La ferme de La Boissière (2) (1605-1664) |
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Chronique du Vieux Marcoussy --Marcoussis--------------- _--------------------__----------- Janvier 2009 JP. Dagnot C. Julien
Nous présentons la seconde partie de l'histoire de la ferme de La Boissière à Saint-Jean de Beauregard (Essonne, cant. Montlhéry). Cette ferme avait pris également le nom évocateur de « Grange-aux-Moines ». Dans la chronique précédente, nous avons appris que ce domaine agricole était la propriété de l'abbaye cistercienne des Vaux de Cernay « Abbatiæ Vallium Sarnaii », mais que, profitant des troubles et destructions de la guerre de Cent ans, il y avait eu usurpation des biens par deux bourgeois de Paris, les nommés Cohaires et Montireau « qui dez l'an 1468 s'en estoient emparez au moyen d'un bail emphitéose… ». En hommes avisés et rusés, les usurpateurs s'étaient mis sous la protection des seigneurs locaux et avaient même reconnu la fameuse rente foncière d'un muid de grain due au prieuré Sainte-Catherine du Val-des-Écoliers à Paris (1). Cette chronique va essentiellement décrire l'action des religieux pour récupérer leurs biens.
La Boissière au sieur de Monthireau Par les pièces de procédures de la fin du XVIe siècle, nous savons par les poursuites engagées contre Gabriel de Monthireau que ce gentilhomme est seigneur de Fresne et de Montfaucon pour le « paiement dudict muid de grain à prendre sur la Grange de La Boissière ». En 1579, ce seigneur dont Montfaucon n'est pas le bien principal et n'y habitant pas, mandate le meilleur recouvreur de fonds de l'époque, à savoir Claude de Lavoisier, procureur du roy et garde du seal de la prévosté de Montlhéry. Il lui cède 67 escus sol des droits dubz à luy par trois laboureurs demeurant à Montfaucon: Ce même procureur est également entre temps devenu le fermier de la grange aux moines. Ayant été le procureur du seigneur vis-à-vis les religieux, il connaît bien les tenants et aboutissants et de ce fait il renonce au bail de cette ferme à la réservation faite de demeurer en l'habitation avec sa femme ses gens et bestial pendant la saison hivernale. Le seigneur décède. Sa femme Jacobie Destocart règle quelques problèmes comme tutrice de ses enfants mineurs. La veuve se remarie avec Jehan Desroziers. Le couple revendra Montfaucon en 1599. La ferme de la Boissière ne fait pas partie des biens.
La Boissière au XVIIe siècle En l'an 1605, Abel Bezée, sieur de la Boissière , vallet de chambre ordinaire du roy, demeurant audit lieu de la Boissière, paroisse St Jehan de Montfaucon, vend la couppe pour une foy seulement, de vingt cinq arpents de boys taillys assis à Montfaucon moyennant la somme de 325 livres. Dans l'acte il est fait mention de son père Jacques Bezée, marchand et bourgeois de Paris. Une déclaration datant de 1613 mentionne que François du Poux, advocat au conseil privé du Roy, est sieur de la Boissière . La vente de la ferme avait été faite par Abel Bezée et Elisabeth de Monthireau, sa femme, fille du fameux Gabriel. Au terrier du prieuré Sainte-Catherine du Val-des-Écoliers, il est qualifié « détempteur et propriétaire d'une maison cour jardin pourpris avec les deppendances, lieux circumvoisins appelez la Grange-aux-Moines dite de la Bussière avec deux cents arpents ou environ de terres labourables sur lesquels les religieux de Sainte-Catherine ont droit de prendre ung muid de grain bon loyal et marchand moitié bled froment et la moitié avoyne mesure de Montlhéry rendu audit lieu de la Grange aux Moynes de rente annuelle et perpétuelle ». Si même l'abbaye des Vaux de Cernay avait perdu les droits de propriété sur la ferme de la Boissière, un autre couvent, le prieuré Sainte-Catherine du Val-des-Écoliers continuait à défendre la rente foncière qu'il avait droit de prendre sur le domaine. Tout au long des XVIe et XVIIe siècles, nous trouvons des procès que les administrateurs engageaient pour être payés du muid de grain et obtenir un titre nouvel à chaque mutation. Le bail à rente comporte toutes les précautions pour le paiement de la redevance dont l'hypothèque en cas de défaillance, et l'obligation de tenir les terres en bon état « de la condition