L'assassinat du seigneur de Marcoussis

Chronique du Vieux Marcoussy ------------------------------------- _------------------------- ------ Mai 2011

Visite du roi Charles VIII au château de Marcoussis (XVe s. enluminure).

C. Julien

JP. Dagnot

 

 

 

Dans un extrait des Registres des délibérations du bureau de la ville de Paris , publié par Alexandre Tuetey en 1886, nous avons appris que René d'Illiers, le seigneur de Marcoussis, avait été assassiné à Paris le 3 janvier 1533 (1). Ce texte est une découverte surprenante que nul auteur n'avait rapportée. Nous développons cette affaire dans notre chronique.

 

 

La maison d'Illiers

Brièvement, présentons en avant-propos, la notice de la maison d'Illiers par Jean-Baptiste de Courcelles (2). D'Illiers, maison d'ancienne chevalerie, qui tirait son nom d'une ville située dans la Beauce, décorée des titres de sirerie et de baronnie dès le milieu du Xe siècle. Avesgard, sire d'Illiers, vivant en 948, est le premier sujet de cette maison que l'histoire fasse connaître. Les chartes de l'église cathédrale de Chartres, font mention de la donation que lui fit Ledegarde, veuve de Thibaut, comte de Chartres, des dîmes et droits de patronage de l'église d'Illiers. Bodart d'Illiers vivait en 1090, et Yves, sire d'Illiers, en 1128; mais la filiation n'est établie que depuis l'an 1220. Miles d'Illiers fut évêque de Chartres en 1431. René d'Illiers, son neveu, lui succéda sur ce siège épiscopal. Cette maison s'est éteinte en 1701 dans la personne de Léon-Pélage d'Illiers, marquis d'Entragues et de Gié, qui ne laissa qu'une héritière, vivante sans alliance en 1734. Armes : D'or à dix annelets de gueules .

Pour une généalogie complète de la maison d'Illiers, le lecteur est invité à consulter l'ouvrage de François-Alexandre Aubert de La Chesnay-des-Bois, Dictionnaire de la noblesse , t. VIII, p. 224 (3).

 

 

L'époux de Jeanne de Graville

Aucune biographie de René d'Illiers ne nous est parvenu. Toutefois, nous savons que ce gentilhomme qui vécu au début du XVIe siècle fut le second époux de Jeanne de Graville qui devint dame de Marcoussis, à la mort de son père, le célèbre amiral Louis Malet de Graville, en héritant, en 1519, du premier lot de la succession du seigneur le plus riche du royaume.

Nous invitons le lecteur à consulter la chronique dédiée à Jeanne de Graville dont le prénom aurait donné par son père en souvenir de ses aïeux qui portaient le prénom de Jean. Jeanne Malet de Graville serait née vers 1481, puisque ses parents avaient convolé en justes noces quatre ans plutôt selon l'acte de constitution du douaire, que Louis de Graville a fait à sa femme Marie de Balsac. Après avoir été demoiselle d'honneur de Jeanne de France, fille de Louis XI et première femme du duc Louis d'Orléans, futur roi Louis XII. En 1491, elle épousa Charles II d'Ambroise-Chaumont, son aîné de deux ans, second fils de Charles 1er d'Amboise, seigneur de Chaumont, et de Catherine de Chauvigny, neveu du cardinal Georges d'Amboise, ministre favori de Louis XII considéré comme l'un des plus grands mécènes de son époque pour avoir participé à l'introduction de la Renaissance en France. Maréchal de France depuis 1504, le mari de Jeanne de Graville devenait amiral de France en septembre 1508, charge que lui avait transmis son beau-père.

Après vingt ans de bonheur, le malheur accabla Jeanne de Graville qui perdit successivement son mari, mort lors de la guerre d'Italie en 1511, puis son père en 1516 enfin son fils Georges mort à la bataille de Pavie le 24 février 1525 au cours de laquelle le roi François 1er fut fait prisonnier. Restée sans appui, Jeanne eut la faiblesse de se remarier. Elle épousa René d'Illiers, seigneur de Milly, «  qui ne paraît avoir contracté cette union qu'en vue des grands biens dont la dame d'Amboise était en possession  » nous dit un contemporain.

