Les Balsac d'Entragues mignons des Valois |
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Chronique du Vieux Marcoussy --Marcoussis--------------- _------------------------------- Décembre 2008 Ajout février 2009 Le bal de noce du duc de Joyeuse (1581) .Le mariage du favori du roi, Anne de Joyeuse, cousins des Balsac d'Entragues, avec Marguerite de Lorraine, sœur de la reine, est célébré le 18 septembre, avec un faste qui n'a pas eu d'équivalent dans le XVIe siècle français.C. Julien JP. Dagnot
Cette chronique relate la vie des membres de la famille de Balsac d'Entragues, seigneurs de Marcoussis au cours du XVIe siècle. Tous ont exercé des charges royales plus ou moins importantes tant comme militaire ou administrateur. Quatre d'entre eux ont vécu dans l'entourage des derniers Valois et de ce fait ont porté la qualité de " mignons ", ce sont les quatre fils de Guillaume de Balsac. Le nom " mignon " donné au XVIe siècle désigne les courtisans et favoris des seigneurs de chaque grande maison comme celle duc de Guise, le duc de Montmorency et bien évidemment la Cour des Valois. Le terme a été dévoyé et pourvu d'une connotation péjorative propagée par les calvinistes qui condamnaient avec démesure le genre de vie raffiné (1).
Une tradition ancestrale Sans remonter au XIVe siècle, quand la famille Le Gros, puis les Montagu étaient au service du roi, nous pouvons nous arrêter un moment pendant le XVe siècle, époque où l'on compte, parmi les ancêtres maternels des Balsac d'Entragues, les sires de Graville, de nombreux officiers royaux : capitaines, chevalier banneret, grand-fauconnier, conseiller du roi, grand-panetier de France, grand maître des arbalétriers , etc. D'abord, Jean VI Malet, seigneur de Marcoussis était chambellan de Monseigneur le Dauphin et par son mariage prestigieuse avec Marie de Montauban entrait dans la famille Visconti (cf. chronique " les Cousins de l'Amiral "). Dès 1449, il avait obtenu du roi Charles VII, son suzerain pour la terre de Marcoussis, l'exemption de la garde du château de Montlhéry, service qui avait été institué au XIIe siècle. Le personnage le plus illustre de la famille fut sans aucun doute Louis Malet, seigneur de Graville, Marcoussis, Bois-Malesherbes, Séez, Bernay, Milly, Montagu, Fontenay, et autres lieux. Il fut celui qui eut le plus de crédit auprès de Louis XI qui le combla d'honneurs et de charges. Le roi lui accorda la justice de Châtres et Graville en 1471, le qualifiant de « son amé et féal cousin » en août 1476. Il faut dire que Louis était un familier de la Cour. Son père étant mort pendant son jeune âge, il fut éduqué par son oncle maternel, Guillaume de Rohan, l'amiral de Montauban qui, l'ayant pris sous sa protection, avait veillé à ses premiers pas à la Cour. Louis de Graville possédait la charge de chambellan et conseiller du roi quand il rendit foi et hommage pour ses seigneuries en novembre 1482. Nous le retrouvons à la cour de Gien du côté de la régente Anne de Beaujeu assistant au conseil du roi du 21 novembre 1483 où le jeune Charles VIII accorde l'amortissement de nombreuses terres possédées par les moines Célestins de Marcoussis et des rentes à Doulainville et Chetainville. Amiral de France en 1486, il dispersa la flotte anglo-bretonne qui assiégeait Brest en septembre 1489. Il avait, de droit, sa place au Conseil et devient, en 1488, selon M. La Trémoille , « ministre de la guerre de nostre Roy ». Il avait reçut la croix de chevalier de Saint-Michel en 1493, et le 20 août de l'année suivante devient gouverneur de Normandie et de Picardie. Il garda la confiance de Louis XII qui le nomma gouverneur de Paris en août 1505. Il aurait prêté 80.000 livres à Louis XII, somme qu'il abandonna aux pauvres dans son testament. À plusieurs reprises, le « très hault et très puissant seigneur de Marcoussis » reçut ses royaux cousins dans son château. Louis XI y séjourna un temps et visita le couvent des Célestins, Charles VIII y rédigea en décembre 1488 les lettres royaux établissant la foire de la Saint-André , et les édits de Louis XII datés de 1496 et 1498 ont été signés à Marcoussis.
Les héritiers de l'amiral Arrêtons-nous au début du XVIe siècle. Quand l'amiral meurt au château de Marcoussis le 30 octobre 1516, sa succession est l'occasion d'un procès entre Louis de Vendôme, fils de Louise de Graville et les époux Pierre de Balsac et Anne de Graville, ses oncle et tante. Les termes du partage de 1528 sont donnés par Simon de La Mothe : « La mort qui fait changer de face à toutes choses ayant éteint et enseveli en la personne de feu Monsieur l'Amiral de Graville l'éclat et la pompe d'une des plus illustres familles, devenus héritiers avec les enfants de Madame la vidame d'Amboise et de Balsac ses filles recueillirent sa succession et partagèrent entre elles et iceux ses grands biens ses terres et seigneuries, Graville et ses dépendances Sées et Bernay vinrent au partage des enfants de Madame Louise de Graville, vidame de Chartres, les seigneuries de Marcoussis, de Nozay, Châtres, Boissy, de la Roue, de Saint-Yon, et autres fiefs furent des appartenances de Madame d'Amboise et Malesherbes, Ambourville, Montagu-en-Cotentin, et autres domaines reconnurent Madame Anne de Graville et sa postérité sur le nom de Balsac pour seigneur ». Maxime de Montmorand précise dans son livre sur « Anne de Graville » (Auguste Picard, Paris, 1917) que l'enlèvement d'Anne de Graville par son cousin Pierre de Balsac eut lieu en 1506. Cette thèse est basée sur le « défaut » du 27 janvier 1507, qui est la plainte engagée par l'amiral contre les amoureux intrépides. Voici la pièce conservée aux Archives Nationales « Deffault à Loys, seignour de Graville, admiral de France demandeur en cas d'excès, rapt, crimes, déliclz et maléfices, le procureur général du Roy joint aveq luy,- contre Pierre de Balsac, escuyer, seigneur d'Entresgues, un nommé Antoine, son laquay ; Loyse Blancher, veufve de Feu Sevestre Lefebvre, Anne de Graville, damoiselle, défendeurs es diz cas - adjournez à comparoir en leur personnes sur peine de bannissement de ce royaume, de confiscation de corps et de biens et d'estre attainctz et convaincuz des cas à eulz imposez. - et encore contre ung nommé Pierre de Nevers, un aultre nommé maistre Pierre, chantre - et serviteur de la dite demoiselle Anne de Graville, aussi deffendeurs ce ditz cas et adjournez à comparoir en leurs personnes par ordonnance du bailly de Meleun ou son lieutenant commissaire Meleun ou son lieutenant commissaire en ceste partie - non comparans. - Appellé et rapporté par Tillel. Du jeudi XXVIIe jour de janvier mil cinq cent sept, en la grant chambre. Baillet, président ». On ignore la date des noces d'Anne de Graville et de Pierre de Balsac, mais on peut imaginer que le mariage fut célébré au cours de l'année 1507. Pierre de Balsac, seigneur d'Entragues, Saint-Amand, Rioumartin, Prélat, Paulhac, Juys, Dunes, et Clermont-Soubiran est un militaire et officier royal. Bien qu'âgé de 14 ans à la mort de son père Robert de Balsac, le roi Charles VIII lui permet de conserver les gouvernements de la Haute et de la Basse Marche (2). Puis, il possède la charge de lieutenant général des duchés d'Orléans et d'Étampes. Anne et Pierre furent parents de onze enfants. Deux fils survécurent « Messire Guillaume, seigneur de Marcoussis, de la Ronce , Nozai, baron de Saint-Yon et Boissy, et Monsieur Thomas de Balsac, propriétaire des seigneuries de Châtres, de la Pelerine , de la Roüe et de Viviers et quelques autres domaines » ; cinq fils moururent encore enfants : Pierre, Paul, Antoine, Etienne et Jean ; et encore quatre filles : Louise de Balsac, l'aînée marié en 1523 à Charles Martel, seigneur de Bacqueville, Jeanne de Balsac, épouse de Claude d'Urfé, Antoinnette, abbesse de Malnoue, et ,Georgette femme de Jean Pot, seigneur de Chemault (3).