qu'elle est que ledict sieur recongnoissant a promis, tenu promis à gaige, bailler et payer auxdicts sieurs Relligieux, prieur et couvent à leur procureur, recepveur ou porteur audict jour Saint Martin d'hiver première année de payement estant au jour Saint Martin d'hiver prochain venant et continuer tant en et sur ladicte maison appelée la Grange aux Moynes appartenances et dépendances d'icelle qui en est et demeure spécialement chargée, affectée, obligée et ypothéquée lequel ledit sieur recongnoissant sera tenu a promis entretenir et maintenir en bon et suffisant estat, tellement que ledict muid de grain tel que dessus y soit et puisse estre aisément pris et prélevé par chacun an audict jour tant et sy longuement que ledit sieur recongnoissant en sera detempteur et propriétaire ou a partie et portion d'icelle, promettant, obligeant et renouvant ». Le 5 octobre 1616, Richard Arsac, laboureur, demeurant à la Granche-aux-Moines vend dix-sept muids de grain pour la somme de 828 livres , c'est une transaction assez considérable! Ce sont 204 setiers, vendus à raison de 4 livres 1 sol le setier, qui sont récoltés sur une superficie d'au moins 100 arpents.
La réintégration de la Boissière Depuis 1606, Henri de Bourbon-Verneuil, fils naturel d'Henri IV et de Catherine-Henriette d'Entragues avait reçu, à l'âge de trois ans, le bénéfice de prieur commendataire de l'abbaye des Vaux de Cernay (2). Alors que le jeune évêque de Metz – il n'a que 20 ans – occupe les sièges abbatiaux de Saint-Vincent et de Saint-Clément, il devient abbé de Saint-Germain-des-Près en 1623. Son homme de confiance et fondé de procuration, le sieur Isaac Thibault, sieur de Courville, est chargé de reprendre en main le temporel des Vaux de Cernay. Thibault découvre l'usurpation de la Grange-aux-Moines et décide de réintégrer la ferme. Bien évidemment il est encouragé par Monseigneur l'Evesque de Mets , car, dans le lot de celui-ci est compris le revenu de la ferme. Dès le 27 avril 1627, un exploit est signifié à Marie De Try, veuve de feu Jacques Bezée, dans le but de casser et annuler les contrats et baux et aliénation du 20 décembre 1566 et 13 novembre 1597. Le 18 juillet 1627, Henri de Bourbon-Verneuil, évêque de Metz et abbé de l'abbaye des Vaux de Cernay passe une transaction avec le sieur Isaac Thibault qui « ayant eu advis de cette usurpation, traitta avec Monsieur l'Evesque de Mets, comme Abbé des Vaux de Cernay, pour réunir à la mence de son abbaye ladite terre seigneurie et fief de la Buxière , autrement ditte Montfaulcon ou la Grange au Moyne, scituée prez de Marcoussy, paroisse sainct Jean de Beauregard, chastellenie de Montlhéry… ». Par ce traité, l'évêque donne plein pouvoir, puissance et autorité de faire en son nom toutes les poursuites « à Messire Isaac de Courville, cy devant gouverneur de Mondevergues pour obtenir la restitution de la terre et seigneurie de la Boissière dit la Grange aux Moynes dépendant de son abbaye des Vaux de Cernay et faire la cassation du bail emphytéotique d'icelle… ». La sentence de restitution de la ferme de la Boissière à l'abbaye des Vaux de Cernay est rendue le 27 septembre 1627 par un arrêt du Parlement de Paris. Voici les attendus de la Cour : « Nous parties ayant esgard auxdites lettres et icelles entherinant, avons cassé et annulé, cassons et annulons lesdits contrats et baux et aliénation du 20 décembre 1566 et 13 novembre 1597. Ce faisant avons condamné et condamnons ladite deffenderesse de laisser et quitter, audit demandeur la libre possession et jouissance de ladite terre, seigneurie de la Boissière autrement la Grange aux Moynes, maison, cour, granges, terres, prez, bois et autres domaines en déppendant ; le tout néanmoins sans restitution de fruicts, sinon ceux de la présente année, suivant le bail affermé qui en a esté fait, lesquelz sinon payés audit demandeur par le fermier de ladite terre aux termes qu'échoiront par moitié aux jours de Noel et Pasques prochain à la charge que ledit demandeur sera tenu faire décharge à ladite deffenderesse à la demande de la pension de moitié de fruicts de ladite terre adjugée à ladite Elisabeth de Montireau, le tout sans despens, dommages et interests ».
