Louis Malet de Graville, seigneur de Marcoussis (IV) Le chambellan du roi |
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Chronique du Vieux Marcoussy ------------------------------------- _---------------------- --------- Mai 2010 C. Julien JP. Dagnot
Nous présentons le quatrième volet de la vie de Louis Malet de Graville. Bien qu'ayant eu une éducation militaire, le jeune écuyer fit partie du cercle restreint des chambellans de Louis XI. Plusieurs auteurs prétendent que Louis XI s'entourait de « gens de petite noblesse » car il se méfiait des grands seigneurs qui lui avaient " donné du fil à retordre ". Louis de Graville s'initia à la gestion des affaires du gouvernement, s'occupa de justice, de diplomatie et devint l'un des Conseillers les plus influents du royaume.
Le conflit avec l'Empire Après la disparition du duché de Bourgogne et de son chef, le duc Charles le Téméraire, un nouveau conflit vit le jour entre 1485 et 1488, la Guerre folle , qui opposa la régente contre une coalition formée par des princes français : le duc de Lorraine, le duc de Bretagne, le sire d'Albret et le duc d'Orléans et de princes étrangers : Maximilien d'Autriche, le prince d'Orange, le roi d'Angleterre et le roi d'Aragon. Le parti princier, féodal et aristocratique porta la guerre principalement en Bretagne et en Flandres. En se mariant avec la seule héritière de Bourgogne, la duchesse Marie, Maximilien 1er de Habsbourg contrôle la Flandre bourguignonne et la comté de Bourgogne (Franche-Comté). Après la révolte des Gantois, Maximilien déclara la guerre à la France, prétextant qu'il n'en voulait pas au jeune roi, qu'il regardait toujours comme son gendre chéri, mais qu'il s'en prenait seulement à ceux qui gouvernaient sous son nom. Louis de Graville était directement visé, au Conseil, il lança : « je mesbaïs bien de Maximilien, qui, ne possédant rien dans le royaume, prétend y faire la police ». La guerre dans les Flandres et aux Pays-Bas bourguignons se termina par un fiasco. Le sort ne favorisa pas les armées françaises. Saint-Omer et Arras étaient tombés aux mains de Maximilien. En Franche-Comté la situation n'était pas moins favorable, Maximilien avait reconquis la plus grande partie de la dot de sa fille. L'opinion du plus grand nombre de la cour de Charles VIII était favorable à la paix : les ducs de Bourbon et d'Orléans, le prince d'Orange réclament la restitution des terres enlevées. Par contre, l'amiral de Graville n'épargne aucun effort pour faire obstacle à la paix. « Il lui semble en effet que, tant que l'on sera en guerre, il restera en grand crédit ; car c'est un homme d'une valeur et d'un génie réels, et dès qu'il y a quelque chose à faire, il faut bien que l'on ait recours à lui », dit François Delaborde. L'amiral est soutenu par le cardinal de Bordeaux, Louis de Clèves, et le maréchal de Gié, son cousin germain. Quelques années plus tard, l'amiral changea d'opinion quand la guerre d'Italie fut décidée. Plus tard, en mars 1495, Maximilien, en tant que roi des Romains, s'opposera à l'expédition française en Italie et à la mainmise sur le royaume de Naples en rejoignant la Ligue de Venise. Pour le gêner, le roi l'attaqua dans les Pays-Bas bourguignons où Louis XI avait gagné de nombreuses terres.
