugues « reclusus » approuve le don fait par Simon, son père, de tout que l'abbaye avait reçu en sa seigneurie; confirme l'usage de ladite forêt «  item usagium nemoris Raimboldi  » pour chauffage et construction, « et ad omnes usus suos quantum propriis vehiculis, oxceptis carris, advehi poterit ». Témoins : Hugues « reclusus », Herbert, curé de Corfélix, Pagan, chevalier de Baye, Garnier de Aspero-Monte, Pierre de Monte-Mirabili. Donné en l'an de grâce 1152 (charte IX). Hugues aurait prit l'habit de religieux, on appelait ainsi un moine qui se faisait murer dans une cellule pour se consacrer plus intimement à la vie contemplative. Il s'agit du couvent fondé dans le voisinage, l'abbaye dite du Reclus.

Au cours du mois de novembre 1226, Hugues, seigneur de Broyes, fils de feu Simon 1er, seigneur de Commercy, confirme la charte de son ayeul Hugues «  carta de confirmatione nemoris Raimboldi  », autorisant l'abbaye à conserver ce qu'elle a ou aura en sa suzeraineté, l'usage de ladite forêt et l'usage des prés (charte X). Simon de Châteauvillain était l'un des fils du Hugues II de Broyes, dont le père, Simon 1er, avait épouse Félicité de Brienne, remariée à Geoffroy III, seigneur de Joinville.

En mars 1230, Hugues, seigneur de Broyes, partant pour Jérusalem, du consentement de B., sa femme et de ses enfants, confirme toutes les chartes antérieures de ses prédécesseurs «  carta quomodo ecclesia potest acquirere in feodis Brecarum  » (charte XI). Puis, Hugues, seigneur de Broyes, renonce à tout ce qu'il réclamait de Remy de Pleurs «  de concessione et quitatione Remigii de Plaiostro  », qui avait épousé la femme de feu Jean de Latione. Témoins : Maître Robert, Gilbert de Belon, Raoul (charte XII).

En décembre 1250, Hugues, seigneur de Broyes, fait savoir que Hugues, abbé de Oye, réclamait comme son homme Nivard de Broussy-le-Petit «  Broceio Parvo  », laïc, contre Jean, fils du seigneur Gaucher Corberans et Jean, son beau-frère, lequel Nivard Marguerite, sœur du seigneur Vilain de Broccio, chevalier, avait aumôné audit monastère ; à la fin lesdits opposants renoncèrent à leurs prétentions. «  De discordia Johannis Courberans  » (charte XIII).

 

 

Hugues III de Broyes

Hugues , IIIe du nom, seigneur de Broyes, Châteauvillain, Baye, Neelle, Villenosse, Champigny-sur-Aube et d'Arc en Barrois en 1168, né vers 1125, mort en 1199, épousa :

•  en premières noces, vers 1144, Etiennette (Stéphanie) de Bar (1125-av.1178), dame de Commercy, fille de Renaud, dit le Borgne, 1 er du nom, comte de Bar, et de Gillette ou Gisèle de Vaudemont;

•  en secondes noces, vers 1178, Isabeau de Dreux, dame de Baudement (1160-1239) , fille de Robert de France, comte de Dreux, et d'Agnès de Braine.

Du premier lit sont nés: 1° Simon III , qui suit; 2° Emmeline , morte sans avoir eu d'alliance en 1197; 3° Sophie , morte de même; 4° Agnès (1160-1221) épouse de Simon II de Brisey, seigneur de Bourlémont, puis d'Henri de Fouvent. Du second lit sont issus: 4° Simon , dit le Jeune, (m. 1259) qui fit la branche des seigneurs de Châteauvillain, rapporté ci après. Il épousa Alix de Luzy, fille de Dalmas de Luzy zt Beatrix de Vignory; 5° Emmeline , épousa en 1202 Eudes de Champlitte, puis en 1205 Erard III de Chacenay. À partir de 1160, Hugues III de Broyes devint seigneur de Châteauvillain en Champagne «  Castrum villanum  » qui fit construire un important donjon de pierres à bosses et un château entouré d'une enceinte avec de nombreuses tours, dont on peut encore voir une partie. La lignée de la famille de Broyes-Châteauvillain se poursuivit par Simon le jeune et dura plus de quatre siècles en ligne directe ou indirecte. Hugues III de Broyes serait né vers 1125 et mort au plus tard en 1199. Il est qualifié de querelleur en se brouillant avec son suzerain, le comte Henri II de Champagne, et les hostilités furent assez sérieuses pour empêcher ce prince de faire la guerre eu comte de Hainaut. Selon Dom Bouquet (XVIII, p. 751), le château de Broyes fut pris d'assaut «  Postquam castrum de Brois dejecit  ».