La gestion du sieur de Courville Une clause du traité du 18 juillet 1627 mentionnait « qu'en cas que ledit sieur Thibault obtint reversion de ladite terre, il jouyst du revenu d'icelle, jusques à ce qu'il fust par luy ou ses successeurs abbez remboursé de tous les frais qu'il auroit convenu faire pour cet effet, tant pour les poursuites du procez à intenter, que pour les sommes cy après déclarées qu'il seroit tenu d'avancer, lequel remboursement ledit seigneur se réserva de faire à sa volonté, obligea ledit Thibault de l'acquiter, garantir et indemniser de toutes poursuittes sous son nom, frais et despens ; à payer encore à son acquis et descharge 3.600 livres tournois à Hierosme Ruelle et damoiselle Isabelle de Montireau sa femme, à laquelle somme ledit Seigneur s'estoit obligé envers eux par sa promesse du 17 janvier 1627, pour le droict d'avis qu'ils avoient donné sur le fait de la cassation dudit bail et recouvrement des tiltres de ladite terre ». En vertu de ce traicté ledit sieur intenta tout aussitost action contre lesdites parties qui detenoient ladite terre, obtint arrest de la Cour du 27 septembre 1627, par lequel elles furent condamnées à déguerpir, et ensuite s'estant mis en possession, satisfit aux clauses et conditions dudit traicté auxquelles il estoit obligé. Ainsi: Lesquels estant en décadence et totale ruiné il fut obligé de réparer, amélioriser, relever et augmenter : à raison dequoy il débourça les sommes suivantes : En tant que propriétaire de la terre de la Buxière, le sieur Thibault de Courville s'engage à payer une rente ordinaire de 240 livres à l'abbé des Vaux de Cernay « à la décharge de cens de ladite abbaye, tant et si longuement qu'il en demeureroit en jouissance et possession » . Plus 100 sols par an aux religieux de ladite abbaye, pour employer à l'entretien du luminaire de leur Eglise, et autres droits seigneuriaux que lesdites terres peuvent devoir. Comme nous l'avons vu précédemment la ferme est aussi chargée de la rente foncière perpétuelle et non rachetable d'un muid de grain aux religieux du prieuré Sainte-Catherine du Val-des-Écoliers. Faute de droits et devoirs non faits, une saisie féodale est prononcée le 29 avril 1641 contre le sieur Thibault pour non-paiement de la fameuse rente.
La ferme de la Boissière vers 1650 C'est l'affiche de la mise en adjudication de 1661 qui nous donne l'état de la ferme de la Grange-aux-Moines au milieu du XVIIe siècle. Elle consiste en bastiments, terres labourables, bois taillis, prez et pastures, cy après declarez par les singuliers :
La succession d'Isaac Thibault de Courville Le sieur Isaac Thibault de Courville meurt à l'automne 1648 après avoir fait un testament le 7 octobre en faveur de ses neveux Jean Le Royer, écuyer, sieur de Prades et Louys Le Royer, écuyer, sieur de La Salle « frères légataires universels de deffunct Isaac Thibault, vivant escuyer sieur de Courville et héritiers de damoiselle Louise Grosset leur mère, et encore ledit Jean Royer sieur de Prades, héritier par bénéfice d'inventaire de defunct Jean Royer son père ». Les frères Royer avaient quatre sœurs : Louise, l'aînée, Marie, Marguerite et Charlotte. C'est le procès porté devant le Parlement de Paris le 18 juillet 1657 qui révèle la situation financière et familiale des deux frères, qui vivent « au-dessus de leurs moyens ». En fait comme bien souvent, il y a un second procès découlant du premier qui oppose les frères Royer à 43 créanciers. Parmi ces derniers, il y a des conseillers et secrétaires du roi, des avocats à la Cour, des bourgeois et marchands de Paris, un prêtre, un voiturier, une servante, une veuve, un moine de l'abbaye Saint-Germain-des-Prés, etc. et la demoiselle Louise Royer « fille de deffunct Louis Le Royer et de damoiselle Louise Grossez majeure, vivante et jouïssante de ses droicts . Ladite Louise Le Royer incidemment demanderesse suivant les differences par elle fournies par escrit le 6 aoust 1658 ». Louise Royer demande la cassation du testament et