Les successions des parents et celle de la tante Jeanne de Graville furent ouvertes en 1540. Les frères Thomas et Guillaume furent invités à les ratifier dès leur majorité, ils n'avaient que 21 et 23 ans. Les biens de Jeanne de Graville revinrent aux héritiers mâles, ses neveux « Dieu ayant appelé à lui Madame d'Amboise, Jeanne de Graville, sans laquelle ait laîné des successeurs de son premier et second mariage, ses biens et ses seigneuries échurent aux enfants de Madame Anne de Graville, sa sœur ». Les deux tiers des biens de Messire l'amiral étaient ainsi reversés dans les mains des deux garçons du couple Balsac-Graville.
La dame d'honneur de la reine Anne de Graville, fille cadette de l'amiral et de Marie de Balsac, est présentée par son père à la cour de Louis XII. Le roi la plaçe en qualité de dame d'honneur auprès de sa fille aînée, Claude de France. Après 1515, Anne continue ses fonctions à la cour et joue un rôle de premier plan auprès de la reine Claude, première épouse du roi François 1er. Elle assiste à la fameuse entrevue du camp du Drap d'or et suit la reine dans ses résidences du Val de Loire. Madame de Balsac est la confidente de Marguerite d'Angoulême (ou de Valois), sœur aînée de François 1er, à qui Pierre de Balsac, son mari, priait, dans son testament, de prendre ses enfants sous sa protection « à cause des grands procès qu'on lui avait suscités, tant de la part de son beau-père que pour pour la succession de Geoffroy de Balsac, [seigneur de Montmorillon] son cousin ». Ce dernier point, nous montre le degré d'intimité qui existait entre les Balsac-Graville et la famille royale. C'est dans ce milieu que les deux fils, Guillaume et Thomas passent leur tendre jeunesse. Selon le père Anselme, il semble que Pierre de Balsac meurt à la fin de l'an 1531, puisqu'il rédige son testament le 21 octobre. En novembre 1531, la garde noble des enfants mineurs est confiée à son gendre Charles Martel, seigneur de Bacqueville, époux de Louise de Balsac, la fille aînée.
Guillaume de Balsac Guillaume de Balsac, né à Marcoussis le 14 décembre 1517 a pour parrain Monsieur de Montmorency et pour marraine Madeleine de la Roche-Guyon. Ainsi , le petit-fils de l'amiral de Graville a un lignage prestigieux : Normand du côté maternel et Auvergnat du côté paternel. Son ancêtre Etienne Visconti le fait apparaître comme cousin éloigné des Valois (cf. chronique " Les cousins de Messire l'Amiral "). N'ayant que 23 ans à la mort de sa mère en 1540, il se fait émanciper pour partager les biens de ses parents avec son frère Thomas de Balsac. Dès 1536, le dauphin, futur Henri II organise sa maison. Les familiers composant la maison delphinale sont des jeunes gens qui se livrent à des activités physiques périlleuse dans la forêt de Fontainebleau, et jouent à la paume. L'entourage du dauphin s'explique par des considérations affectives. Parmi les gentilshommes de sa chambre nous trouvons Claude de Clermont-Dampierre, Jean d'Albon de Saint-André, François d'Albon, Jean d'Estrées, Jean d'Andoins, Artus de Cossé, Jean III de Humières et Guillaume de Balsac d'Entragues . Le fils de Pierre de Balsac, Guillaume, entre au service de la Couronne par l'entremise des ducs de Guise, suivant les traces de son père qui avait été le lieutenant de la compagnie d'un autre prince lorrain, le duc d'Aumale. Ayant commencé sa carrière militaire comme capitaine de chevau-légers, Guillaume devient gouverneur du Havre et sert comme lieutenant de la compagnie de François de Guise. Puis, à l'avènement de Henri II, il est gentilhomme de la chambre du roi. Son frère puîné, Thomas de Balsac-Montagu, suit aussi une carrière d'officier dans la fidélité des princes lorrains et devient enseigne dans la compagnie du duc d'Aumale. Le seigneur de Marcoussis fréquente ainsi les seigneurs de Humières, sires d'une vieille maison picarde de Monchy-le-Perreux, ardents serviteurs du parti des Guise. Le 18 octobre 1538, il épouse Louise, fille de Jean II de Humières et Françoise de Contay. Les noces ont lieu à Compiègne en présence de la cour et des frères de la mariée Jean III, Charles et Jacques de Humières. Jean de Humières, seigneur de Monchy, Bequencourt, Vignemont, Vandelincourt, etc., était le chambellan et conseiller de François 1er depuis août 1517. Il cumule de nombreux charges royales : gouverneur de Péronne, Montdidier et Roye, lieutenant-général pour le roi en Dauphiné et est ambassadeur en Angleterre, en Autriche. Le roi le traite de cousin dans ses lettres de 1536. Il meurt à Saint-Germain au mois de juillet 1550 alors qu'il était qu'il avait été déclaré « gouverneur des enfans de France pour sa sagesse, sa probité et sa prudhommie ». Un des beaux-frères de Guillaume de Balsac, Charles de Humières, est évêque de Bayeux et grand aumônier du roi François II. Une de ses belles-sœurs est dame d'honneur de Catherine de