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L'abbaye Notre-Dame du Val de Gif (8)

Les abbesses au XVIIe siècle

Cette chronique, huitième volet de l'histoire de l'abbaye de Notre-Dame du Val de Gif, est consacrée aux abbesses qui dirigèrent le monastère des Bénédictines de Gif. Étant donné qu'il était «  de fondation royale », le roi avait droit de regard sur la nomination des mères, et Louis XIV, en guerre contre le Jansénisme, ne se priva pas de ses prérogatives. À fin du XIXe siècle, l'abbé Alliot écrivit une magnifique Histoire de l'abbaye Notre-Dame du Val de Gif (1), mais, oubliant ce bel ouvrage, nous jetons un autre oeil sur cette histoire. Nous rappelons que pour la plupart des textes nous gardons la langue de l'époque.

 

C. Julien J.P Dagnot - Avril 2013

 

L'abbaye bénédictine N.-D. du Val de Gif (dessin L. Morize, 1871).

 

 

Les arrêts du Conseil d'État

Avant de parler des abbesses de Notre-Dame du Val de Gif au XVIIe siècle, nous présentons des textes juridiques se rapportant à leur nomination. En 1672, Louis XIV par l'arrêt du Conseil d'État du 5 janvier, et en 1676, par celui du 17 octobre, maintint les abbesses par lui nommées aux abbayes et monastères des Urbanistes, et excepta seulement de sa nomination royale les religieuses de la première règle de saint François, celles du tiers-ordre de Sainte Elizabeth et les filles de l'Annonciade. Les monastères de filles ne peuvent donc non plus que ceux des hommes être résignés que sous le bon plaisir du roi. Voici plusieurs actes de ces résignations qui se rapportent à madame Magdeleine Hurault de Cheverny.

Démission pur et simple d'abbaye de filles . L'an mil six cens soixante et quinze, le deuxième jour du mois de may avant midy, pardevant les conseillers du Roy, etc. étant de présent en l'abbaye royale de Notre-Dame du Val de Gif, ordre Saint Benoît, diocèse de Paris, et en présence des témoins ci-après nommez, est comparue et fut présente en sa personne au parloir de Saint Paul de ladite abbaye noble et révérende dame Magdeleine Hurault de Cheverny, abbesse de ladite abbaye de Gif, laquelle volontairement et de son bon gré a fait et constitué, fait et constitue ses procureurs généraux et spéciaux maîtres,... auxquels et à chacun d'eux seul ladite révérende dame constituante a donné pouvoir et puissance de pour elle et en son nom sous le bon plaisir de Sa Majesté Très-Chrétienne, résigner et remettre purement et simplement sa dite abbaye royale Notre-Dame du Val de Gif, de l'ordre et diocèse susdits, avec tous ses droits et appartenances quelconques entre les mains de notre Saint Père le Pape, de Monseigneur son vice-chancelier ou autre ayant à ce pouvoir et puissance, en faveur de telle personne capable qu'il plaira à Sa Majesté vouloir nommer et présenter à ladite abbaye, et non autrement faire ladite résignation et démission, consentir l'expédition des lettres sur ce nécessaires, et affirmer en l'âme de ladite révérende dame constituante qu'en ce que dessus n'est intervenu et n'interviendra aucun dol, fraude, simonie ou autre paction vicieuse et illicite, et généralement, etc. promettant, etc. dont, etc. Fait et passé audit parloir de Saint Paul, en ladite abbaye Notre-Dame du Val de Gif, diocèse de Paris, les an et jour que dessus.

Résignation d'abbaye de filles avec réserve de pension . L'an mil six cens soixante et quinze, le deuxième jour du mois de may avant midy. Pardevant nous notaire apostolique en l'archevêché de Paris, y demeurant, estant de présent en l'abbaye de Gif, ordre de Saint Benoît, diocèse de Paris, et en présence des témoins ci-après nommez, est comparüe au parloir de Saint Paul noble et révérende dame Magdeleine Hurault de Cheverny, abbesse de ladite abbaye royale Notre-Dame du Val de Gif, ordre de Saint Benoît, diocèse de Paris, laquelle volontairement a fait et constitué, ses procureurs maîtres ….. auxquels et à chacun d'eux seul ladite révérende dame constituante a donné pouvoir et puissance de pour elle et en son nom, résigner sous le bon plaisir de Sa Majesté entre les mains de Sa sainteté sa dite abbaye royale de Gif, avec tous ses droits et appartenances quelconques, en faveur de telle personne capable qu'il plaira à Sa Majesté nommer et présenter à ladite abbaye, à la réserve néantmoins de huit cens livres tournois de pension, sur tout et chacun les fruits et revenu de ladite abbaye payable à ladite révérende dame constituante sa vie durant, ou à son procureur en ladite abbaye, ou en la ville de Paris, en deux termes égaux, sçavoir aux jours et fêtes de Noël et de la Nativité de saint Jean-Baptiste, premier terme de payement échéant au jour et fête de Noël prochainement venant, et ainsy continuer d'année en année et de terme en terme, et non autrement faire ladite résignation, consentir l'expédition des lettres sur ce nécessaires, et affirmer en l'âme de ladite révérende dame constituante qu'en ce que dessus n'est intervenu et n'interviendra aucun dol, fraude, simonie ou autre paction vicieuse et illicite, et généralement, etc. promettant, etc. dont, etc. Fait et passé en ladite abbaye de Gif audit parloir que dessus, le etc., ès présence de vénérable personne maître Sedillier, prêtre du diocèse du Mans, curé de l'église paroissiale de Saint-Germain de Toussus-le-Noble, et Charles Jardin demeurans audit Toussus, étant de présent en ladite abbaye, témoins à ce requis et appelez. Signé, sœur Magdeleine Hurault de Cheverny, F. Sedillier, Charles Jardin et Horry.