remboursement des biens qui ont été usurpés par ses frères et notamment Jean qui fut son tuteur. « Lesdites deffences de ladite Louise Royer dudit jour 6 aoust 1658 continuant sa dite demande incidente, à ce que lesdits Jean et Louis Royer fussent condamnez luy rendre compte de sa tutelle, représenter les inventaires faits après le déceds de ses père et mère, et d'Isaac Thibault sieur de Courville son oncle, et condamnez ez despens ». L'action des avocats des parties commence alors par un échange de répliques en demande et en défense « Les répliques de ladite Royer dudit jour 19 aoust audit an 1659, contenant aussi sadite demande incidente, à ce que le testament fait par ledit deffunct Isaac Thibault le 7 octobre 1648, fust déclaré nul, et que nonobstant et sans avoir esgard à iceluy il fust procédé au partage et division entre les parties des biens de la succession dudit deffunct Thibault, suivant et au désir de la Coutume de Paris où lesdits biens sont situez et assis, lesdits Jean et Louis Royer condamnez liy rendre et restituer les fruicts et loyers qu'ils ont receus desdits biens depuis le jour du deceds dudit Thibault, se constituant d'abondant demanderesses allencontre dudit Jean Royer à ce qu'il fust condamné luy rendre compte de la tutelle, maniment et administration qu'il aroit euë de sa personne et biens, et luy payer le reliqua avec les intérests des intérests, et condamné en ses dommages, interests et despens ». Louise Royer réclame le paiement d'une pension viagère à elle léguée par Thibault, son oncle, les autres actes approbatifs dudit testament qui demeureront nuls, et en conséquence « ayant esgard à la nullité dudit testament , qu'iceluy soit cassé, ce faisant ladite Royer receuë à venir à partage et division des biens dudit deffunct Thibault son oncle, et luy adjuger la succession entière des biens de ladite Louise Grosset sa mère, aux termes de la donation faite à son profit par lesdits Jean et Louis Royer, ses frères, et condamner ledit Jean Royer son tuteur de luy rendre compte des successions de leurs père et mère… » Finalement, Maître René de Plainchesne, fondé de pouvoir des frères Royer, abandonne et délaisse auxdits créanciers « ce acceptants tous les biens meubles et immeubles, arrérages, interests, fruicts et revenus desdits sieurs Le Royer et à eux appartenant, tant comme légataires universels de défunct Messire Isaac Thibault de Courville, vivant chevalier surintendant des maison et affaires de Monseigneur l'Evesque de Mets, qu'autrement, et à quelqu'autre tiltre que ce puisse estre, qu'il a dit se consister, premièrement en la terre et ferme appelée la Grange de Breuille, size près Longjumeau, celle de la Boissière, autrement dite la Grange aux Moynes près Marcoussis, fruicts et revenus qui en sont deubs, 2.542 livres de rente ou environ, sur les trois millions de livres de rente du sel, arrérages qui en peuvent estre deubs, 50 livres de rente sur les aydes, autrement dit droict de busche, ce qui leur est deubs par le sieur Bercynau, plus ce qui leur peut appartenir sur la charge de conseiller du Roy, commis et garde des registres du Controlle Général des Finances, à cause de la succession ou legs dudit deffunct sieur de Courville oncle dudit sieur Le Royer et généralement tous et chacun les autres biens et effets mobiliers et immobiliers, sommes de deniers à eux deuës en principaux arrérages, intérests, frais, despens, et autres choses quelconques qui leur peuvent et à chacun d'eux competer et apparteneir des effets despendans des successions de leurs defunts père et mère consistant entre autres choses ». La fortune des frères Royer était donc considérable puisqu'ils possédaient la ferme du Breuil, ancienne propriété de Saint-Germain-des-Prés et la ferme de la Boissière, ancienne propriété des Vaux de Cernay. L'arrêt prononcé par la cour le 7 septembre 1660 est comme suit :
