L'école Bihorel à Montlhéry
Cette chronique est le cinquième volet de l'histoire de l'enseignement à Montlhéry. Cette fois nous nous intéressons à l'institution privée qui existe encore de nos jours au 28 Grande rue.
J-P Dagnot. Avril 2014.
Vue de l'établissement "Resves et Gros" côté place de la Souche au début du XXe siècle.
L'institution du 28 Grande rue
Cette école se trouve en descendant vers la porte Baudry, en face de l'ancien auditoire (maison du patrimoine).
Reprenons un historique lu par le maire Saintin, et ne retenons que ce qui concerne cette chronique: A coté de cette institution remarquable (Welcker) a végété longtemps une école privée dirigée successivement par plusieurs instituteurs plus ou moins capables, et ayant maintenant pour chef Mr Bihorel, qui, par ses soins son zèle et sa bonne conduite a su lui aussi inspirer la confiance aux familles, et a vu augmenter chaque jour ses élèves au point de devenir presque balancer par le nombre total celui de Mr Welcker et de l'emporter même sur cette dernière, par une plus grande réunion d'enfants du pays, pendant que celle de Mr Welcker augmentait en élèves pensionnaires étrangers la plupart au pays, de sorte que l'établissement de Mr Welcker est véritablement plutôt un fort pensionnat qu'une école et ne rempli pas à mes yeux le but d'une école communale parce que les enfants pauvres s'y trouvent mal à l'aise à coté de pensionnaires de familles aisées.
Le nombre des enfants compte pour chacun des établissements près de cent enfants, et nécessairement un instituteur est insuffisant, de même un seul local ...; Par ces motifs le conseil propose à nouveau une somme de deux cents francs à titre d'encouragement à l'instituteur privé Bihorel pour avoir admis gratuitement dans son école tous les enfants pauvres de la commune qui s'y sont présentés. Saintin le 19 juillet 1843". Un vote secret approuve la proposition par 10 voix contre 6.
Dans le périmètre actuel de l'établissement, notons extrait des matrices cadastrales au nom de Bihorel une parcelle avec maison en A3481, les numéros sur les plans s'arrêtent à 3475!. Voyons ensuite:
- en 1826, Jeanne Pigeon de Brétigny aux n°2202-03 face à l'auditoire tiré du folio 784 et passé au 579?
- en 1830, Marie Jeanne Carca, n°2202 maison tiré du folio 591, démolie, suivi de Marie Jeanne Carca et Marie Sophie Gérard pour un sol de maison tiré du 591 porté au 1144.
En 1835, relevons la vente par Jeanne Pigeon à Marie Jeanne Carca et Marie Sophie Gérard: demoiselle Jeanne Félicité Pigeon, célibataire majeure, propriétaire demeurant rue des Juifs, la quelle a vendu demoiselle Marie Jeanne Carca et Marie Sophie Gérard, majeures, institutrices, demeurant toutes deux grande rue, indivisement pour l'usufruit et jouissance leur vie durant et après au profit de la survivante, une maison qui en faisait deux, grandes rue n°12, à l'angle de la rue aux Chats et de la grande rue..., lesdites acheteuses disant en avoir parfaite connaissance. Le cadastre confirme Jeanne Pigeon passe en 1836 à Marie Jeanne Carca. Ces femmes sont des religieuses et probablement enseignent aux filles.
En avril 1837, notons le décès de Melle Gérard à Montlhéry, âgée de 50 ans, institutrice et religieuse.
En octobre de la même année, Yves Charles Bihorel, 24 ans, né dans le Calvados, instituteur, se marie avec Emelie Peltier, dame de confiance, âgée de 22 ans. De cette union naîtront un fils Emile en 1840, et une fille Joséphine en 1841. La même année les époux se font donation mutuelle.
En 1841, d'après le registre des délibérations: deux écoles primaires de jeunes gens existent à Montlhéry dont l'un des chefs ( Mr Welcker) est reconnu comme instituteur de la commune et rétribué sur les fonds communaux ; qu'il serait souhaitable dans l'intérêt des jeunes gens de la classe indigente que l'autre instituteur, Mr Bihorel, fut admis à recevoir aussi à son école des enfants pauvres et reçoive une rétribution pour enseigner aux pauvres de cents francs, comme déjà faite en 1839. Pour revoir le détail on peut consulter la chronique sur les écoles de 1832 à 1900.
En 1842, Marie Jeanne Carca dite soeur Augustin, institutrice, rédige son testament; notons la présence d'Antoine Nicolas Welcker.