 

Les écus d'Hugues III de Broyes et de ses deux épouses, Estiennette de Bar, dame de Commercy, et Isabeau de Dreux.

 

Simon de Broyes , dit le jeune, fils de Hugues III et d'Elisabeth de Dreux eut en partage la seigneurie de Châteauvillain. Lui et sa postérité prirent le nom de Châteauvillain, suivant la coutume usitée de ce temps là, ainsi que les armes, qui sont «  de gueules, semé de billettes d'or, au lion de même brochant sur le tout  ». Jean son troisième fils fut évêque et comte de Châlons et pair de France en 1284, il mourut en 1312.

 

 

Simon III de Broyes

Simon, III e du nom, seigneur de Broyes et de Commercy, né vers 1145, mourut vers l'an 1202. Il fut seigneur de Commercy en 1173. Il épousa Nicole, dame de Commercy , fille de Thiébaut et d'Étiennette, dont il eut: 1°) Hugues IV , qui régna à Broyes; 2°) Gaucher ou Gauthier 1er, seigneur de Commercy dès 1202; 3°) Renaud , dit de Commercy, qui épousa Marguerite de Buancy, dont il n'eut point d'enfants; 4°) autre Hugues , qui fut d'Église; 5°) Agnès , qui épousa Frédérick comte de Toul et 6°) Elisabeth qui prit en 1229 le titre d'avouée de Commercy, morte fille. En 1182, nous trouvons Simon II faisant une donation à l'abbaye de Boulancourt, assisté par son cousin Erard II comte de Brienne, Pierre abbé de Claivaux, Jean abbé de Beaulieu, Aubert abbé de La Chapelle et plusieurs chevaliers.

Simon de Broyes était un homme jouissant d'une grande considération personnelle, honoré de la confiance des seigneurs ses contemporains pour terminer leurs différends (6). Ce fut lui qui fut le médiateur entre Mathieu, comte de Toul, et l'évêque Pierre de Brixei, en 1181, ainsi que relativement aux difficultés survenues à l'oc casion de la forteresse de Liverdun. Il avait, en 1178, assisté le duc Henri de Bar dans l'hommage qu'il fit à l'empereur Frédéric, et l'année suivante il avait été témoin de la ratification, par le même duc, de la donation qu'Aubert de Sainte-Menehould avait faite à l'abbaye de Trois-Fontaines, de ce qu'il possédait en la forêt de Martinmont. Simon, parent de l'évêque de Toul, fut peut-être entraîné par celui-ci aux libéralités qu'il fit aux maisons religieuses : en tous cas, il fut généreux à leur égard. Sans parler de ce qu'en 1174 il donna au prieur de Breuil 20 sous de rente à prendre sur le droit de passage de Commercy, ce fut lui qui fonda la collégiale en 1186.