L'homme d'État À la mort de Louis XI, le dauphin n'ayant que 12 ans fut mis sous la tutelle de sa sœur Anne de Beaujeu et de son mari Pierre de Bourbon (3) . Dès 1485, la régente fut attaquée aux États Généraux de Tours, par les princes rebelles. Anne de Beaujeu en destitua trois et donna de plus en plus sa confiance à Louis de Graville et à Louis de La Trémoille , destinés à jouer un rôle prépondérant à la Cour. « Madame de Beaujeu aimait à s'appuyer au Conseil sur l'expérience de vieux serviteurs de son père, tels que Louis de Graville , Jean Bourré, etc … ». Sous le titre de conseiller et chambellan du roi Charles VIII, Louis de Graville avait la fonction de ministre. En 1487, Graville est le principal et le plus écouté des conseillers du roi. En 1488, il devient, suivant l'expression de Louis de La Trémoille, son « ministre de la guerre ». Il semble que Graville, très pointilleux dans ses affaires, avait adressé, à son collègue et parent La Trémoille, un grand nombre de lettres ; le 12 août, ce dernier reçoit une missive «… vous dictes que vous m'avez escript depuis huit jours plus de six foys : je vous advise qu'il y a plus de huit jours que je n'en eu lectre de vous… ». Ainsi La Trémoille, chef des armées royales, reçoit les ordres du roi par l'intermédiaire du ministre Louis de Graville. Il surveille les soldes des soldats « En tant que touche des Souysses, le Roy escript qu'il en soit paié jusques à six vings… ». Graville manifeste une constante préoccupation pour l'armée. Il ne néglige rien pour donner la gloire à son jeune chef âgé de 28 ans seulement. Pour certains auteurs, Graville était un homme habile, alerte et fin courtisan. Il craignait de se voir supplanter par La Trémoille. Les difficultés rencontrées par Graville, véritable organisateur de la guerre, étaient parfois exorbitantes ; de Tours, il chaperonnait le jeune général, son cousin. Bien que ce dernier n'écoutât pas toujours l'amiral, il allait de victoire en victoire. Lors de la prise de « Chasteaubryant » Graville reçut une petite part du butin composée d'une demi-douzaine de chiens courants. Ayant agi comme le commandant suprême des opérations menées en Bretagne, Louis de Graville n'en est pas moins un fin diplomate. Après la prise de Saint-Malo, il concède 20.000 écus à La Trémoille pour ne pas prendre la flotte bretonne conduite par son amiral Prégent de Coetivy « … car je n'ay point acoustumé de prendre mon prouffit de si près… » . Charles VIII annonce qu'il ne veut plus de « rançonnemens ni des très mauvais et rudes termes » dont on use avec les Malouins. Graville est nommé capitaine de Saint-Malo . Dans les comptes et ordinaires de la prévôté de Paris de 1491, Louis de Graville est qualifié de « chevalier, conseiller et chambellan du Roi et concierge du Bois de Vincennes » ; puis « admiral de France, capitaine et concierge de l'hostel et tour de Beauté-sur-Marne ». Le même registre nomme Louis de Graville au chapitre des « rachats, reliefs et quints deniers », en 1481 pour des ventes de cens, en 1484 pour les gages d'officiers ordinaires « Louis, seigneur de Graville, concierge dudit Bois, au lieu dudit Olivier le Dain, par lettres patentes du roi, données à Amboise le huit septembre 1483, pour ses gages depuis le huit septembre qu'il fut institué jusqu'au vingt-neuf novembre ensuivant » (4) . Il est encore porté, comme « concierge du Bois de Vincennes » pour « salaires et pensions à volonté » en 1487, pour vente de cens en 1492 ; comme « capitaine du Bois de Vincennes » pour les comptes de voirie en 1502 et en 1506 rendus par messire Jehan Teste, receveur et voyer de Paris. En 1515, nous lisons « sire Louis de Graville, admiral de France » sur l'ordinaire de Paris pour un an fini à la Saint-Jean. Enfin le compte de l'ordinaire de Paris pour 1517 mentionne plusieurs fois « au lieu de deffunt de Graville » et au titre « dame Jeanne de Graville, fille et héritière de feu Messire Loys sieur de Graville, admiral de France ». La table stipule son logement « Louis Mallet de Graville, à l'hôtel de Graville ; il a demeuré rue Percée, et dans la maison du Porc-Épic, rue de Joui ». Le 30 août 1491, Louis de Graville était au château de La Roche-Talbot près Sablé avec de nombreux princes et prélats et le roi qui signa des lettres patentes pour les commissaires des états du Languedoc afin de lever des fonds pour la guerre en Bretagne. L'amiral apposa sa signature au bas de ces lettres. À cette époque Louis de Graville était le personnage le plus important du Conseil royal. Comme on sait les Etats généraux de Tours, réunis le 15 janvier 1484 et sollicités par le parti royal aussi bien que par le parti orléaniste, n'avaient rien décidé quant à la garde du jeune roi. Pratiquement la tutelle restait aux mains des Beaujeu (certains auteurs les nomment Monsieur et Madame de Bourbon) et les chambellans attachés à la personne de Charles VIII. Anne de Beaujeu donna de plus en plus sa confiance à Louis de Graville et à Louis de La Trémoille, destinés à jouer un rôle prépondérant, tandis que trois conseillers accusés de complicité avec les rebelles furent destitués : Gui Pot et les sieurs de Maillé et de Boissy.
