Le hameau de Lopigny à Bruyères-le-Châtel (1208-1773) |
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Chronique du Vieux Marcoussy ------------------------------------- _---------------- --------- Septembre 2010
Sceau de Philippe Auguste sur l'acte de vente d'Hugues Bachelier aux frères de l'Hospital en 1208 (AN).JP. Dagnot C. Julien
Cette chronique se propose de rassembler les notes trouvées sur cet écart de Bruyères-le-Châtel et tordre le cou aux erreurs que certains auteurs ont recopiés successivement en confondant ce lieu avec le Plessis-Saint-Thibault. D'après certains, ce hameau aurait compté 4 à 500 habitants! De nos jours, il ne reste aucune trace de ce lieu (1). Nous prenons le parti d'écrire « Lopigny » bien que certains documents donnent « Loppigny » ou « Lopini » (2).
Les anciens documents Comme à l'accoutumée, c'est dans les archives religieuses et notamment ceux des frères de l'Hôpital ancien de Saint Jean de Jérusalem que l'on trouve l'information. En 1208, Philippe Auguste, roi de France, en tant que seigneur suzerain, approuve la vente que fait le chevalier Hugues Bachelier et Gille sa femme, de ce qu'ils possédaient dans le fief royal de Bruyères-le-Châtel; cette vente comprenant la dot de Gille, son mari lui assigne comme remploi les biens qu'il avait à Lopigny « apud Lupiniacum », c'est-à-dire les habitations et la prairie dans son intégralité. Un siècle plus tard, toujours dans les mêmes dossiers, nous retenons un échange fait entre Jehan de Montlhéry, commandeur du Déluge qui transporte à Thomas seigneur de Bruyères: Trois ans après, Thomas de Bruyères et Isabelle de Melun achètent une terre à Luppigny... En 1361, Jehan d'Orsay et Jehanne de Vaugrigneuse, tuteurs de Perrettte Chevrau, vendent une série de terre et de droits à Raoul Lavenant, notaire du roy en son chastel de Paris. Parmi cette longue liste nous retiendrons: Cette dernière phrase nous conforte dans l'hypothèse dans l'existence d'un hameau habité au XIIIe siècle par une famille ayant porté ce patronyme.
Lopigny à la sortie de la guerre de Cent Ans En 1462, Messire Loys de Bohan dit de la Rochette, chevallier, seigneur de Bruyères le Chastel, advoue tenir à une seulle foy et hommage ... Ne retenons que le thème de cette chronique, c'est à savoir: les villages de Bailleau, Couart, le petit Ru, le grand Ru, Verville, Arpenty, Saint Morice, Loppigny, Le Plessis de Bruyères, Mulleron, desquels soulloit avoir de 80 à 100 feux et de présent ne détenir personne, et auquel demeuroit de présent ung laboureur à la Roche, ung mesnage à Dollainville, et deux mesnages au grand Ru. Ce qui revient à dire que Lopigny est désert. Comme après toutes les guerres les lieux reprennent vie et Lopigny également.