Le mariage fut célébré au cours de l'été 1526 ainsi que le confirme l'acte suivant: Scavoir faisons que devant Simon Chenu et Gabriel Lefèvre notaires du roy nostre sire de par luy establis en son Chastelet de Paris, furent présent et comparurent personnellement nobles seigneur René Dilliers seigneur de Milly, pour luy et en son nom d'une part, et noble femme Jehanne de Graville veufve de feu noble Charles d'Amboise, en son vivant chevalier de l'ordre et grant maistre de France, aussi pour elle et en son nom d'autre part, lesquelles parties de leur bons grez bonnes volontés propres mouvemens , eulx surs bien advisés comme ils disoient, recongnaissent et confessent par devant lesdits notaires comme par devant nous en droit jugement avoir fait entre eulx de bonne foy les traités accords et promesses qui sensuyvent pour raison du mariage, qui au service de Dieu sera fait desdits sieur et dame, cest assavoir qu'ils ont promis prendre par loy de mariage le plustost que bonnement faire se pourra en faveur et contemplation duquel mariage :
- ledit seigneur a doué à ladite dame sa future femme et espouse de douaire coustumiers à iceluy avoir et prendre par ladite dame sitost et incontinent que douaire avoir lieu,
- icelle dame Jehan
ne de Graville a définitivement delaissé à toujours et par ces présentes donne par don irrévocable fait entre vifs audit Dilliers sondit futur espoux ses hoirs, les terres et seigneuries cy après déclairées, cestassavoir chastel terre parc et seigneurie de Marcoussis prez Montlhéry qui se consiste en manoir, eddiffices, garennes, terres, labourables, estangs, moulins, cens, rentes, justice, fiefs, arrièresfiefs, prés, pastiz, boys, buissons et aultres appartenances quelconques, la terre et seigneurie de Chastres soubz Montlhéry, les terres et seigneuries de Gometz Saint Clerc, la terre et seigneurie de Nozay, la terre et seigneurie de Ville-du-Boys, la terre et seigneurie d'Allainville en Beausse, toutes lesdites terres sans aulcunes choses excepter, appartenant à ladite dame eschus par les trespas et succession de feuz messire Loys de Graville que de dame Marie de Balsac ses père et mère. Et oultre luy donne et transporte en faveur dudit mariage tous et chacuns les autres fiefs terres et seigneuries fermes cens rentes biens immeubles quelconques à icelle appartenant, exceptés les terres et seigneuries assis au pays de Normandie, lesquelle terres icelle dame pour en faire et disposer à son plaisir, pour icelles terres et héritages et choses cy dessus donnés comme dit est estre et sortir le propre héritage dudit Dilliers. Item luy donne cedde et transporte tout ce qui peut luy appartenir par la communauté qui estoit entre elle et son deffunt mary et tout ce qui peut lui appartenir par la succession de deffunt révérend père en Dieu Georges d'Amboise en son vivant légat de France . Et de tout ce qui luy a esté donné, donne icelle dame mandement espécial par ces présentes investir recevoir en foy et hommage comme vrai seigneur propriétaire et possesseur desdites choses. Et veut icelle dame que ladite donation tienne son plain et entier effet soit que ladite dame vit cy après ensuit dudit mariage ou qu'elle decède sans enfan. En considération le donataire consent et accorde au cas qu'il desceddat que icelle dame joisse desdites terres et seigneuries par usuffruit sa vie durant... Aussi ledit Dilliers promet prendre dès le jour des espousailles le nom et les armes plaines et entières que icelle dame porte et qu'il ne soit autrement contredit ou empescher par les parent de ladite dame... passé au lieu et chastel du Plessis Pasté prés ledit Montlhéry l'an 1526 le mercredi 4 juillet. Le seigneur du Plessis n'est autre que Jehan Blosset dont l'épouse est Hélaine d'Illiers! Cet acte est unique en son genre, la dame devait avoir des problèmes de vue!

Par ce contrat de mariage, René d'Illiers devient un homme très riche, recevant les biens de sa femme lesquels venaient du richissime amiral Louis de Graville et des Chaumont Amboise et du cardinal d'Amboise qui s'était enrichi auprès du roi Louis XII. Il semble qu'Hélène d'Illiers soit sa nièce, une des trois filles de son frère aîné Jean d'Illiers, seigneur de Manou.

Le mois suivant, René d'Illiers seigneur de Marcoussis ... Guillerville, donataire de Jehanne de Graville, présente ses foys et hommages: à nos amez gens de nos comptes à Paris, ... cher & bien aimé René d'Illiers, chevalier, seigneur de Marcoussis nous a fait ce jourdhuy au bureau de nostre chambre des compte les foys et hommages des terres seigneurie et chastellenie de Marcoussis, ... des terres seigneuries et haute justice de Guillerville, Vilehiers, Villejust, et la Roue, ... audit Dilliers appartenant qui lui ont été donné par Jehanne de Graville en faveur et contemplation de notre mariage ....