Je soussignée Marie Jeanne Carca en religion Soeur Augustin, demeurant 78 Grande rue, étant malade :
- lègue aux pauvres de Montlhéry 300 frs, remis au curé Mathieu,
- 300 frs à l'église,
- 1800 frs au curé pour 600 messes en trois ans suivant mon décès, pour le repos de mon âme.
- tous mes livres & objets de piété , plus 2.000 frs, au curé Mathieu Languedoc,
Le reste à ma nièce Marguerite Carca comme légataire universelle excluant de la jouissance ses père et mère. Ma légataire devra vendre la maison 78 Grande rue.
La même année, les problèmes de paiement de l'instituteur Bihorel continuent, le conseil vote 200 frs à Bihorel instituteur privé, pour que son école accueille plus d'élèves et les parents indigens pourront choisir... La municipalité biaise en disant que Mr Bihorel reçoit cette somme comme instituteur privé et comme recevant dans son école le plus grand nombre d'enfants de la commune, à charge pour lui de recevoir gratuitement les enfants indigens qui se présenteraient. Le conseil municipal reconnait que Mr Welcker, instituteur communal, n'a point démérité ...
L'année suivante, le maire propose qu'il soit alloué à Bihorel, une somme de 200 frs à titre d'encouragement sur celle de 400 frs qu'il devoit recevoir en 1842... Comme de nos jours une partie du conseil quitte le séance ... Ce que le préfet refusera l'année suivante.
En septembre 1843, Bihorel étend son pensionnat: mademoiselle Marie Jeanne Carca dite Sainte Augustine, institutrice, demeurant à Montlhéry, vend à Yves Bihorel, instituteur, demeurant à Montlhéry, une maison qui en faisait deux, grande rue n°16.... tenant à la rue aux Chats au midi ... La vente faite moyennant 8.000 frs... C'est donc à cette époque que l'institution privée de jeunes filles située grande rue a cessé d'exister. Le cadastre confirme Yves Bihorel pour les parcelles B2202-2203.
Notons en 1845, une convention pour loger nourrir blanchir et lui donner l'éducation qu'il enseigne entre Yves Bihorel et Marie Gonin, à l'enfant Nicolas Blin jusque l'âge de quinze ans.
L'année 1851 voit l'acquisition essentielle qui va définir le périmètre actuel de l'institution: Achille Menot vend à Yves Bihorel, maître de pension, et à Antoinette Pelletier son épouse, une maison place de la Souche:
- au rez-de-chaussée quatre chambres plus cuisine,
- au premier, quatre chambres,
- au second, quatre chambres,
- deux greniers,
- cour derrière, avec petit bâtiment de deux écuries et un bûcher, au midi deux granges,
ladite vente faite moyennant 8.000frs. N'ont pas étés transcrites d'autres références étrangères à la chronique. Le cadastre mentionne un an plus tard, B2209-10 tiré de 561 passé à 680. C'est donc à cette époque que les principaux bâtiments de l'institution sont acquis. Pour assurer le paiement de cette acquisition, l'année suivante, Yves Charles Bihorel, maître de pension, reconnaît devoir à Nicolas Papillon 6.000frs, garantis sur une maison place de la souche deux étages plus grenier avec cave achetée en 1851.
En 1856, Pierre Alexandre Prou, entre comme professeur chez le maître de pension, Mr Bihorel, y reste jusqu'en 1860, puis de 1863 à 1864.
Famille Gros concernée par l'institution.
Une famille va être concernée pendant plusieurs décennies par cette institution, il s'agit des Gros. Ainsi en 1858, Désiré Alexandre Gros, instituteur désigné de la commune d'Ollainville, âgé de 19 ans, demeurant à Montlhéry, d'une part, et Henriette Michelet, âgée de 18 ans, ... se prennent pour époux...
Yves Bihorel d'après le cadastre ajoute des bâtiments en 1859 et 1861. Le recensement de 1861 le considère chef d'établissement.
Le cadastre de 1866 mentionne Pierre Bayeux chef d'institution, 52 ans avec Eugénie Bayeux 32 ans, Alfred Bayeux, domestique, 21 ans .
En octobre 1868, Désiré Gros , maître de pension, reconnaissent devoir à l'abbé Pierre Bayeux, ancien directeur de l'institution Bihorel et Bayeux, aujourd'hui rentier, la somme de 20.000 frs pour laquelle il n'a pas été fait d'acte notarié... Le même jour, le même Désiré Gros déclare ouvrir une école d'enseignement primaire libre de garçons avec pension qu'il a acquis de Messieurs Bayeux et Bihorel ... On serait enclin de croire qu'il y a eu acquisition...
En fin d'année, la sous-préfecture précise au maire que Désiré Gros peut recevoir 103 élèves internes dans le pensionnat primaire qu'il dirige, sous réserve que chacun des dortoirs serait éclairé et surveillé par un sous-maître.