La guerre de Bretagne Pendant toute la régence, le gouvernement fut occupé par deux affaires : la rébellion du duc d'Orléans qui prétendait avoir été chassé du pouvoir et la coalition autour du duc de Bretagne. Après avoir échappé à l'arrestation, Louis d'Orléans se réfugia, en décembre 1486, en Bretagne où il excita des défiances et fut forcé de déclarer solennellement qu'il ne songeait pas à épouser Anne de Bretagne (1). Après les premières victoires militaires du roi en Guyenne et en Poitou, les seigneurs rebelles au duc de Bretagne signèrent le traité de Châteaubriand avec les négociateurs, le sire du Bouchage et André d'Espinay, cousin germain de Louis de Graville. Mais la régente comptait bien conquérir la Bretagne. Le 8 mars 1488, l'armée royale sous les ordres de Louis de La Trémoille, alors âgé de 28 ans se réunit à Pouencé. Elle comptait 10.000 Français et 5.000 Suisses. L'amiral de Graville assurait le recrutement et les approvisionnements. Après la perte de Vannes par les Français, le roi, les Beaujeu et l'amiral de Graville pressaient La Trémoille d'entrer en campagne. Châteaubriand capitula le 23 avril, Ancenis le 19 mai. Les anglais arrivèrent le 5 juin à Rennes. Fougères se rendit à La Trémoille le 5 juillet. Finalement la coalition fut défaite à Saint-Aubin-du-Cormier le 28 juillet 1488 où le prince d'Orange et le duc d'Orléans furent faits prisonniers (2) . La défaite de l'armée bretonne commandée par le maréchal de Rieux, et des troupes alliées à la bataille de Saint-Aubin-du-Cormier, en juillet 1488, met fin à la Guerre folle et entraîna la fin de l'indépendance de la Bretagne. Le duc François II meurt le 9 septembre suivant, sa fille Anne devient duchesse en janvier 1489. Au printemps 1490, alors que les Beaujeu était retenu à Riom pour leur héritage, Graville se trouva seul avec le roi à Amboise pour garder les intérêts de la régente. Il para un coup d'état du comte d'Angoulême qui tenta de remettre en liberté son cousin, le duc d'Orléans. « Ledit seigneur de Graville estoit lors le principal ayant auctorité en cour après Monseigneur et Madame de Bourbon : et depuis qu'il estoit entré en ceste auctorité, il n'avoit point encore abandonné la personne du Roy ; de sorte qu'à cause de luy baulla cette commission, le commun bruit estoit que la cour commençoit à se tanner de luy et qu'on luy bailloit le bout. Il en partit donc et alla en sa commission et fit diligence d'appester le vaisseau et s'avança ensuite à Brest ».
Manuscrit concernant Jehan de Reilhac, seigneur de la Queue-en-Brie, maître des comptes, général des finances et ambassadeur de Charles VIII.