Médicis. En un mot, Guillaume de Balsac est devenu un homme important tant à la Cour qu'auprès des Guise . Le roi Henri II monte sur le trône à la mort de son père, le 31 mars 1547. Deux personnages sont régulièrement présentés comme favoris du roi : le connétable Anne de Montmorency et Jean d'Albon de Saint-André gratifiés de rentes royales « et voylà comme il faut, et est bien raison, que tels favoris des roys soient gratiffiez et récompensez en toutes choses ; car le semence est très-bien employée en la terre, lorsqu'il s'en donne bonne moisson et de bon grain » écrit Brantôme. Le roi s'entoure de jeunes seigneurs qui suivent la cour (4). Guillaume de Balsac, entré au service du duc de Guise par l'entregent de Jacques de Humières le représentant des Guise à la cour, devient un courtisan assidu. Ensemble, les Balsac d'Entragues et les Humières forment une « nébuleuse catholique » sous les hospices des Guise. Guillaume de Balsac, seigneur d'Entragues, connaît une vie chevaleresque durant les guerres que livre la France contre la puissante maison d'Autriche. Il est capitaine de deux cents chevaux et lieutenant de la compagnie des gendarmes du héros militaire vainqueur de Calais, François 1er de Lorraine, duc de Guise, sous le commandement duquel il défend Metz en 1552 . Deux ans plus tard, le 13 août 1554, la bataille de Renty oppose les français de Henri II aux espagnols de Charles Quint. Coté français, les meilleurs chefs de guerre sont présents : le duc Guise, le sire Gaspard de Saulx-Tavannes, des ducs Nevers et d'Aumale. Alors que la victoire semble acquise, le sieur d'Entragues est dangereusement blessé et évacué dans l'hôpital de Montreuil-sur-Mer où il meurt quelques jours après. Il était âgé de 37 ans. Les époux Balsac-Humières eurent neuf enfants qui furent tous élevés au château de Marcoussis : Devenue veuve en 1554, Louise de Humières a la garde noble de ses enfants mineurs. Quatre fils arrivent à l'âge adulte, les fameux quatre frères Balsac d'Entragues : François, Charles l'aîné, Guillaume et Charles le jeune (5). Elle vit au château de Marcoussis où elle administre ses terres avec une grande efficacité.
Les cousins Joyeuse La maison de Balsac avait pris alliance avec la famille de Joyeuse qui fut amenée à jouer un rôle de premier plan au moment de la Ligue. Les quatre frères Balsac d'Entragues étaient en famille avec le duc Anne de Joyeuse, arrière-petit-fils de leur grand-tante. Cette dame avait épousé Guillaume 1er, vicomte de Joyeuse et seigneur de Saint-Didier, Puyvert et d'Arques dont elle avait eu 12 enfants : huit garçons et quatre filles. Elle était la fille de Roffec II de Balsac, seigneur de Glisenove et Saint-Amand, et de Jeanne d'Albon. Ainsi, elle était à la fois, cousine et tante de Pierre de Balsac d'Entragues, à cause de sa femme, Anne de Graville, grand-mère des frères. Depuis 1577, alors qu'il n'a que 17 ans, Anne de Joyeuse arrive à la cour d'Henri III et rejoint le groupe des mignons avec Jean-Louis de Nogaret de La Valette , le futur duc d'Epernon. Rejeton d'un lignage possessionné en Vivarais et Bas-Languedoc, il appartient à une famille qui a servi le duc de Bourbon et le roi de France. Son ancêtre Guillaume, époux d'Anne de Balsac, a été chambellan, tandis que son frère Charles est nommé évêque de Saint-Flour en 1483. La promotion d'Anne de Joyeuse est fulgurante. Devenu duc, puis, pair de France en août 1581, il est nommé amiral de France le 1er juin de l'année suivante, alors que son père Guillaume II de Joyeuse est nommé maréchal de France en 1582. Il est promu chevalier de l'Ordre du Saint-Esprit le 31 décembre 1582. À partir de 1577, il accompagne son père en campagne contre les Huguenots en Languedoc et en Auvergne. Deux ans plus tard, il reçoit le commandement d'une compagnie d'ordonnance du roi. Depuis lors, il accumule les charges, devenant successivement gouverneur du Mont-Saint-Michel, gouverneur de Normandie le 24 février 1583, gouverneur du Havre en 1584. La même année, à la mort du duc d'Anjou, frère du roi, il reçoit le gouvernement du duché d'Alençon, puis premier gentilhomme de la chambre.
Anne de Joyeuse est un redoutable guerrier dont les penchants pour le roi Henri III ont fait de lui un homme puissant. Il est le plus célèbre des mignons du roi qui lui paya les énormes dépenses de son mariage, 1.200.000 écus, avec Marguerite de Lorraine, la sœur de la reine. Il était un grand combattant comme tous les membres de la noblesse d'épée de cette époque. Entré en disgrâce après le massacre de Saint-Eloi (21 juin 1587), Anne de Joyeuse repart en compagne combattre Henri de Navarre. Le 20 octobre 1587, son infanterie et sa cavalerie furent décimées, il mourut à la bataille de Coutras à l'âge de 26 ans. Parmi les 2.000 morts catholiques, se trouvait également son jeune frère, Claude de Joyeuse, seigneur de Saint-Sauveur.