Une quittance du 9 décembre 1528 avec expédition sur parchemin fut donnée par Jaques Charmolue, échangiste du Trésor du Roy, au receveur ordinaire de Paris, de la somme de 1.200 livres tournois pour les droits de rachapts, proffits de fiefs et autres droits seigneuriaux dus sur la terre et seigneurie de Marcoussis, au Roy à cause du mariage de Jeanne de Graville avec René d'Illiers, seigneur de Milly. Ladite terre et seigneurie de Marcoussis mouvant du roy. Les droits payés par le couple échurent finalement à Jehan de Mondoucet, valet de chambre du roy pour labourieux services rendus audit seigneur tant au royaume d'Espaigne durant sa prison que ailleurs...

Ce mariage fut un calvaire pour la dame de Marcoussis. Elle fut chassée par son mari du château de Marcoussis qu'elle quitta pour aller se réfugier dans un domaine qui en dépendait, «  en sa maitairie de la Ronce  » dit Simon de La Motte. René d'Illiers qui méprisait sa femme, et menait "grand train" avec la fortune de celle-ci, se livrant à la débauche. Exaspérée par tant de violence, Jeanne de Graville porta plainte auprès de la Cour du parlement contre son mari, par dissipations des 9 septembre et 17 octobre 1527. L'arrêt du Parlement condamna celui-ci à restituer le château par provision et trois mille livres de rente sur les revenus (4). Quelques détails de cette procédure attestent le peu d'égards qu'il avait pour sa femme : «  faisant allusion à son excès d'embonpoint, il ne craint pas de la nommer sa josflue et sa masflue  ». La séparation fut prononcée le 22 août 1530.

Nous ne détaillerons pas ici les actes de gestion faits par René d'Illiers, mais on peut dire qu'il n'a pas tenu compte des arrêts du parlement puisqu'en ne prenant que ses actions décrites en 1532 avec les frères Lemaistre , il a continué d'être le seigneur de Marcoussis jusqu'à son dernier jour.

Le 3 janvier 1533 (non pas au mois de juillet 1532, comme il est souvent écrit), le seigneur d'Illiers tombe sous les coups d'un assassin et Jeanne retrouva son ancienne liberté.

 

 

René d'Illiers, seigneur de Marcoussis

René d'Illiers, seigneur de Milly, de Yèvres, de Bures, de Francvilliers et de Chavernay était le fils de Louis d'Illiers et de Françoise de Bigars. Son grand-père Florent d'Illiers fut un des compagnons de Jeanne d'Arc et prit par de façon décisive à la libération d'Orléans en 1429.

Dans les Notes généalogiques sur la famille d'Illiers , Eugène Vallée cite un auteur du XVIIe siècle «  qu'un puisné de la maison de Vendosme [Bouchard] avoit espousé l'héritière d'Illiers [Yolande, fille de Godefroy], à condition d'en porter le nom et les armes qui sont d'or à six anneaux de gueules… mais, il est vray de dire que la naissance de ce seigneur tire son origine des plus nobles et premières maisons du royaume, soit qu'il prenne son extraction de ces anciens sires d'Illiers, ou bien qu'on le fasse descendre des seigneurs de Vendosme, puisque les princes de la maison de Bourbon, par le mariage de Catherine, héritière de Vendosme, avec Jean II du nom, comte de La Marche, ont honoré de leur alliance cette maison illustre, de laquelle est sortie la branche royale, qui est enfin montée sur le throsne des fleurs-de-lys, et qui règne aujourd'huy avec tant de bonheur. Cela présupposé, l'on peut dire avec vérité de Florent d'Illiers , nommé dans une Histoire du siège d'Orléans, et par quelques autres, messire Florentin, qu'il a esté l'un des plus illustres rejettons de cette ancienne famille ; que c'est en luy que prennent leur source ceux de ce nom qui vivent encore aujourd'huy; qu'il fut fils aisné de Pierre, et petit-fils de Geoffroy, que d'anciens monumens nomment haut et puissant chevalier Geoffroy sire d'Illiers, lequel vivoit en l'an 1350. Nostre Florent commença de paroistre au mesme temps que Charles VII devint héritier de la couronne, c'est à dire environ le temps que le roy d'Angleterre Henry VI, ligué avec le duc de Bourgongne, gouvernoit l'Estat sous le nom de son oncle régent, qui taschoit de ravir le sceptre et la couronne audit roy Charles  » Voilà en quelques mots un raccourci de la biographie du cher de la maison d'Illiers au XVe siècle (5).