Résignation d'abbaye de filles en faveur avec réserve de pension . L'an mil six cens soixante et quinze, le vingtième jour d'avril après midy, pardevant nous Pierre Horry licencié ès droits, avocat en Parlement, et notaire apostolique en l'archevêché de Paris, y demeurant, étant de présent en l'abbaye des moniales Notre-Dame du Val de Gif, ordre Saint Benoît, diocèse de Paris, et en présence des témoins ci-après nommez, est comparue au parloir de Saint noble et révérende dame Magdelaine Huraut de Cheverny, abbesse de ladite abbaye royale du Val de Gif, laquelle volontairement a fait et constitué, comme ces présentes, fait et constitue ses procureurs généraux et spéciaux maîtres ….. auxquels et à chacun d'eux seul ladite révérende dame constituante a donné pouvoir et puissance de pour elle et en son nom résigner sous le bon plaisir et avenant à ce la nomination et présentation de Sa Majesté Très-Chrétienne, sa dite abbaye royale Notre-Dame du Val de Gif, l'ordre et diocèse susdits, entre les mains de notre Saint Père le Pape, de Monseigneur son vice-chancelier ou autre ayant à ce pouvoir et puissance, en faveur toutefois de noble et discrète dame Anne Victoire de Clermont Montglas, religieuse professe, et sous-prieure de ladite abbaye, à la réserve néantmoins d'une pension annuelle de la somme de huit cens livres tournois, sur tous et chacun les fruits et revenus de ladite abbaye ; ladite pension libre et exempte de toutes charges, taxes, décimes ordinaires et extraordinaires, imposées et à imposer, même des réparations des lieux, payable par ladite dame Anne Victoire de Clermont Montglas, et ses successerices en la dite abbaye à ladite révérende dame constituante sa vie durant, ou à son procureur en ladite abbaye, ou en la ville de Paris, en deux termes égaux, sçavoir aux jours et fêtes de Noël et de la Nativité de saint Jean-Baptiste, premier terme de payement commençant en l'une ou l'autre desdites fêtes immédiatement suivante, après la possession de ladite dame de Clermont Montglas, et ainsy continuer d'année en année et de terme en terme, et non autrement faire ladite résignation, consentir l'expédition des lettres sur ce nécessaires, et affirmer en l'âme de ladite révérende dame constituante qu'en ce que dessus n'est intervenu et n'interviendra aucun dol, fraude, simonie ou autre paction vicieuse et illicite, et généralement, etc. promettant, etc. dont, etc. Fait et passé en ladite abbaye royale Notre-Dame du Val de Gif, diocèse de Paris, les an et jour que dessus ès présence de vénérable et discrète personne maistre François Sedillier, prestre du diocèse du Mans, et Charles Jardin, demeurant audit Toussus, estans de présent au parloir de saint Paul en ladite abbaye de Gif, témoins à ce requis et appelez. Signé, sœur Magdeleine Hurault de Cheverny, F. Sedillier, Charles Jardin et Horry.

Par des bulles de la Cour de Rome les provisions sont données à l'abbesse qui doit prêter serment. Quand les bulles sont arrivées, elles sont certifiées par deux banquiers en Cour de Rome, et celui qui les a fait venir de Rome y ajoute ce qu'on appelle le tradita , qui est un certificat qu'il les a fait venir et qu'il les a délivrées. Ensuite l'abbesse pour qui sont ces bulles, présente sa requête à l'un des exécuteurs qui y sont dénommés pour les fulminer, en l'occurrence l'official de l'évêque dans le diocèse duquel est l'abbaye… (2).

Dans le recueil des arrêts donnés en la cour de Parlement de Paris, Georges Loûet traite, en 1665, la question «  Si femme séparée de biens d'avec son mary, doit rachapt. S'il est deu relief pour secondes ou autres nopces  ». « Et depuis en la coustume de Paris, par arrêt du mardy matin 5 mars 1630, monsieur Jay président, qui a esté depuis premier président, plaidans Chappellier et Saureau, au profit des religieuses, abbesse et couvent de Nostre-Dame de Gif, contre dame Magdeleine du Texier, appellante d'une sentence du prévost de Paris du 23 novembre 1629 conformément aux conclusions de monsieur l'advocat Talon ».

 

 

Les abbesses de Gif au XVIIe siècle

Avant que de développer la biographie des mères supérieures du couvent N.-D. du Val de Gif, reprenons la succession des abbesses au XVIIe siècle, et suivant un ordre chronologique nous donnons les courtes biographies écrites par Henri Fisquet (3) :

38. Françoise Miée de Guespré ou Myée de Guespray (1600-1610), religieuse professe de Pacy, alla se mettre ensuite sous la direction de sa tante Susanne de Chambray, abbesse de Saint-Rémy-des-Landes, au diocèse de Chartres, et fut nommée abbesse de Gif en 1600. Elle passa, en 1610, à l'abbaye de Saint-Julien-du-Pré, dans le diocèse du Mans.