Voici un extrait de la charte de fondation «  Pierre, par la grâce de Dieu, humble ministre et serviteur des Leucois… nous attestons par cet écrit, pour le présent et l'avenir, que notre cher fils, Simon de Commercy, désirant illustrer la noblesse de sa race par une action digne d'elle, et guidé par une pieuse dévotion, a résolu d'instituer des chanoines séculiers dans la partie de Commercy qui avoisine le château. Il nous a supplié d'autoriser sa fondation… nous consentons à l'institution de treize prébendes, de manière que le prévôt en possède deux, et que les onze autres soient partagées entre onze chanoines pour desservir cette église érigée en l'honneur de la bienheureuse mère de Dieu et de saint Nicolas… Et leur a donné aussi quarante sous à percevoir annuellement sur le droit de foire et marché, savoir : vingt à Pâques et vingt à la Sain-Rémy; sa corvée proche la terre Saint-Pantaléon du côté de l'eau, et dix jours de terre dans la corvée sous la Perrière; six fauchées de prés à Brassieux , la dîme de ses anguilles, soit qu'elles proviennent de sa pêche ou de celle d'autrui; la dîme de sa chasse aux sangliers et aux cerfs ; le repas des pêcheurs le jour de la dédicace de l'église. Il leur a donné aussi tout ce qu'il possédait à Vadonville, payable à la Saint-Rémy, à l'exception du service personnel des hommes; tous les cens qu'il perçoit sur les terres de la châtellenie de Commercy, moitié à la Saint-Jean-Baptiste, moitié à la Saint-Rémy, sauf qu'il retient la justice sur le tout. E n outre, il leur a donné deux muids à prendre sur le loyer du moulin de Morley, parties à la Saint-Martin, la dîme de son moulin de Commercy, et, sur ce dernier, un muid à percevoir à la Saint-Martin par le doyen et pour lui seul ; l'usage dans les prés, les champs , les eaux et les bois de Commercy et de Morley, soit pour bâtir leurs maisons, soit pour leurs ustensiles; les dîmes qui lui appartiennent ainsi qu'à son épouse dans l'évêché de Toul, tant des vignes que des fruits, du vin et des troupeaux...  ».

En cette année 1186, où Simon fonda la collégiale, l'hiver fut si rougoureux au mois de mars que tout fut gelé, ce qui occasionna une famine terrible. C'est en ce temps que l'on voyait les loups garoux, grands outre mesure, trouvant hommes et femmes par les champs, les étrangler . On ignore l'époque fixe de la mort de Simon, arrivée, croit-on, en 1202. En 1190, il fut témoin, avec Widric et Aubry, de Commercy, chevaliers, d'une donation, par Hadwide et Simon de Selascourt, au profit de Rangéval. On le voit aussi, en 1192, témoin de la fondation de la collégiale de Ligny, instituée à l'imitation de celle de Commercy. Nicole, sa femme, vivait encore en 1210.

 

 

Les descendants de Simon III de Broyes

Hugues IV , seigneur de Broyes, fils aîné de Simon II, mourut l'an 1226. Il épousa Odte de Vendeuvre, fille et héritière d'Eudes, seigneur de Vendeuvre , et de Béatrix de Ceris, et laissa: 1°) Hugues V de Broyes; 2°) Eudes, seigneur de Vendeuvre, mort sans hoirs, l'an 1246; 3°) Simon, chanoine de l'Eglise de Reims en 1262; 4°) Gaucher, aussi chanoine de l'Église de Reims; 5°) Marguerite, femme de Gérard, seigneur de Durnay, fils de Jacques, seigneur de Durnay, et d'Agnès; et 6°) Ermensens, religieuse en l'abbaye de Notre-Dame Troyes en 1223.

Hugues V , seigneur de Broyes en 1247, épousa une dame nommée Bérengère, et laissa: 1°) Thibaut , seigneur de Broyes, ayant suc cédé à son père, eut d'une femme, dont le nom est inconnu, Guy, seigneur de Broyés, lequel est nomme avec Jean, seigneur de Châteauvillain, dans des lettres passées en 1314. La branche aînée de cette maison a fini aux enfants de Thibaut de Broyes. Ces seigneurs vivaient sous le règne de Philippe le Bel . 2°) Jean, chevalier, qui eut en partage les seigneuries de Soisy et de la Villeneufve, et fut père de Guy de Broyés, seigneur des mêmes lieux, marié à une dame nommée Perrenelle: ils vivoient l'an 1297; et 3°) Hugues, chanoine de Saint-Quiriace de Provins, et de Saint-Blitaire de Broyes en 1270.