Lopigny au XVIe siècle Il faut attendre 1517, et la succession de Loys de Graville pour retrouver le terme Lopigny. Les commissaires chargés de la succession du seigneur de Marcoussis nomment Guillaume Monchin, sergent pour la garde des boys de la Faucellaye près Lopigny, contenant 400 arpens... En 1521, nous avons la preuve de la reconstruction du hameau: devant un prêtre représentant Estienne Marcouville, tabellion en la chatellenie de Montlhéry, Philippot Rousseau marchand de vin demeurant à Loppigny se porte fort de sa femme Marguerite Lucas , et vend le moulin à vent qui va devenir le moulin banal de Marcoussis (3). L'acheteuse est la dame de Marcoussis, veuve de Charles d'Amboise. Six ans après, son second mari, René d'Illiers, chevalier, d'une part, Jehan Lefèvre et Vincent son fils, marchands demeurant à Montlhéry, d'autre part, lesquelles parties font de leur bon gré à savoir ... René d'Illiers baille à cens , la ferme de Troux. Dans la description des 160 arpents en une pièce, notons le chemin de Montlhéry à Loppigny au dedans de ladite pièce. En 1544, Guillaume Deforges, laboureur demeurant à Loppigny, paroisse de Bruyères le Chastel, et Barbe Petit, sa femme, confessent avoir vendu à honorable homme Anthoine Lefebvre, marchand à Montlhéry, 5 quartiers 10 perches de terre au dit Loppigny, chantier dit les Cormiers, appartenant du propre de la dite Petit par la succession de feu Jehan Petit, son père.(4) L'année suivante, devant Payen et Trouvé, notaires au Chastelet de Paris, Jehan Letellier, laboureur à Loppigny, confesse avoit vendu constitué cinquante sols tournois de rente à Jehan de Baillon sur ses héritages et biens moyennant 24 lt paiées devant lesdits notaires . Huit mois après la même opération se renouvelle pour une somme deux fois plus importante. Nous sommes dans la période où Jehan de Baillon multiplie ses acquisitions. Cet homme seigneur de Marivaux agrandit l'étendue de son domaine et Loppigny est à moins d'une lieue. Une autre vente est réalisée devant Levacher, par Jehan Drouet, laboureur demeurant à Janvrys et Marguerite Gebert sa femme qui vendent audit Baillon demy arpen de terre au terroir de Lopigny, moyennant 12 lt. Egalement, devant le même Levacher, Guillaume Cotereau, laboureur demeurant en la paroisse de Gometz le Chastel, vend à Jehan de Baillon 44 perches de terre assis au terroir de Lopigny moyennant 12 lt. En 1551, ce ne sont plus des terres mais une maison qui est citée. Jehan de Baillon, seigneur de Marivaulx, cède à titre d'eschange à Macet Chollet, laboureur de vignes demeurant à Briis et à Barbe André sa femme plusieurs biens dont une espace de maison avec qautre perches de jardin derrière ladite maison, assis en la grand rue de Loppigny à paroisse de Bruyères le Chasteau, tenant d'une part à la dite rue, d'autre à Mathurin Gallot, d'un bout aux hoirs de feu Marin Gallot, d'autre bout aux hoirs de feu Pierre Guyot. Suivent d'autres pièces qui nomment les mêmes et également Jacques Rathuy. Le seigneur dont relèvent ces biens est celui de Dollainville. D'après cet acte on peut penser que Lopigny comporte plusieurs rues! Quatre ans après, Marie de Hacqueville, épouse de Jehan de Baillon devenu seigneur de Janvry, qui utilise une faculté de reméré dans une acquisition faite à Jacques Peulvrier, laboureur de Montlhéry. Les biens en question sont 12 arpens de terre au terroir de Marivaulx, lieudit Lopigny et deulx arpents et demy en une pièce assis audit lieu de Lopigny. Nous arrivons en 1561, cette fois il s'agit d'une vente avec le seigneur de Saint-Cehour (devenu Courson par la suite) qui va nous éclairer sur ce hameau. Olyvier Boyvin, marchand hostellier, demeurant à Lynois les Montlhéry, et sa femme Jehanne Chandellier confessent avoir vendu et constitué à noble homme & saige monseigneur messire Gilles Lemaistre, seigneur de St Cehour & Montelou , 25 livres de rente sur:
Extrait de la carte de Malte-Brun.