39. Madeleine 1ere de Montenay (1610-1629) fit profession au couvent de Saint-Sauveur d'Évreux. Par suite de la cession de la précédente en sa faveur et avec l'approbation du roi, elle obtint l'abbaye de Gif le 19 janvier 1610. Ce monastère était alors dans une triste situation sous le double rapport des finances et de la discipline monastique. Madeleine s'efforça d'y remédier. Elle emprunta de grosses sommes d'argent au baron de Villarceaux, son parent, et put ainsi payer les dettes de Gif, acheter des chevaux pour cultiver les terres du couvent et des bestiaux pour servir aux usages de la communauté. En même temps, elle faisait des vœux ardents pour que ses religieuses vécussent d'une manière plus sainte, et demandait cette grâce à Dieu par de continuelles prières. Enfin elle eut le bonheur d'obtenir ce précieux résultat en 1619, époque où elle et toutes ses religieuses, à l'exception de quatre qui passèrent dans d'autres couvents, adressèrent une requête au cardinal de Retz, évêque de Paris, pour supplier Son Éminence de remplacer leur vêtement blanc par un noir plus convenable à l'ordre de Saint-Benoît. Le prélat souscrivit à ce désir, le 21 mai de cette année, et les jours suivants, les religieuses de Gif s'obligèrent à mener la vie cloîtrée, à garder une continence perpétuelle, à mettre tous leurs biens en commun, à garder enfin la discipline de l'Étroite observance. Madeleine survécut encore dix ans à ce grand acte si honorable pour sa mémoire, et mourut le 17 août 1629, à l'âge de 57 ans.

40. Madeleine II de Mornay-Villarceaux (1629-1638), fille de Louis, seigneur de Villarceaux, et de Madeleine de Grouches, qui suit.

41. Madeleine III de Mornay-Villarceaux (1638-1651), nièce de la précédente, fille de Pierre de Mornay de Villarceaux et d'Anne Oliver de Leuville, qui suit.

42. Catherine Morant du Mesnil-Garnier (1651-1654), fille de Thomas, maître des requêtes et de Jeanne Cauchon, sa première femme, fut d'abord religieuse de Notre-Dame du Trésor en Normandie, nommée par le roi à la fin de l'année 1651, prit possession l'année suivante de l'abbaye Notre-Dame du Val de Gif, abdiqua au mois de juillet 1654 en faveur de l'abbesse qui suit, et se retira au monastère de Port-Royal des Champs. Elle fut la première abbesse de tendance définitivement janséniste. Toutefois le Jansénisme de Gif doit être compris dans son sens particulier. Une perpétuelle abstinence de viande avait été instituée. Henri Brémond dit «  Femme d'une simplicité excessive d'une intelligence bornée et sans volonté, reçoit de Louis XIV son brevet d'abbesse, puis se met sous la direction de la Mère Angélique Arnault qui l'effraya bientôt…  ». Notons que, contrairement au père Anselme et à l'abbé Alliot, Aubert de La Chesnaye prétend (par erreur) que Catherine Morant est issue du mariage de Thomas Morant et de Françoise de Vieuxpont, sa seconde femme, qui lui donna cinq fils et cinq filles dont quatre furent religieuses : Catherine à Gif, la seconde abbesse de Moret, la troisième abbesse de Montreuil et la dernière supérieure des Carmélites de Compiègne.

43. Françoise de Courtilz de Boyon (1654-1669), religieuse et prieure de Gif, en devint abbesse par la cession de Catherine Morant, prit possession dans le mois de juillet 1654, et mourut à l'âge de 63 ans, le 1er novembre 1669, regrettée des pauvres qu'elle aimait tendrement et de ses religieuses pour qui elle fut toujours un modèle de toutes les vertus. L'abbé Alliot montre que Françoise de Courtilz résista aux germes du jansénisme qui s'étaient développés à Gif du temps de l'abbesse précédente.

44. Madeleine Hurault de Cheverny (1669-1676), faisait partie de la puissance maison de Cheverny qui donna un chancelier à la France. Devint abbesse par le brevet royal le 12 novembre 1669, munie des bulles pontificales en juin 1670, elle prit possession du couvent de Gif le 13 août suivant.

45. Victoire de Clermont de Monglat (1676-1686), nièce de la précédente, qui suit. Sous son abbatiat, la persécution pour cause de jansénisme des religieuses de Port-Royal des Champs «  on parle d'un parti redoutable à l'État , écrit la mère supérieure », commença le jour de la visite de l'archevêque de Paris, le 17 mai 1679, pour retirer les 42 pensionnaires du monastère. «  La vigilance de ceux qui firent expulser ces pauvres enfans de P.R. alla jusqu'à faire donner des défenses à d'autres couvens de le recevoir, entre autres Gif et Val-de-Grâce  ». L'abbesse de Gif en fit ses doléances à la mère Angélique, à qui elle écrivit plusieurs lettres pour lui marquer combien elle était sensible à la vexation qu'on faisait à sa maison, et pénétrée de l'impuissance où on la mettait de donner retraite à quelqu'un de ses chers enfants, suivant la défense à elle faite par la voie de M. l'archidiacre de Josas et de deux docteurs chargés de cette commission par M. l'archevêque.