Interessons nous un instant à Gauthier 1er de Broyes, fils puîné de Simon II qui reçut la seigneurie de Commercy. En 1214, il signa un concordat avec l'abbé de Molesme et les moines de Breuil relativement au village de Ville-Issey « Ego Galtherus Commerciensis Moi, Gaucher, seigneur de Commercy, fais savoir à tous… la troisième partie des tailles, dans ce qui dépend de Ville-Issey et des hommes qui, hors de Breuil, sont de ma dépendance, m'est réservée, et la maison de Breuil aura les deux autres…  ». En 1225, Gauthier rentra dans la terre de Braine et récupéra 500 arpents de bois que Hugues, son frère, avait aliénés à Thibaut, comte de Champagne. Il en rendit foi et hommage à ce dernier. En 1243, il affranchit les habitants de Laneuveville-au-Rupt. Il figure encore en 1244 dans un accord avec les chanoines de Commercy. Il mourut en 1248 en laissant deux fils Gaucher II et Henri qui rendirent en décembre de cette année, avec leur mère, foi et hommage, pour le fief de Commercy, à Jacques de Lorraine, évêque de Metz. Il semble que Gaucher II eut une fille unique nommée Élisabeth qui épousa, en 1265, Simon de Montbelliard, comte de Sarrebruche. Élisabeth fut l'ancêtre de Robert de Sarrebruche, mari de Jeanne du Moulin, gendre de d'Élisabeth de Montagu, héritière en partie de Jean de Montagu, seigneur de Marcoussis. Ce Robert de Sarrebruche fut en procès avec les Malet de Graville, héritier de Jacqueline de Montagu. Finalement, Jean de Sarrebruche, fils aîné de Robert, transigea avec l'amiral Louis de Graville, touchant les terres de Marcoussis et de Montagu, qu'il lui céda pour le vidamé de Laon et les quatre sergenteries de Rouen.

Ainsi, raccourci de l'histoire : à partir du XIIIe siècle, les membres de la famille de Sarrebruche descendaient, par les femmes, d'Hodierne et de Gui de Montlhéry.

 

Sceau de Jean 1er de Sarrebruche, fils de Simon et d'Élisabeth de Broyes.

 

On pourrait même douter qu'Élisabeth fût fille de Gaucher II, cependant cette filiation est plus probable que celle qui la fait descendre immédiatement de Gaucher 1er, d'autant mieux que dans l'acte de 1269, Simon de Sarrebruche donne à ce dernier le titre d'aïeul. Certains généalogistes comme Dom Calmet ou le père Anselme font descendre Élisabeth de Simon de Broyes et d'Alix, sa femme, mais cette origine est plus que douteuse, rien n'atteste même l'existence de ce Simon.

 

 

Notes

(*) De la même manière que pour les chroniques précédentes nous nous limitons au commencement du XIIIe siècle.

(1) A. Duchesne, Histoire généalogique de la maison de Broyes et de Chasteauvillain (chez S. Cramoisy, Paris, 1631).

(2) É . de Barthélemy, Ancien diocèse de Châlons-sur-Marne, histoire et monuments (Martin, Châlons, 1861).

(3) Ernest Petit, Cartulaire du prieuré de Jully-les-Nonnains, 1115-1456 (Impr. Rouillé, Auxerre, 1881).

(4) É. de Barthélemy, La ville de Sézanne et l'abbaye du Reclus (Impr. Dufour-Bouquot, Troyes, 1879).

(5) É. de Barthélemy, Cartulaire de l'abbaye Saint-Pierre d'Oyes (canton de Sézanne), suivi d'une note sur les anciens seigneurs de Broyes (Impr. Thouille, Châlons-sur-Marne, 1882).

6) C.-E. Dumont, Histoire de la ville et des seigneurs de Commercy , tome 1 er (Typographie de Numa Rolin, Bar-le-Duc, 1843).

 

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