Le réformateur Vers la fin du XVe siècle, un certain nombre de voix s'éleva contre la richesse patrimoniale des abbayes. Louis de Graville prit en charge l'affaire des questions religieuses qui travaillaient le monde monacal. À la fin du XVe siècle, les moniales et moines d'Île-de-France ont été réformés par des réformes nées et éprouvées en province comme à Cluny. Vers 1496, l'abbé de Saint-Séverin de Château-Landon s'adresse à Jean Standonck, principal du collège de Montaigu, au roi, à l'amiral de Graville et à l'évêque Jean Simon pour réformer son abbaye. Louis de Graville encourage ce mouvement pour imposer la réforme au monastère de Saint-Victor, aidé par le prieur des Célestins, Etienne Poncher. En tant que protecteur séculier des réformes, Louis de Graville gradua ses aides en fonction de la richesse des couvents. « Ces réformes ont permis aux ordres anciens de regagner la générosité des fidèles, qui, sans jamais se tarir, s'était faire modeste et discrète au XVe siècle » nous dit Jean-Marie Le Gall. Dans son testament, l'amiral de Graville est d'une grande générosité envers les réguliers : 300 livres tournois aux tertiaires de Saint-Eutrope-lès-Chastres, autant aux franciscains de Malesherbes. En 1511, il a remis 3.000 livres à Montaigu. Il y a aussi fondé un obit au prieuré de Graville et à Marcoussis. Sa générosité bénéficia donc à tous les ordres réformés. Toutefois, elle fut graduée puisque nous constatons une rente de 20 lt pour Montaigu et Graville, mais ne dota pas les Célestins de Marcoussis « pour ce qu'ils ont assez de biens ». Jean Standonkt (ou Standonht), d'origine brabançonne, docteur de l'Université de Paris, n'oublia jamais qu'il devait son éducation et son élévation à la charité. Il eut toujours une affection particulière pour les étudiants sans fortune. Grâce aux libéralités de l'amiral de Graville, dont il fut le confesseur, il rebâtit le collège de Montaigu. Peu après sa nomination au gouvernement de Picardie, Louis de Graville réclame, le 5 mai 1495, la réforme à Amiens où « la vitalité des institutions municipales résulte de la proximité frontalière ». L'amiral semble être engagé dans une action de moralisation publique. En novembre 1495, l'échevinage appelle Olivier Maillard tandis que l'amiral demande le renfort de son ami Standonck. Bien souvent les réformateurs sont accompagnés par « un grant nombre de sergents et autres gents armés » (5) . Louis de Graville mit des gens d'armes à la disposition de Jean Mombaer, abbé de Château-Landon. Mais que pousse Louis de Graville à être le bras armé cette réforme ? Les réformateurs des réguliers croient en l'utilité de la médiation des réguliers. Il s'agit pour le seigneur de Marcoussis de se préparer à passer dans l'au-delà, il demande aux moines de prier pour son âme, celle de son épouse, celle de ses parents et amis. Pour rejoindre sa dernière demeure, Louis de Graville demande à être accompagné par « gens d'église les plus craignant Dieu et mieux renommez qu'on pourra trouver à l'environ comme religieux réformez ». Il choisit sa sépulture dans le couvent des Franciscains qu'il a fondé à Malesherbes. Il sollicite une inscription au nécrologe du prieuré de Graville et de Montaigu afin qu'on célèbre un obit chaque année au jour anniversaire de son trépas. Il demande l'assistance des moines réformés qui sont la meilleure assurance dans la prière.
Le chambellan de Charles VIII De nombreuses lettres patentes de Charles VIII portent la signature de « Loys de Graville » en compagnie des sires de Myolans, de Grunault et d'Aubigny. Les lettres données aux Montilz-lez-Tours le 18 juillet 1491 portent le mandement du roi faisant droit aux réclamations de maître Jehan de Reillhac en rappelant les services qu'il a rendus depuis plus de quarante ans « … ordonnons que ledit de Reilhac soit entièrement payé des restes de sesdits gages et droiz qui luy sont et pevent estre deubz a cause de sondit office [conseiller et maître ordinaire de la Chambre des comptes] ». Les droits se montaient à 500 livres tournois. L'affaire ne fut pas réglée, les gens des Comptes continuaient à marchander à Reilhac son traitement. Graville signa une seconde lettre de réclamation donnée de Lyon le 11 février 1496. Nous donnons quelques extraits des lettres de Loys de Graville à ses collègues du Conseil du roi, ou bien celles qu'il écrivit au nom du roi pour des affaires diplomatiques.
L'amiral Louis Malet de Graville (dessin de Du Moustier).
Le 5 novembre 1483, Messire Nicolle Chevalier et les clercs de Messire Etienne Petit, reçoivent 4 livres 2 sols 6 deniers tournois, pour avoir fait les mandemens nécessaires touchant la restitution du corps et des biens de Messire Olivier le Dain, prisonnier ès mains du sire de Graville. En 1494, des montres sont reçues à Péronne : la première est celle des hommes d'armes et archers qui sont sous la charge et conduite de Messire Loys de Graville , amiral de France, sa personne y comprise. En 1498, une sentence du prévôt de la Ferté-Milon, est rendue pour Louis de Graville et de la Ferté, amiral de France. En 1500, le rôle de la montre faite en la ville de Pont-de-1'Arche des gens de guerre tenant garnison dans ladite ville. Quittance donnée par Louis, sire de Graville, amiral de France et capitaine de Pont-de-l'Arche. À la même époque, le paiement des frais d'un voyage entrepris par Georges de Clère, en la compagnie de l'évêque de Castres, vers le roi à Blois, pour se plaindre des entreprises de M. de Graville, amiral de France.