46. Éléonore de Béthune d'Orval (1686-1733) qui suit. Nommée abbesse par le roi le 14 août 1686, elle prit possession du couvent de Gif le 28 février 1687 et y resta jusqu'à sa mort survenue le 28 novembre 1733.

 

 

Les dames Mornai de Villarceaux

Magdeleine Mornai de Villerceaux, fille de Louis de Mornai, seigneur de Villerceaux, que l'on prononce aujourd'hui et que l'on écrit Villarceaux et de Magdelene de Grouches, fut pourvue très jeune de l'abbaye de Gif, ordre de saint Benoît, diocèse de Paris. Elle avoit pris l'habit dans ce monastère le premier jour de mars 1610, âgée de 14 ans et y fit profession deux ans après le 22 de juillet 1611. En 1614, elle fut faite coadjutrice de madame Magdelene de Montenai, sa cousine, auparavant religieuse professe de Saint-Sauveur d' Évreux, dame de beaucoup de piété. Le spirituel et le temporel du monastère de Gif étant également déchus pendant les guerres civiles, madame de Mornai répara l'un et l'autre. Toute jeune qu'elle étoit, elle persuada aux religieuses de garder la clôture, de vivre en commun, et de reprendre la plupart des pratiques régulières qui ne s'y gardoient plus. Tel fut le commencement de cette réforme, qui fit de nouveaux progrès sous madame de Cheverny, et qui fut portée à la perfection sous madame de Clermont-Montglat. L'archevêque de Paris, supérieur de cette maison, informé des vertus et le régularité de madame de Mornai, l'envoya à l'abbaye de Malnoue pour y mettre plus d'ordre qu'il n'y en avoit, et réunir les religieuses avec l'abbesse [avec le consentement de Catherine Vivier, abbesse de cette maison]. Elle gagna si bien les esprits par sa douceur, et sçut tellement les ménager par sa prudence, que toute la maison se rendit à ses avis, et se fournit à ce qu'elle leur proposa ; et quand elle fut obligée de s'en retourner toutes les religieuses ne la virent partir qu'avec un extrême regret. En 1619, elle devint abbesse de Gif en chef par la mort de madame de Montenai, arrivée le 19 d'août de la même année, et pendant les neuf ans qu'elle gouverna encore cette maison, elle en augmenta beaucoup le spirituel et le temporel par ses soins et par ses exemples. Dieu ayant permis qu'elle fut éprouvée par des grandes et douloureuses infirmités, elle devint un vrai modèle de patience, et de détachement du monde ; mais comme elle ne pouvait plus vaquer comme auparavant au gouvernement de sa maison, elle demanda pour coadjutrice Claude de Mornai de Villarceaux, sa sœur, qui avoit été déjà prieure et maîtresses des novices dans la même maison, où elle étoit à l'âge d'onze ans, et où elle avoit fait profession le 11 de novembre 1618. Claude de Mornai mourut avant sa sœur le 14 de juillet 1637, âgée seulement de 38 ans, et Magdelène la suivit de près, étant morte le 11 de septembre 1638, dans la quarante-troisième année de son âge (4).

 

 

L'abbaye de Gif fut donnée, aux prières et aux instantes sollicitations de toutes les religieuses, à Magdelène de Mornai, nièce des défuntes, qui n'avait encore que vingt-et-un ans, mais dont la piété, la prudence, et la régularité étaient fort au-dessus de son âge. C'est elle qui a fait bâtir entièrement l'église, la porte de la clôture, un deuxième dortoir, le réfectoire et plusieurs autres lieux réguliers, avec le dehors de ce monastère qui n'était auparavant remarquable que par sa caducité. Elle a fait tout cela, sans avoir engagé en aucune manière le bien de sa maison, et sans avoir jamais rien diminué des aumônes qu'elle faisait avant cette entreprise. Elle entretint aussi le bon ordre et la régularité dans la maison, affermit, et augmenta même l'un et l'autre. Elle ne s'est jamais distinguée de ses religieuses, que par une plus grande application à ses devoirs, et une très grande humilité. Mais elle mourut, n'ayant encore que trente-quatre ans, le 21 d'octobre 1651. Elle était fille de Pierre de Mornai, seigneur de Villarceaux, colonel du régiment du même nom, qui fut assassiné en 1624 et Anne Olivier de Leuville, fille de Jean Olivier, seigneur de Leuville, et de Magdelène de l'Aubépine.

 

 

Lettres de Catherine de Morant abbesse de Gif

Onze lettres échangées entre Catherine de Morant (1628- 1705), abbesse de Gif qui, considérant sa charge trop lourde, et son supérieur, concernent la démission de la mère supérieure. Elle envoya un premier courrier , le 24 juillet 1654 à Monsieur l'advocat, grand vicaire de Monsieur l'archevêque et chanoine de Notre-Dame à Paris puisque le supérieur de couvent de Gif était l'archevêque de Paris.