François de Balsac d'Entragues François de Balsac est le chef du lignage. Né en 1541, fils aîné de Guillaume, il avait suivi son père à la Cour. Très jeune, dès 1549, il entre à la Cour comme « enfant d'honneur des enfants de France » par l'entremise de Jacques de Humières, son oncle maternel, gouverneur et lieutenant général en Picardie. Dans le registre des insinuations du 18 avril 1551, nous trouvons « Guillaume de Balsac, chevalier, baron de Dunes, seigneur d'Entragues et de Marcoussis, gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi : donation à François de Balsac, enfant d'honneur du Dauphin, son fils aîné, d'une maison à Paris, rue de Jouy, paroisse Saint-Paul, lui appartenant par la succession de sa mère, Anne de Graville, et de ses droits, à titre d'héritier de Jeanne de Graville, dame de Marcoussis , sa tante, sur une maison au bourg d'Ablis, à l'enseigne de l'Image Notre-Dame ». François de Balsac d'Entragues, cumula de nombreuses charges et offices. Il commença sa carrière militaire comme guidon dans la compagnie du duc de Longueville puis devient capitaine de gendarmes en novembre 1567. L'année suivante, il est reçu chevalier de Saint-Michel par le duc d'Anjou. Dès sa majorité, il était entré en possession des seigneuries d'Entragues, de Marcoussis et du Bois-Malesherbes. Il fut un des principaux seigneurs de la cour sous les derniers Valois et d'Henri IV où il montra une activité très agitée similaire à sa vie privée. Il fut marié en premières noces à Jacqueline de Rohan, fille et héritière de François de Rohan-Gié et de Catherine de Silly. Par cette alliance, il était en parenté avec les Orléans-Longueville et le prince de Condé dont il était cousin germain par les femmes. Le seigneur d'Entragues fut le protecteur du capitaine d'artillerie Edouard d'Ennery, gentilhomme écossais, seigneur de Tremont, qu'il abrita à Malesherbes en lui donnant la terre du Fillay. Il était devenu à la fois gouverneur d'Orléans et lieutenant de l'Orléanais pour le roi, capitaine de cinquante hommes d'armes. Après la paix de Longjumeau le 23 mars 1568, il est chargé par Charles IX de pacifier Orléans. Il est nommé lieutenant général des duchés d'Orléans et d'Etampes vers avril 1568, bailli d'Orléans en 1571 et capitaine de la citadelle de la ville, où il entretient une garnison de cinquante hommes. Venu à Paris, l'ancien bailli d'Orléans, Jérôme Groslot y trouve la mort lors du massacre de la Saint-Barthélemy . L'ordre du massacre parisien parvient aussitôt à Orléans dans la soirée du 24 août. Le maire Claude Sain et le gouverneur, Balzac d'Entragues décident de faire surveiller par la garde bourgeoise les portes et les rues de la ville ainsi que les maisons où habitent des protestants qui ne pourront en sortir. Dans la nuit du lundi 25 au mardi 26, le sang commence à couler à flots. La sinistre besogne peut s'accomplir d'autant que les protestants, refusant jusqu'au bout de croire à sa possibilité négligent de prendre la précaution de s'enfuir. Les massacres continuent le mardi et le mercredi. Le jeudi 28, une pluie torrentielle calme les ardeurs. Le protestantisme orléanais est décimé par une barbarie extrême , accompagnée de spoliations, de pillages et de viols. Le régent de l'Université François Taillebois est tué par ses propres étudiants. Des haines entre parents, voisins, confrères, concurrents sont assouvies. Les cadavres sont jetés à la Loire ou placés dans un charnier au grand cimetière au nord de la cathédrale. Le bilan de l'horrible tuerie est estimé entre 800 et 1000 victimes. Le sieur d'Entragues reçoit le collier du Saint-Esprit dès la première promotion de l'Ordre le 21 décembre 1578 (6). Il n'occupe pas une place de premier plan à la cour, à la différence de ses frères. Il a pourtant été nommé gentilhomme de la chambre en 1567 à la place de Jacques de Humières, et touche une pension de 2.000 l .t. en 1578. Il est également conseiller d'État à partir de novembre 1582. S'il n'appartient pas à l'entourage proche de Henri III, le roi le ménage en raison de son autorité locale.
Charles de Balsac de Clermont Charles de Balsac, sieur de Clermont, dit Clermont-d'Entragues, troisième fils de Guillaume de Balsac, est seigneur de Clermont-Soubiran en Agenois . Gentilhomme de la chambre et capitaine des cent archers de la garde du corps du duc d'Anjou, futur roi Henri III, il suit ce prince en Pologne. Il est l'unique gentilhomme de la famille qui resta fidèle au roi et, contrairement à ses frères, il n'entra jamais au service des Guise. Il commence sa carrière militaire au service du maréchal Artus de Cossé, guidon en 1565 et enseigne à partir de 1567. Très jeune, il entre comme officier au service du roi. Il est gentilhomme de la chambre depuis 1570, avec la charge d'accompagner le duc d'Anjou qui le pensionne avec 500 l .t. de gages. Bien intégré à la Cour, Charles IX lui donne une gratification de 2.000 l.t. en 1570, et lui obtient les revenus de la terre de Gaudelon en Gascogne dont il tire 6.000 l.t. en 1578 et de l'abbaye de Saint-Pierre-sur-Dive affermée pour 1.600 l.t. le 29 juillet de la même année. Le capitaine des gardes du corps Charles de Balsac de Clermont rencontre sa future femme à la Cour en la personne d'Hélène Bon, fille de Pierre Bon, baron de Méolhon, et de Marguerite de Robins de Graveson. Pierre Bon, capitaine des galères avait pratiqué la piraterie avant de recevoir la charge de gouverneur de Marseille. Depuis juin 1574, Hélène Bon est veuve de Charles de Gondi-La Tour, maître de la garde-robe de Charles IX dont elle eut une fille, Alphonsine. De nombreux témoins proches du pouvoir assistent à la signature du contrat de mariage, le 18 décembre 1577 : Jacques de Humières, gouverneur de Péronne, oncle de l'époux, François de Balsac d'Entragues et Charles de Balsac de Dunes, ses deux frères, René Hennequin, maître des requêtes et avocat au Parlement. Aussi, est présent Jehan de Vulcob en tant que « amys et conseil du sieur de Clermont ». Du côté de la mariée, sont présents : Jacques Faye, maître des requêtes, et Buysson, avocat au Parlement. Le douaire est de 2.000 lt. de rente, et l'époux fait don à sa femme de 12.000 lt. à prendre sur les 50.000 lt. que le roi lui a accordées le même jour. Ce mariage participe à l'intégration de Charles de Balsac de Clermont à l'entourage royal, fidèle à la Couronne pendant la Ligue , alors que ses frères François et Charles le jeune étaient beaucoup plus associés à de puissants seigneurs comme les Guise. Hélène Bon donna six enfants à Charles, dont Henri qui a fait la branche des seigneurs de Clermont-Soubiran. Le 19 septembre 1579, Charles de Balsac-Clermont d'Entragues achète la seigneurie de Bermainville en Beauce à Antoine Hennequin d'Assy, conseiller au Parlement. Plus tard, le neveu du baron de Clermont, Charles, le fils d'Entraguet, épousera Catherine Hennequin, fille d'Antoine. En 1572, Charles de Balsac de Clermont fait partie du quatrième quartier des gentilshommes de la chambre en compagnie de François d'Elbène et Jacques de Harlay de Champvallon. Après son retour de Pologne, Charles de Balsac de Clermont reprend ses fonctions de capitaine des gardes du corps du roi. Devenu un des dignitaires de la cour, le roi le fait chevalier de l'ordre du Saint-Esprit lors de la promotion du 31 décembre 1583. Il reste fidèle au parti du roi avec son cousin germain Charles de Humières dont il est témoin de son mariage, en juillet 1585, avec Antoine de Silly de La Rochepot. Clermont-d'Entragues est nommé au Conseil d'Etat en 1585 avec quatre autres officiers de la maison du roi dont Benoît Milon de Vedeville, seigneur d'Ollainville qui détient une charge d'intendant des finances au Conseil des finances. Lors du remaniement ministériel de mai 1588, après l'échec de la reconquête de Paris par les armes, François de La Grange-Montigny est nommé premier maître d'hôtel à la place de Robert de Combault qui était entré dans la fidélité des Guise. Parmi les serviteurs de Henri III qui reconnaissent Henri IV et lui jurent fidélité le 4 août 1589, se trouvent les capitaines des gardes du corps Charles de Balsac de Clermont, Joachim de Châteauvieux et Jean d'O-Manou. Passé au service d'Henri IV, Charles de Balsac de Clermont participe à la bataille d'Ivry au cours de laquelle il est tué le 14 mars 1590 à côté de son cousin Guillaume Pot, cornette blanche du roi, qui trouve d'ailleurs la mort au cours de cette bataille.