Continuons de citer chronologiquement les faits que nous avons trouvés. En 1564 Jacques Guyot, laboureur à Loppigny, quitte à Jacques Delaleu, laboureur au Déluge , de tout droit de bail à ferme qui lui a été fait de 8 arpents de terre labourable et autres héritages par Jehan Bourellier.(4) Nous avions vu jusqu'à présent les échanges de petits biens, la même année les seigneurs font également des échanges et notamment Jehan de Baillon qui poursuit ses acquisitions à un rythme supérieur. Après Marivaux et Janvry, il achète maintenant Ollainville et Bruyères-le-Châtel à Jehan de la Rochette. C'est à savoir que ledit de la Rochette, cedde & délaisse but à but sans soulte audit de Baillon,
la terre & seigneurie de Dolainville, ses appartenances et deppendances avec la moitié de la baronnye et chatellenie de Bruyères le Chastel se consistant: Jehan de Baillon décède subitement en 1567 et ses biens vont être dispersés. Ainsi en 1571, les droits de la terre de Bruyères sont passés aux mains du seigneur de Soucy, Pierre de Ficte, auparavant commis au service du seigneur de Janvry et son beau-frère. Cet homme organisé va rendre aveu de ce qu'il a acquit. Au chapitre qui nous intéresse nous pouvons lire: item les dixmes de Loppigny baillées à six setiers de grain par an ... Un titre nouvel de 1579, nous confirme que Lopigny est toujours habité: Jacques Souchet, manouvrier demeurant à Lopigny, déclare en estre détempteur d'un quartier de vignes à Marcoussis. Les troubles dus aux guerres de religion ne se sont pas encore faits sentir à Lopigny en 1584, en raison d'un transfert de collecte de droits attachés à Lopigny. Mathurine Guignet, veuve de feu Lucas Petit, demeurant à Couart, paroisse de Bruyères le Chastel, en son nom et comme tutrice de ses enfants mineurs, confesse avoir ceddé à Jullien Petit laboureur demeurant à Bailleau, tous les droits de bail faits par le seigneur de Soucy, des dixmes de grain qu'il avoit droit de prendre chacun an au terroir de Loppigny & la Forest, moyennant six sextiers de bled seigle et troys septiers avoyne à 21 boisseaux par septier. La même année, Symon Comment, laboureur, demeurant à Lopigny, paroisse de Bruyères, confesse devoir payer à l'acquit de Nicolas Guereau, archer des gardes du roy soulz la charge de Monseigneur de Richelieu... la suite sans intérêt. Arrivé à cette époque, nous sommes amenés à constater plusieurs faits: Le même Symon Comment demeure toujours à Loppigny en 1596, il agit comme tuteur dans un problème de succession à Longpont. Cinq ans après, le même, toujours à Loppigny se portant fort de Barbe Roger sa femme, vend une pièce de terre près du Mesnil au Boullay à Longpont. De nouveau en juillet, il vend une maison à Longpont, également en octobre et comme tuteur en novembre. En 1614, un bail original d'arme et de chasse est cité car Lopigny figure dans les limites de l'étendue de la chasse; Charles de Ficte, baille pour trois ans à tiltre de loyer, à Constant Carré vigneron, demeurant à Forges, la permission de porter une harquebouse, sur une partie de ses terres et seigneuries de Soucy, depuis l'estang jusqu'à Quincampoix, la Forest, Loppigny & Mulleron, Jusques à trois ans; lequel seigneur a mis entre les mains dudit Carré une grang harquebouze à rouette de longueur quatre pieds à grand ? & bien allant, à rendre dans le mesme estat dans trois ans. Le bail fait moyennant la quantité de quatre douzaines de lappin... La même année, noble homme Jacques Mareschal, conseiller & procureur du roy en la presvoté de lhotel & grand prevost de France, advocat au conseil privé de sa majesté, demeurant à Paris rue Thibaud paroisse saint Germain l'Auxerrois, lequel constitue Marguerite Baudart sa femme à qui il a donné plain pouvoir & puissance pour bailler à titre de ferme & moison de grain, les fermes de la Forest & Loppigny, comme bon lui semblera... Le surlendemain, noble femme Marguerite Baudart, espouze de Jacques Mareschal,, de présent en sa maison de la Forest paroisse de Bruyères, confesse avoir baillé à titre de ferme et loyer, jusqu'à six ans, à Jehan Lanoullier laboureur demeurant à Quincampoix, et Suzanne Desmaret sa femme, la maison & ferme de Loppigny avec les terres en dépendant consistant en: Ce laboureur, est toujours présent dans un document de 1620, où Lopigny fait partie de la chastellenie de Soucy; il déclare remettre à François