 

Monsieur,

Encore que je n'aye pas l'honneur d'estre connue de vous, ce m'est assez d'estre sous la juridiction de Monseigneur l'Archevesque et de vous reconnaître pour mon supérieur, en son absence, pour me sentir obligée d'avoir recours à vous, en vous exposant mon désir et vous témoigner Monsieur combien je m'estimerais heureuse et vous me ferez la grâce de m'accorder la très humble supplication que je vous présente à quoy je me sens fortée par un mouvement de Dieu du tout extraordinaire et qui m'ayant dit à faire faire une démission de l'abbaye que je possède, je crois Monsieur que je ne me rendrais pas assez fidelle à cette première grâce, et je ne ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour suivre entièrement les desseins que Dieu a sur moy et comme je ne peux m'y rendre plus parfaitement q'en faisant choix d'une maison où il y a tous les moyens que l'on pourroit désirer pour sa sanctification. J'ay cru Monsieur vous devoir représenter toutes ces raisons, afin que vous y fassiez quelque sorte de considération, et en particulier sur la pensée que j'ay eu de tout temps de me retirer dans un lieu, où je pusse plus facilement travailler ma perfection, ayant aussy conservé toujours une forte passion de rentrer dans le mesme ordre que celui de la maison de la profession par laquelle j'avais jeté les yeux, et toute chose est esté dans un meilleur règlement qu'elle ne soit, et comme Dieu dans sa miséricorde m'appelle dans un estat plus parfaitement fusse à vous témoigner mes sentiments et à vous supplier instamment de ne me point dénier la grâce que je vous demande au nom de Dieu, et dit ce que je ne veux promettre de votre bonté , c'est ce qui me rendra toute ma vie.

La réponse du vicaire est la suivante :

Ce lundy matin,
Ma très chère mère,
J'avais eu dessein d'envoier aujourd'huy chez vous, mais l'incertitude que j'avais sy vous y estiez encore et fait que j'ay envoier ma lettre par pli, où je vous expose la pensée que j'avais de m'adresser à Mr la grand vicaire pour ma permission, croyant qu'une lettre de civilité ne seroit pas mal à propos dans cette occasion dans laquelle je pourrais ensuite témoigner mon désir et présenter ma requeste, que j'aymerai mieux adresser à quelques uns de Mrs le grands vicaires , qu'à Mr le cardinal et parce qu'il sy auroit bien plus de lieu de craindre que la chose n'éclatat estant éloigné comme il est, je ne ferai pour tant comme il vous plairay, mais je seray bien aise de sçavoir votre avis…. Ma chère mère je fais toujours avec respect et cordialité toute à vous.

Les autres courriers sont postés de l'abbaye de Port-Royal des Champs ou la mère supérieure de Gif avait trouvé refuge.

 

 

Anne Victoire de Clermont de Monglat

Abbesse et réformatrice des religieuses bénédictines de l'abbaye royale de Notre-Dame du Val-de-Gif, au diocèse de Paris, étoit fille de François de Clermont, seigneur de Monglat (écrit parfois Monglas), commandeur des ordres, et grand maître de la garde-robe du roi, et Elisabeth de Cheverny, petite-fille du chancelier de même nom. Elle naquit dans la terre de Monglat, et fut baptisée le 30 de septembre 1647. Elle fut élevée dès l'âge de deux ans dans l'abbaye de Port-Royal sous la conduite de madame la comtesse d'Aumont, sa tante maternelle qui s'y étoit retirée. Elle avoit l'esprit vif et le jugement solide, le cœur grand et généreux, la mémoire des plus heureuses, et elle appris aisément toutes les sciences qui convenoient à son sexe, et auxquelles on eut soin de la former. Elle sçut lire dès l'âge de trois ans, et elle n'en avoit que cinq ou six lorsqu'on lui appris la langue latine, à laquelle on joignit l'étude de la poésie, et celle de la géographie, et de l'histoire tant sacrée que profane. On l'appliqua particulièrement dès ses premières années à l'étude et à la méditation de l'Ecriture sainte, qui a toujours été depuis sa principale occupation (5).

À l'âge de douze ans elle perdit madame d'Aumont, sa tante, et peu après elle fut attaquée elle-même d'un rhumatisme si violent, que ses nerfs se retirèrent, qu'elle ne crut plus en grandeurs depuis ce temps là, et qu'elle en resta très incommodée, et même contrefaite. Dégoûtée du monde, elle demanda l'habit de religieuse, et quoiqu'elle n'eût que quatorze ans, on lui accorda ce qu'elle demandoit. Ses instances et sa ferveur firent passer par-dessus les règles ordinaires. Dépendant peu de temps après qu'elle eut pris l'habit, on reçut une défense de la cour de lui faire faire profession, et un ordre de la rendre à ses parents. Il fallut obéir : elle sortit du cloître, mais elle en conserva l'esprit, et ne voulut point en quitter l'habit. Elle se retira à l'abbaye du Val-de-Gif, au diocèse de Paris, où madame de Cheverni, sa tante étoit religieuse et prieure, et qui avoit alors pour abbesse madame Françoise de Courtils, et elle y vécut en qualité de pensionnaire dans une grande retraite et une exacte application aux exercices de la maison. M. de Monglat, son père, l'arracha malgré elle à cette solitude, parce qu'il espéroit qu'elle pourroit rentrer dans sa première maison ; mais les obstacles s'étant multipliés avec le temps, il lui permit de retourner à Gif environ trois ans après en être sortie. Elle y rentra le premier jour d'octobre de l'an 1665, et elle y prit l'habit trois mois après.