La politique européenne Nous avons, à maintes reprises, esquissé l'opposition de Louis Malet pour les guerres en Italie. Commynes note que dès 1495 et encore en 1498 « il y eut maintes disputations » à propos de l'intervention en Italie. Le plus hostile est un parent du légat, proche de lui aussi des réformateurs, l'amiral de Graville, tandis que de Briçonnet père prône la guerre. Graville n'y participa pas, préférant rester gouverner la Normandie et soutenir les réformes des ordres monastiques. Aidé dans cette tâche par ses cousins Rohan, Pierre de Rohan maréchal de Gié et François de Rohan, archevêque de Lyon, il prend la réforme des moniales à cœur. Quand il eut passer les Alpes, le 2 septembre 1494, le roi Charles VIII nomma Commynes son ambassadeur près de la Seigneurie de Venise, l'une des grandes puissances d'Italie, afin d'obtenir une alliance des Vénitiens et « de les entretenir de l'amour du roi de France ». En 1488, Charles VIII avait fait saisir leurs navires. Dans une lettre de Louis de Graville, amiral de France, on lit que « les Vénitiens sont hérétiques et ennemis du roi ». Anne de Beaujeu régente du royaume, réunit les Etats généraux au grand complet le 15 janvier 1484. Elle fait débouter Louis, duc d'Orléans, de ses prétentions à la régence et obtient les subsides dont elle a besoin. Cette assemblée est innovatrice car les états rassemblent des élus du royaume, paysans compris ; au total on compte 265 délégués (7) .
Graville et le droit coutumier La fin du XVe siècle fut l'époque de la réforme de l'administration. Le droit coutumier passa de l'oral à l'écrit. Chaque pays avait sa coutume. En Île-de-France, différents droits coutumiers étaient appliqués : la coutume de la prévôté et vicomté de Paris dont dépendait la châtellenie de Montlhéry, celle de Meaux, celle de Melun, etc. De cette variété de coutumes naît une complexité juridique dont les Cours devaient résoudre. Si l'on s'en tient au « retrait lignager » par exemple, il y a quelques coutumes qui y sont plus favorables comme celle de Laon. La coutume de Melun fut rédigée la première, en 1494, mais elle ne fut publiée que plusieurs années plus tard ; coutume pour laquelle Louis de Graville fut impliqué en tant que « haut et puissant seigneur » ayant des fiefs à Milly et autres paroisses du Gâtinais. Le 19 octobre 1508 eut lieu, dans la chambre épiscopale, la dernière lecture des Coutumes de Chartres , puis la publication du code chartrain, par les commissaires royaux, en présence des ecclésiastiques, nobles et bourgeois composant les États du bailliage de Chartres . Parmi l'assemblée, il y avait « Messire Louis de Graville , amiral de France, comme tuteur et bail des enfants mineurs de Jacques de Vendôme, en son vivant vidame de Chartres et seigneur de Meslay ». Les lettres pour la publication de la Coutume de la prévosté et vicomté de Paris sont publiées le 21 janvier 1510 par Messire Thomas Baillet, « président en la court de Parlement ». Louis Malet de Graville, seigneur de Marcoussis est appelé en 1510 pour la rédaction « … pour le soulagement de noz sujetz, eussions ordonné toutes les coustumes de nostre royaulme estre accordées en l'assemblée des trois estats de chascun bailliage et séneschaussée de nostredict royaulme, et rédigées et mises par escript; et ce faict, rapportées par devers les commissaires sur ce par nous disputez, … ». Sa grande expérience pour les affaires intérieures lui permettait de donner son avis sur tous les articles du Code civil de l'Ancien régime. En conséquence de cette ordonnance, par lettres du 26 février 1510, le roi ordonna au lieutenant civil de la prévôté de Paris de convoquer le clergé, la noblesse et le tiers-état, pour délibérer sur la coutume, et en arrêter la rédaction, avec l'assistance du président du parlement et de l'avocat du roi. Parmi les seigneurs présent à l'assemblée du 22 mars réuni dans la grande salle de l'évêché de Paris, nous voyons le membres de la noblesse : le seigneur de Châtres et de Marcoussis, le seigneur de Palaiseau… ; parmi le clergé : le chapitre de Saint-Merry de Lynois, les religieux de Longpont, les religieux du couvent des Célestins de Marcoussis… ; parmi les représentants du tiers-état : les prévôts de Châteaufort, de Montlhéry, de Poissy, de Corbeil, de Torcy, de Tournant, de Gonesse , vingt procureurs au Châtelet, un procureur en parlement, le substitut du procureur du roi, et quatre praticiens de Montlhéry… Une opposition très-vive du tiers-état se manifesta encore sur le 62e article du chapitre de la censive et des droits seigneuriaux. Cet article obligeait tous les propriétaires de biens soumis à la censive du payer le droit de cens au seigneur, sous peine de 5 sols parisis d'amende, excepté les héritages situés dans la banlieue de Paris, qui ne devaient rien. Le clergé et la noblesse prétendirent que ce droit était dû pour les héritages aussi bien que pour les autres hors de la banlieue. Les avocats et praticiens affirmèrent que non. Ils l'emportèrent, et l'article fut maintenu.