Outre les gentilshommes, chevaliers et écuyers de la maison d'Illiers, celle-ci donna des ecclésiastiques qui eurent de hautes fonctions dans l'église. Miles d'Illiers, un des frères de Florent fut évêque de Chartres, ce prélat joua un grand rôle diplomatique auprès du roi. Dans les lettres datées des Montils-près-Tours du 24 janvier 1446, le roi Charles VII lui donne des instructions en tant qu'envoyé en l'assemblée des princes de l'Empire à Nuremberg. Son neveu René d'Illiers, fils puîné de Florent fut archidiacre du Pinserais de 1475 à 1492, puis lui succéda sur le trône épiscopal de 1493 à 1507. Le troisième fils de Florent, Charles, écuyer, fut prêtre, seigneur de la Ferrière, d'Achères, de Manou et de Milly, chanoine et chantre de Chartres, doyen du chapitre de Chartres du 24 août 1459 à février 1509, prieur commendataire de Thimert, député du clergé en 1484 et testa en 1514 (6).

Louis d'Illiers, le second fils de Florent d'Illiers et de Jeanne de Couttes, dame de Noviant le Comte, fut l'auteur de la branche de Manou. Il mourut en 1523. Marié en premières noces avec Jeanne de Flocquet dont il n'eut pas d'enfants, il se remaria en 1489 avec Romaine de Cintray, fille de Jacques, sieur de Dizier de la Cour, de Bréviande, et de Marie de Loches, dont il eut quatre enfants :

  • Jean, chevalier, seigneur de Manou et de la Boussardière, mort avant le 20 juin 1554, marié avec Françoise de Bigars,
  • Miles, écuyer, prêtre, seigneur de Fumesson, chantre du chapitre de Chartres, prévôt d'Ingré, doyen du chapitre de Chartres du 19 février 1509 jusqu'en 1553, évêque de Luçon en 1526. Le 20 janvier 1543, à Chartres, paroisse de Saint-Martin le Viandier, Milles de Yllers, episcopus de Lusson , est cité comme parrain. Il teste le 21 novembre 1550, meurt à Chartres le 19 mars 1553, et est inhumé en l'église des Jacobins de Chartres 4 jours plus tard,
  • René, seigneur de Milly, de Yèvres, de Bures, de Francvilliers et de Chavernay, marié avec Jeanne Malet de Graville qui lui apporta Marcoussis ,
  • Marguerite, morte après le 20 juin 1554, épousa le 30 septembre 1516 François Lhomme, chevalier, seigneur d'Homme en Touraine.

Après la mort de Louis d'Illiers leur père, ses enfants font le partage de ses biens. Ils ont pris l'avis de messire Martin Bocher, abbé de Saint Jean en Vallée, d'Etienne de Champrond, sieur d'Ollé, conseiller du Roi et avocat, de messire François Arroust, sieur de Monville, lieutenant au siège de Chartres (7). Cet exposé nous donne une idée des possessions de la famille. À Jean d'Illiers, par son droit d'aînesse, est échu : la terre et seigneurie du Mesnil Madame, et seigneurie de Villeneuve avec l'étang du lieu, la terre et la seigneurie de la Boussardière et le Mesnil-Saint-Arnoult en Yveline, ensemble une maison, sise en la rue du Fer, à Paris, et la métairie d'Ecurolles. À René d'Illiers est échu : le châtel et hôtel seigneurial de la Moutonnière, avec les bois, étangs et taillis, tant du propre du défunt que de la succession de Charles d'Illiers, son oncle ; la terre de la seigneurie de Chavernay, par le décès de Florent d'Illiers, prévôt d'Ingré, chancelier du Chapitre, son frère avec le droit que le défunt avait sur la terre de Vaupillon : ensemble les droits que messires Charles et Louis d'Illiers avaient sur les terres de Courtalain et Bois Ruffin, et sur les terres de Bures et Francvilliers.