Elle fit sa profession à l'âge de près de vingt ans, le 17 de février 1667, entre les mains de madame de Courtils qui étoit encore abbesse de ce monastère ; et qui mourut deux ans après. Madame Hurault de Cheverni, tante de la demoiselle de Monglat, lui ayant succédé dans la dignité d'abbesse, obligea sa nièce, dont elle connoissoit les talens et la vertu, à accepter successivement les charges de seconde maîtresse des novices, puis de soûprieure, et enfin celle de première maîtresse des novices. Ce fut sous le gouvernement de Madame de Cheverni que la réforme commencée fort avantageusement sous le gouvernement des dames de Mornai de Villarceaux, fit de nouveaux progrès dans l'abbaye de Gif, qui jusques là avoit été mitigé, quoiqu'édifiante ; et madame de Monglat seconda autant qu'elle put par son exemple et par ses discours le zèle de sa tante et de celles qu'elle eut pou imitatrices de sa ferveur. Mais il n'y eut point sur cela de règlemens en forme, et depuis 1671, on se contenta de laisser dans la mitigation celles qui ne se sentoit pas encore assez de force pour pratiquer la règle de saint Benoît dans sa pureté.

 

 

En 1676, Madame de Cheverni, se démit de son abbaye en faveur de sa nièce, après en avoir reçu l'agrément de la cour, et les provisions de Rome nécessaires, et madame de Monglat, malgré ses répugnances et toutes les raisons qu'elle put alléguer pour n'être pas chargée de ce fardeau, fut contrainte de le prendre le 7 de mai 1676. Plus elle se fit élevée, plus elle augmenta en ferveur et en amour pour la pénitence. Elle ne voulut avoir personne à son service dans le temps même de ses maladies ; elle ne voulut jamais avoir de feu dans sa chambre et passa plus de dix ans sans s'en approcher. Elle jeûnait très austèrement, et poussoit en tout la mortification presqu'à l'excès, par rapport à sa complexion des plus délicates. Le grand amour pour la pénitence l'engagea de proposer de nouveau à ses sœurs de demander que l'on établit dans la maison l'étroite observance de la règle, entr'autres l'entière abstinence, et l'observation des jeûnes réguliers de la règle de saint Benoît. Une grande mortalité qui affligea la maison au commencement de son gouvernement, et qui enleva onze ou douze membres en dix mois ; entr'autres cinq ou six religieuses qui avoient montré le plus d'opposition à la réforme, lui fut très utile dans son dessin : elle s'en servit pour faire admirer la justice de Dieu, et la faire craindre, et parla si vivement et d'une manière si chrétienne des avantages que l'on pouvait retirer de la pratique exacte de la règle que l'on avait pris pour guide, qu'elle en persuada beaucoup. Enfin, sur le consentement du plus grand nombre, elle se détermina à travailler sérieusement à cette réforme, et à rentrer, comme elle disait, dans l'héritage de ses pères : c'est ainsi qu'elle nommait les pratiques de la pénitence, prescrites par la règle de saint Benoît. Elle trouva cependant encore beaucoup d'oppositions à l'exécution de son dessein : elle les vainquit par la persévérance, et par ses prières, secondée en cela par M. Claude Ameline, grand archidiacre de l'église de Paris, alors visiteur de cette maison, qui servit beaucoup en cette occasion le zèle de l'abbesse.

M. de Harlay, archevêque de Paris, à qui cette affaire fut remise, consentit enfin, après plusieurs refus, à la nouvelle réforme, qui commença à être suivie dès la fin de 1676, et qui a toujours subsisté depuis. Ce grand ouvrage paraissant affermi, madame de Monglat se prépara à recevoir la bénédiction abbatiale, qui lui fut donnée le 25 d'avril de l'année suivante 1677 par le P. Le Boutz, de l'Oratoire, célèbre prédicateur, alors évêque de Périgueux, qui loua beaucoup en cette occasion la réforme que la nouvelle abbesse venait d'introduire dans son monastère. Les infirmités de Madame de Monglat s'étant augmentées avec le temps, et la grandeur de son humilité lui causant continuellement d'extrêmes peines sur sa dignité d'abbesse, elle en fit la démission, pure et simple le 3 d'avril 1686, après avoir fait agir pour que l'abbaye fut donnée à madame Anne-Éléonore de Béthune d'Orval, professe de l'abbaye de Royallieu de l'étroite observance de Citeaux, et qui étoit alors par ordre de ses supérieurs, et contre son inclination, dans l'abbaye de Saint-Pierre de Reims. Louis XIV n'ayant pas d'abord répondu aux vœux de madame de Monglat, elle lui en écrivit, et sa Majesté accepta sa démission, sans faire connaître celle qu'il voulait nommer à sa place. Mais ce monarque n'en nomma point d'autre que celle que madame de Monglat avait désirée. Cette nomination si souhaitée fut faite le jour de l'Assomption de la même année, et madame de Béthune alla en conséquence à Gif le 28 de février 1687, et quelque temps après, madame de Monglat voulu bien accepter la qualité de prieure dans une maison dont elle venait de quitter la première dignité. Elle mourut le 30 septembre 1701, n'étant encore âgée que de cinquante cinq ans. Une lettre de M. Arnault, docteur de Sorbonne fait mention d'un miracle arrivé en la personne de madame de Monglat à l'âge d'environ treize ans, pendant qu'elle demeurait à Port-Royal. C'était au mois d'avril 1661 (6).