Galéas de Balsac d'Entragues Guillaume de Balsac, également nommé Galléas, avait reçu la seigneurie de Tournenfuye en Brie. Comme ses frères il était militaire et combattait dans les armées du roi. Sur l' ordre de Charles IX, le siège de La Rochelle fut décidé le 11 février 1573. Après le massacre de la Saint-Barthélemy , il s'agissait de réduire les protestants. Commandés par le duc d'Anjou, l'armée royale est composée de 5.000 fantassins et de 1.000 cavaliers. Toute la haute noblesse de France est présente à La Rochelle dont Louis de Gonzague, Henri de Guise, Charles de Mayenne, Claude d'Aumale. Galéas de Balsac est présent dans les compagnies commandées par les ducs de Lorraine. Les navires anglais rentrent et sortent comme ils le souhaitent dans la rade. Sur terre, huit grands assauts sont donnés contre les remparts de la ville de février à juin. Ces assauts sont meurtriers, rares sont ceux qui ne sont pas blessés. Le 26 mars 1573, 150 assiégeants meurent dans l'explosion accidentelle d'une mine destinée à faire sauter les remparts. Blessé au cours d'un assaut pendant le siège, Galéas de Balsac d'Entragues meurt sans alliance en 1573.
Charles de Balsac de Dunes Charles de Balsac, baron de Dunes, dit le bel Entraguet , est le plus jeune des fils de Guillaume de Balsac. Un épistolier contemporain a écrit « il étoit nommé le beau d'Entragues, à cause de sa bonne mine, et Entraguet parce qu'apparemment il étoit petit » . Il fait ses études au collège de Navarre, maison d'éducation des nobles et des catholiques où il fréquente les héritiers de la fine fleur de la noblesse, les Guise, les Vendôme et les Chabot. La protection des Montmorency s'applique aux Saint-Sulpice et aux Joyeuse, tandis que les Villequier sont les clients de Saint-André. Par contre, les Balsac d'Entragues comme les Saint-Mégrin dépendent des Guise. L'entourage d'Henri III est d'abord composé par des figures de jeunes, puis à partir de 1574 par de très jeunes gens comme Entraguet, âgé de 27 ans, Caylus (20 ans), Saint-Mégrin, Maugiron, Livarot et d'autres. En 1571, Charles de Balsac le jeune reçoit une pension de 500 l .t. pour sa charge de gentilhomme de la chambre du duc d'Anjou. Entraguet devient un gentilhomme respecté, dans un acte du 9 décembre 1574 il est qualifié de « très hault et très puissant seigneur d'Entragues ». Entraguet accompagne le jeune Alexandre-Edouard, futur Henri III, âgé de 14 ans. Dans ses états de services rédigés le 6 janvier 1595, on peut lire « combattu avec feu Monsieur de La Rivière », c'est-à-dire Jacques Villiers de La Rivière qui était capitaine des gardes du corps du duc d'Anjou à cette époque. En 1572, Entraguet fait partie du troisième quartier des gentilshommes de la chambre en compagnie d'Antoine de Brichanteau de Beauvais-Nangy et de Charles du Plessis-Liancourt. Élu roi de Pologne le 11 mai 1573 sous le nom « d'Henryk Walezy », Henri de Valois arrive à Varsovie le 24 janvier 1574 avec de nombreux gentilshommes de sa maison dont les frères Balsac d'Entragues. Charles IX étant mort le 30 mai 1574, Henri revient en catimini à Paris pour être sacré roi de France à Reims le 13 février 1575 et marié le lendemain à de Lorraine. Au retour en France avec le prince, Entraguet porte le titre de " gentilhomme de la Chambre du roi ", charge dans laquelle il est confirmé en janvier 1575. Un conflit d'influence s'installe alors entre les " mignons " et les adversaires du roi, les Guise et Monsieur (le duc d'Alençon frère cadet du roi). Il existe des rivalités au sein du groupe des favoris. Nous voyons Henri de Silly, comte de La Roche-Guyon , entretenir des relations étroites avec certains proches du roi, comme Charles de Balsac de Clermont, son créancier, à qui il a passé une obligation portant sur 3.600 l .t. le 27 mai 1575. Un autre groupe apparaît hostile envers les Balsac, ce sont les frères d'O, mené par l'archimignon François d'O. Les relations tendues ont pour origine une question de succession. Les deux familles se sont opposées lors d'un procès devant le Parlement de Rouen pour les terres de Fontenay et de Senancourt dans le bailliage de Gisors. Il s'agissait de la succession de René d'Illiers qui était convoitée par sa sœur Hélène d'Illiers, femme de Jean d'O et par sa veuve Jeanne de Graville, tante de Guillaume de Balsac. Par les arrêts du Parlement des 31 mars 1547 et du 30 avril 1550, le seigneur de Marcoussis, héritier de Jeanne, avait emporté la succession. Ce différend avec le favori du roi fut sans doute la cause de la disgrâce d'Entraguet.