La Boissière sous Jean Royer Une reconnaissance et titre nouvel sont passés le 12 mars 1654, devant Jacques Lillart et son confrère par Jean Royer, écuyer, sieur de Prades, demeurant à Paris paroisse Saint-Nicolas du Chardonnet, héritier de défunt Messire Isaac Thibault de Courville, en son vivant intendant des affaires de Monsieur de Metz « lequel a recognu et confesse qu'au moyen du testament faict par ledit sieur Thibault passé le 7 octobre 1648 du partage fait entre Louis Royer, sieur de la Salle et ledit sieur Royer recongnoissant légataire dudit défunt lequel est propriétaire et détenteur d'un lieu appelé la terre de la Boissière autrement dict Monfaulcon et la Grange aux Moines ses dépendances et appartenances scize proche Malcoucy consistante en plusieurs bastimens, quatre cents arpens de terres labourables, deux cents arpens de boys, le tout ayant de pré ». Le 2 octobre 1656, Jacques Jagu (3), masson couvreur de Marcoussis, fait un marché avec Pierre Arsac, c'est à savoir la couverture du colombier et crespir la muraille du coulombier aux endroits nécessaires, fournir la thuile, cloud, latte, plastre, chaulx qu'il conviendra d'employer....une lucarne pour empescher la vermine d'entrer dans le coulombier.., la couverture du poulailler moyennant le prix somme de 250 livres . Le 9 octobre 1656, Jehan Bagnon, maitre menuisier, et Fleurant Godart, serrurier demeurant à Marcoussis, promettent de faire les ouvrages de menuiserie et de serrurerie à Pierre Arsac, laboureur fermier de la Grange aux Moynes, à savoir faire une porte neuve à la foullerie, la porte à la bergerie,...une fenestre de la cuisine, le tout moyennant 21 livres de menuiserie et 22 de serrurerie. Le 3 novembre 1656, Guillaume Besnard, couvreur en chaulmes demeurant à Villehiers, promet à Pierre Arsac, laboureur demeurant en la ferme de la Grange aux Moynes, autrement appelée la Boissière , de couvrir tout à neuf avecq chaulmes à prendre dans les terres deppendantes de ladite ferme,... sur la couverture du grand logis.., fournir latte et clouds...fait et parfaire dans ung moys, ce marché et convention faict aux charges cy dessus moyennant le prix somme de soixante douze livres.... Nous sommes maintenant convaincu que Jean Royer ne payait ni ses fournisseurs ni ses créanciers. Il en fut de même avec la fameuse rente foncière. Mais cette fois, il avait affaire à un couvent qui avait rang de seigneur ; il y a risque de saisie féodale. Tout commence le 16 mai 1657 par la requête devant le Palais à Paris par Messire Jean Lecouver le jeune, laboureur demeurant à Orsay « demandeur en saisie aux fins de la requête présentée au prévost de Montlhéry le 4 juillet 1656, exploit faict en conséquence ledit soictz en requête verballe du 24 avril 1657 à ce qu'il soit ordonné que sur les droits procédant des fermiers de la terre et ferme de la Bussière autrement dict la Grange aux Moynes, le demandeur sera payé de deux années depuis au jour de sainct Martin d'hiver 1656, du muid de grain mesure de Montlhéry moityé froment moityé avoine que lesdits Religieux, soubprieur et couvent de Sainte Catherine à Paris dont ledit Lecouver est avisé ont droit de prendre par chacun an sur ladite terre de la Bussière ». Une requête verbale est déposée le 1er février 1659 par maître François Foreadel, commissaire aux saisies à celles des deffendeurs cy après nommez proceddant des fruicts promis et revenus de la terre et seigneurie de La Bussière pour les impayés de Messire Jean Royer, sieur de Prades, propriétaire d'icelle terre. La sentence est rendue le 12 février : « la Cour, les parties comparant ouyes a ordonné et ordonne que lesdits Religieux seront payés de la rente de six vingt dix huit livres et ledit Sieur de Bourbon la somme de 250 livres qu'il a droit de prendre sur ladite terre et seigneurie de la Bussière ». Une nouvelle fois, le 17 mai 1664, la Cour ordonne que la sentence obtenue par lesdits le 9 janvier sera exécutée selon sa forme et teneur et « faisant ordonne et contraint au payement de ladite rente d'un muid de grain deuë auxdits pour l'année 1663 et condamne lesdits deffendeurs aux dépens ».