Yves Bihorel décède pendant la guerre de 1870 qualifié comme propriétaire. Son inventaire après décès n'aura lieu qu'en mars 1871 les personnes concernées sa veuve Emélie Peltier, Yves Pierre Bihorel, rentier à Tordouet son père, Edouard Bihorel tisserand à Tordouet, Louis Frédéric Bihorel, jardinier à Montlhéry. La liquidation et le partage interviennent le mois suivant. Ces actes restent à consulter.
En mars 1874, Emélie Peltier, propriétaire, demeurant au Petit Montlhéry, veuve d'Yves Bihorel, laquelle fait bail à loyer pour 19 ans à Désiré Alexandre Gros, maître de pension, et Henriette Michelet sa femme, une grande propriété à usage de pensionnat... moyennant un loyer annuel de 3.500 frs...
L'année suivante, Pierre Bayeux curé à Saint-Martin en Seine-et-Marne, donne main levée du prêt qu'il avait consenti au couple Gros-Michelet. En fin de mois, Emelie Peltier, propriétaire, âgée de 60 ans, décède. Un acte de notoriété est dressé. Puis une délivrance de legs est faite par Marceline Ernestine Bihorel à la veuve Rabourdin. Cette personne est une collatérale du Calvados. En 1876 un acte de notoriété est rédigé au profit de Paul Kibler, époux de Marceline Bihorel de Montlhéry.
Nous arrivons en 1878, un cahier des charges est établi par Kibler pour vendre l'institution, propriété de son épouse Marceline Ernestine Bihorel. Suit l'acquisition par adjudication du pensionnat par Joséphine Simiand moyennant 51.100 frs. Cette dernière fait réaliser des travaux ayant pour but l'agrandissement du réfectoire, d'où un loyer de 3675 frs. Le cadastre confirme l'achat Joséphine Simiand à Linas pour les parcelles B2202-2203-2209-2210.
Voyons maintenant la vie de la famille Gros; Mathilde, institutrice âgée de 23 ans fille de Désiré Gros chef d'institution, décède en février 1883. Ce dernier vend le pensionnat le mois suivant à Firmain Vallot et Héloïse Genestre de Trappes moyennant 70.000 frs. En mai il décède, âgé de 44 ans. Son inventaire après décès est réalisé en novembre 1883.
À la suite de son acquisition, Firmain Vallot breveté en capacité pour l'enseignement primaire, déclare l'ouverture d'un pensionnat avec 115 internes.
Notons en 1890 le bail fait par Joséphine Simiand à Firmain Vallot: Joséphine Simiand propriétaire demeurant à Linas laquelle donne à loyer pour quinze années, à Firmain Vallot chef d'institution et Hélène Genestre sa femme, demeurant 28 grande rue et place de la Souche, une grande propriété à usage de pensionnat ... moyennant un loyer annuel de 3.900 frs. Ce bail ne dure que deux années, Firmin Vallot, décède âgé de 46 ans.
Le mois suivant, Jules Parageot, âgé de 47 ans, diplômé de l'enseignement primaire, déclare son intention d'ouvrir une école primaire privée grande rue n°28 avec pensionnat dans l'établissement tenu par Mr Vallot . Expérience dix années d'instituteur. Il prend ses fonctions en étant en retraite depuis deux ans.
En octobre, l'inventaire après décès est dressé. Son épouse, Héloïse Genestre, veuve Firmain Vallot vend le mois suivant, le pensionnat et externat de garçons à Charles Damien Resves et Joséphine Rousseau, moyennant 70.000 frs.
De ce fait en décembre, le sieur Charles Resve , âgé de 42 ans, breveté de l'enseignement primaire, déclare son intention d'ouvrir un pensionnat-externat primaire libre, grande rue n°28, établissement Vallot, tenu depuis son décès par Mr Parageot, qui était instituteur à Linas de 1883 à 1889. Le même mois, Joséphine Simiand transporte le bail consenti : Charles Damien Resves instituteur public et Joséphine Rousseau son épouse demeurant à Saint-Cyr l'Ecole, d'une part , et Joséphine Simiaud propriétaire demeurant à Linas d'autre part, lesdites parties rappellent le bail de 1890, le décès de Firmain Vallot, le transport du bail de sa veuve au sieur Resves au 1er janvier 1893; ceci exposé Mr et Mme Resve s'obligent directement envers Melle Simiand au paiement du loyer.
En 1896, Edmond Gabriel Gros, sous-directeur à l'institution Resve, âgé de 23 ans, se marie avec Jeanne Resve, fille de Charles Damien, chef d'institution . Edmond apporte le tiers de la succession de son père, la future 10.000 frs ...