Après la disgrâce auprès d'Henri III, Entraguet se tourne vers les Guise parce que les Balsac avaient appartenu à la maison de Lorraine au milieu du XVIe siècle. S'il adopte le parti du duc, il n'est pas hostile au roi. Il conserve sa charge de Gentilhomme de la chambre et reçoit le collier de l'Ordre de Saint-Michel vers 1580, avant d'être nommé capitaine de gendarmes, puis gouverneur de Saint-Dizier en 1586. En février 1588, on le voit vivre discrètement dans son hôtel parisien de la rue Coquillière, comme voisin du duc d'Epernon ; c'est un hôtel qui comprend deux corps de bâtiment avec cour, jardin et des écuries. Dans ses mémoires dissertant sur la famille Balsac d'Entragues dont il fréquentait une des demoiselles, le maréchal de Bassompierre analyse la rivalité pour la faveur royale vécue sur un mode exclusif : « comme c'est une charge jalouse que celle de gouverner son maître, et que chacun tâche de jouer avec son compagnon à boute-hors, pendant qu'Antragues était malade à Lyon, au retour de Pologne, Legas et Queylus de décréditèrent auprès du roi ». Les contemporains prêtent toutes sortes d'aventures amoureuses au comte de Dunes. Entraguet est le Don Juan de la fin du XVIe siècle, période pendant laquelle on voit « la plénitude de l'ébattement des corps, en un temps où la société vante un peu trop la pureté prétendue des amours chastes ». Il aurait eu de surcroît les faveurs de la reine Marguerite de Navarre , ce que Le Guast n'aurait pas manqué de révéler publiquement « … pas un homme ne résistait à son charme physique, Marguerite ne possédait pas que la beauté ». En 1575, la conduite de Henri III envers Entraguet aurait changé. Dans sa lettre du 26 mars 1594, le roi Henri IV s'adresse à Monseigneur de Dunes d'Entraguet, gouverneur de Pluviers en ces termes « Monsieur de Pluviers, Je vous prie me venir trouver incontinent en ce lieu, où vous me verrés en mon char triumphant. C'est chose que je desire, et pour vous dire chose de bouche que je ne vous puis mander par escript. De Paris. Henry ». Nous ignorons la conversation entre le roi et Entraguet. Henri IV avait été sacré à Chartres le 27 février et était entré dans Paris le 22 mars. Sans doute demandait-il à Charles d'Entragues de venir à son service car le roi connaissait l'adresse du fameux duelliste. Entraguet reçut le collier de l'Ordre du saint-Esprit des mains d'Henri IV, le 7 décembre 1595. Une obligation est dressée par Charles de Balsac en 1598 pour Daniel de Pelaret, sieur de Montigny en Beauce, actuellement à Paris, pour une somme de 83 écus un tiers de rente, assise sur leurs biens, à condition de rachat. La rente à constitution a été faite moyennant 1.000 écus soleil et a été reçue par le Sieur de Montigny pour l'employer à ses urgentes affaires et, pour confirmer cet emprunt, il a élu domicile rue de la Harpe, près de la porte Saint Michel. Charles de Balsac-Dunes, comte de Graville, meurt à Toulouse à l'âge de 52 ans. Selon une lettre du roi à Sully le décès a eu lieu au début de mars 1599.
Les mariages des Balsac à la Cour À son avènement, Henri III avait distribué aux gens de sa Cour les charges de chambellan et de gentilshommes à ceux de sa maison en Pologne. Ainsi se trouvent Henri de Saint-Sulpice, Jacques de Lévis-Caylus, François d'Espinay-Saint-Luc, François d'O, Joachim de Dinteville, Charles de Balsac de Clermont et son frère cadet Entraguet. Le baron de Dunes avait participé à coté du prince pendant les campagnes militaires de 1568 et 1569, aux batailles de Jazeneuil, Pamprou, La Roche-Abeille , Jarnac et Moncontour. Comme tous les autres gentilshommes de la Cour , les Balsac tentent de s'allier avec des familles en vue auprès du roi. Nous avons vu qu'à l'époque du roi Henri II, Guillaume de Balsac avait épousé Louise d'Humières, la fille du chambellan. Son frère Thomas de Balsac, seigneur de Montagu et la Roue , se marie avec Anne Gaillard de Longjumeau, la fille du panetier du roi, proche parente de François 1er. Leurs deux sœurs Louise et Georgette prennent elles aussi des maris parmi les gentilshommes de la Cour. La première épouse Charles Martel-Bacqueville, gentilhomme normand, valet tranchant du roi sous Charles IX, et la seconde se marie en 1538 avec Jean Pot. François de Balsac d'Entragues, le fils aîné de Guillaume, lieutenant général à Orléans, épouse en premières noces Jacqueline de Rohan, fille de François de Rohan-Gié, du lieutenant général en Bretagne. Devenu veuf, le gouverneur d'Orléans se remarie avec Marie Touchet, l'ancienne maîtresse de Charles IX. Célèbre pour sa beauté, Marie Touchet est la fille de Jean Touchet, lieutenant particulier au bailliage d'Orléans, sieur de Beauvais et de Quillart. La famille Touchet appartient à la bourgeoisie de l'Orléanais connue depuis le XVe siècle dont lun des ancêtres était un marchand beauceron à Pathay. Marie Touchet était pensionnée par le roi pour 2.000 l .t. par an. En 1585, en compagnie de Claude de La Châtre , François d'Espinay de Saint-Luc et Jean-Louis de La Rochefoucault , François de Balsac participe à la Ligue de mars, parti constitué sous prétexte de désordres de l'Etat, les membres sont « des galands hommes que le duc d'Epernon avoit esloigné de la Court ». En tant que Grands, Messieurs de la maison de Guyse , ne supportaient pas « qu'un petit cadet de Gascoigne » gouverne la France. Le duc Henri 1er de Guise fut assassiné à Blois au matin du 23 décembre 1588 par huit coupe-jarrets gascons menés par le sieur Laugnac. Outre le capitaine des gardes Larchant, deux autres capitaines sont impliqués dans l'organisation du crime : Joachim de Châteauvieux et Charles de Balsac de Clermont qui fut accusé par les députés ligueurs d'avoir détroussé le cadavre du duc en s'emparant du diamant qu'il portait au doigt. Henri III meurt le 2 août 1589, Jacques de Humières suit Henri IV sans condition alors que Entraguet rejoint aussitôt la Ligue bien que le nouveau roi confirme tous les anciens serviteurs de Henri III dans leurs charges montrant qu'il agit comme le roi de tous les Français. Charles de Balsac de Clermont, capitaine des gardes du corps, reconnaît Henri IV et lui jure fidélité le 4 août 1589 ainsi que son cousin Henri Pot, le fils du Grand Maître des cérémonies Guillaume Pot.