La mort de Charles VIII La nouvelle de la mort soudaine du roi à Amboise le 7 avril 1498 se propagea comme une traînée de poudre dans toute l'Europe. Dans une lettre adressée, de Blois le 8 avril 1498, au grand chancelier de Savoie, Philippe de Valperge annonce l'avènement de Louis XII, l'influence de son conseiller, le prince d'Orange, le prompt oubli du défunt roi dont Louis Malet de Graville « M. l'armiraglio » est cité comme ministre. Le 17 mai 1498, Maffeo Pirovani écrit de Turin à Ludovic Sforza pour narrer les nouvelles de France « le novelle de Franza » annoncer la disgrâce de l'amiral de Graville « al Armiraglio che l'hanno conducto a stare a casa sua privatamente ». Il faut croire que Louis Malet était craint « outre-monts ». Louis de Graville résida à Amboise durant le premier trimestre de 1498 : peut-être fut'il témoin de l'accident qui provoqua la mort du roi. On dit qu'il veilla son cadavre « tant en une grant chambre bien tendue que en l'église… » mais n'est pas mentionné dans l'ordre de pompe des obsèques. Il rejoignit le roi Louis XII dès le 13 avril à Blois où il signa des lettres patentes, lesquelles confirmaient le Parlement de Paris. Il avait recouvré quelques faveurs avec la reine Anne de Bretagne, et l'on peut appréhender les sentiments de Louis XII à son égard « qu'il se seroit decent ne à honneur du roy de France de venger les querelles d'un duc d'Orléans ». Bien que Graville ait combattu les intrigues du prince, celui-ci en souverain intelligent, ne résilia pas les fonctionnaires assez serviles pour « le bien servir ». À suivre…
Notes *Rappelons que par abus de langage, nous succombons, comme la plupart des auteurs, à appeler Louis Malet de Graville par « amiral » ou « amiral de Graville » bien qu'il ne reçut la dignité qu'en janvier 1487. (1) Les retournements de l'Histoire sont tels, qu'une fois, devenu roi de France sous le nom de Louis XII, le duc épousa Anne de Bretagne, veuve de son cousin Charles VIII. (2) Le prince d'Orange obtint sa liberté en épousant une sœur de Pierre de Beaujeu et retourna en Bretagne en promettant de seconder la politique française. (3) Un édit de Charles V, de 1374, fixait la majorité des rois français à quatorze ans commencés. (4) La charge de concierge du bois de Vincennes fut attribuée à messire Gilbert du Puy, chevalier « au lieu dudit de Graville » le 29 novembre 1484. (5) Vers 1480 il y avait Aubri de Courches, sire de Malicorne, chez lequel se firent de grandes parties de chasse. Aubri était favori du duc de Berry, frère du roi. Un Jean de Chourches, chevalier, seigneur de Malicorne vivait à cette époque. Le 5 octobre 1486, il céda à Guillaume Herouys, paroissien de Parcé et à Jehanne sa femme, la place des moulins à drap et à tan en la rivière de Sarthe et tous les droits… moyennant la somme de 100 sols tournois de rente inféodée, annuelle et perpétuelle… . (6) J.-M. Le Gall, Les moines au temps des Réformes (Éditions Champvallon, Seyssel, 2001). (7) Dans le Journal des Etats Généraux , le Tiers-état est appelé « le commung ».
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