 

 

Anne-Éléonore de Béthune d'Orval

Dans son dictionnaire historique, l'abbé Louis Moréri, prêtre, docteur en théologie donne une biographie complète et très élogieuse d 'Anne-Éléonore de Béthune d'Orval, abbesse de Gif.

« Abbesse de Notre-Dame du Val de Gif, au diocèse de Paris, si connue par sa grande piété, par son esprit supérieur, et par ses écrits, étoit fille de François de Béthune, duc d'Orval, chevalier des ordres du roi, premier écuyer de la reine Anne d'Autriche, et de madame Anne de Harville de Palaiseau. Placée dès l'âge de trois ans dans l'abbaye de Royal-Lieu, elle y fut élevée dans la piété et l'innocence, sous les yeux de madame de Vaucelas, sa tante, qui en étoit abbesse. On n'eut pas moins de soin de cultiver son esprit, et de l'orner de toutes les connoissances qui convenoient à son état, et à la supériorité de son génie. Dès qu'elle se crut en état de prendre un parti, elle n'hésita pas sur le choix. Le monde lui offroit tout ce qu'il y a de plus flatteur ; mais la grâce lui faisoit goûter au fond du cœur des joies pures et solides que le monde ne connoît pas ; et vaincue par cet attrait supérieur à celui de la nature, elle résolut de s'engager dans l'état religieux de la maison même où elle avoit été élevée. Elle entra au noviciat à l'âge de quatorze ans, prit l'habit à quinze ; et laissant partir sa tante qu'elle aimoit tendrement, et qui fut nommée à une autre abbaye, elle fit profession dans celle de Royal-Lieu à l'âge de seize ans. Dieu l'y affermit dans la vertu par la voie où il a coutume de conduire ses élus ; elle fut exposée dans un lieu qu'elle aimoit à des peines et à des contradictions qui le lui firent rien perdre de l'affection qu'elle avoit pour cette maison ; et lorsque l'on se fut cru obligé de l'en séparer, elle n'en sortit qu'avec peine, et il fallut, pour ainsi dire, l'en arracher. On la mit dans l'abbaye de S. Pierre de Reims, dont madame sa sœur étoit abbesse, et pendant cinq années qu'elle demeura dans cette maison, on ne put se lasser d'admirer sa foi, sa douceur, sa patience, son application continuelle à ses devoirs, en même temps qu'on la recherchoit pour la beauté de son esprit, et la grandeur de ses talents.

Elle n'avoit encore que vingt-neuf ans, lorsque madame de Clermont Monglat, abbesse de Gif, voulant se décharger du gouvernement de son abbaye qu'elle envisageoit comme un fardeau sous lesquels ses infirmités, et encore plus son humilité, la faisoit gémir, jeta les yeux sur elle pour la remplacer. Jamais choix ne fut plus approuvé, et ne dut l'être plus. Madame d'Orval joignoit à tous les talents dont on a parlé le véritable esprit de gouvernement. Louis XIV ayant accepté la démission de madame de Montglat, et nommé conformément aux vœux et à la demande de celle-ci, madame d'Orval, cette dernière se rendit à Gif le 28 de février 1687, et prit possession le même jour.

Elle agit toujours depuis de concert avec l'ancienne abbesse, qui accepta par obéissance la qualité de prieure ; et pendant quinze ans que madame de Monglat vécut encore, ce fut un combat continuel entre l'une et l'autre à qui montreroit le plus de déférence, attention et de zèle. Depuis que madame d'Orval eut pris possession de l'abbaye de Gif, et pendant quarante-sept ans qu'elle a gouverné cette maison, tous ceux qui ont eu l'avantage de la connoître, ont admiré en elle une grandeur d'âme que rien ne pouvoit abattre ; une facilité de génie qui la mettoit en état de fournir à tout ; une supériorité de vues qui lui présentoit en toute occasion les expédiens les plus sages et les mesures le plus convenables ; et ce qui est encore plus estimable, un cœur tendre, bienfaisant, généreux, ennemi de la flatterie et de l'artifice ; en un mot un caractère d'autant plus propre à gouverner, qu'il étoit plus élevé au-dessus de ce qui fait aimer les premières places aux âmes nées sans élévation. Elle joignit à ses talens une piété tendre, mais éclairée, et sans ces petitesses qui la gâtent ou qui l'altèrent, et qui la font mépriser des personnes du siècle qui ne l'envisagent que par les défauts dont elle n'est point coupable ; une humilité profonde, mais sans pusillanimité ; un amour universel de la pénitence, mais sans ostentation ; un amour constant de l'ordre et de la règle, mais sans dureté ; une régularité toujours égale, et toujours soutenue ; un don d'exhorter et d'instruire peu commun, appuyé d'un exemple encore plus éloquent et plus efficace.