Le fameux duel des mignons Le règne d'Henri III a été celui où vécurent des rivalités entre trois factions : le parti du roi, celui du duc de Guise et des Ligueurs et les Huguenots. Les guerres de religion ont été avant tout fomentées par ces partis. Les mignons voulaient être braves, c'étaient de fines lames. En 1578 « Malgré la paix, la discorde régnoit par-tout, et surtout à la cour, le roi avoit ses mignos, Monsieur avoit ses braves, ceux-ci insultoient les mignons qui les persécutoient ; le roi haïssoit Monsieur… » . L'an 1578 fut fertile en évènements de toute sorte. Commençant par le départ de François d'Anjou, frère du roi dans le parti de Guise, et finissant, le 21 décembre, par la fondation de l'Ordre du Saint-Esprit dans le but d'honorer Dieu. En réalité, cet ordre de chevalerie permet de rassembler les gentilshommes les plus distingués de la société et dévoués à la personne royale. Nous avons vu que Francois de Balsac, chef de la famille d'Entragues avait été nommé lors de la première promotion. L'évènement le plus fameux est le duel des mignons qui eut lieu le dimanche 27 avril 1578 à cinq heures du matin, au Marché aux chevaux, près de la forteresse de la Bastille (actuelle place des Vosges) . Les mignons du parti du roi, Jacques de Lévis, comte de Caylus (ou Quélus), Louis de Maugiron et Jean d'Arcès, seigneur de Livarot, étaient opposés aux mignons du duc de Guise, Charles de Balzac de Dunes, surnommé "le bel Entraguet", Ribérac et Georges de Schomberg. Le duel tourna vite au désastre : Henri III perd le meilleur de ses amis, Jacques de Lévis, comte de Caylus, qu'il destinait nommer à dignité de grand maître de France à la place du duc de Guise. Ce fut la cause réelle du combat. Jean de La Taille affirme que l'origine de la querelle est une jalousie pour une dame « un trait de jalousie que le Sieur de Quelus conceut contre Entraguet, le voyant sortir un samedy au soir de la chambre d'une Dame plus doüée de beauté que de chasteté. Et pour ce qu'elle estoit aimée d'un grand, Quelus luy dit comme en folastrant qu'il estoit un sot : l'autre luy respond de mesme, qu'il avojt menty. Là dessus il font complot de se battre » (7). Alexandre Dumas père a immortalisé le duel dans « la Dame de Monsoreau », écrivant « Que Dieu reçoive en son giron Quélus, Schomberg et Maugiron… » et imaginant un dialogue entre le roi et Entraguet :
Les mignons du Hurepoix Sous le règne des derniers Valois, nous voyons de nombreux officiers de la maison du roi devenir seigneurs de terres du Hurepoix. Outre les Balsac d'Entragues, seigneurs de Marcoussis et autres lieux circonvoisins, des gentilshommes de la cour s'installent dans le sud parisien. Philippe Hurault, chevalier comte de Cheverny, devient seigneur de Limours. Il est conseiller au parlement de Paris, maître des requêtes et représentant le roi dans le comté de Montfort époux d'Anne de Thou. Le 10 avril 1553, Nicolas de Neufville, chevalier, seigneur de Villeroy, secrétaire du roi en ses Conseils et trésorier de l'Ordre de Saint-Michel, fait le partage de ses biens en présence de son fils cadet Jehan de Neufville aussi conseiller et audiencier en sa chancellerie et secrétaire dudit seigneur. L'acte mentionne « … mes enffans naturels et légitimes avons faict accord et passé soubz seing manuel le contenu cy après, ..., que ledit Jehan de Neuville prendra les maisons terres seigneurie et ferme de Villarceau, Villejust, Villevent Villeconin, Soucy, Crenes, Le Plessis près les Chantellou, Anthony et toutes les appartenances desdites terres, sans rien excepté ... ». Le 11 août 1554, messire Jean de Neufville, seigneur de Chanteloup et du fief de Villevent rend foi et hommage à messire François Olivier, seigneur de Leuville, du fief de Villevant et ses dépendances situé en la paroisse de Villejust, tenant et mouvant dudit Messire de Neufville à cause de son fief de la Poitevine. En 1593, Jehan de Neufville, seigneur de Chanteloup, est « maître d'hôtel chez le roy ». Il décède le 22 septembre 1597 à l'âge de 70 ans et fut inhumé en l'église Saint-Eutrope de Chanteloup. Les biens tombent dans les mains de sa petite-fille Anne de Thou , femme de François Savary, marquis de Brèves et de Mauletrier, ambassadeur à Constantinople puis à Rome. En 1570, Benoît Milon acquiert la terre d'Ollainville par échange fait avec René Crépin, sieur du Gast, conseiller maître des requêtes ordinaire de l'hôtel du roi. Benoît Milon est un seigneur de fraîche date, anobli par sa charge de trésorier ordinaire des guerres. Benoît Milon fut successivement intendant des finances d'Henri III, puis intendant de la Ligue et intendant de l'Ordre du Saint-Esprit créé par le roi en 1578. Il était seigneur de Wideville, par achat en 1594, Launay-Faucille, Boisgasse, Sautour, Maurepas, Bougival et autres lieux. Il avait épousé Madeleine de Crèvecœur de Boulenc, dame de Davron. L'hommage de la terre et seigneurie d'Ollainville est rendu par le nouveau propriétaire le 5 mars 1571. Le 20 septembre 1576, Benoist Millon, sieur de Wideville, seigneur d'Ollainville et de Bizon, intendant des finances, vend la terre et seigneurie d'Ollainville au roi Henri III . L'an 1585, Jacques de la Rochette , escuier , sieur de la Roche, enseigne de la compaignie du seigneur d'Entraigues, maitre d'hôtel de monseigneur le cardinal de Guise , demeurant à Arpenty, paroisse de Bruières-le-Chastel... En 1592, lors de la signature d'un acte de procuration, Jacques de la Rochette est qualifié en tant qu'« escuier, seigneur de la Roche d'Ollainville, capitaine et commandant au chasteau de Marcoussis ». En 1600, François de La Grange, seigneur de Montigny, chevalier des ordres du roy, cappitaine de 50 hommes d'armes de son ordonnance, maistre de camp de la cavalerie, lieutenant général du roi en la vicomté de Paris , achète à la sœur d'Henri IV, la maison terre et seignerye Dollainville consistant en maison ou château seigneurial, court, basse-court, fossez allentours, jardins, boys, vignes, parc, prez, terres labourables, en tel estat quilz sont à présent… », moyennant la somme de 10.000 escus d'or sol. L'hommage de la terre et seigneurie d'Ollainville est rendu le 8 mai 1601. François de La Grange-Montigny avait été nommé premier maître d'hôtel du roi en 1589. En 1592, il participe au siège de Rouen avec de nombreux autres anciens officiers d'Henri III. L'histoire tumultueuse et rocambolesque des Balsac d'Entragues ne s'arrête pas là. Nous atteignons le paroxysme avec François et ses deux filles : l'une maîtresse du Roi, l'autre maîtresse d'un maréchal de France. Toute la famille entra alors dans les complots. Mais ceci est une autre histoire…