Jean et René d'Illiers ont, en outre, cédé à Miles leur frère, le droit qu'ils tenaient tant de feu Monseigneur René d'Illiers, évêque de Chartres que de Charles d'Illiers, leur oncle ; sur la maison sise rue de Beauvais, à Chartres, que ledit Charles avait acquise de Mathurin Beloys, et sur le clos appelé Nicochet, aux faubourgs de la Grande Porte des Epars.

 

 

Vue du château de Marcoussis dessinée par Moithey.

 

 

L'assassinat du seigneur de Marcoussis

Dans le registre des délibérations du bureau de la ville de Paris de 1533, le chapitre CCXVII porte le titre « Les Prévost de l'hostel et Lieutenant criminel de la Prévosté de Paris sont venuz en l'Hostel de Ville pour adviser de donner ordre aux mauvays garsons estans en cette ville de Paris » 7 janvier 1533 .

Voici le texte en vieux français qui déclare comment des assassins ont « occis ledict feu seigneur de Marcoussis  ».

« Du septiesme jour de Janvier oudict an mil V°XXXII. Au jour d'huy, est venu au bureau de la ville, environ quatre heures de relevée, monseigneur le Prevost de l'Hostel, acompaigné de monseigneur le Lieutenant Criminel, lequel a faict entendre à messieurs les Prevost des Marchans et Eschevins de la ville de Paris que le Roy luy avoit ordonné appeller ledict Lieutenant Criminel, et ensemble aller vers lesdictz Prevost des Marchans et Eschevins pour conférer, affin de donner ordre aux mauvais garsons et vaccabons, tant ceulx qui suivent la Court que autres, frequentans, sejournans et demourans en ceste dicte ville de Paris, sans maistre ne aveu, pour obvier aux meurtres qui se peuvent journellement commettre, attendu le meurtre advenu en ceste dicte Ville, puis quatre jours en ça, en la personne du feu seigneur de Marcoussis, René d'Illiers, et pour ce que il est bruyt queung nommé Saucen le jeune, Gaucher, a occis ledict feu seigneur de Marcoussis, le Roy veult que recherche soit faicte par toute ladicte Ville pour trouver et prendre au corps, s'il est possible, ledict Saulcen, pour en faire la justice telle qu'il appartient, en faisant laquelle recherche seront prins lesdictz vaccabons et mauvais garsons; et pour ce faire ledict Prevost de l'Hostel a requis à mesdictz sieurs les Prevost des Marchans et Eschevins confort et ayde, ce qui luy a esté octroyé de par ladicte Ville. Et par monsr maistre Pierre Viole, sr d'Athis, conseiller du Roy nostre Sire en sa Court de Parlement, Prevost des Marchans de la dicte Ville, a esté dict que, comme chef de ladicte Ville, il seroit à toutes heures donné confort et ayde au Roy, ses gens et officiers, et quant à l'affaire de la recherche qui se offre de présent, il offrait audict Prevost de l'Hostel luy bailler tel nombre d'archers, arbalestriers et hacquebutiers de ladicte Ville qu'il luy plairait demander ; et oultre, si besoing estoit, offrait audict Prevost y aller en personne ».

Puis la note suivante mentionne : «  Injonction faict au cappitaine des archers de la Ville de donner avec sa compaignye ayde et confort au prévost de l'Hostel. Ce faict, a esté ordonné au cappitaine des archers de ladicte Ville fournir audict Prevost de l'Hostel tel nombre d'archers de sa compaignie ledict Prévost de l'Hostel luy demandera pour faire les choses dessus dictes et acomplyr l'ordonnance et voulloir du Roy   ». Ensuite nous avons : « Pour donner ordre aux pilleryes qui se font en la Prévosté de Paris par les gens de la Court. Aussi, a esté advisé qu'il seroit bon de faire information par l'ordonnance dudict Prevost de l'Hostel en la Prevosté et Viconté de Paris des extorsions et pilleries que font quelzques gens de la Court es maisons des bourgeois de Paris et autres ». Et : «  Pour donner ordre aux pauvres mendicans. Item, quant aux pauvres mendicans, a esté conclud suivre les arrestz de la Court de Parlement  …».