La matrice cadastrale confirme en 1897, Charles Resves maître de pension pour les bâtiments B2303 à 2309.
Notons pour la famille Gros:
- en 1901, naissance de Camille, fille d'Edmond chef d'institution, témoins les grands-parents,
- en 1904, naissance de Simone Charlotte, fille d'Edmond sous-directeur d'institution de jeunes gens,
- en 1911, naissance d'Edmée Jeanne, fille d'Edmond..., demeurant 28 Grande rue, présents Henriette Michelet demeurant rue du Luisant n°15 et Joséphine Rousseau demeurant 28 grde rue, aieules de l'enfant.
En 1913, Edmond Gabriel Gros , né à Montlhéry, breveté pour le supérieur, demande l'ouverture pour une école libre de garçons avec pensionnat situé grande rue n°28 . Il exerce au même endroit depuis 1895.
En août arrive le premier d'une génération qui va se succéder dans le pensionnat, Germain, Eugène Bouteilly , breveté du supérieur, chef d'institution, informe le maire de Montlhéry qu'au 1er octobre prochain, il a l'intention d'ouvrir une école primaire privée avec internat dans les locaux situés au n°28 grande rue et occupés actuellement par l'institution dirigée par Mr Gros dont je prends la succession.
Edmond Gabriel Gros, ancien chef d'institution, époux de Jeanne Resves, décède en 1922. Il signe peu avant son décès une procuration pour vendre et toucher.
Notons quatre ans après son inventaire après décès. Le mois suivant, a lieu l'adjudication d'une partie des biens: Georges Alexandre, employé aux chemins de fer à Orléans, Camille Henriette, majeure demeurant à Montlhéry route d'Orléans, Jeanne Resve demeurant également route d'Orléans, en son nom et pour Simone et Edmée ses filles mineures, lesquels disant que par suite d'un jugement il va être procédé à la vente aux enchères publiques:
1°) une propriété autrefois à usage de pensionnat rue des Juifs n°27, cadastré B 1780-1781-1782, mise à prix 120.000 frs, pas d'enchères,
2°) une maison rue du Luisant, cadastrée B2072-2073, mise à prix 20.000 frs, adjugé pour 25.000 frs à Jules Bara.
En août, décès à Paris de Charles Resve, sans profession, domicilié au 29 route d'Orléans à Montlhéry. Le cadastre mentionne comme à l'accoutumée la sortie de Charles Resve en 1926 pour B2202-2205-2207-2209 . La suit mentionnée case 349 citant la veuve Edmond Gros demeurant 27 rte d'Orléans pour les mêmes parcelles. Le pensionnat va rester indivis entre les héritiers.
Notons enfin quelques personnages qui apparaîtront dans la vente aux Huc:
- 1929, mariage de Simone Gros avec Robert Lassieur à La Baule,
- 1937 mariage Edmée Gros avec Robert Seiler à Neuilly,
- 1947, décès Jeanne Resves. Transmission un tiers à Simone Gros, un tiers à Edmée Gros, un tiers à Jean Schmitz,
- 1951, acquisition du tiers d'Edmée Gros par Jean Bouteilly,
- 1962, décès de Simone Gros à Paris 4e,
- 1964, transmission du tiers de Simone Gros par Jacques et Monique Lassieur épouse Mazur.
- 1986, décès Edmée Gros à Paris 16e.
- 1996, transmission d'un sixième au profit de Monique Mazur de la part de Jacques Bouteilly décédé.
Les trois générations de Bouteilly au 28 Grande rue.
Peu avant la fin du XXe siècle, une S.C.I. dont les Huc sont gérants rachète l'institution aux héritiers du couple Rève-Gros mentionnés sur le tableau généalogique.
Notons pour terminer, ce que dit la plaquette actuelle de l'institution: Fondée en 1832 par M. Bihorel et dirigée successivement par Messieurs Gros et Vallot, l'institution n'a cessé d'obtenir un succès toujours croissant. Elle est devenue rapidement un établissement leader sous la direction de Messieurs Rève et Gros qui, pendant près de 30 ans, y ont prodigué des trésors de savoir et de dévouement. L'institution fut considérablement agrandie en 1896, 1901, 1908, 1928 et 1932 et dirigée par 3 générations de la famille Bouteilly.
M. Huc a repris la direction de cet établissement en 1989. En réunissant les 2 écoles en 1996, M. Huc, nouveau directeur, n'a cependant pas voulu que disparaissent les noms qui avaient jalonné l'histoire des 2 institutions. Le collège, désormais sous contrat d'association, a gardé le nom de Moreau tandis que le primaire reste placé sous la bonne étoile de Blaise Pascal.