La Boissière revient aux Vaux de Cernay
Le 5 mai 1661, un imprimé émis par Maître Philippe Le Moyne, notaire de la prévôté au Châtelet de Paris, annonce la vente aux enchères de la terre de la Boissière , autrement dit la Grange-aux -Moines pour payer les créanciers de Jean et Louis Royer, héritiers d'Isaac Thibault leur oncle. Aux 43 créanciers s'ajoutent les religieux et prieur de Sainte-Catherine du Val des Ecoliers qui réclame le paiement de la rente foncière. Le samedi 7 janvier 1662, les syndics et directeurs des créances décident : « A esté délibéré et arresté que quant à présent il sera différé de procéder à l'adjudication de ladite terre de la Grange aux Moynes, jusques à ce qu'il ayt esté pourveu et prononcé sur l'empeschement et demande pour rentrer par lesdits Moynes ». Un accord fut passé par l'intermédiaire de l'avocat du débiteur, Maître René de Plainchesne. La ferme de La Boissière revient dans le temporel des Vaux de Cernay après paiement des créanciers « Messieurs les religieux des Vaux de Cernay étant rentrés dans la jouissance de cette terre faisant anciennement partie des biens de leur maison ». La sentence du 17 mai 1664 confirme le traité d'acquisition passé entre Jean Royer, sieur de Prades, et les religieux de Cernay leur a permis de « recouvrer dans leur propriété jouissance de ladite terre de la Grange aux Moynes ». La Cour ordonne que la sentence obtenue par lesdits le 9 janvier sera exécutée selon sa forme et teneur et faisant ordonne et contraint au payement de ladite rente [d'un muid de grain moitié froment, moitié avoine] deuë auxdits pour l'année 1663 et condamne lesdits deffendeurs aux dépens. Peu de temps avant la rétrocession, la terre de la Bussière avait été saisie réellement à la requête dudit de François de Seignerolles, procureur du couvent Sainte-Catherine sur Jean et Louis Royer pour défaut de paiement de la redevance d'un muid de grain. Cette contestation portée aux requêtes du Palais y fut jugée en faveur du prieuré Sainte-Catherine par sentence du 4 janvier 1666. Un titre nouvel fut passé le 30 juin 1666 par Dom Nicolas Lonnat, docteur en théologie de la faculté de Paris et prieur de l'abbaye des Vaux de Cernay audit ordre de Cisteaux, diocèse de Paris, et Dom Claude Cainnu aussy cellerier de ladite abbaye au profit « des religieux prieur et couvent de Saincte-Catherine des Escolliers scis à Paris ont droict d'y prendre et percevoir par chacun an au jour sainct André apostre un muid de grain moitié bled fourment et l'autre moitié avoine mesure de Mont-lhéry sur lequel domaine lesdits religieux audit nom ont promis, gaigent bailler et payer tant sy longuement qu'ilz en seront detenteurs et propriétaires ».
à suivre ...
Notes (1) Ce sont les libéralités de Saint-Louis qui permirent aux frères du prieuré Sainte-Catherine du Val-des-Écoliers de s'installer à Paris, dans la paroisse de Saint-Paul, près de la porte de Bauders, depuis Baudoyer qui, en 1280, se nommait la porte du Val des Écoliers. Il est certain que le monastère de Sainte-Catherine existait déjà en 1235, puisqu'on en détacha des religieux pour prendre possession du prieuré du Val-Saint-Éloi, dans la paroisse de Chilly, près Longjumeau. (2) Bien qu'il n'ait jamais été ordonné prêtre, l'abbé des Vaux de Cernay était l'évêque de Metz, Henri de Bourbon-Verneuil, fils naturel d'Henri IV et de Catherine-Henriette de Balsac d'Entragues. Il reçut l'abbaye en 1606 à l'âge de 3ans et y joignit plusieurs autres bénéfices dont les abbayes de Saint-Germain-des-Prés (1623), Fécamp, Ourscamp, Saint-Taurin d'Evreux, etc. Il résigna le 12 octobre 1668, quinze jours avant son mariage. (3) Il s'agit du maçon qui a réalisé Beljame et d'autres demeures importantes.
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