Les arrêts du Conseil d'État Plusieurs arrêts du Conseil d'État concernent la famille Balsac d'Entragues. L'arrêt du 3 février 1593 déclare « de bonne prise les meubles et hardes enlevés à un nommé Lamy par les gens de guerre de la compagnie du sieur de Dunes, gouverneur de Pluviers » (Pithiviers). Celui du 6 mars ordonne qu'en conséquence de la mainlevée accordée à la dame de Clermont d'Entraigues (Hélène Bon), comme ayant la garde noble des enfants du feu sieur de Clermont, des droits de gros et huitième de Lagny, Villevaudé, Bordeaux, Sarcelles, et Saint-Leu-Taverny, appartenant à ladite dame et à ses enfants, « les debteurs et redevables desditz droictz seront tenuz et contrainctz de luy en rendre compte, de ce qu'ilz doivent du passé, et payer ce qu'ils se treuveront redevables ». L'arrêt du 14 janvier 1597 ordonne que la somme de 8.266 écus deux tiers due au sieur de Dunes, lieutenant général d'Orléans, tant pour l'entretien qu'un compagnie de gendarmes, que pour le payement de la garnison de Pluviers (Pithiviers) sera employée dans l'estat des debtes à pourvoir en la présente année. Celui du 29 mars 1597 donne à la dame Clermont d'Entragues assignation de 666 écus deux-tiers pour sa pension de l'année dernière. Le 4 novembre 1598, un arrêt déclare que Messire Charles de Balsac, sieur de Dunes, chevalier des ordres du Roi, aura la nomination aux offices de la châtellenie de Janville, en qualité de tuteur des enfants du sieur Clermont d'Entragues. 2 août 1603, arrêt renvoyant au lieutenant criminel à Sens le procès criminel intenté à maître Jean Gaulchier, notaire apostolique, par maître Jean Collin, ancien abbé, et messire Jean de Balzac, abbé actuel de Saint-Quentin-lès-Beauvais (mort en 1608, fils de Charles Balsac de Clermont). Le 9 octobre 1603, un arrêt ordonne la mise en adjudication des aides de l'élection de Paris, achetées jadis par MM. de Sourdis, le comte de Choisy, de Sancy, de La Grange-le -Roy, de Mareuil, Testu, d'O, de Schonberg, le président Brisson, par M. et Mme de Clermont d'Entragues, etc. Le 7 février 1604, un arrêt réserve au Conseil la connaissance des poursuites exercées contre la ville de Pithiviers par divers particuliers au sujet des démolitions de maisons et des prises de bois ordonnées, pendant les troubles, par le feu sieur de Dunes, gouverneur de Pluviers. 26 février 1605, arrêt autorisant la levée d'une somme de 1.135 livres que la ville de Noyon a été condamnée à payer à l'évêque de Noyon, Charles de Balzac (fils de Thomas de Balsac, pair de France), à Louis Josset et à Jean Boquet. Le 25 janvier 1607, arrêt renvoyant aux sieurs Durant et Langlois, conseillers d'Etat et maîtres des requêtes de l'Hôtel, une requête du sieur de Clermont d'Entraigues, gentilhomme de la Chambre , acquéreur des deux tiers de l'office de contrôleur-marqueur-visiteur des cuirs de la ville de Rouen, ladite requête étant relative à certain règlement fait naguère par le bailli de Rouen au sujet du métier de tanneur et de corroyeur. 27 juin 1609, arrêt maintenant messire Nicolas de Balzac (mort en 1610, fils de Charles Balsac de Clermont) en possession de l'abbaye de Saint-Quentin-lès-Beauvais, à condition qu'il prendra la nomination et la présentation de la reine Marguerite. Puis, le même jour, un arrêt ordonne que le même Nicolas de Balzac indemnisera le baron de Bayencourt, « en faveur duquel ladite dame royne auroit présenté à ladite abbyae Maître Jean Lamoureux ». L'arrêt du Conseil d'État du 6 mai 1610 charge un maître des requêtes de rechercher de quel gouvernement dépend la ville de Suèvres, et défend provisoirement tant au sieur de Marcoussis, gouverneur du duché d'Orléans, qu'au comte de Cheverny, gouverneur de Blois, d'y exercer leur charge.
Notes (1) Le mot « mignon » doit être compris dans le même sens que « menin », un gentilhomme servant de compagnon au dauphin de France. En Espagne, les menins « las Meninas » étaient des jeunes gens nobles au service d'une maison princière. Parmi les plus célèbres favoris d'Henri III figurent les noms de : Louis du Gast, François d'O, Henri de Saint-Sulpice, Louis de Maugiron, Jacques de Caylus, François d'Espinay de Saint-Luc et les deux archimignons : Jean-Louis de Nogaret de la Valette , duc d'Epernon et Anne de Batarnay, duc de Joyeuse. Le lecteur est invité à lire l'excellent ouvrage « La faveur du Roi » par Nicolas Le Roux (Eds. Champvallon). (2) Les gouvernements étaient des divisions militaires et politiques du royaume au XVIe siècle. Les gouverneurs, importants personnages lors des Guerres de religion et parfois rivaux dangereux du pouvoir, ont vu leurs pouvoirs amoindris par la royauté, notamment par Henri IV ou par Richelieu. (3) Jehan Pot et sa femme Georgette (Servet) de Balsac, dame de Chemault en Gâtinais laissèrent deux fils Guillaume et Guyot qui était chevalier de Rhodes, grand maître des cérémonies de France, porte-cornette de sa Majesté et premier écuyer tranchant. Etant seigneur de Chemault, il reçut le roi Henri III. Cette visite suscita la fondation d'un asile pour les soldats blessés à Paris, rue de l'Oursine qui devint plus tard l'hôtel des Invalides. Le 25 février 1604, Guyot Pot vendit sa seigneurie de Chemault à Marie de Belleville dûment autorisée par son mari François de Balsac d'Entragues, seigneur de Marcoussis et cousin du vendeur. (4) Anne de Montmorency, grand maître de France et gouverneur du Languedoc en 1526, puis connétable en 1538. Sa baronnie de Montmorency est érigée en duché-pairie en juillet 1551. Avec ses cinq fils, ses quatre gendres, son beau-frère, le maréchal Gaspard de Châtillon et ses trois neveux Gaspard de Coligny, le cardinal Odet de Châtillon et François d'Andelot., il est le chef d'un clan familial. Il garde le gouvernement jusqu'à sa mort le 12 novembre 1567. Jean d'Albon de Saint-André obtient la charge de Premier gentilhomme de la chambre du roi puis est nommé Maréchal de France. À la fin de sa vie, le connétable de Montmorency reçoit une pension royale annuelle d'au moins 81.000 l .t. et ses revenus fonciers dépassent les 130.000 l .t. Le maréchal de Saint-André recevait une pension de 32.000 l .t. en 1559. (5) Il y a lieu de corriger certains écrits qui désignent par erreur Charles de Balsac de Clermont comme le dernier des frères Balsac. Les actes originaux citent toujours Charles de Balsac de Clermont avant Charles de Balsac de Dunes, en précisant parfois explicitement qu'il est "Charles de Balsac l'aîné, sieur de Clermont", tandis qu'Entraguet est désigné comme "Charles de Balsac le jeune, sieur de Dunes". (6) Parmi les 35 récipiendaires de première promotion de l'ordre du Saint-Esprit reçus le 31 décembre 1578 en l'église des Grands-Augustins, on compte 27 chevaliers dont les ducs de Nevers, de Mercoeur, d'Aumale, les maréchaux de Cossé et de Villars, et 8 prélats dont les cardinaux Charles de Bourbon, Louis de Lorraine et Pierre de Gondi. (7) Jean de La Taille, Discours notable des duels, de leur origine en France, et du malheur qui en arrive tous les jours au grand interest du public. Ensemble des moyens qu'il y auroit d'y pourvoir (chez Claude Rigaud, Paris, 1607).
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