 

 

L'insécurité dans Paris

Dans ses notes, l'éditeur mentionne : « Ce même jour, le seigneur de La Mothe-au-Groing, prévôt de l'Hôtel, vint au Parlement et se plaignit au nom du Roi des graves désordres commis par les vagabonds et gens sans aveu, disant que en ceste Ville, toutes les nuictz, se assemblent quelques gens incongneuz en diverses trouppes et bandes,qui ne faisoient autres choses durant la nuict que briguer,et avoient prins audace de venir jusques en la chambre du Roy au Louvre,et qu'on en avoit prins trois estans armez soubz leurs cappes, lesquelz pourroient descouvrir leurs compaignons, et qu'il estoit requis renforcer le guect de ceste Ville pour obvier à toutes séditions, tumultes et scandalles, et que à ceste cause le Roy luy avoit commandé aller ce jourd'huy en l'Hostel de la Ville pour y faire donner ordre» (Archiv. nationales, Parlement de Paris, X, 1536, fol. 68 v°).

Dès que le Roi apprit l'assassinat du sieur de Marcoussis, il donna ordre au Prévôt de son Hôtel de faire une enquête à ce sujet et d'inventorier les biens du défunt, tant à Paris qu'au château de Marcoussis, et ce, malgré la résistance que pourrait opposer la dame de Graville que l'on prétend femme dudit Marcoussis, qui, paraît-il, se rendait au château en grosse compagnie. Le Prévôt de l'Hôtel n'avait trouvé à Paris que des objets de minime valeur, sauf une valise contenant des cédules pour la valeur de 10,000 écus; il se proposait de dépêcher son lieutenant à Marcoussis lorsqu'il fut avisé de l'envoi de commissaires du Parlement chargés de procéder à l'inventaire en questions; sur la demande du sieur de La Mothe-au-Groing la Cour autorisa l'adjonction du lieutenant de la Prévôté de l'Hôtel aux commissaires délégués. Marie de Balzac, femme de Louis Mallet sieur de Graville [il faut corriger par Jeanne, fille de Louis Mallet sieur de Graville], soutenait un procès au sujet de la seigneurie de Marcoussis tant au Parlement qu'en cour ecclésiastique et avait par conséquent intérêt à faire inventorier les biens et titres concernant le domaine.

D'après le témoignage du Prévôt de l'Hôtel, les mendiants encombraient les rues et stationnaient surtout aux abords du logis du Roi qui avait chargé son Prévôt de le débarrasser de cette engeance.

Le 7 janvier 1533, le Bureau de la Ville met à la disposition du Prévôt de l'Hôtel un détachement d'archers, afin de rechercher l'assassin du sieur de Marcoussis. En 1533, il recommande au Bureau de la Ville de prendre des mesures pour la répression du vagabondage, et de prêter main-forte pour l'arrestation de l'assassin du seigneur de Marcoussis.

Marc Le Groing, prévôt de l'hôtel du Roi, est chargé par ce prince de les informer auprès du Bureau de la Ville, réuni le 4 décembre 1532, de l'état des approvisionnements en bois de chauffage.

Sans vouloir faire de grandes digressions sur la criminalité du XVIe siècle, rappelons que le crime était également un acte d'état, le massacre de la Saint Barthélemy, l'assassinat du duc de Guise, sans oublier l'assassinat de deux rois : Henri III et Henri IV. On connaît également les dangers de Paris au XVIIe siècle, l'assassinat de Jacques Tardieu, lieutenant criminel au Châtelet, et de sa femme en est un exemple. Toutefois, les historiens ont noté que les homicides et assassinats sont nettement moins nombreux au XVIIIe qu'au XVIe siècle.

 

 

Notes

(1) Alexandre Tuetey, Registres des délibérations du bureau de la ville de Paris , t. II, 1527-1539 (Impr. Nationale, Paris, 1886).

(2) J.-B. de Courcelles, Dictionnaire universel de la noblesse française , t. III (Bur. Gén. De la Noblesse, Paris, 1821).

(3) F.-A. de La Chesnay-des-Bois, Dictionnaire de la noblesse , tome VIII (chez Antoine Boudet, Paris, 1774).

(4) Registre du Conseil, année 1527, 9 septembre, 17 octobre. Malte-Brun ne semble pas avoir pris connaissance de l'arrêt du Parlement puisqu'il dit « on n'en connaît pas les résultats ».

(5) E. Vallée, Notes généalogiques sur la famille d'Illiers (A. Picard, Paris, 1905) in-8°, 120 pages.

(6) J. Michaud et J. Poujoulat, Mémoires relatifs à Florent, sire d'Illiers (Impr. E. Proux, Paris, 1837), p.231.

(7) Les Chroniques Paroissiales d'Eure-et-Loir et de Sarthe (posté sur Internet le 11 septembre 2006).

 

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