Rousselet, secrétaire de feu Mr le duc d'Anjou, estant de présent en sa maison de Quincampoix, la somme de 160 livres de principal d'une rente. En 1626, les propriétaires de la Forest font entretenir leurs vignes par une personne de métier, l'intérêt, le logement alloué au vigneron: Lome Baron, vigneron demeurant à la Roncière paroisse de Saint Cehour s'oblige de bien faire et dument tous labours et fassons, 4 arpents de vignes appartenant à Monsieur Mareschal en sa maison de la Forest à savoir lesdits fassons de faire labourer en temps et saisons ... pour raison de quoy ledit sieur Mareschal s'est obligé de payer audit Baron, la somme de 72 livres chacun an et outre la jouissance de la maison de Lopigny pour son abitation, les deux petits jardins proche d'icelle aussi quatre arpens de terre de présent en friches au dessoubz en la vallée dudit Lopigny et jusqu'aux fossés ... permission de faire pasturer les bestiaux dudit Baron dans les pastures du sieur Mareschal sans paier ... Fait en la maison de la Forest du sieur Mareschal. L'année suivante, le bail précédent est résilié, un nouveau bail est passé: Jacques Le Mareschal, escuier seigneur de la Forest, absent, Jacques Mareschal son fils, advocat stipullant pour lui, et Girard Dufresne, vigneron demeurant à la Roche,.. de faconner pendant trois ans quatre arpens de vignes assis en un clos derrière ladite maison de la Forest... ficher les eschalats, replanter les margottes... ledit sieur Mareschal s'est obligé de laisser pendant le présent bail: En 1634, Philippe Hamelin, manouvrier demeurant à Lopigny, loue une maison à Briis. Cet acte est le dernier document montrant signe de vie dans ces lieux. En 1649, un aveu est rendu par Henri le Camus seigneur de Chastres de la moitié d'un fief de 52 arpents situé au parc aux boeuf, situé près le bois de Marcoussis tenant au seigneur de la Roue, aux Célestins et d'autre bout aux friches de Lapigny. Cette mention de friches apparaît également dans les biens de la seigneurie de la Roue, dont la ferme de Troux fait partie. À l'article correspondant à cette métairie il est déclaré qu'elle consiste en terre labourables maison pastures bois 180 arpens tenant à la ferme de Couart, aux friches de Lopigny aux bois du sieur des Maretz, aux célestins de Marcoussis, à Mr d'Entragues , aux terres de Lopigny et la ferme de la Forest. Le document date des années 1660. Loppigny étant revenu à l'état de friches, c'est au travers d'un dernier document daté de 1773 que l'on apprend un renseignement intéressant. A cette époque, la dame de la Roue, à Linas, possède la ferme de la Forest. En tant que vassale d'André Haudry, seigneur de Soucy, pour sa ferme de la Forest, elle rend aveu pour le fief de la Forest. Ne nous intéressons qu'à un article de sa déclaration censuelle, le reste sera repris dans la suite de la chronique sur la ferme de la Forest. Donc à l'article consacré aux bois: ... dans lesquels bois et friches était autrefois construite une ferme et ses dépendances dont on trouve encore aujourd'hui quelques vestiges de cave voutée, appelés les bois de la Challerie.
Socle en pierre de taille de la croix de Lopigny.Avant de terminer ce récit, l'auteur de cette chronique est allé voir les lieux qui sont à présent une réserve de chasse, dans l'espoir innocent de trouver les vestiges de cette cave. Rapidement, la recherche a été abandonnée au vu de l'épaisseur de la végétation dans les bois. Une conversation avec un garde chasse et le fermier du domaine de la Forêt m'a confirmé qu'ils n'ont pas souvenance de vestiges. Néanmoins en dissertant sur les bornes que l'on peut encore trouver dans les champs, le garde nous a montré un pierre caractéristique, trouvaille qui a récompensé notre démarche: cette pierre de base rectangulaire n'est autre que la base de la croix de Lopigny mentionnée sur la carte des Chasses (XVIIIe siècle). Elle se trouve non loin de son emplacement primitif et n'a pas été réutilisée peut-être par superstition.
Notes (1) Nous avons déjà rencontré plusieurs hameaux disparus avant 1789. Les hameaux du Rouillon à Nozay et à La Ville-du-Bois sont des exemples que nous avons traités. (2) Nous respectons la racine latine « Lupiniacum », le lieu où l'on trouve des loups.(3) voir la chronique sur les moulins à vent de Marcoussis. (4) actes provenant de Pascal Herbert.
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