Pendant un si long gouvernement, elle n'est sortie qu'une seule fois de sa maison, et cela par un ordre exprès de feu M. le cardinal de Noailles, et pour un dessein digne de la piété de l'un et l'autre. Elle n'avait de commerce au dehors que celui auquel la charité, le devoir, les besoins de la communauté, et les bienséances indispensables l'obligeaient. Son amour pour les pauvres n'était arrêté que par l'impuissance absolue de les assister plus abondamment. L'hospitalité s'est toujours exercée par ses ordres avec une générosité noble et chrétienne. Son désintéressement dans la réception des sujets propres à sa maison, a été poussé aussi loin qu'il peut l'être. On ne finirait pas si on voulait s'étendre sur ses vertus. Tant que l'esprit de régularité, de piété et de religion subsistera dans son monastère, sa mémoire y sera toujours en vénération. C'est au milieu des justes regrets d'un pieux troupeau de vertueuses compagnes qu'elle avait formées, et qu'elle a toujours édifiées, qu'elle mourut le 28 de novembre 1733, à neuf heures du soir, dans la soixante-seizième années de son âge, la soixantième de sa profession religieuse, et la quarante-septième de son gouvernement. Elle a été remplacée par madame de Ségur, qui depuis plusieurs années était sa coadjutrice, et qui était digne de lui succéder.

Madame d'Orval, pleine d'un juste respect pour madame de Monglat, à qui l'abbaye de Gif doit presque toute la réforme que la première trouva dans cette maison lorsqu'elle y entra, a composé sa vie qui est encore manuscrite, et qui mériterait de voir le jour. À l'égard de ses ouvrages imprimés, nous ne connaissons que ses :

1. Réflexions sur les évangiles , imprimées à Paris, chez Jean de Nilli, in-12,
2. L'idée de la perfection chrétienne et religieuse pour une retraite de dix jours , chez le même, in-12, en 1719. Cet ouvrage est en deux parties : la première contient la retraite dont on vient de parler ; la seconde, des méditations pour se préparer à recevoir le saint Esprit, et pour l'octave du saint sacrement, avec une paraphrase sur le Te deum, etc.
3. Les règlemens de l'abbaye de Gif avec des réflexions.

Le portrait de madame d'Orval y a été gravé depuis sa mort. Un ami de sa maison, plein de vénération pour sa mémoire, a fait ces vers à l'occasion de ce portrait :

Si d'une abbesse illustre en grâce, en piété,
Dans ce portrait tu ne vois que l'image,
Contemple le troupeau que ses soins ont formé,
Ses vertus, ses regrets, t'en diront davantage.

Madame de Béthune d'Orval, alors nouvellement abbesse de Notre-Dame du Val de Gif, ayant eu besoin d'un confesseur pour sa maison, le père Julien Gardeau, curé de Saint-Étienne-du-Mont à Paris, qui avait été visiteur de ce couvent, lui adressa le père Ambroise Morna, prêtre angevin, qui alla dans l'abbaye de Gif, avec l'agrément de Monseigneur l'archevêque de Paris. Il commença d'y exercer son ministère le 13 du mois d'août 1688, et il l'a continué dans cette maison pendant 34 ans. «  On ne tarda pas à reconnoître que Dieu l'avoit envoyé dans sa miséricorde, et qu'il avoit toutes les qualités d'un digne ministre des autels, et d'un fidèle dispensateur des divins mystères  », dit l'abbé Moréri. A l'age de 63 ans, le père Morna se trouva attaqué d'un tremblement de membres du côté gauche qui devint bientôt universel, par un relâchement des nerfs. Il cessa toutes les fonctions de son ministère et s'en alla dans la communauté de saint François de Salle, destinée aux ecclésiastiques pauvres et infirmes. Enfin voyant que ses infirmités croissaient, il souhaita de revenir dans la solitude de Gif, où il a vécu le reste de sa vie.

Dans un dictionnaire de femmes célèbres paru en 1788, l'auteur donne une courte biographie, mais cocasse, d'une sœur du XVIIe siècle. Il s'agit de Blaise de Wlvegan (ou Villegevan), née à Strasbourg de parents luthériens qui s'enfuit de sa famille déguisée en homme et se rendit à Cologne chez les Carmes déchaussés où elle fut reçue en qualité de frère convers sous le nom de Joachim . Son déguisement ayant été découvert, elle revint à Paris et reprit son habit de fille pour se faire religieuse dans l'abbaye de Notre-Dame du Val de Gif. Elle y mourut en 1657, âgée de 84 ans.

À suivre…

 

 

Notes

(1) Abbé J.-M. Alliot, Histoire de l'abbaye et des religieuses bénédictines de N.-D. du Val de Gif (chez A. Picard, Paris, 1892).

(2) Jean-Louis Brunet, Le parfait notaire apostolique et procureur des officialitez (chez Robustel, Paris, 1730).

(3) H. Fisquet, La France pontificale, Gallia Christiana (Repos Libr. Paris, 1864)

(4) L. Moréri, Le grand dictionnaire historique ou le mélange curieux de l'histoire sacrée et profane (chez les Libraires associés, Paris, 1759).

(5) L. Moréri, Grand dictionnaire généalogique, géographique , t. II (chez J. Vincent, Paris, 1735).

(6) L. M. Prudhomme, Historique des femmes célèbres mortes ou vivantes , vol. 3 (chez Lebigre, Paris, 1830).